La brucellose est une maladie infectieuse et contagieuse chez l’animal, transmissible à l’homme. L’infection est due à un germe du genre Brucella. La contamination humaine se fait essentiellement par contacts directs avec des ruminants malades, ou par du lait contaminé (1). La brucellose est une zoonose de répartition mondiale. Cependant, son incidence et sa prévalence varient largement d’un pays à l’autre. Elle est devenue rare dans les pays développés. En France, plus de 800 cas ont été déclarés en 1978 contre 44 en 2000 (2). Elle reste un problème de santé publique dans les pays en voie de développement qui recensent encore de nombreux cas humains. En Tunisie, le nombre des cas déclarés varie entre 128 en 2003, 354 en 2004 et 284 en 2005 (3). Une nouvelle recrudescence de la maladie est survenue au cours de l’année 2006 avec la notification de 460 cas et surtout la survenue d’une épidémie dans la région du grand Tunis (87 cas) .
Par ailleurs la brucellose est classée parmi les anthropozoonoses majeures. Elle constitue une affection potentiellement grave et représente un surcoût économique important (4). La prévention de la maladie s’avère essentielle compte tenu de son risque pour la santé humaine et son impact économique.
RAPPELS
Définition
La brucellose (également appelée fièvre de Malte, mélitococcie) se définit comme une maladie infectieuse atteignant l’homme et les animaux, à type de fièvre sudoroalgique (fièvre ondulante) avec possibilité de complications et localisations viscérales, ostéo-articulaires, neuro-méningées, due à des bactéries du genre Brucella .
Caractères bactériologiques
Les caractères morphologiques
Brucella sont de très petits coccobacilles à gram négatif de 0,5-0,7 × 0,6-1,5 µm. La bactérie est immobile, non encapsulée, non sporulée .
Il existe 4 espèces principales pathogènes pour l’Homme :
− Brucella melitensis : chez les ovins (= moutons) et caprins (= chèvres);
− Brucella abortus : chez les bovins;
− Brucella suis : chez les suidés;
− Brucella canis : chez les canidés .
Les caractères culturaux et biochimiques
Les brucelles sont des germes intracellulaires, vivant en milieu aérobie strict, de culture difficile, délicate et surtout lente. La température de croissance optimale se trouve entre 34-35°C. La bactérie Brucella s’altère à l’action de la chaleur et des rayons ultraviolets mais elle résiste dans le milieu extérieur :
− dans les milieux secs non organiques (locaux, matériel) Brucella peut vivre 32 jours;
− dans les milieux organiques humides (lisier, fromage et lait crus, végétaux souillés), elle peut vivre plus de 125 jours;
− dans les milieux organiques secs (souillures sèches dans une étable), elle peut vivre jusqu’à 135 jours;
− dans le sang conservé à +4 °C, elle peut vivre jusqu’à 180 jours .
Les caractères antigéniques
Brucella a la structure générale d’un bacille à Gram négatif. Deux types d’antigènes sont présents en quantité variable selon l’espèce : Ag A et Ag M. Les Brucella ont une parenté antigénique avec d’autres bactéries (Yersinia enterocolitca O9, Francisella tularensis et certaines Salmonella) .
Historique
La brucellose a été décrite pour la première fois en 1861, sur l’île de Malte, par un médecin anglais nommé Marston. En 1887, David Bruce isola la bactérie responsable de la maladie à partir de la rate d’un soldat décédé. Le germe reçut le nom de Micrococcus melitensis. En 1897, la présence d’anticorps agglutinants dans le sérum des malades fut démontrée par Wright. En 1905, Zamitt, en voulant étudier la maladie sur le modèle animal de la chèvre à Malte, découvrit qu’elles étaient toutes positives au test de Wright et que la brucellose était donc une anthropozoonose .
Epidémiologie
Ampleur
A l’échelle mondiale, la brucellose atteint encore plus de 500 000 individus chaque année. L’incidence de la maladie varie selon les pays et les régions, allant de 0,125 à plus de 500 cas pour 100 000 habitants .
En France, il existe 50 cas déclarés par an. La fréquence étant liée à la densité du troupeau herbivore ruminant .
En Afrique tropicale, l’étude menée par Tuekan en 1983 a montré trois catégories de pays vis-à-vis de la brucellose : (i) les pays avec une incidence exceptionnelle comme le Lesotho, le Sénégal ; (ii) les pays avec une incidence modérée comme le Swaziland, le Tchad, le Niger, le Kenya, le Maroc ; (iii) et les pays non touchés par le problème comme les pays du Sahara et Madagascar (10). Actuellement, la situation de la brucellose n’est pas bien connue à Madagascar.
Pathogénie et physiopathologie
Le mécanisme du pouvoir pathogène de Brucella reste encore mal connu. La bactérie est phagocytée par les macrophages et se développe dans le phagosome en inhibant la fusion lysosome/phagosome. La bactérie peut ainsi échapper au système immunitaire et entretenir la chronicité de la maladie. De plus, la bactérie synthétise des protéines dites « de choc septique » responsables de la phase aigüe de la maladie.
L’évolution de la maladie passe par 4 phases :
− La phase de pénétration et de migration locorégionale : après pénétration transcutanée ou muqueuse, les germes migrent par voie lymphatique jusqu’au premier relais ganglionnaire (généralement les ganglions mésentériques) où ils se multiplient. Cette migration correspond à la période d’incubation qui dure une à deux semaines.
− La phase de dissémination septicémique : à partir du ganglion colonisé, les germes gagnent par voie sanguine d’autres groupes de ganglions et des organes riches en tissu réticulo-histiocytaire (le foie et la rate) où ils forment des foyers intracellulaires entourés d’une réaction inflammatoire histiocytaire et lymphocytaire. Dès la fin de la deuxième semaine, la réaction de formation des anticorps se produit.
− La phase de localisations secondaires : ultérieurement, un ou plusieurs foyers brucelliens vont évoluer suivant un mode subaigu résumant la symptomatologie en une localisation secondaire ostéo-articulaire, neuroméningée, hépato-splénique et génitale ; c’est la brucellose subaiguë.
− La phase de parasitisme contrôlé : c’est un état d’équilibre entre l’hôte et le parasite. Le traitement antibiotique ne permet pas la stérilisation complète de l’organisme; c’est la brucellose chronique .
MANIFESTATIONS CLINIQUES
Type de description : la brucellose aiguë
La brucellose aiguë constitue la primo-infection. Elle correspond à la phase septicémique de la maladie. Elle se caractérise par son polymorphisme avec des manifestations cliniques peu spécifiques, surtout au début. Classiquement, après une incubation silencieuse de 15 jours en moyenne (8 à 21 jours), la brucellose débute de façon progressive et insidieuse, rarement brutale. Le début de la maladie est souvent marqué par un tableau pseudo-grippal associant une fièvre, une asthénie, des algies diffuses et un malaise général amenant le malade à consulter.
A la phase d’état, la symptomatologie associe trois symptômes majeurs : fièvre, sueurs et algies. Il s’agit de la classique fièvre ondulante sudoro-algique.
− La fièvre avec un aspect ondulant reste très évocatrice (fièvre aux alentours de 39 °C durant 10 à 15 jours, séparée de phase d’apyrexie de 6 à 10 jours). Cette fièvre semble bien tolérée (l’asthénie et l’amaigrissement étant modérés).
− Les sueurs profuses, surtout nocturnes, obligent le malade à changer de linge plusieurs fois dans la nuit.
− Les douleurs ne sont pas fixes; elles sont fugaces et de siège imprécis (musculaires, osseuses, articulaires).
L’examen physique est généralement pauvre mais peut trouver :
− une splénomégalie modérée ;
− une hépatomégalie ;
− des adénopathies superficielles, fermes, sensibles.
Plus rarement, il peut y avoir des signes très évocateurs de la brucellose :
− la sacro iléite révélée par une sciatalgie ;
− l’orchite unilatérale .
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