Cours gratuit Hygroscopicité du bois

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Hygroscopicité du bois

Les figures 22, 23, 28 et 29 illustrent la relation entre le potentiel hydrique et la teneur en humidité d’équilibre des bois de bouleau jaune et de hêtre à 25°C et 50°C. Ces figures montrent autant les humidités obtenues en désorption que celle obtenue suite à une saturation intégrale. Dans quasiment tous les cas, l’erreur de la moyenne des teneurs en humidité d’équilibre ne dépasse pas la grandeur du symbole utilisé. Cette représentation graphique à l’échelle logarithmique élargit de façon importante la région du domaine hygroscopique à hautes valeurs d’humidité relative de l’air. On remarque ainsi une excellente continuité entre les valeurs mesurées par les deux méthodes de sorption, ce qui confirme l’utilité de la méthode de la membrane poreuse pour la détermination de la teneur en humidité d’équilibre à des humidités relatives élevées. Cette correspondance de résultats entre les deux méthodes a été rapportée auparavant par plusieurs chercheurs (Cloutier et Fortin 1991; Hernández et Bizoň 1994; Defo et al. 1999; Almeida et Hernández 2006a, 2006b; Hernández et Pontin 2006).
Les figures citées précédemment montrent la présence de l’hystérèse à la saturation à hautes valeurs d’humidité relative de l’air ambiant. Cette hystérèse a été définie par Goulet et Hernández (1991) comme étant la différence entre l’équilibre obtenu suite à une désorption en présence d’eau liquide et celui atteint en désorption à partir de la saturation des membranes. Ce phénomène est apparent lors de désorptions subséquentes, c’est-à-dire qu’il n’est pas limité au premier séchage mais plutôt à une désorption réalisée en présence d’eau libre (Barkas 1949; Goulet 1968; Goulet et Hernández 1991; Cloutier et Fortin 1991; Hernández et Bizoň 1994; Almeida et Hernández 2006a, 2006b; Hernández et Pontin 2006).
Dans la présente recherche, les essais de désorption ont été réalisés à partir de la saturation intégrale de manière que les courbes obtenues représentent les teneurs d’humidité d’équilibre maximales atteintes pour chaque condition d’humidité. Le terme courbe de désorption limite est alors utilisé pour décrire ce phénomène. Une autre courbe de désorption obtenue à partir d’une humidité plus faible devrait être située au-dessous d’une telle courbe de désorption limite (Hernández et Bizoň 1994; Hernández et Pontin 2006). Des résultats expérimentaux confirmant ce comportement ont été rapportés par Defo et al. (1999) pour le bois d’érable à sucre.
Almeida et Hernández (2006a, 2006b) ont obtenu pour le bouleau jaune et le hêtre des valeurs similaires de teneur en humidité d’équilibre en désorption à 25°C (figures 34 et 35). Par ailleurs, les figures 36 et 37 montrent que les écarts des valeurs de teneur en humidité d’équilibre des deux espèces étudiées sont relativement faibles entre 0% et 90% d’humidité relative de l’air ambiant, tandis qu’au dessus de cette valeur d’humidité les différences entre ces deux espèces sont plus marquées. Les différences d’équilibre entre les espèces augmentent donc au fur et à mesure que l’humidité relative de l’air augmente.
Tel qu’indiqué plus haut, la région entre 96% et 100% (HR) est très élargie lorsqu’on utilise le concept de potentiel hydrique pour la représentation des isothermes de sorption. Cette région est très importante dans l’étude des interactions bois-eau étant donné que celles-ci sont contrôlées par les forces capillaires et en conséquence par la microstructure du bois. Puisque le bois est un matériel poreux, un effet important à considérer pour l’interprétation des figures 22, 23, 28 et 29 est le phénomène dit de «la bouteille d’encre». Le système capillaire du bois est composé de cavités cellulaires interconnectées en série par des canaux plus étroits. La variation des dimensions entre les différents types de cavités connectées en série suggère que la désorption est contrôlée par un potentiel hydrique plus faible, lequel est régi par les plus petits pores. D’autre part, les conditions d’adsorption sont contrôlées par un potentiel hydrique plus fort, lequel dépend des plus gros pores. Ainsi, la courbe de désorption dépend du diamètre des canaux qui relient les cavités cellulaires, tandis que la courbe d’adsorption est surtout régie par le diamètre de ces cavités (Fortin 1979).
Les courbes de désorption entre 0 et -5000 Jkg-1 ψ furent alors différentes pour les deux espèces étudiées, étant donné qu’à hautes valeurs d’humidité, les valeurs d’équilibre seront davantage fonction du volume, de la distribution et de la dimension des pores dans le bois des différentes espèces (Fortin 1979, Almeida et Hernández 2006b). De plus, la variation de la structure anatomique entre les espèces doit contribuer également à expliquer ces différences.
Les figures 38 et 39 montrent que le drainage d’eau entre la saturation maximale et -300 Jkg-1 ψ fut d’environ 43,7% et 56,2% (H) pour le bouleau jaune, et de 59,4% et 58,2% (H) pour le hêtre, à 25°C et 50°C respectivement. Selon des études antérieures, la perte initiale d’eau dans le bois devrait avoir lieu dans les capillaires les plus larges, notamment ceux des lumens des vaisseaux (Hernández et Bizoň 1994; Almeida et Hernández 2006a; Hernández et Pontin 2006). Le tableau 5 montre que à -300 Jkg-1 ψ, les capillaires ayant un rayon plus grand que 0,48 µm à 25°C et 0,45 µm à 50°C sont déjà vides. Des mesures d’anatomie quantitative réalisées par Almeida et Hernández (2006c) montrent que le diamètre tangentiel moyen des vaisseaux est de 86 µm pour le bouleau jaune et de 40 µm pour le hêtre. La proportion des vaisseaux dans le volume total du bois était de 15% pour le bouleau jaune et de 25% pour le hêtre. On confirme donc en effet que les vaisseaux constituent la première voie de drainage de l’eau dans le bois, à cause de leur taille ainsi que de leur proportion élevée dans le bois de ces espèces. Le hêtre, qui présente un volume
de vaisseaux plus grand que le bouleau jaune, montre ainsi un changement plus abrupt de la courbe de teneur en humidité d’équilibre entre 0 et -300 Jkg-1 ψ (figures 36 et 37).
Par ailleurs, la courbe de désorption limite à 25°C pour le bouleau jaune change de façon abrupte entre -300 Jkg-1 et -700 Jkg-1 ψ et plafonne entre -700 Jkg-1 et -5000 Jkg-1 ψ (figure 38). Puisque le bouleau jaune a une proportion des fibres assez élevée, cette baisse de teneur en humidité semble indiquer que le drainage complet des cavités de fibres serait accompli à -700 Jkg-1 ψ. Ce drainage dépendra de la taille des ouvertures dans les membranes des ponctuations connectant les fibres. Cela signifie que le rayon moyen de ces ouvertures pourrait être plus grand que 0,21 µm (-700 Jkg-1 ψ) pour cette espèce (tableau 5). Le même résultat fut obtenu par Almeida et Hernández (2006a) pour le bouleau jaune à 25°C. Le plateau observé entre -700 Jkg-1 et -5000 Jkg-1 ψ (figure 38) indique que les ouvertures qui contrôlent la rétention et drainage de l’eau liquide sont peu abondantes entre ces niveaux de potentiel hydrique. L’eau restante dans le bois pourrait être localisée dans les capillaires ayant un rayon égal ou plus petit qu’environ 0,029 µm (tableau 5). Le plateau montré pourrait correspondre à la transition entre le drainage des cavités de fibres et celui des parois cellulaires et des lumens des cellules de parenchyme longitudinal et radial. Un plateau similaire a été déjà observé sur le bois d’érable à sucre par Hernández et Bizoň (1994). Selon Hart (1984) une partie importante de l’eau liquide présente au-dessous de – 700 Jkg-1 ψ pourrait être logée dans les cellules de parenchyme. À -5000 Jkg-1 ψ, on distingue une très bonne correspondance entre les deux méthodes de sorption utilisées à 25°C. En effet, les valeurs de teneur en humidité d’équilibre obtenues à -5000 Jkg-1 ψ (membrane poreuse) et à -5619 Jkg-1 ψ (solution saline saturée de K2SO4) sont très rapprochées.
Par ailleurs, la courbe de désorption du bouleau jaune à 50°C est inférieure à celle obtenue à 25°C, à l’exception de la condition d’équilibre à -700 Jkg-1 ψ (figure 38). En fait, la désorption à 50°C suit le même comportement de drainage d’eau que la courbe à 25°C jusqu’à -5000 Jkg-1 ψ. À -300 Jkg-1 ψ, la différence entre les valeurs de teneur en humidité d’équilibre à 25°C et 50°C est de 12% (H). Cette perte en humidité plus élevée à 50°C qu’à 25°C pourrait s’expliquer par une plus grande perméabilité des tissus du bois favorisée par l’élévation de la température. Cependant, l’intervalle entre -300 Jkg-1 et -700 Jkg-1 ψ montre une diminution particulière de l’humidité d’équilibre. Sachant que la conductivité de l’eau augmente avec la température (Tremblay et al. 1996), le temps pour atteindre l’équilibre d’humidité est inversement proportionnel à la température, à un niveau de potentiel hydrique déterminé. Cependant, à -700 Jkg-1 ψ, le temps fut plus long à 50°C qu’à 25°C. La valeur H à -700 Jkg-1 ψ et 50°C pourrait alors être légèrement affectée par une source inconnue. Il se pourrait aussi que ce niveau de potentiel hydrique établisse véritablement la limite du drainage complet des cavités cellulaires des fibres. Cette limite devrait être égale pour les deux températures étudiées. Il en résulte qu’à 50°C la teneur en humidité d’équilibre a diminué de manière plutôt constante entre -300 Jkg-1 et -5000 Jkg-1 ψ. En revanche, la région entre -5000 Jkg-1 et -6370 Jkg-1 ψ à 50°C présente un changement abrupt de la teneur en humidité d’équilibre, ce qui pourrait correspondre avec le drainage de l’eau liquide dansles rayons ligneux. Ce résultat n’a pas été observé à 25°C car l’intervalle de potentiel hydrique utilisé dans cette région fut plus grand.
Dans le cas du hêtre à 25°C, la courbe de désorption limite en-dessous de -300 Jkg-1 ψ présente une diminution assez constante de la teneur en humidité d’équilibre durant la désorption, sans présence d’aucun plateau intermédiaire (figure 39). Ce résultat a été observé antérieurement par Almeida et Hernández (2006b). Dans le cas de bois de conifères, Fortin (1979) et Tremblay et al. (1996) ont rapporté des courbes de drainage sans plateau intermédiaire. Une distribution plus uniforme des ouvertures de pores peut expliquer l’absence de plateau dans ces espèces. Ces résultats confirment qu’à des humidités élevées, la relation teneur en humidité d’équilibre-potentiel hydrique est fortement dépendante des espèces. Au niveau de la transition entre la méthode de la membrane poreuse et celle des solutions salines saturées, le point correspondant à -5619 Jkg-1 ψ (K2SO4) à 25°C a été considéré inexact car la valeur de teneur en humidité obtenue fut supérieure à celle à -5000 Jkg-1 ψ (tableau 12; figure 28). Cette valeur dépasse également la courbe de désorption limite rapportée pour cette même espèce par Almeida et Hernández (2006b) (figure 35). Le calcul de la teneur en humidité fut, dans ce cas, faussé par une diminution de la masse subie par les échantillons suite à l’action des agents de moisissure et/ou pourriture. Cette attaque fut favorisée par le niveau d’humidité relative et par le temps de conditionnement trop long (530 jours).
À 50°C, les valeurs de teneur en humidité d’équilibre pour le hêtre son légèrement inférieures à celles à 25°C, et comme dans le cas du bouleau jaune, la courbe de désorption se comporte de manière semblable à celle à 25°C jusqu’à -5000 Jkg-1 ψ. À -5000 Jkg-1 ψ la courbe change brusquement tel que observé pour le bouleau jaune. Cela pourrait ainsi correspondre avec le vidange de l’eau liquide présente dans les rayons ligneux. En résumé, la discussion montre que l’équilibre hygroscopique est plus faible à 50°C qu’à 25°C pour les deux espèces étudiées, ce qui confirme l’influence qui a la température sur cette propriété.
En dessous de -14502 Jkg-1 et de -6370 Jkg-1 ψ à 25°C et à 50°C respectivement, pour le bouleau jaune (figure 38) et pour le hêtre (figure 39), la teneur en humidité d’équilibre diminue lentement. En-dessous de -37775 Jkg-1 (76% HR) et de -44057 Jkg-1 (74% HR) ψ à 25°C et à 50°C respectivement, les courbes de désorption de ces deux espèces sont quasiment accolées. On prévoyait ce comportement puisque la désorption de l’eau liquide à ces niveaux d’humidité relative de l’air est quasiment terminée. Plus précisément, Hernández (1983) a démontré que la perte d’eau liquide pour l’érable à sucre serait accomplie à environ 63% (HR), valeur que correspond à 14% de teneur en humidité d’équilibre. Il est reconnu que la désorption de l’eau liée est presque similaire entre les différents bois tempérés.

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