DÉFINITION, USAGES ET OBLIGATIONS DE CONTRÔLE DES DÉLÉGATIONS DE SERVICE PUBLIC (DSP)
L’expression « DSP » est apparue tardivement avec la loi Sapin1 du 29 janvier 1993. Des arrêts majeurs du Conseil d’État sont venus préciser les critères de distinction entre DSP et marché public, dont notamment une rémunération devant être substantiellement assurée par le résultat de l’exploitation du service (« Préfet des Bouches-du-Rhône » (15 avril 1996)). La notion de « part substantielle » est précisée par l’arrêt « SMITOM » (30 juin 1999), soit 30% des recettes. Ceci suppose que le délégataire assume une part du risque d’exploitation (« Syndicat intercommunal des transports publics de la région de DOUAI » (15 juin 1994)).La DSP est un « contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d’un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l’exploitation du service. Le délégataire peut être chargé de construire des ouvrages ou d’acquérir des biens nécessaires au service. »2Bien avant que les législateurs français et européen (cf. annexes 2 et 3) ne s‘emparent du sujet en faisant progressivement passer ces contrats d’une liberté quasi absolue à un encadrement qui garde de la souplesse, c’est la jurisprudence qui en a précisé le domaine et les principes dans des décisions mémorables du début du XXe siècle. En fait, la gestion déléguée de service public est très ancienne. Elle abrite différents contrats pratiqués de très longue date par l’administration française dont les plus connus sont la concession, l’affermage et la régie intéressée. (cf. annexe 1)
La DSP s’enracine dans l’histoire de la concession apparue sous l’Ancien Régime. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, les concessions se développent notamment pour les voies navigables (canal des deux mers, de Briare et du Languedoc). A la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, âge d’or de la concession, l’État et les villes s’équipent en grands réseaux de communication (chemins de fer) et services urbains de proximité (éclairage public, téléphone, chauffage urbain, gaz, distribution d’eau potable et transports urbains). L’État ne tient pas à intervenir dans le domaine industriel et commercial et préfère recourir aux investissements privés pour financer les infrastructures des réseaux. La seconde moitié du XXe siècle voit l’essor et la multiplication des services publics locaux en réponse aux attentes des citoyens. Les lois de décentralisation et les transferts de compétences donnent un nouvel élan à la gestion déléguée locale. Les pratiques douteuses qui apparaissent au grand jour expliquent la loi Sapin du 29 janvier 1993 qui impose des règles de publicité et de transparence tout en affirmant le libre choix des élus en matière de mode de gestion. Depuis, les textes et la jurisprudence font évoluer le régime de la DSP. En dépit de la concurrence d’autres outils contractuels et de l’influence du droit européen, la DSP reste un mode privilégié de gestion des services publics locaux.
Le champ de ce mode de gestion est très vaste. En effet, il concerne autant des services administratifs, que des activités industrielles ou commerciales. Les activités qui ne peuvent pas être déléguées en raison d’exigences légales, de prérogatives de puissance publique ou de la nature particulière du service sont peu nombreuses. L’atlas de la gestion des services publics locaux dans les grandes villes de France paru en 20131 met en exergue l’importance et la diversité des secteurs concernés : eau, assainissement, déchets, trans- ports urbains, stationnement, réseaux de chaleur, éclairage public, restauration collective, petite enfance, équipements sportifs et culturels, palais des congrès, etc. Il montre que ces services sont gérés de trois façons : Au rang des délégataires possibles, on trouve aussi bien des entreprises privées que des organismes mixtes ou publics. Quelques grands groupes sont emblématiques du modèle de DSP. Devenus internationaux, ils ont assuré leur croissance en apportant des services urbains à des communes de petite taille, aux moyens humains et financiers limités.