Définitions liées au champ optique
Le champ électrique de toute onde optique est une fonction à valeurs réelles dépendant du temps, solution des équations de Maxwell. Nous noterons cette fonction ε(t). Par transformée de Fourier de ε(t), on obtient la décomposition en fréquence εω ε ω ( ) ( )exp( ) t i t dt +∞ −∞ = ∫ % , où ω est la pulsation optique (ω=2πf avec f fréquence optique). On peut alors définir un signal analytique temporel complexe , auquel est associé par transformée de Fourier une décomposition en fréquence tel que ce champ soit nul pour les fréquences négatives et égal à ε%( ) ω pour les fréquences positives. On définit alors l’intensité spectrale ou spectre comme étant la densité spectrale d’énergie . Dans de nombreux cas nous utiliserons cette grandeur normalisée en considérant l’énergie de l’impulsion comme unitaire. La phase spectrale ( ) ϕ ω est par l’intermédiaire du retard de groupe T( ) ϕ ω ω ∂ = ∂ une représentation du temps d’arrivée des différentes composantes spectrales. La mesure de la phase spectrale est difficile. Elle sera abordée dans le 5ème chapitre de ce mémoire de thèse. De même qu’en fréquentiel, on définit pour le domaine temporel la phase temporelle ( ) ϕ t et l’intensité temporelle ( ) I t telles que le champ électrique temporel s’écrive . L’intensité temporelle est en fait la puissance instantanée de l’impulsion (dans de nombreux cas on considérera cette grandeur normalisée). ϕ0 est la phase absolue, ω0 est la pulsation porteuse dont le choix est arbitraire mais influe sur l’expression de ( ) ϕ t . Cette pulsation porteuse ou « centrale » est généralement choisie au centre de la bande spectrale de l’impulsion et elle permet d’éliminer les oscillations rapides de l’impulsion temporelle. Chapitre 1 : Rappels et formalisme 18 Les grandeurs et paramètres représentant une impulsion font l’objet de recherches dans le domaine du traitement du signal. Une des représentations intuitives est la distribution de Wigner-Ville de l’impulsion. Cette distribution de deux variables (pulsation du domaine fréquentiel et temps du domaine temporel) est à valeurs réelles : . Elle est reliée de manière bijective au champ. De nombreuses propriétés intéressantes peuvent être démontrées [Bastiaans 1997]. Elle est une des représentations visuelles des impulsions ultrabrèves les plus explicites. De même définissons quelques paramètres utiles dans la caractérisation d’une impulsion ultrabrève: les moments du second ordre [Ripoche 1998] . Ce qui donne pour une impulsion ultracourte dans le domaine temporel est l’énergie de l’impulsion. On peut alors montrer les relations suivantes: – 2 2 1 4 t ω ≥ , plus l’impulsion est courte, plus son spectre est large. – Les fonctions qui réalisent le minimum sont les gaussiennes. . A spectre donné, la valeur minimale de la durée est obtenue pour une phase spectrale identiquement nulle. Dans ce cas l’impulsion est limitée par transformée de Fourier. Les relations exposées ci-dessus ne sont pas valables pour la largeur à mi-hauteur. Or dans la littérature cette largeur est le paramètre utilisé. Nous nous en servirons donc également dans ce manuscrit en conservant en mémoire la faible qualité de ce critère (notamment pour déclarer une impulsion « Fourier Transform »). Afin d’illustrer la pertinence du moment d’ordre deux par rapport à la largeur à mihauteur, il faut comparer les effets de différentes phases spectrales sur un spectre donné. La phase spectrale est introduite par la dispersion de la vitesse de la lumière en fonction de la fréquence optique. Cette dispersion est traduite par la variation de l’indice optique avec la longueur d’onde. Introduisons à présent le formalisme utilisé pour exprimer la phase spectrale et la dispersion à travers les matériaux.
Propagations linéaire et non linéaire, indice des matériaux
La propagation linéaire d’une impulsion ultrabrève est décrite dans le domaine spectral par un indice optique ne dépendant que de la pulsation : n( ) ω . L’indice optique d’un matériau est directement relié à sa susceptibilité linéaire exprimée par le tenseur symétrique χij . Ce dernier étant symétrique, il est diagonalisable. Dans sa base propre (où il est diagonal), on a: , où ni(ω) est l’indice de réfraction optique dans la direction propre considérée. Ces grandeurs sont complexes et la partie réelle de l’indice représente la vitesse relative de cette pulsation par rapport à la vitesse de la lumière dans le vide, la partie complexe étant lié à l’absorption du matériau. La susceptibilité optique est reliée à la constante diélectrique ε par les définitions du vecteur déplacement D et de la polarisation optique , ε0 est la permittivité diélectrique du vide (8.8 10-12F/m). La constante diélectrique ε est donc directement liée à l’indice optique par : ε(ω)=ε0εr(ω)=ε0n 2 (ω). La dispersion traduit la variation de la vitesse de phase de la lumière en fonction de la pulsation optique. Cette vitesse est exprimée par rapport à la vitesse de la lumière dans le vide par la partie réelle de l’indice optique. La dispersion se traduit donc comme étant la variation de l’indice optique en fonction de la pulsation optique. Physiquement, les parties réelle ε1 et imaginaire ε2 de la constante diélectrique sont reliées généralement par la relation de Kramers-Kronig :, eV où E est l’énergie du photon de pulsation exprimée en eV ω . Cette relation est issue du principe de causalité appliqué à la constante diélectrique. La notion de causalité traduit que le photon influe sur le milieu. Il s’agit de l’application physique directe des théorèmes de Titchmarsh [Titchmarsh 1948] et de Paley/Wiener [Papoulis 1962] sur les propriétés de la transformée de Fourier. Ces théorèmes statuent : Si u(x) est une fonction causale ( u(x)=0 quelque soit x<0, où u(x) a un support fini) alors il existe une relation entre les parties réelle et imaginaire de sa transformée de Fourier: 0 où est la transformée de Hilbert: Ces théorèmes supposent que le théorème de Cauchy sur l’intégration dans le plan complexe est applicable. Or cette hypothèse est très restrictive et souvent non valable dans le cas de confinement spatial (couche mince, guide d’onde…) ou de discrétisation trop importante des valeurs. En effet, si pour une susceptibilité de matériau diélectrique de type lorentzienne, la relation de Kramers-Kronig est valable, elle n’est en revanche plus valable pour un interféromètre de Gires-Tournois [Beck 1991] ou pour un filtre « passe-tout » [Wang 2002]. Cette relation de Kramers-Kronig indique que pour les matériaux diélectriques transparents dans le visible, étant donné leur absorption dans l’UV, leurs dispersions sont de même signe. Chapitre 1 : Rappels et formalisme 20 La possibilité de violer cette relation permet d’obtenir des systèmes dont la dispersion est de signe opposé (interféromètre de Gires-Tournois par exemple). Cette compensation de la dispersion est essentielle pour les impulsions ultrabrèves et la technique d’amplification CPA. L’effet de la dispersion sur une impulsion ultrabrève ( à spectre large ) est traduite par l’introduction d’une phase spectrale : ( ) ( ) n L c ω ω ϕ ω = où L est la longueur du matériau traversé. On suppose en général que la variation de n(ω) est lente en fonction de ω, ce qui permet de faire un développement de Taylor de la phase spectrale: où φ1 correspondant au premier ordre du développement est exprimé en fs, φ2 est le deuxième ordre exprimé en fs², φ3 le troisième ordre est exprimé en fs3 , φ4 le quatrième ordre en fs 4 . L’effet physique du premier ordre correspond à un retard optique. Le second ordre est appelé « chirp » ou dérive de fréquences, il allonge temporellement l’impulsion.