DÉFINITIONS DE L’ÉVALUATION
L’évaluation de l’action publique (politique, programme, dispositif) a pour objet d’en apprécier la valeur au regard de certains critères, comme la pertinence, l’efficacité, l’efficience…, notamment dans le but d’apporter des connaissances pour aider à la décision et éclairer le débat public.Le terme d’évaluation est aujourd’hui en vogue et est sujet à bien des malentendus. Chez certains, il fait ressurgir des peurs anciennes, remontant aux temps de l’école et des « zéros pointés ». L’évaluation est perçue par ceuxci comme un jugement, parfois injuste et qui met en cause des acteurs personnellement. Pour d’autres, notamment les ingénieurs, les physi ciens, l’évaluation est synonyme d’estimation. Elle consiste à estimer la valeur d’un paramètre d’un modèle pour estimer l’effet d’une action. Pour autant, estimer la valeur d’un paramètre ne suffit pas à apprécier la valeur de l’action publique, qui ne se résume pas au modèle testé. Économistes et statisticiens ont ainsi tendance à considérer ces travaux comme des évaluations de politiques, alors qu’ils ne sont qu’un élément de constat parmi d’autres à prendre en compte dans le cadre d’une évaluation, comme on le verra plus loin.L’évaluation dont il est question ici vise à apprécier la valeur d’une action publique. Or, selon sa place (décideur politique, opérateur, bénéficiaire), chacun peut avoir un point de vue dif férent sur l’action menée. Ainsi il est possible de développer plusieurs jugements de valeur sur la même action. Évaluer une politique menée au nom de l’intérêt général, c’est prendre en compte l’ensemble de ces points de vue. Dans son article 15, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, préambule de la Constitution actuelle, précise : « La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration » (en 1789, cette disposition visait à se débarrasser des fermiers généraux). L’évaluation analyse des systèmes d’action,L’évaluation de l’action collective peut porter tout autant sur un projet que sur un dispositif de politique publique, un programme ou des politiques plus larges. Plus le degré de généralité est élevé, plus l’évaluation devient complexe. Pour autant, il est indispensable de procéder à ces évaluations larges, afin de repérer les effets de système. En effet, une politique publique se compose généralement de plusieurs programmes et plusieurs actions qui font parfois système et parfois se contredisent. Toute l’évaluation devra donc en tout premier lieu choisir le niveau auquel elle se situe. Il est souvent préférable de commencer par un niveau intermédiaire.
Toute politique relève d’une théorie implicite du changement social. La mise en place d’une poli tique publique vise à résoudre les problèmes qui apparaissent. Par exemple, l’agitation dans les banlieues peut traduire un mécontentement face à un cadre de vie dégradé et à une probléma tique de logement. Face à l’agitation, le pouvoir politique peut décider de calmer les banlieues en réhabilitant le cadre de vie. Il s’agit là d’un objectif général, qui devra être décliné en programmes divers, répondant à des objectifs spécifiques, pouvant être euxmêmes déclinés en objectifs opé rationnels (schéma 1). Dans le cas de la sécurité routière, l’objectif général vise à diminuer le nom bre des morts sur les routes. Plusieurs programmes spécifiques peuvent y contribuer, comme un programme d’aménagements routiers visant à supprimer les points noirs; ou un programme visant à faire respecter le code de la route. Chacun des programmes spécifiques se décline à son tour en programmes opérationnels qui se déclinent en actions. Pour le premier, ce sera par exemple de supprimer tel passage à niveau ou de refaire tel carrefour. Concernant le second, ce pourra être de faire des contrôles de vitesse ou de refondre l’apprentissage de la conduite.À chaque politique, programme ou action, seront affectés des moyens spécifiques en termes humains, financiers et juridiques. Au niveau le plus bas – à savoir les objectifs opérationnels – sont mesurées les réalisations qui correspondent à l’activité de l’administration ou de l’opérateur dans un domaine particulier. C’est à ce niveau que l’on positionne les indicateurs d’activité, déclinés dans la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Pour reprendre l’exemple de la sécurité routière et de la réduction du nombre de points noirs, l’indicateur de réalisation pourra être le nombre d’appels d’offres réalisés par le service chargé des infra structures ou la dépense engagée ; dans le cas de la lutte contre les vitesses excessives, ce sera le nombre de radars installés. Au niveau des objectifs spécifiques correspond l’évalua tion des résultats. Ainsi, dans le domaine de la sécurité routière, le résultat sera le nombre de points noirs supprimés. Au niveau le plus élevé, celui des objectifs globaux, ce sont les impacts qui sont mesurés, généralement à plus long terme. La baisse du nombre des tués sur les routes constitue ainsi un impact de la politique de sécurité routière.