DE 1 À 4: HISTOIRE DU MODÈLE GR
La naissance du modèle « Génie Rural »
Le projet de construire un modèle conceptuel hydrologique aussi simple que possible pour reconstituer les débits journaliers à partir des pluies et des températures a été lancé par Michel en 1983. Dans un bassin versant expérimental, il est parti d’un modèle conceptuel assez complexe pour cette étude: le modèle CREC à 9 paramètres (Galea, 1972) et a constaté des défauts dans ce modèle conceptuel en estimant que « outre la difficulté de mise en oeuvre, la longueur des réglages, on ne maîtrise pas toujours le fonctionnement réel du modèle » (Michel, 1983). On s’aperçoit ainsi que « certaines fonctions d’un modèle ne réagissent pas dans les conditions pour lesquelles elles ont été créées et perdent donc leur intérêt, et la procédure qui consiste à introduire de nouvelles fonctions pour remédier aux défaillances antérieures accentue encore ce phénomène et rend l’analyse du modèle très difficile » (idem). Ce fait a conduit à simplifier ce modèle et on a pu constater que « l’on gagne en compréhension du modèle sans perdre beaucoup sur ses performances » (idem). Dans ces conditions, Michel (1983) a procédé de façon inverse en partant du modèle le plus élémentaire possible (1 réservoir et 1 paramètre) et en ne compliquant cette architecture que pour faire face aux difficultés à reproduire les débits réels et non pas pour satisfaire à des conceptions a priori sur le cycle hydrologique. Cette étude a montré que « De tels modèles existent (voir par exemple Haan, 1972), mais l’essai sur l’Orgeval conduit à de mauvais résultats. Il semble nécessaire de compliquer le modèle en prenant deux réservoirs: un réservoir (S) assurant le bilan de l’eau non gravitaire et un réservoir (R) assurant le routage des débits » (Michel, 1983). Modèle et données utilisés Première partie Chapitre 2 page 30 L’architecture de ce modèle est montrée dans la figure 2-1 où le réservoir superficiel S reçoit une fraction de la pluie (P) et est soumis à l’évaporation (E), ces deux fonctions dépendent de son niveau. La fraction complémentaire de la pluie va dans le réservoir de routage R. Après ce modèle (appelé aujourd’hui GR1), Michel (1983) a proposé une amélioration en prenant 2 paramètres différents pour R et S, d’où l’esquisse du modèle GR2.
De GR1 à GR2
Edijatno (1988), Edijatno et Michel (1989) ont essayé de justifier la meilleure architecture pour cette esquisse de modèle à 2 paramètre. Ils l’ont comparé avec une cinquantaine de modèles différents. L’idée précédente a été justifiée: le schéma le plus prometteur pour un modèle était celui à deux paramètres avec un réservoir sol et un réservoir de routage quadratique. Les caractéristiques principales du modèle GR2 sont (Edijatno, 1988): Première partie Chapitre 2 page 31 1. L’état hydrique du réservoir superficiel (S) détermine le coefficient de rendement: rapport entre la pluie nette (Pn) et la pluie brute diminuée de l’évaporation du jour (P-E)), comme égal à (S/A)2 avec A étant paramètre à caler. 2. L’évaporation réelle (En) liée à l’évaporation potentielle résiduelle (E) est une fonction de S: En = EV S/A; (E = Ep – P, si P < Ep). 3. Un réservoir quadratique recueille la pluie nette et relâche un débit Q R 2 donné par: R R avec B étant le deuxième paramètre à caler. L’architecture du modèle GR2 est présentée dans la figure 2-2. L’insuffisance de la prise en compte de la propagation de l’écoulement superficiel apparaît cependant lorsque GR2 est appliqué à des bassins de tailles très différentes.
De GR 2 à GR 3
A partir du modèle GR2, Edijatno et Michel (1989) ont proposé la première version d’un modèle conceptuel à trois paramètres (GR3) en ajoutant un paramètre (C) au modèle GR2 pour traiter la propagation de l’écoulement superficiel: un hydrogramme unitaire expérimental. Cet hydrogramme 3 unitaire instantané est supposé donné par q(t) = p^ t2 avec t étant le temps (t < C). Edijatno (1991) a conçu cette architecture en la confrontant aux données de 114 bassins versants possédant des superficies entre 1.5 km2 et 3750 km2 . La nécessité du troisième paramètre décrivant l’hydrogramme unitaire a été confirmée par comparaison avec d’autres solutions alternatives. En plus, Edijatno (1991) a introduit un écoulement « pseudo-direct » (5-10% de la pluie efficace) dans ce modèle pour traiter l’écoulement « superficiel rapide » d’un certain nombre de bassins mal représentés sans cela. En général, ce modèle est correct pour les 114 bassins versants sauf pour deux bassins versants très intermittents. Le schéma de la version finale du modèle GR3 est montré dans la figure 2-3 (sauf ceux dans les cadres en pointillé). On peut citer la description de ce modèle faite par Edijatno et Michel (1989). L’architecture du modèle GR3 repose sur deux réservoirs et un hydrogramme unitaire : – le réservoir-sol ayant comme seule sortie le prélèvement occasionné par l’évaporation potentielle. Ce réservoir commande la répartition de la pluie nette entre lui-même et le sous-modèle de routage; – un hydrogramme unitaire, décrivant la propagation des débits depuis leur formation à partir des pluies nettes jusqu’au deuxième réservoir qui est: – le réservoir-eau-gravitaire. Ce réservoir reçoit les débits routés selon l’hydrogramme unitaire. Il a comme seule sortie le débit de la rivière et sa loi vidange est du type quadratique. Cet ensemble de trois opérateurs dont chacun dépend d’un seul paramètre semble être le schéma le plus simple pour rendre compte de façon acceptable de la transformation pluie-débit. Les tentatives de « perfectionnement » de ce schéma, en vue de lui conférer une qualité de fonctionnement plus Première partie Chapitre 2 page 33 complexe, n’ont pas été jugées suffisamment pertinentes pour être retenues, sauf pour mieux rendre compte des bassins intermittents.