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Introduction
La modélisation numérique constitue actuellement un outil indispensable pour concevoir des systèmes complexes. Cette démarche scientifique consiste à représenter des phénomènes physiques réels par des équations mathématiques. Ces équations sont ensuite résolues pas à pas, dans le temps et l’espace, par des moyens de calcul informatique. Les résultats obtenus sont ensuite confrontés avec des mesures effectuées sur des expériences mettant en jeu les phénomènes modélisés. Les paramètres physiques intervenant dans le modèle numérique peuvent alors être modifiés afin de faire correspondre les données simulées à celles obtenues par expérimentation. Une fois que cette étape de calibration est réalisée, le modèle est complètement exploitable pour prédire le comportement du système étudié. Le processus de modélisation numérique, qui est entaché de sources d’erreurs qui peuvent s’additionner entre le phénomène physique réel et la solution obtenue par simulation, est résumé sur le graphique suivant :
Figure : Processus de modélisation numérique. L’erreur de mesure est liée à l’expérimentation qui ne permet parfois que d’observer une partie de la réalité du phénomène physique. L’erreur de modélisation peut être réduite par calibration. L’erreur de discrétisation est liée aux méthodes numériques nécessaires à la résolution informatique des équations.
Dans le cadre d’une démarche de conception, la modélisation numérique présente plusieurs avantages. Le premier concerne la réduction des coûts de conception. En effet, la conception d’un système implique la réalisation de prototypes afin de mener des essais expérimentaux. Selon les matériaux et les procédés de fabrication mis en jeux, le prototype peut être très coûteux. Les expériences de tests peuvent également être complexes à mettre en place. Il s’agit là d’un autre avantage de la simulation : pouvoir réaliser des expériences difficilement praticables en réalité. Enfin le modèle numérique constitue également un bilan du savoir disponible sur un phénomène physique particulier. Lorsque la capacité de prédiction de la simulation est attestée sur un système particulier, le modèle peut être réutilisé pour d’autres conceptions impliquant le même type de physique. Le principal désavantage des simulations est le temps de calcul. L’accroissement exponentiel de la puissance des moyens informatiques au cours des dernières décennies a laissé penser que le coût de calcul des simulations diminuerait en termes de temps. Au contraire, les simulations deviennent de plus en plus complexes (avec des modèles multi-physiques ou des domaines plus étendus) et exploitent totalement les ressources informatiques disponibles. Par exemple, la résolution des équations de Maxwell par différences finies dans le domaine temporel peut nécessiter une journée complète de calcul selon la taille du domaine simulé. De nombreux appels à ce type de simulation ne peut être viable à l’échelle de projets industriels de conception. Pour pallier ce problème, une des solutions actuelles consiste à remplacer le modèle numérique par un modèle de substitution, appelé également métamodèle. Ces modèles de modèles sont capables de prédire la réponse de la simulation instantanément sur de nouvelles expériences
à partir de quelques évaluations préalables. Leur utilisation permet de réduire considérablement l’impact du temps du calcul de la conception par simulation coûteuse, et ainsi de rendre abordables les algorithmes d’optimisation numérique.
Dans le cadre de cette thèse, se déroulant au sein du département d’optique et de photonique du CEA – LETI, les activités de recherche ciblent des marchés industriels majeurs tels que l’imagerie, l’éclairage, la transmission de données et les capteurs environnementaux. La conception de composants innovants dans ces secteurs d’activités est liée à l’intégration de fonctionnalité optique sur des puces électroniques. Dans ce contexte de recherche technologique, de nombreux phénomènes physiques sont mis en jeux au travers des simulations numériques coûteuses. Ces modèles doivent être exploités afin d’analyser le comportement du système à concevoir, d’optimiser ses performances et de garantir son fonctionnement une fois le composant fabriqué. Le métamodèle permet de définir des stratégies d’évaluations parcimonieuses des simulations applicables à ces différentes problématiques. Pour l’optimisation, la spécificité du problème (le nombre d’objectif, la présence ou non de contrainte, etc.) peut nécessiter l’utilisation de stratégies adaptées.
Trois cas d’études représentatifs de la grande diversité des applications traitées au sein du département ont été identifiés afin de cerner la problématique de ce travail et de guider les développements méthodologiques effectués. L’analyse de ces problèmes de conception a permis dans un premier temps d’identifier la métamodélisation multifidélité comme un moyen permettant de réduire le coût de l’exploitation des simulations. Cette méthodologie correspond au rassemblement de l’information fournie par deux modèles numériques de fidélité différente sur le même dispositif. L’intérêt est de faire appel le plus possible au modèle le moins coûteux des deux (également le moins précis) tout en garantissant la précision de la prédiction globale avec un nombre réduit d’évaluations du modèle haute fidélité. Suite à ces travaux, un nouveau métamodèle utilisant les fonctions à base radiale (RBF) dans un cadre multifidélité est proposé. La deuxième problématique extraite des cas d’application est la prise en compte des incertitudes de fabrication dans la conception de dispositifs photoniques. L’optimisation des performances de composants en tenant compte des écarts observés entre la géométrie désirée et la géométrie obtenue en fabrication a nécessité le développement d’une méthode spécifique.
Le travail de cette thèse, inscrit dans une démarche de recherche reproductible [1], a également été capitalisé dans une boîte à outil logicielle, décrite en annexe, permettant notamment de répéter les résultats obtenus et présentés dans la suite de ce mémoire. Le plan du manuscrit est résumé sous forme graphique sur la figure ci-dessous, avant d’être précisé dans les paragraphes suivant.
Le premier chapitre du manuscrit expose le contexte de ce travail. Les principes physiques, les composants de base et les méthodes de fabrication de l’optique intégrée sont d’abord introduits. La diversité des problèmes rencontrés est ensuite spécifiée avec la présentation des trois cas représentatifs. La microsource infrarouge est le premier composant, il est utilisé dans un capteur de gaz bas coût. Son comportement est modélisé par un couplage thermoélectrique. Le deuxième dispositif concerne également la détection de gaz mais adapté à des concentrations plus faibles. Ce dispositif est une cellule photoacoustique pour laquelle nous disposons de deux modélisations, l’une reposant sur la mécanique des fluides et l’autre sur une analyse simplifiée de type acoustique. Enfin le dernier cas est celui d’un coupleur directionnel adiabatique, un composant réalisant une fonction fréquemment utilisée dans les systèmes d’optique intégrée. Son modèle est basé sur une résolution de l’équation de propagation d’Helmholtz, obtenue à partir des équations de Maxwell régissant les phénomènes optiques.
Le second chapitre se concentre sur les modèles de substitution. La méthodologie générale concernant leur construction est présentée puis deux méthodes particulières sont détaillées, à savoir le krigeage et les fonctions à base radiale. Un métamodèle construit à partir de deux modélisations de fidélité différentes pour une même conception est également exposé (le co-krigeage). Une étude comparative sur la précision des métamodèles pour chaque cas d’application est ensuite menée. Les différentes possibilités de réglage de chaque méthode sont envisagées pour déterminer le meilleur choix possible de substitution des différents modèles numériques.
Le troisième chapitre traite des stratégies adaptatives. Ces procédures itératives permettent d’améliorer la prédiction du métamodèle sur des zones particulières de l’espace de variation des paramètres de conception. Quatre types de stratégies sont présentés : la réduction de l’erreur globale de prédiction, l’optimisation à un objectif avec ou sans contraintes, l’optimisation multi-objectif et l’optimisation robuste. Ces différentes problématiques sont bien adaptées à la conception par simulation des composants constituant nos cas d’études.
Le quatrième et dernier chapitre, qui synthétise les apports principaux de ce travail, décrit la mise en place de différentes méthodes permettant d’optimiser la conception des trois dispositifs d’étude identifiés dans le premier chapitre. Pour la microsource infrarouge, les géométries résultantes de l’optimisation sous contraintes de trois objectifs différents sont comparées. En ce qui concerne la cellule photoacoustique, un métamodèle multifidélité basé sur les fonctions à base radiale est proposé. Ses performances sont confrontées à celles du métamodèle multifidélité de référence, le co-krigeage, avant de réaliser l’optimisation du composant. L’optimisation robuste du coupleur vis-à-vis des incertitudes de fabrication liées à sa géométrie est ensuite étudiée. La stratégie identifiée au troisième chapitre pour ce type de problème ne permet pas d’obtenir un résultat satisfaisant. Suite à la réduction de dimension du problème par discrétisation d’une variable, deux axes de développement sont alors envisagés. Le premier repose sur la construction d’un métamodèle adapté aux problèmes à variables mixtes. Le deuxième concerne la mise en place d’une méthode multi-objectif pour garantir l’obtention d’un minimum robuste.
Ce travail a donné lieu aux publications suivantes :
• C. Durantin, J. Rouxel, J. A Désidéri, A. Glière. Multifidelity surrogate modeling based on radial basis functions. Structural and Multidisciplinary Optimization, 2017, pp 1-15.
• K. Hassan, C. Durantin, V. Hugues, B. Szelag, A. Glière. Robust silicon-on-insulator adiabatic splitter optimized by metamodeling. Applied Optics, 2017, 56(8), pp 2047-2052.
• E. Lesmanne, R. Espiau de Lamaestre, S. Boutami, C. Durantin, L. Dussopt, G. Badano. Multispectral Detection with Metal-Dielectric Filters: An Investigation in Several Wavelength Bands with Temporal Coupled-Mode Theory, Journal of Electronic Materials, 2016, 45(9), pp 4603-4606.
• C. Durantin, J. Marzat, M. Balesdent. Analysis of multi-objective Kriging-based methods for constrained global optimization, Computational Optimization and Applications, April 2016, 63(3), pp 903–926.
et aux communications orales suivantes (orateur souligné) :
• C. Durantin, K. Hassan, A. Glière. Robust optimization of adiabatic power splitter. WCSMO 12, Braunschweig, Germany, 5-9 June 2017.
• C. Durantin, J. Rouxel, J.-A. Désidéri, A. Glière. Optimization of a photoacoustic gas sensor using multifidelity RBF metamodeling, MASCOTNUM 2017, Paris, France, 22–24 Mars 2017.
• C. Durantin, J. Rouxel, J.-A. Désidéri, A. Glière. Optimization of a photoacoustic gas sensor using multifidelity RBF metamodeling, ECCOMAS Congress 2016, Crete Island, Greece, 5–10 June 2016.
• E. Lesmanne, R. Espiau de Lamaestre, S. Boutami, C. Durantin, L. Dussopt, G. Badano. Infrared multispectral detection with metal-dielectric filters: a model base on the temporal coupled mode theory, OPTRO 2016, Paris, France, 2-4February 2016.
• J. Favreau, C. Durantin, J-M. Fédéli, S. Boutami, G-H. Duan. Suspended mid-infrared fiber-to-chip grating couplers for SiGe waveguides, Optical Interconects XVI, San Francisco, United States, 13-17 February 2016.
Table des matières
Remerciements
Table des Matières
Introduction
I. Cas d’application
A. La Photonique
1. Historique
2. Guidage optique
3. Composant d’optique intégrée et fabrication
B. Contexte de l’étude
1. Du phénomène physique au modèle numérique
2. Définition de l’optimisation numérique en conception
3. Diversité des problèmes rencontrés
C. Cas d’étude 1 : la microsource infrarouge
1. Fonctionnement du capteur optique
2. Description de la source
3. Modélisation de la source
4. Problématique de conception / optimisation
D. Cas d’étude 2 : la cellule photoacoustique.
1. Principe de fonctionnement du capteur
2. Description de la cellule photoacoustique étudiée
3. Modélisation du comportement acoustique
4. Problématique de conception / optimisation
E. Cas d’étude 3 : le coupleur directionnel adiabatique
1. Description du composant
2. Modèle numérique
3. Problématique d’optimisation
F. Motivations
II. Modèles de substitution
A. Définitions
B. Métamodèles pour la simulation à un niveau donné de fidélité
1. Plan d’expérience
2. Krigeage
3. Fonctions à base radiale (RBF)
4. Critères de validation du métamodèle
C. Métamodèles multifidélité
1. Co-krigeage par modèle autorégressif
D. Etude comparative dans le cadre des d’applications considérées
1. Microsource infrarouge
2. La cellule photoacoustique
3. Le coupleur adiabatique
E. Conclusion
III. Stratégies adaptatives pour l’optimisation avec métamodèle
A. Réduction de l’erreur de prédiction
1. MSE (Mean Squared Error)
2. IMSE (Integrated Mean Squared Error)
B. Optimisation globale à un objectif
1. Algorithmes d’optimisation du sous-problème
2. Critères pour le krigeage
3. Critères pour les RBF
4. Comparaison des critères d’optimisation non contrainte sur un exemple analytique.
5. Optimisation sous contraintes
C. Optimisation multi-objectif
1. Algorithmes d’optimisation
2. Critères pour stratégie adaptative
D. Optimisation robuste
1. Introduction
2. L’optimisation robuste par stratégie adaptative
E. Conclusion
IV. Contribution méthodologique pour traiter les cas d’application
A. Optimisation de la microsource infrarouge.
1. Optimisation de la puissance rayonnée
2. Optimisation de la température moyenne
3. Optimisation de l’efficacité
4. Bilan
B. Métamodélisation multifidélité pour la cellule photoacoustique
1. RBF multifidélité (co-RBF).
2. Comparaison des métamodèles multifidélité sur modèles analytiques
3. Stratégie adaptative pour la RBF multifidélité
4. Application au cas de la cellule photoacoustique
5. Discussion
C. Optimisation robuste du coupleur selon la longueur d’onde
1. Problématique initiale
2. Métamodèle pour paramètres discrets
3. Optimisation du gradient de l’amélioration espérée
4. Application de la stratégie générale
5. Conclusion.
Conclusion
Bibliographie
V. Annexe boîte à outil « SBDO »
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