Dépôt de métaux nobles sur Ni/Au(111)
Dans ce chapitre, nous allons étudier par STM in-situ la croissance électrochimique de B ∈ {Ag, Au, Pd} sur un substrat de Au(111) couvert par un dépôt de Ni. Ce dernier sera soit sous la forme d’îlots de hauteur monoatomique ou bien d’une couche monoatomique couvrant la quasi-totalité de la surface du substrat. Nous nous intéresserons en particulier aux phénomènes de substitution atomique et de ségrégation. Nous étudierons l’influence de la microstructure du dépôt de Ni et du substrat sur l’arrangement des atomes B. Nous examinerons aussi les éventuels processus de nucléation et de croissance préférentielle. Comme le montre le Tableau 1, le choix des métaux B que nous avons fait offre un ensemble de métaux nobles ayant différentes affinités avec le nickel, induisant une structure volumique allant de la solution solide à la démixtion. En effet, on s’attend à ce que l’arrangement des atomes B sur le substrat Ni/Au(111) dépende en partie de l’enthalpie de mélange Ni-B. Nous nous sommes aussi intéressés à la morphologie des dépôts B/Ni/Au(111) pendant la dissolution sélective de Ni, donnant des informations complémentaires sur les processus de substitution de Ni par B. Enfin, pour s’approcher au mieux de l’équilibre thermodynamique, la vitesse de dépôt du métal B est choisie suffisamment faible (~0.05MC/min) au regard des possibilités expérimentales. De plus, pour que la microstructure de la couche de Ni soit or- donnée, le dépôt de Ni a été réalisé sur une surface Au(111) avec des bords de marches passivés par du palladium AuPd (voir chapitre 2) Le chapitre est divisé en trois parties traitant chacune d’un système B/Ni/AuPd(111). Chacune des parties fait l’objet d’une discussion spécifique.
La Figure 1 montre un dépôt d’argent réalisé au potentiel U = -1.24 VMSE sur une surface Ni/AuPd(111). Le flux d’adatomes d’argent sur la surface est 0.06 MC/min correspondant au flux diffusif d’une solution 5µM en AgNO3. Pour éviter les problèmes liés à l’adsorption spécifique de chlorures sur l’argent, l’expérience est réalisée dans un électrolyte ne contenant pas de chlorure de potassium. On identifie facilement les îlots de nickel dans les images de la Figure 1 car ils présentent une corrugation du moiré périodique et de symétrie hexagonale (période 2.2 nm, hauteur moyenne 1.3 Å) identique à celle observée dans le chapitre 2. L’argent forme des nanostructures allongées (« doigts ») et branchées orientées selon trois directions principales définies par les traits bleus. Leur hauteur est de 2.5 Å, ce qui indique que leur épaisseur est égale à un plan atomique. Leur largeur est souvent homogène suivant la longueur et vaut en moyenne 2.25 nm. Les doigts d’argent sont orientés à 30° (avec une certaine dispersion) par rapport aux directions atomiques denses du substrat que l’on repère grâce à l’orientation du moiré (voir chapitre 2).
Il est remarquable qu’aucun germe d’argent ne soit visible sur les îlots compacts de nickel. L’argent mouille ~55% de la périphérie des îlots de nickel lorsque ces derniers sont sur une grande terrasse d’or. Par contre, sur les petites terrasses, la Figure 1b montre que l’argent mouille le nickel et peut entièrement combler une zone laissée vacante entre deux îlots de Ni (Figure 1c). Enfin, les régions grises de la Figure 1a montrent que le substrat AuPd(111) resté nu est plan et conserve donc sa structure atomique (1 x 1). Nous avions vu dans le chapitre 2 que la surface AuPd(111) restait (1 x 1) après le dépôt de Ni. Le dépôt d’argent n’induit donc pas non plus de reconstruction de la surface AuPd(111). Afin d’obtenir des informations complémentaires sur la microstructure de la couche d’argent nous avons étudié sa dissolution. La dissolution sélective et complète du nickel démarre au potentiel seuil de dissolution de la monocouche Ni/Au (~-0.98 VMSE). La Figure 2a montre les nanostructures d’Ag laissées après dissolution du Ni. L’évolution de leur topographie en fonction du potentiel d’électrode est frappante. Alors que la topographie de la surface du dépôt d’Ag ne présente qu’une faible corrugation à -1.0VMSE (Figure 2a), on observe l’apparition de zones sombres vers le potentiel -0.7VMSE (Figure 2b) au sein des nanostructures.