DE LA GOUVERNANCE DU PROJET URBAIN LOCAL A LA MISE EN PLACE D’UN PROJET URBAIN GLOBAL
L’organisation d’une gouvernance alliant les luxembourgeois et les français a aboutit suite à une forte implication de l’Etat français. Les acteurs de part et d’autre de la frontière vont désormais pouvoir réfléchir à la réalisation d’un projet urbain global, selon Ingallina (Cf. partie 2-2.) c’est-à-dire un projet complémentaire à l’échelle de l’agglomération. « Le bassin de l’Alzette, doit permettre d’arrimer sur le plan urbanistique le projet français au projet luxembourgeois. Il est par conséquent nécessaire que l’État et l’ensemble des collectivités locales françaises concernées élaborent une vision partagée du développement du territoire Nord Lorrain qui mette l’accent sur ces complémentarités possibles avec les projets du Grand- Duché. » (DTA des bassins miniers Nord-Lorrains) « Nous nous devons de saisir l’opportunité créée par la croissance exceptionnelle du Grand Duché de Luxembourg et son ambitieuse politique d’aménagement à la frontière française pour engager et mener à notre tour un projet de grande ampleur et œuvrer pour rendre notre territoire attractif et compétitif. » Communauté de Communes du Pays Haut Val d’Alzette (CCPHVA) Les acteurs du territoire et partenaires du comité stratégique semblent ainsi déterminés à mettre en œuvre un projet urbain global sur le territoire frontalier.
La dynamique économique luxembourgeoise ne cesse de créer de l’emploi. Actuellement, les deux tiers d’emplois crées au Luxembourg sont occupés par des frontaliers, dont la moitié sont lorrains. Avec l’offre d’emploi qui va être générée sur Belval, de nombreux employés, de la France entière souhaiteront s’installer à proximité de la frontière. D’après les projections du STATEC1 et de l’AGAPE, on va passer de 70 000 frontaliers lorrains actuels à 105 000 en 2020. Les CIADT de mai et décembre 2003 ont engagé une réflexion partenariale dont l’animation a été confiée au Préfet de la région Lorraine. Ce travail a aboutit en juillet 2005 à l’élaboration d’un schéma d’aménagement réalisé par l’EPFL mais partagé par l’ensemble des acteurs lorrains du Comité transfrontalier de l’époque (Conseil régional de Lorraine, Conseils généraux de Moselle et de Meurthe-et- Moselle, Communauté de communes du Pays Haut Val d’Alzette). L’objectif était « d’élaborer une vision partagée du développement potentiel du territoire Nord-Lorrain, en mettant l’accent sur les complémentarités possibles avec le projet luxembourgeois2 ». Il est important de noter que ce schéma, élaboré en 2005, a été validé par le comité de pilotage de l’époque mais pas par le comité stratégique actuel. Il constitue en ce sens une vision stratégique de l’aménagement du site frontalier mais ne reflète pas nécessairement les projets qui seront validés à terme.
Le 24 janvier 2008, la lettre de mission cosignée par les ministres MM. Borloo et Kouchner engage un projet de développement territorial global sur le territoire d’Alzette-Belval. Après une réflexion concertée, le comité stratégique mis en place par la DRE, s’est dirigé vers le développement d’une éco-agglomération, aboutissant à l’élaboration d’une charte de développement durable (coécrite par l’ensemble des partenaires institutionnels1, et en cours de signature en ce début d’année) et à l’élaboration d’une démarche EcoCité, s’inscrivant dans le cadre du Grenelle de l’Environnement et du plan ville durable, réalisée par la communauté de communes du Pays Haut Val d’Alzette en concertation avec ses partenaires (Préfecture de Région Lorraine, Direction Régionale de l’Equipement de Lorraine, Conseil Régional de Lorraine, Conseils Généraux de Moselle, Meurthe-et-Moselle et Meuse, Etablissement Public Foncier de Lorraine, Agape, Caisse des Dépôts et Consignation et autres services de l’Etat). Le schéma directeur Alzette-Belval 2015 et la démarche EcoCité définissent ainsi les grandes lignes d’aménagement du projet global, orienté sur l’aménagement des cinq communes mitoyennes de Belval Ouest: Rédange, Russange, Thil, Villerupt et Audun- le-Tiche. Au vu de l’ensemble des acteurs ayant participé à la vision stratégique de l’espace transfrontalier, il apparaît que seuls les acteurs français sont impliqués. La coopération transfrontalière, au-delà du développement d’un projet en complémentarité ne vise-t-elle pas la concertation de l’ensemble des acteurs, et ce, de part et d’autre de la frontière ? Bien que la composante verticale de la gouvernance transfrontalière soit largement présente au sein de ce projet stratégique global transfrontalier, la composante horizontale est totalement absente. L’élaboration d’un projet stratégique à la proximité de la frontière, sans concertation avec le pays voisin, risque de se voir dépassé dans l’éventualité où le pays voisin projette également de mettre en place de nouveaux projets stratégiques. La bonne gouvernance transfrontalière consiste à coordonner les projets de nature stratégique, de façon à ce qu’ils soient complémentaires et pour limiter leurs difficultés d’opérationnalisation. L’absence des acteurs luxembourgeois dans l’élaboration de ce projet global constitue ainsi une limite quant à la mise en place d’un projet transfrontalier.