CONTROLE DE QUALITE INTERNE ET EVALUATION EXTERNE DE LA QUALITE AU LABORATOIRE DE BIOCHIMIE
Guide de bonne exécution des analyses (GBEA)
Présentation du GBEA Le GBEA est né de la volonté de l’administration et de la profession d’harmoniser la pratique de la biologie et d’améliorer la qualité dans les laboratoires (publics et privés) en se référant à un texte officiel, opposable à chaque laboratoire. Le référentiel actuellement en vigueur est fixé par arrêté du 26 avril 2002 [3]. Le GBEA est défini comme étant un instrument au service de la qualité dont la mise en application permet de maîtriser la plupart des évènements pré, per et post-analytiques. Le GBEA impose la mise en place d’un SAQ, prévoit la mise en œuvre de CQI, la participation au CNQ et recommande aux laboratoires de participer à d’autres programmes d’EEQ. Par ailleurs, il prévoit des dispositions particulières pour certaines analyses telles les analyses en immuno-hematologie-érythrocytaire (permettant notamment de déterminer les groupes sanguins). Le respect du GBEA implique de la part du biologiste : – La formalisation par écrit de l’organisation et du fonctionnement du laboratoire ; – La rédaction de procédures opératoires (ce que l’on fait) ; – La gestion du système documentaire, en formant et en informant le personnel ; – L’assurance de la mise en œuvre effective et correcte de ce qui est écrit dans le système documentaire (faire ce qui est écrit) ; – L’archivage des documents prévus par les textes législatifs et réglementaires et ceux relatifs à la qualité (apporter la preuve de ce qui a été fait)
Mise en œuvre du GBEA par les LABM
Le GBEA est un référentiel officiel et opposable aux LABM. Sa mise en œuvre est décrite ci-dessous ainsi qu’un programme destiné à accompagner les laboratoires dans leur démarche.
Démarche interne des LABM
Des publications et des communications ayant trait à la démarche qualité en biologie mettent l’accent sur l’assurance qualité et la mise en place d’un SAQ ainsi que sur l’implication du personnel et de la direction comme un facteur clé de réussite de la mise en œuvre du GBEA . Le GBEA bouscule les habitudes des biologistes quant à leur perception de la qualité. En effet, la qualité analytique ne suffit pas à répondre aux exigences des « clients » (médecins prescripteurs et patients) et l’introduction d’une politique qualité est indispensable. Par ailleurs, le respect de ce référentiel implique le passage de la tradition orale à une communication écrite et à la traçabilité des activités. Ce changement de « culture » ne doit donc pas être perçu par le personnel comme un moyen de surveillance et de sanction [30, 33]. Selon un laboratoire, la gestion et la maitrise du système documentaire nécessitent un effort important. Par ailleurs, la formation du personnel (biologistes inclus) est indispensable afin de partager une culture commune [30, 33]. Enfin, Masseyeff et coll. [14] estiment que le GBEA peut être un levier d’amélioration des performances. Ils proposent comme perspective « d’aller audelà des obligations réglementaires et de faire de la mise sous qualité un levier pour améliorer non seulement la performance analytique(…) mais la performance globale du laboratoire », grâce aux audits et au suivi d’indicateurs de résultats opérationnels.
Qualité des analyses dans les LABM
Le GBEA impose au biologiste d’organiser des CQI et de participer au CNQ. Par ailleurs, il recommande que le LABM participe à des programmes d’EEQ organisé par des sociétés scientifiques, des groupements de biologistes ou tout autre organisme présentant les garanties nécessaires. Les Contrôle de Qualité Interne (CQI) sont indispensables pour déceler les anomalies et les erreurs de mesure et y remédier immédiatement. Ils sont organisés en interne et comprennent notamment l’analyse d’échantillons de contrôle dans les mêmes conditions que les échantillons « patients », en tenant compte des instructions du fabricant. Le GBEA rappelle que ces échantillons de contrôle ne se substituent pas aux échantillons de calibrage des appareils et réciproquement.
Contrôle du respect du GBEA
Le contrôle de la conformité des LABM au GBEA est prévu par les articles L.6213-1 et suivants (et D.6213-1 et suivants) du CSP. Ces articles désignent notamment les corps d’inspection compétents, les modalités d’inspection et les dispositions pénales (uniquement dans la partie législative). Corps d’inspection Selon les dispositions de l’article L.6213-1 du CSP, le contrôle des LABM est assuré par les PHISP, les Médecins Inspecteurs de Santé Publique (MISP) et par l’IGAS. Contrairement aux PHISP, les MISP ne bénéficient pas d’enseignements théoriques et pratiques sur les laboratoires dans le cadre de leur formation initiale. 18 Inspection des LABM Deux types d’inspections sont à distinguer : les inspections de routine et les inspections « signalement » (enquêtes CNQ, plaintes, etc.). Une procédure nationale explicite la méthodologie d’inspection et inclut un guide d’inspection des laboratoires [35]. Selon le rapport de l’IGAS, un LABM est inspecté en moyenne une fois tous les 20 ans et le bilan national des inspections de routine montre qu’environ 67% des LABM appliquent le GBEA à des degrés plus ou moins avancés
Normes ISO
Contrairement au GBEA, les normes ISO aux LABM (ISO 17025 et ISO 15189) sont de portée internationale². Elles sont élaborées par ISO puis adoptées au niveau communautaire et international [19, 7].
Présentation des normes ISO
La norme ISO 17025, conçue pour l’accréditation des laboratoires d’étalonnage et d’essais (incluant les LABM), contient d’une part des exigences qualité et, d’autre part, met l’accent sur les compétences techniques. Ces exigences concernent entre autres, le système de Management de la Qualité (SMQ), la responsabilité de la direction (notamment la définition de la politique qualité du laboratoire), l’analyse et l’amélioration de l’activité (avec le traitement des réclamations, la réalisation d’audits interne et la mise en œuvre d’actions correctives et préventives). Cette norme ne fait pas référence à la biologie, au patient et au médecin prescripteur [27,31]. La norme ISO 15189, spécifique aux LABM est facilement appréhendable par les biologistes et couvre la totalité de leur activité. Elle détaille notamment les exigences techniques concernant la compétence du personnel, les locaux et la 19 qualification des matériaux. Par ailleurs, ces exigences prennent en compte l’ensemble de l’analyse y compris les phases pré et post-analytiques. Elles reprennent celles de la norme ISO 17025 auxquelles s’ajoutent notamment la communication interne, la mesure de la satisfaction des clients, la surveillance de tous les processus et l’amélioration en continue de l’efficacité du SMQ. Cf annexe 2 [28,8, 31].
Mise en œuvre des normes ISO par les LABM
En France, la démarche d’accréditation est motivée notamment par le souci de prouver la mise en place d’un système qualité et déterminer les risques et les coûts de la « non qualité ». Les LABM font appel à une expertise (consultants, ingénieurs qualité, confrères, etc.) afin de mettre en place la préparation de l’accréditation. L’ensemble du personnel est totalement impliqué dans cette démarche et bénéficie de formations internes et externes. Les LABM investissent en matériel (informatique, automates, etc.) afin d’assurer la traçabilité et la métrologie (c’est à dire l’étalonnage et la vérification des dispositifs de surveillance et de mesure tel que le suivi des températures des réfrigérateurs) [9,23]. Les LABM constatent qu’entre la prise de décision et leur accréditation, leur charge de travail augmente d’environ 30% sur 2 ans. Toutefois, ils en soulignent les bénéfices en termes d’amélioration des conditions de travail (gestion des dossiers, relation avec le personnel et leur implication dans la qualité). Enfin, ils estiment qu’il est indispensable de faire vivre le système par la planification d’audits internes. L’accréditation des laboratoires hors de France est inégale selon les pays. En Italie, elle est obligatoire et de le délai de mise en conformité des laboratoires est de 3 ans [15]. Aux Pays-Bas, elle a commencée dans les années 90, et entre 20 1994 et 2001, environ 100 laboratoires ont été accrédités [39]. En revanche, en Chine, un état des lieux conclut à la nécessité de mise en place d’un système en deux étapes : en premier lieu, des règles d’application obligatoire édictées par le ministère de la santé pour le fonctionnement des laboratoires, puis un système d’accréditation pour les laboratoires volontaires [38]. En Suède, les laboratoires estiment que l’accréditation leur permet de structurer leur activité et d’améliorer leur performance. Ainsi, une centaine de laboratoires est accrédité selon des normes généralisées dont la totalité du secteur libéral [6,17]. La principale difficulté selon eux, réside dans la pérennisation de leur démarche qualité. En Allemagne, la maîtrise de la phase pré-analytique, exigée par la norme ISO 15189, pose des problèmes dans le secteur privé où, contrairement à la France, les prélèvements sont effectués par le médecin ou l’infirmier libéral et ne dépendent pas du laboratoire [19, 42].
Evaluation du respect des normes ISO par les LABM
L’accréditation d’un LABM selon la norme ISO 15189 ou ISO 17025 est la reconnaissance formelle de ses compétences techniques et de son SMQ. En France, l’organisme chargé de l’accréditation des LABM est le COFRAC, créé par les pouvoirs publics en 1994 [44, 45a-b]. L’accréditation s’effectue sur la base d’une démarche volontaire du laboratoire auprès du COFRAC. Le LABM élabore un dossier de demande d’accréditation précisant notamment la (les) portée(s) d’accréditation souhaitée(s). S’en suit la signature d’une convention d’accréditation stipulant les engagements mutuels de l’organisme et du laboratoire candidat ainsi que le projet de portée d’accréditation accepté par le COFRAC. La visite d’évaluation, en accord avec le laboratoire, s’effectue par les auditeurs (qualiticiens et experts techniques). 21 Le LABM, accrédité pour 5 ans (renouvelables), est soumis à des visites de surveillance tous les 18 mois et à une réévaluation quinquennale dont les résultats conditionnent le maintien, la suspension ou le retrait de son accréditation. A ce jour, 108 LABM sont accrédités selon la norme ISO [44]. Ce chiffre bien que faible comparé au nombre de LABM en France (environ 4500) a progressé depuis quelques années. En effet, selon une enquête publiée en 2001, seuls 8 LABM étaient accrédités ISO en 1998 -1999 [6]. L’accréditation ISO des LABM est désormais prise en compte par le ministère chargé de la santé qui, pour la première fois, a cosigné le 22 décembre 2006, la convention cadre COFRAC-Etat, reconnaissant ainsi le COFRAC comme organisme national d’accréditation. Cette initiative était préconisée par L’IGAS, qui précisait qu’une telle convention devrait permettre au COFRAC d’assurer, à l’horizon de 2010, l’accréditation ISO 15189 des laboratoires [19].
INTRODUCTION |