Contrôle social et croisade morale dans l’Espagne de la posguerra 

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Le jeune délinquant, un cas à part : histoire d’une lente prise de conscience

La cristallisation d’un statut spécifique

Jusqu’au début du XIXe siècle, le traitement des mineurs déviants emprunt la double voie de l’hospice pour les orphelins, les oisifs et les vagabonds, et de la prison pour ceux qui ont enfreint les lois pénales. Les choses changent progressivement au cours du siècle, à mesure que l’on fait du jeune délinquant un individu à part, dont l’âge et le développement distinct font qu’il doit être traité différemment de l’adulte. Cette lente prise de conscience se traduit dans le domaine pénal par l’« excuse » de la minorité. Les codes pénaux successifs adoptés au XIXe siècle restreignent ainsi l’application aux mineurs de la loi commune38.
Selon les dispositions introduites par le code pénal de 1822, les mineurs âgés de moins de 7 ans sont déclarés juridiquement « irresponsables». S’ils ont entre 7 et 17 ans, il convient de voir s’ils ont œuvré avec « discernement et mali ce » et d’évaluer leurs capacités intellectuelles. Si un mineur ayant agi sans faire preuve de discernement n’est pas coupable, il est néanmoins dangereux. Soit il est remis à ses parents, qui ont le devoir « de le corriger et de prendre soin de lui », soit le juge l’envoie en maison de correction pendant le temps qui lui paraîtra nécessaire, mais jamais au-delà de la vingtième année. Les mineurs âgés de plus de 7 ans et dont le tribunal estime qu’ils ont agi avec discernement sont quant à eux envoyés en prison, comme les adultes39. Le code pénal de 1848 considère que jusqu’à l’âge de 9 ans, tous les mineurs sont i rresponsables. Ceux qui ont entre 9 et 15 ans sont acquittés, sauf si le juge estime qu’ils ont agi avec discernement. Dans ce cas, une peine discrétionnaire est appliquée, toujours inférieure de deux grades à la peine prévue pour un adulte. Les règles ne sont pas modifiées par les codes pénaux adoptés en 1850 et en 1870, sauf sur un point40. En 1870, on rétablit la mesure prescrivant qu’en cas d’irresponsabilité pénale, le mineur est soit remisà ses parents, soit interné dans un établissement de bienfaisance pour une période indéterminée (article 8). Notons que lorsque le mineur est arrêté par la police, il estplacé en détention préventive jusqu’à ce que son cas soit traité par le tribunal : il est alors en contact avec des détenus adultes . Enfin, on envoie en prison les enfants âgés de moins de 15 ans qui ont été déclarés irresponsables, ainsi que les jeunes âgés de plus de 15 ans42.

En prison, la séparation progressive des adultes etdes mineurs

Séparer les jeunes détenus des adultes : cette incantation des spécialistes et des philanthropes pénitentiaires s’avère difficile à mettre en œuvre. Deux solutions sont envisagées : la construction de quartiers distincts dans les prisons et l’édification d’établissements réservés aux jeunes.
La première tentative destinée à organiser la séparation des mineurs et des adultes au sein de la prison date de 1834. L’Ordonnance générale des prisons (Ordenanza general de presidios) s’inscrit dans la rupture libérale imposée à la régente Marie-Christine après la mort du souverain absolutiste Ferdinand VII, en septembre 183344. Ce texte prévoit l’aménagement, dans les prisons, de quartiers réservés aux mineurs, d’une école élémentaire et d’un atelier . Dans les faits, les mineurs côtoient toujours les adultes et ne reçoivent ni instruction élémentaire, ni instructio professionnelle46. L’exigence de séparation pose en effet de nombreux problèmes pratiques : les locaux ne permettent pas toujours d’imposer une séparation complète et permanente ; les lieux indispensables à la vie de l’établissement (cuisine, infirmerie, atelier) demeurent communs ; enfin, lorsque la place manque, il est tentant de récupérer le quartier pour mineurs pour y loger de nouveaux détenus.
L’échec patent des quartiers séparés et l’augmentation du nombre d’enfants détenus entraînent réformateurs et administrateurs à envisager une autre solution : l’ouverture de prisons réservées aux jeunes détenus. Dans le sillage de la Glorieuse révolution qui, en septembre 1868, a chassé Isabelle II du pouvoir et permis l’adoption de la première constitution démocrate espagnole, en juin 1869, un texte libéral est adopté en matière pénitentiaire . La Loi sur les prisons (Ley de prisiones) du 21 octobre 1869 autorise le ministère de l’Intérieur à établir une colonie pénitentiaire accueillant les délinquants âgés de moins de 21 ans (Base nº14). L’idée reste cependant à l’état de projet. Le décret royal du 11 août 1888, adopté sous la Restauration, est en recul par rapport à cette position libérale . Il indique que les peines infligées aux garçons â gés de moins de 20 ans seront purgées dans une prison pour adultes à Alcalá de Henares, près de Madrid. Il faut attendre 1901 pour que soit mis en place, dans la même ville, un centre pénitentiaire exclusivement destiné aux jeunes délinquants . Le retard de l’Espagne par rapport aux autres pays européens est alors flagrant : aux Pays-Bas, la prison pour garçons de Rotterdam a ouvert en 1833. En France, l’Administration pénitentiaire a décidé d’affecter aux jeunes la prison des Madelonnettes en 1833, puis celle de la Petite-Roquette en 1835. En Belgique, le premier établissement spécifiquement destiné aux unes,je le pénitencier de Saint-Hubert, est mis en place par Edouard Ducpétiaux au début des années 1840 .
La prison d’Alcalá de Henares ne répond pas aux besoins du pays tout entier : pendant tout le XIX e e siècle et jusqu’au début du XX siècle, des mineurs sont incarcérés avec des adultes. En 1904, ils sont près de 9 000 : 2 342 d’entre eux ont entre 9 et 14 ans, 6 625 entre 15 et 17 ans51. Cette situation alerte les réformateurs sociaux,qui comparent la prison une école du crime52. En 1907, José Soler y Labernia visite le quartierdes jeunes reclus de la prison Modèle, à Madrid. Cet espace donnant directement sur la cour des adultes, les jeunes âmes voient et entendent tout 53. Cette situation n’est pas spécifique à l’Espagne puisqu’en France par exemple, pendant tout le XIX e siècle, de nombreux textes normatifs rappellent la nécessité de tenir éloignés les jeunes des adultes, preuve que cette séparation est loin d’être effective . Si la situation appelle des solutions urgentes, qui est prêt à prendre à bras-le-corps le problème de la délinquance juvénile ?

Quand la misère devient une « question sociale »

Au début du XIX siècle, la croissance démographique et la dégradation de la conjoncture économique, auxquelles s’ajoutent des facteurs conjoncturels comme les crises agricoles successives, les épidémies et les guerres, entraîne une augmentation de la pauvreté. Les intellectuels catholiques eux-mêmes conviennent quela charité ne peut, seule, répondre à cette misère sociale55. L’industrialisation crée une main-d’œuvre excédentaire : ce phénomène touche des groupes sociaux économiquementautosuffisants, comme les artisans ou les petits propriétaires agricoles, qui vont grossir les rangs de la population paupérisée. Les pouvoirs publics s’inquiètent de cette menace grave et persistante, s’enracinant dans les faubourgs surpeuplés des grandes villes qui commencent à s’industrialiser. Les quelques initiatives prises pendant la première moitié du XIX siècle émanent soit de philanthropes, soit des mairies, immédiatement confrontées aux problèmes sociaux.
Dans le même temps, on commence à considérer que dans les sociétés industrielles, la pauvreté n’est pas un phénomène naturel mais le produit de l’ignorance et de l’exploitation. Pour les réformateurs sociaux – ces hygiénistes, ces médecins, ces intellectuels ou ces hommes politiques essentiellement issus des rangs de la bourgeoisie – la misère devient une « question sociale » qu’il faut résoudre en cherchant à supprimer les causes de l’indigence. Dans la seconde moitié du XIXe siècle, leur discours gagne du terrain. Les concepts « d’enfance coupable » et de « correction nécessaire » font place à ceux « d’enfance en danger » et de « protection de l’enfance ». On assiste ainsi à la naissance d’un mouvement de protection de l’enfance large et hétérogène, donnant lieu à un éventail de réponses sociales, législatives, institutionnelles, assistantielles et éducatives. Parallèlement, l’Europe voit se généraliser l’idéeselon laquelle l’État doit protéger et soutenir les nécessiteux. En Espagne, dans le dernier quart du siècle, les pouvoirs publics adoptent progressivement une attitude pragmatique consistant à encourager la bienfaisance des particuliers et la collaboration des secteurs public et privé. Mais ce processus y est plus tardif que dans d’autres pays car la bienfaisance reste longtemps une chasse gardée ecclésiastique. La bourgeoisie et les classes aisée estiment que ce n’est pas à l’État de prendre en charge la pauvreté mais aux groupes sociaux qui, au niveau local, partagent cette préoccupation. Ceux-ci ont intérêt à participer aux politiques d’assistance sociale car le contrôle social que celles-ci induisent renforce leur position sociale dominante.
Les deux premières maisons de correction espagnoles : des établissements isolés et au développement erratique

La Casa de corrección de Barcelone (1836-1880)

En 1836, la maison de correction de Barcelone est créée par la mairie de la cité comtale pour répondre au problème posé par l’augmentation ed la population marginale56. Son existence est marquée du sceau du provisoire jusqu’au milieu du XIXe siècle : l’établissement n’a pas de local propre et s’établi dans des couvents rendus disponibles par la politique de désamortissement, mais à l’architecture inadaptée . En 1836, la maison de correction accueille 144 personnes : il s’agit autant de mendiants que de personnes sans travail, d’enfants des rues, de petits délinquants et de prostituées. En 1848, l’institution change de local. Elle accueille alors entre 85 et 125 pensionnaires, dont 35 à 40% de mineurs.
Le régime intérieur de l’institution est fondé surun triptyque appelé à perdurer : le travail, l’instruction élémentaire et la pratique religieuse. On estime que le travail constitue à la fois un élément de moralisation (il donne de « bonnes » habitudes) et un gage de réinsertion. Il permet aussi à l’institution de se financer58. Les jeunes pensionnaires traitent les houppes de coton, les femmes adultes tricotent des chaussettes et des collants. Les garçons passent une heure par jour en classe ; on n e sait pas si les filles sont scolarisées. En revanche, tout le monde doit assister à la messe qu otidienne. La maison de correction manque de moyens, de façon chronique : il n’y a pas assez de vêtements et de lits pour toute la population internée. Les locaux ne permettent pas de répartir les pensionnaires en fonction de leur âge. Ces mauvaises conditions de v ie expliquent pourquoi un rapport municipal considère l’établissement comme un « dépôt de corruption ». L’institution ferme ses portes en 1854.
La maison de correction rouvre en 1856, mais elle est cette fois uniquement destinée à des enfants et à des adolescents ayant une conduite irr égulière. Dirigée par José María Canalejas de 1858 à 1863, l’institution acquiert un e solide réputation dans le domaine éducatif. Cet inspecteur des prisons s’inspire des succès des modèles étrangers pour faire de l’établissement « une école d’éducation morale tede réforme des mœurs » 59. L’emploi du temps, précis et complet, vise à éviter les temps morts (trois heures de classe, six à huit heures de travail dans les ateliers, suivies de jeux). Les pensionnaires sont des vagabonds, des mendiants ou des voleurs, abandonnés par leurs familles. Ils restent en moyenne trois ans entre les murs de la maison de correction, voire plus dans le cas des filles. La maison de correction compte 138 pensionnaires en 1859, 193 en 1862. A partir de 1880, elle n’accueille plus de jeunes filles. Ces dernières sont par exemple envoyées dans une institution créée par les religieuses françaises duBon Pasteur, l’Asile royal pour enfants abandonnées (Real Asilo de Niñas Desemparadas) . La seconde moitié du XIX siècle voit en effet se multiplier l’installation, sur le territoire espagnol, de congrégations féminines spécialisées dans le domaine éducatif : doratricesA (1845), Oblates (1864), Trinitaires (1885)…
L’institution barcelonaise décline lorsque Canalejas quitte le poste de directeur, en 1863. En 1872, il est question de démolir le bâtiment ; émerge alors le projet de convertir la maison de correction en colonie agricole, sur le modèle de ce qui avait été fait à Mettray. Mais le coût d’une telle entreprise apparaît vite t rop élevé. La maison de correction est donc transférée dans l’ancien couvent des Minimes,puis dans une ancienne fonderie située sur la commune de Gracia. Dans les années 1880, l’établissement ne remplit clairement plus les missions qui lui ont été assignées. C’estla raison pour laquelle l’Association générale pour la réforme pénitentiaire(Asociación general para la reforma penitenciaria) , laquelle appartient l’infatigable réformiste Pedro Armengol y Cornet, propose l’accord suivant. La mairie de Barcelone pourrait déléguer ompétences administratives et budgétaires à l’association pour que cette dernière gère l’institution. Les autorités municipales acceptent. L’association prend donc contact avec les religieux de la congrégation française Saint-Pierre-ès-Liens et transforme l’institution en « école de réforme ».
Portrait de Pedro Armengol y Cornet, présenté paral congrégation San Pedro Ad Víncula comme l’artisan de son installation en Espagne (sans date)61.
La Cárcel de jóvenes ou Casa de corrección de Madrid (1840-1849)
En 1839 est créée, à Madrid, une Société pour l’amélioration du système pénitentiaire, pénal et correctionnel espagnol (Sociedad para la mejora del sistema carcelario, penal y correccional de España). Ses membres visitent les prisons et aident les prisonniers libérés . Ils sont influencés par les idées de Ramón de laSagra : né en 1789 à la Corogne, ce botaniste et géographe a voyagé aux États-Unis et en Europe afin de mieux connaître les systèmes pénitentiaires et de bienfaisance locaux . Le 16 février 1840, la société philanthropique parvient à faire ouvrir une prison correctionnelle (cárcel correccional) pour jeunes délinquants. La rapidité et l’efficacité des démarches sont probablement dues au fait que le maire de Madrid, Salustiano de Olóza ga, est alors le vice-président de la société .
A l’intérieur de cette prison correctionnelle, un religieux des Escuelas Pías délivre des cours de lecture, d’écriture et d’arithmétique . La formation professionnelle est dispensée dans un atelier, où la cordonnerie est bientôt remp lacée par le rempaillage de chaises, jugé plus économique. Le but du séjour est en effet d’inculquer aux jeunes délinquants les rudiments de la moralité et de la religion, ainsi qu’une instruction élémentaire et des habitudes de travail. Les pensionnaires ignorent généralement tout de la religion et de la moralité et sont souvent analphabètes. Ils se disent « sans famille » : en 1840, seuls onze pensionnaires sur 70 ont encore leur père et leur mère66. Les peines courtes ne permettent pas de doter les pensionnaires d’un minimum de formation, selon Ramón de la Sagra. On a là les prémices de l’une des caractéristiques fondamentales des modèles ultérieurs : le régime de « sentence indéterminée », selon lequel e l mineur doit être interné aussi longtemps que le requiert le traitement éducatif.
En 1843, la société philanthropique est dissoute, ourp des raisons liées au contexte politique (action des militaires Narváez, O’Donnell, Prim et Milans del Bosch, régence d’Espartero). La prison correctionnelle connaît une période de déclin, qui se solde par sa disparition autour de 1850, pense Félix Santolaria.
Aucune autre expérience n’est tentée à Madrid jusqu’en 1861, date à laquelle le marquis de la Vega de Armijo essaie de créer une Maison d’éducation correctionnelle pour jeunes gens (Casa de educación correccional de jóvenes). Ce philanthrope souhaite éviter que des jeunes turbulents, insoumis à l’autorité parentale, ne commencent à gravir « l’échelle du crime »67. L’État accepte de mettre à disposition un bâtimen t situé dans la rue de Tolède, à Madrid, et de financer les travaux, dont le montant s’élève à 63 151,10 réaux. Le marquis de la Vega de Armijo établit le régime intérieur dufutur établissement : les pensionnaires envoyés par leurs parents au titre de la correctionpaternelle seront reclus dans des cellules individuelles et n’auront aucun contact entre eux (système dit de Philadelphie). A cause du manque de place, les orphelins et les jeunes délinquants vivront en groupe durant la journée. L’isolement en cellule est prévu pour la nuit (modèle auburnien). Mais une fois les travaux terminés et l’établissement aménagé, le marquis de la Vega de Armijo apprend que le règlement n’a pas été validé par le ministère del’Intérieur : la « maison d’éducation correctionnelle » est transformée en caserne de laGarde civile.
Au XIXe siècle en Espagne, ce sont donc les prisons et les institutions de bienfaisance comme les maisons de charité, les hospices et les asiles, qui remplissent la fonction de centres de correction. 35 institutions de ce type existent à Barcelone à fin du siècle, 38 à Madrid. Jusqu’aux années 1880, il n’y a pas d’établissement spécifiquement destiné à la rééducation des jeunes garçons, hormis quelques expériences isolées et au développement erratique (maisons de correction de Madrid et de Barcelone). Il n’en va pas de même pour les filles : les initiatives privées, à caractère religieux, se sont multipliées dans toute la péninsule. En définitive, l’Espagne accuse un retard important par rapport à d’autres pays européens comme la France, la Belgique et les Pays-Bas. Les premières maisons de correction spécifiquement destinées aux jeunes délinquants y ont aussi été créées dans les années 1830 et 1840, mais elles se sont multipliéesaprès 1848.

Table des matières

Introduction
Première partie : héritages et structures
Chapitre 1. Genèse et histoire des reformatorios du XIXe siècle à la Guerre civile 
I. La création de quelques institutions isolées : l’ère des maisons de correction (casas de corrección), début du XIXe siècle – années 1870
1. Le jeune délinquant, un cas à part : histoire d’une lente prise de conscience
2. Quand la misère devient une « question sociale »
3. Les deux premières maisons de correction espagnoles : des établissements isolés et au développement erratique
II. L’époque des « écoles de réforme » : Santa Rita et ses émules (années 1880 – début du XXe siècle)
1. Naissance et organisation d’un établissement pionnier
2. Le secteur privé en pointe
3. Approcher la réalité du fonctionnement de l’institution
4. Hors de Madrid, le cas de l’Asilo Durán de Barcelone
III. La création des tribunaux pour enfants et des maisons de redressement (années 1910)
1. L’adoption de la loi Montero Ríos (25/11/1918)
2. Un texte fondateur
3. La lente conquête du territoire par les tribunaux pour enfants et leurs institutions auxiliaires
IV. L’évolution de la législation sous la Dictature de Primo de Rivera et la Seconde République (1923-1936)
1. Une intense activité législative sous la Dictature de Primo de Rivera (1923-1930)
2. Soutiens et détracteurs du système existant
3. La parenthèse républicaine : des projets ambitieux, des réalisations limitées (1931-1936) Retard espagnol, carences de l’État
Chapitre 2. Quand la dictature franquiste légifère : tout changer pour que rien ne change
I. Deux camps, deux modèles pour l’enfance marginale (1936-1939)
1. Du côté républicain, la révolution en marche ?
2. Du côté franquiste : les prémisses de la construction de la « Nouvelle Espagne »
II. Le cadre normatif : « Nouvel État », retour à l’ancien
1. Détruire, pièce par pièce, l’héritage républicain
2. L’organisation générale du dispositif institutionnel
3. Organisation et compétences des tribunaux pour mineurs
4. Les auxiliaires des tribunaux : délégués et institutions éducatives
III. Un dispositif franquiste ?
1. Des juridictions d’exception pour protéger et rééduquer la jeunesse
2. Quand le temps long l’emporte L’exception franquiste ?
Chapitre 3. Panorama de l’édifice institutionnel
I. Entre hiérarchie et omniprésence du secteur privé (1939 – milieu des années 1950)
1. Un système hiérarchisé : Conseil supérieur de protection des mineurs, tribunaux et maisons de redressement
2. La domination sans partage du secteur privé
3. L’archipel des institutions éducatives
II. Un système sclérosé, archaïque et replié sur lui-même (fin des années 1950 -1975)
1. Un scandale révèle les maux des maisons de redressement : « l’affaire del Castillo »
2. Entre ouverture et immobilisme : des réformes limitées (1965-1975)
Une longue autarcie
Deuxième partie : le fonctionnement des reformatorios
Chapitre 4. Enfreindre la norme : la déviance juvénile en Espagne de 1939 à 1975
I. Une vue d’ensemble : sources et méthode de l’analyse quantitative
1. Description du corpus
2. Classification des différents types de motifs d’internement
II. L’omniprésence du vol
1. L’évolution de la place du vol dans la délinquance juvénile (1939-1975)
2. Une prise en charge essentiellement judiciaire et policière
3. Tracer les contours de la délinquance réelle
4. Misère et infra-délinquance juvénile (années 1940-1950)
5. Quand l’Espagne entre dans l’ère du développement économique (années 1960 et 1970)
III. Recourir à la puissance publique pour résoudre un conflit privé : la prise en
charge de l’indiscipline juvénile
1. La correction paternelle : dispositions juridiques
2. Corriger les jeunes dits « difficiles »
3. Qui envoie les jeunes indisciplinés en maison de redressement ?
4. Les réalités multiformes de l’indiscipline juvénile
IV. « Combattre les perversions morales qui les ont poussées au mal » : les spécificités de la prise en charge des filles
1. Les spécificités de la procédure de prise en charge des filles
2. Une approche sexuée de la déviance juvénile
3. Voleuses avant d’être perverses, mais toujours contrôlées
Chapitre 5. Qui sont-ils ? L’origine sociale des pensionnaires
I. « De jeunes vauriens sans école » ? Le profil culturel et religieux des pensionnaires
1. Le rapport aux sacrements religieux
2. Le niveau scolaire des pensionnaires
II. L’origine géographique des mineurs et de leurs familles
1. Les aires de recrutement des maisons de redressement
2. Immigration et déviance juvénile
III. La vie fragile
1. Des quartiers centraux vers la périphérie
2. Habitat et conditions de vie : ville informelle, pauvreté et délinquance réelles
IV. Structure familiale et niveau socio-économique
1. Les structures familiales dominantes
2. Le niveau socio-économique des familles
3. Le profil sociologique des pensionnaires : constantes, récurrences et anomalies
Chapitre 6. Entre les murs : le fonctionnement des maisons de redressement
I. Derrière les murs : l’organisation des institutions
1. L’enfermement : les réalités de la procédure d’internement
2. La population des trois maisons de redressement : effectifs et répartition
3. L’organisation du personnel de la Colonia San Vicente Ferrer
II. « Modeler les esprits, forger les âmes » : les principes et les modalités de la rééducation
1. Le travail, le premier pôle de la rééducation
2. La religion, le deuxième pôle de la rééducation
3. L’enseignement et les loisirs : la portion congrue
III. Redresser les corps
1. Le corps encadré
2. Le corps discipliné
3. Le corps réprouvé : la sexualité
IV. Des jeunes effectivement « redressés » ?
1. La réception du traitement éducatif
2. Des dysfonctionnements importants, dus à un manque de moyens chronique
3. Les dysfonctionnements sont-ils structurels ?
Troisième partie : reformatorios et idéologie
Chapitre 7. Les maisons de redressement, un outil de répression politique ?
I. La prise en charge de la déviance juvénile, un prolongement de la guerre civile par d’autres moyens ?
1. Une répression politique de la jeunesse ?
2. La part des enfants de « rouges » parmi les pensionnaires de maison de redressement
3. Les raisons non politiques de la présence de pensionnaires issus de familles « rouges »
4. Entre vengeance familiale et répression politique : les deux exceptions qui confirment la règle
II. Un « Nouvel État » mais des logiques anciennes ? Les maisons de redressement, un outil de contrôle social plutôt que de répression politique
1. Qu’est-ce-qu’un enfant de « rouge » ?
2. Quelle réalité familiale, sociale et politique derrière le non-dit et le non-signalé ?
3. Les maisons de redressement, un formidable outil de contrôle social
III. Les maisons de redressement, un maillon de l’appareil répressif et de contrôle social de la dictature
1. Les pensionnaires des maisons de redressement sont-ils des « enfants perdus du franquisme » ?
2. Quel est le degré d’adhésion des acteurs de la prise en charge à l’idéologie du « Nouvel État » ?
Chapitre 8. Les reformatorios pendant les « années de la faim »
I. Se nourrir et se soigner
1. « Les années de la faim »
2. Nourrir les pensionnaires des maisons de redressement
3. Des organismes affaiblis et vulnérables
II. La gestion sociale des conséquences de la pénurie
1. Des organismes divers et concurrents
2. La fonction socio-économique des maisons de redressement
Chapitre 9. Contrôle social et croisade morale dans l’Espagne de la posguerra 
I. Redresser les jeunes déviants, surveiller leurs familles
1. Former des femmes pures : « de la maison à l’église, et de l’église à la maison »
2. « Le sexe et l’effroi »
3. La question du mariage
II. Les croisés de la morale
1. Un réseau de surveillance étroite
2. « L’Eglise et l’État vont entamer la reconquête. Et vous, que ferez-vous ? »
3. Une coalition entre plusieurs entrepreneurs de morale
III. Une modification effective des processus de régulation sociale ?
1. Rapport de forces, rapport de classes
2. Des signes de changement : une diffusion notable des pratiques et des rites catholiques
3. Conflits, résistances et quant-à-soi
Une certaine gestion du temps
Conclusion
Annexes

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