Déclaration des Droits de l’Homme
Une prise de conscience tardive
L’article 9 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, rédigé comme le symbole d’un rempart aux mesures arbitraires appliquées par la justice criminelle, consacrait implicitement le principe directeur du procès pénal. Le XIXème siècle n’en perçoit pas non plus les véritables orientations. Sa consécration, comme mécanisme gouvernant le procès pénal, ne prend forme qu’à partir du moment où le droit pénal et la procédure pénale deviennent des matières autonomes par rapport à un droit civil omnipotent et souverain. Par ailleurs, l’influence certaine des recherches scientifiques entreprises sur le fait criminel, voire même sur le criminel lui-même, mais aussi le renforcement pour l’accusé de ne plus être seul lors de l’instruction, duit une autre approche de la preuve pénale. Ces éléments constituent le in substrat sur lequel reposera une restructuration de cette discipline (1182), et par là même, l’émergence d’une véritable réflexion sur la démonstration de la vérité judiciaire. Sous la plume de criminalistes reconnus (1183), la doctrine finalise progressivement le principe de la présomption d’innocence. Une littérature spécialisée en esquisse les mécanismes et fixera l’idée que ce principe est consubstantiel de la preuve pénale. Parce que l’accusé retrouve une place effective dans le procès pénal, se trouve consacrée une rupture avec le seul mécanisme de l’intime conviction qui commandait le jugement pénal. Les conditions se trouvaient réunies pour que se formalise le principe procédural qui organise dans toute son amplitude le procès pénal actuel. Bien que son émergence demeure relativement récente. (Chapitre 1), elle consacre doctrinalement le viatique réflexif et obligatoire des juges dans leur processus écisionnel. Pourtant, l’inflation législative qui étreint le droit pénal, parce ortements transgressifs incipe. L’intérêt de la ociété l’emporte à nouveau sur les droits de l’accusé (Chapitre 2).
Un principe procédural exposé récemment
La codification napoléonienne, importante par le corpus des textes qui la compose, n’est que la conséquence d’un lent travail de synthèse et d’unification des multiples sources du droit existant dans l’Ancien régime. En prétendant englober toute cette science, mais aussi parce que Napoléon ne manquait pas d’entretenir une certaine méfiance à l’égard des juristes, cette mise en forme du droit français allait cependant amener à ce que « le pouvoir tente donc, par tous les moyens, d’empêcher la doctrine juridique de s’épanouir »(1184). La conséquence d’une telle vision aboutissait à un assèchement de la pensée juridique qui ne pouvait sortir du respect des règles ainsi codifiées. Les juristes n’avaient d’autres fonctions que de « développer le texte législatif, à en éclairer au besoin les obscurités, mais non à faire acte de création du droit. Elle se ramenait à une exégèse, […] mais qui ne constituait autrefois qu’une part de leur démarche intellectuelle »(1185). De fait, toute nalyse créatrice ne pouvait s’organiser que dans le cadre d’une soumission à a la lettre du texte posé par le législateur. Il ne pouvait être question d’interpréter, et encore moins de créer par amplification au regard du texte initial. Par ailleurs, le règne absolu du droit civil aboutit en réalité à structurer toutes les autres disciplines sur lui. Ainsi le droit pénal et la procédure pénale, dont la finalité peut se définir comme la « sanction de toutes les autres lois et [la] protection de l’ordre public »(1186), ne disposent-ils d’aucune autonomie, dans leur domaine respectif d’application. Ils ne sont que les excroissances d’une discipline principale qui exerce une véritable souveraineté. De fait, si la problématique de la preuve pénale reste intimement liée aux règles posées par le Code de Procédure Civile, la démarche du juge s’inscrit quant à elle dans le cadre initialement fixé par l’article 24 du Titre VI du décret des 16-29 septembre 1791, et qui posait le principe d’une intime conviction entièrement bre. Le début du XXème siècle voit cependant les premiers signes d’un la liberté du juge et de poser ection1) sans que pour autant ce rincipe soit effectivement reçu (section 2). ection 1 Les premières évocations du principe ection 2 Un principe qui ne concrétise pas li changement qui a pour conséquence d’encadrer la nécessité de gouverner le procès pénal (s
Les premières évocations du principe
Le début du XXème siècle constitue le point de départ d’une autre réflexion sur la preuve pénale parce qu’il rompt avec le siècle précédant. Les ouvrages et traités universitaires consacrent des développements plus importants sur un sujet longtemps délaissé, abordant notamment une esquisse sur la émonstration de la culpabilité. En précisant la situation procédurale de re lui, la doctrine élabore un rincipe directeur du procès pénal (A) dont la réception définitive ne se fera e […] elle est à la charge du emandeur, ministère public et partie civile, qui doit priver l’existence du d l’accusé face aux poursuites engagées cont p que tardivement (B). Paragraphe 1 Le tournant du XXème siècle Evoquer la présomption d’innocence, c’est préciser l’existence d’un double mécanisme qui commande la décision du juge. Même si les premières années du XXème constituent un tournant sur ce point, il faut relever que certains frémissements se firent sentir sur ce sujet. En 1898, devait paraître un manuel élémentaire de droit criminel conforme aux programmes universitaires, contenant le commentaire de la législation la plus récente ( 1187), et qui consacrait un paragraphe aux notions générales qui sous-tendent la preuve pénale. Son auteur précisait qu’ »en princip d délit et du dommage et la culpabilité de l’accusé. Tant que cette preuve n’est pas faite, l’inculpé bénéficie d’une présomption légale d’innocence qui ne tombe que devant la preuve contraire »(1188) Ce dernier ne donne cependant aucune explication sur l’amplitude exacte de ce qu’il considère comme un principe. Simplement, il ajoute qu’il « résulte de cette présomption que l’inculpé qui se borne à nier l’affirmation du délit ou de sa culpabilité, n’a aucune preuve à fournir de sa négation »(1189). Nous estimons que, derrière cette évocation fugace, se trouve évoquée indirectement l’idée que le régime de la preuve pénale, dans ses conséquences, ne peut recouvrer exactement celui de la preuve civile. La éorie générale sur la preuve fixée par le Code civil et le Code de procédure é : actore non probante reus absolvitur »(1191). On retrouve th civile, et qui longtemps prédomina, ne pouvait intégralement s’appliquer dès lors que se trouvait en jeu la liberté individuelle. Il fallait admettre que l’accusé avait le droit de rester passif durant la procédure.