Les mesures hygiéno-diététiques
Ces méthodes non invasives doivent être proposées systématiquement en première intention, avant toute autre thérapeutique plus lourde ou invasive. Elles visent à supprimer ou à limiter les facteurs en cause qui provoquent l’obstruction pharyngée.
Leur efficacité a été démontrée dans la prise en charge du ronflement isolé et du SAHOS.
Aussi, le premier traitement à proposer au patient apnéique est la mise en place de mesures hygiéno-diététiques.
Obésité
La surcharge pondérale est un facteur de risque reconnu, les études récentes le confirme en prenant comme référence l’indice de masse corporelle (IMC) (25)
Il semble que la localisation cervicale de tissu adipeux soit un facteur de risque plus important, mais la distribution de masse graisseuse étant hétérogène d’un patient à un autre, l’IMC parait rester un bon indicateur. L’augmentation du tour de cou augmenterait la prévalence du SAHOS (26).
La perte de poids entraine a contrario une diminution de l’IAH (mais d’une mesure moins importante que son augmentation lors de la prise de poids (25)) et parallèlement diminue les cofacteurs de risques cardiovasculaires associés au SAHOS. Il parait alors évident que l’objectif principal dans le traitement du SAHOS sera donc la perte de poids. Les différentes stratégies de prises en charge del’obésité́aboutissent àdes réductions de 5 % à 50 % du poids, qui permettent des diminutionsparfois importantesde l’IAH, des améliorations du sommeil et de la vigilancediurne.Schwartz et al. (27) ont rapporté une diminution significative de l’IAH de 83 à 33événements/heure (p <0,0001) chez des patients suivant un rééquilibrage alimentaireassocié à des exercices physiques. Les mesures étant faites avant et après la réduction de l’indice de masse corporelle chez ces patients.
Dans certains cas d’obésité sévère (IMC > 35 kg/m2) ou massive (IMC > 40 kg/m2), il peut être indiquée une thérapie adjuvante chirurgicale : la chirurgie gastrique considéré parl’OMS comme la chirurgie la plus efficace dans le traitement de l’obésité sévère (28).Plusieurs techniques sont proposées, celle du By-Pass gastrique et de la dérivation biliopancréatique auront en plus de la perte de poids des répercussions métaboliques.
Tabac
Le tabagisme, irritant les muqueuses et créant des troubles du sommeil est un facteur de risque identifié dans plusieurs études. Il a été établi que les anciens fumeurs ne semblent pas être des patients à risque de développer des troubles respiratoires du sommeil. Ce sont les effets cytotoxiques de la fumée dégagée par la cigarette qui auraient un rôle délétère sur la muqueuse des voies aériennes supérieures (VAS) ; en effet celle-ci diminuerait le tonus musculaire des VAS ce qui provoquerait les risques de collapsus durantle sommeil. (31)
Il parait évident que le sevrage tabagique, de n’importe quelle manière, est l’une des premières mesures thérapeutiques à instaurer.
Alcool
Peppard et al. (32) ont constaté en 2007 que les hommes déclarant une consommation d’alcool habituelle étaient plus susceptibles d’avoir un SAHOS léger (IAH > 5 événements / heure) que les hommes qui n’en consommaient pas.
Il semblerait que les patients dépendants à l’alcool sont plus sujets aux apnées. En effet, l’alcool potentialise l’effet dépresseur du sommeil sur les muscles dilatateurs des voies aériennes supérieures ce qui provoque une diminution du tonus musculaire de la zone pharyngée.
De ce fait, la consommation d’alcool en soirée (mais également en journée !) doit être déconseillée et incitée.
Les techniques chirurgicales
De nombreux patients où l’échec thérapeutique des traitements dits classiques, ou désirants une solution à long terme se tournent vers la chirurgie. De plus, 25% des patientsrefusent le traitement par Ventilation par Pression Positive et entre 40% à 70% de ceux quil’accepte déclarent ne pas être totalement observant à ce traitement.
Néanmoins, les patients bénéficiant d’une solution chirurgicale doivent répondre à des critères de sélection rigoureux pour garantir une réponse au traitement optimale et pérenne dans le temps. De plus, le patient doit être informé des avantages et risques de chaque solution que l’opérateur lui présentera.
Il existe de nombreux protocoles chirurgicaux ; traditionnellement, celui de Stanford est encore le plus appliqué, de par sa conservation des tissus et de par sa fiabilité. Il propose une prise en charge en 2 temps : premièrement des gestes chirurgicaux au niveau des sites obstructifs reconnus (nasal, palatin, rétro lingual). Si un échec est observé au bout de 6mois, la seconde étape consiste en un avancement bi-maxillaire chirurgical. (33)
D’un point de vue anatomique, on distingue donc principalement 3 zones susceptibles de compromettre le passage de l’air dans les voies aériennes supérieures : la cavité nasale, la région rétro-vélaire et la région retro-basi-linguale. Toutes les chirurgies présentées se concentrent donc sur ces zones anatomiques. (34)
Obstruction nasale
Les techniques chirurgicales corrigeant une obstruction nasale ont pour objectifs principaux de limiter ou stopper une ventilation orale, fautive des apnées du sommeil. En effet, la ventilation orale entraine une mauvaise position du massif lingual en position basse provoquant un abaissement de l’os hyoïde. Celui-ci de par ses insertions va reculer la base de la langue et donc diminuer l’espace rétrobasilingual provoquant une apnée.
Il faudra être particulièrement vigilant en instaurant une surveillance post opératoire accrue du patient. En effet, à l’âge adulte la respiration orale est un réflexe acquis quasiment impossible à corriger, malgré les chirurgies nasales levant les obstructions.
Ce type de chirurgie est surtout réalisé chez les patients futurs porteurs d’une VPPC, pour diminuer les risques d’intolérance à l’appareil de ventilation, car le risque principal est une fuite d’air au niveau buccal (par ouverture buccale lors du sommeil). On pourra alors, grâce aux dégagements chirurgicaux des obstructions nasales, diminuer les pressions efficaces utilisées, souvent mieux toléré par le patient.
On peut supposer que ce type de chirurgies peuvent être efficaces sur un patient présentant un IAH faible, mais certainement pas chez un patients apnéique sévère
Les anomalies nasales telles que le collapsus narinaire par affaissement des cartilages alaires et rétrécissement de la valve nasale (ou son affaissement lors des mouvements d’inspiration), les polypes nasaux, les déformations chondro-osseuses, l’hypertrophie des cornets inférieurs et la déviation de la cloison nasale, peuvent diminuer de manière importante le flux aérien, provoquant une diminution du débit aérien au niveau de l’oropharynx ou de l’hypo-pharynx. (33)
– La rhinoplastie avec greffe alaire peut corriger le collapsus de la valve nasale fréquemment retrouvé chez les patients atteints de SAOS durant les mouvements d’inspiration. Le cartilage greffé provient de celui de la cloisonnasale du patient lui-même.
L’uvulo-palato-pharyngoplastie peut provoquer des douleurs postopératoires importantes et d’éventuelles complications à long terme, notamment un reflux nasal, une sténose pharyngée cicatricielle, une dysphonie avec rhinolalie ouverte et une insuffisance vélopharyngée et tubaire. (36)
De plus, l’utilisation de cette chirurgie de manière exclusive pour le traitement des apnées du sommeil ne montre pas des résultats optimaux sur la baisse de l’index d’apnée hypopnée. Une méta analyse de Caples et al. (37) chiffre à 33% la baisse de l’IAH sur le moyen-long terme (1 à 4ans), mais Sundaram (38) en 2005 a montré que le traitement n’était pas efficace dans le temps.
Selon la société française d’ORL, les traitements vélaires ne sont plus recommandés pour traiter un SAHOS sévère.
Une hypertrophie adéno-amygdalienne peut provoquer l’obstruction du flux ventilatoire et ainsi créer des apnées particulièrement chez les enfants. Une chirurgie pour adénoïdectomie +/- amygdalectomie totale ou partielle le plus souvent, sous anesthésie générale, peut être réalisée lorsqu’à l’examen clinique cette hypertrophie est avérée.
Obstruction retro-basi-linguale
L’effondrement de la base de la langue représente 17% à 33% de l’obstruction des voies aériennes supérieures et est particulièrement importante chez le patient obèse et atteint de SAOS sévère. (39)
La basi-glossectomie est une technique réalisée sous anesthésie générale qui consiste en la résection de la partie postéro-médiane de la langue.
Cette chirurgie peut être réalisée par voie de cervicotomie ou voie orale par radiofréquence ou par technique robot-assistée. La mise au point de la radiofréquence et de la chirurgie robot-assistée ont permis des gestes moins invasifs, en revanche, il est nécessaire de renouveler souvent l’opération et son efficacité a été remise en cause dans une revue de la littérature (40).
La basi-glossectomie améliore sensiblement les résultats du sommeil uniquement si elle est associée à d’autres techniques chirurgicales chez l’apnéique, Murphey AW, (41) a montré une amélioration significative de l’IAH de 48,1 ev./h (± 22,01) à 19,05 ev./h (± 15,46). Actuellement, les preuves sont insuffisantes pour analyser le rôle de la basiglossectomie en tant que traitement unique pour corriger l’apnée du sommeil, bien que les données suggèrent des résultats positifs chez certains patients. (41) Par ailleurs, cette technique n’est pas dépourvue de risques avec le risque hémorragique et dyspnéique par œdème post-opératoire pouvant aller jusqu’à la trachéotomie, et d’effets secondaires avec dysphagies et fausses routes à répétition.
Chirurgie avancée bi-maxillaire
La chirurgie d’avancée bi-maxillaire repose sur l’avancée maxillo-mandibulaire par le biais d’ostéotomies. Réalisée sous anesthésie générale, il va être effectué par le chirurgien maxillo-facial ou le chirurgien oral, une intervention de Lefort I et une intervention d’Epker par ostéotomie sagittale bi-maxillaire. La première ostéotomie sagittale mandibulaire de type Epker est réalisée. Celle-ci consiste en une avancée de la branche horizontale de la mandibule, fixée par des plaques titane ou des vis bi-corticales. La deuxième ostéotomie de Lefort I est réalisée avec une avancée du maxillaire supérieur, fixé par une plaque titane. Elle est réalisée dans un but esthétique et/ou fonctionnel, elle peut être associée à une distraction maxillaire médiane et paramédiane.
L’avancée bi-maxillaire présente un taux de réussite entre 75% et 100% et semble apporter les meilleurs résultats à long terme (42). Elle parait également plus efficace que l’orthèse d’avancée mandibulaire selon Garreau et al. (43). La littérature suggère que l’avancement maxillo-mandibulaire est plus efficace lorsque le maxillaire, la mandibule ou les deux sont avancés de 1 cm (44).
Cependant, ce mouvement de 1 cm doit être calculé sur des mesures céphalométriques, en prenant compte de l’esthétique faciale du patient et surtout, de son occlusion dentaire avant la chirurgie. L’orthodontie pré-chirurgicale et post-chirurgicale ne doit pas être sous-estimée dans une thérapeutique d’avancement maxillo-mandibulaire. Des extractions dentaires planifiées, suivies d’orthodontie pour déplacer l’articulé dentaire, sont souvent nécessaires pour permettre des mouvements squelettiques de 1 cm et maintenir une occlusion convenable.
Attention cependant à garder en surveillance le patient pour ne pas méconnaitre une récidive de SAHOS par hypotonie du muscle génio-glosse.
Trachéotomie
Il s’agit du premier traitement curatif du SAHOS, la trachéotomie et la trachéostomie vont permettre un passage de l’air en dérivation des voies aériennes supérieures, donc empêcher une apnée obstructive de se produire. Ces 2 chirurgies sont de nos jours devenues extrêmement rares et souvent limitées pour une prise en charge carcinologique ou en cas d’urgence lors d’un risque vital majeur, en absence de prise en charge alternative.
Les implants palatins
L’efficacité des implants palatins sur la diminution de l’IAH pour le traitement de l’apnée obstructive du sommeil a été testée dans des essais cliniques. (45) (46).
Cette procédure consiste en l’insertion d’implants en polyéthylène téréphtalate dans le palais mou. Ceci va provoquer un durcissement de la muqueuse du palais ce qui va diminuer le flottement palatin. (45)
Il se provoque de fait une réaction inflammatoire au niveau de la zone retro-palatine, conduisant à la formation d’une capsule fibreuse qui fournit un soutien structurel supplémentaire au palais et empêche l’effondrement des voies aériennes supérieures.
Les complications des implants palatins peuvent être le rejet de l’implant, une douleur continue sur la zone greffée, une perforation ou une nécrose du plancher nasal ou une nécrose de la muqueuse palatine.
Les traitements médicamenteux
Des thérapies médicamenteuses peuvent être indiquées sur des patients présentant des anomalies hormonales aggravant l’apnée du sommeil, telle que l’hypothyroïdie (prévalence du SAHOS dans cette population de 25% à 35%) ou l’acromégalie (prévalence du SAHOS dans cette population entre 45% et 80%) Mais à l’heure actuelle, les médicaments doivent être considérés comme des thérapies adjuvantes et ne doivent pas être administrées en 1ere intention. En effet il n’existe pas d’arsenal médicamenteux efficace pour les personnes souffrant d’apnée du sommeil (48).
Thérapie de remplacement de l’hormone thyroïdienne
Chez les patients présentant une hypothyroïdie certaine, l’hormone de substitution thyroïdienne peut, au fil du temps, supprimer totalement l’apnée du sommeil. En 1999, une étude fut réalisée étudiant les effets du remplacement de l’hormone thyroïdienne sur l’IAH chez les personnes atteintes de SAHOS. Sur deux patients, la thérapie de remplacement thyroïdien a diminué l’IAH jusqu’à des valeurs normales et sur un 3e patient, les auteurs ont observé une diminution supérieure à 50% de l’IAH. (49)
Acromégalie
Deux rapports ont examiné l’efficacité du traitement de l’acromégalie sur l’IAH. L’un est une série de 10 sujets utilisant de la bromocriptine, où le pourcentage de temps de sommeil passé en apnée/hypopnée a chuté de 75% (50). La deuxième étude a examiné l’octréotide, un analogue de la somatostatine, et a signalé une réduction significative de l’IAH de 39 à 19 événements/heure, (P <0,0001) (51).
Corticostéroïdes traitant la rhinite allergique
Un traitement court par corticoïdes locaux traitant une rhinite allergique aura pour effet principalement de diminuer l’intolérance à la pression positive continue ou de l’orthèse d’avancée mandibulaire résultant de la rhinite allergique. Malgré tout, ce traitement n’aura pas d’efficacité sur le traitement des évènements respiratoires anormaux (48).
Le Modafinil
Le Modafinil est un psychostimulant puissant qui contribue à améliorer la vigilance diurne des patients. Il peut être recommandé en cas de persistance de somnolence diurne excessive malgré un traitement par VPPC efficace, sans aucune autre cause de somnolence notable (mauvaise hygiène de sommeil, narcolepsie). En aucun cas ce médicament n’a d’effet sur l’IAH (52), et sa prescription ne doit pas être envisagée pour diminuer les risques de somnolence et d’accidents de la route associés à la somnolence diurne chez les patients atteints de SAHOS