Contexte d’étude des écosystèmes terrestres arctiques

Contexte d’étude des écosystèmes terrestres arctiques 

Définition des notions utilisées 

Certains termes ou certaines notions reviendront fréquemment tout au long de ce travail. Ils sont parfois définis de manière différente suivant les publications scientifiques, c’est pourquoi il est nécessaire de leur attribuer ici une définition claire .

DOMAINE VIT AL (home range) – Le domaine vital est défini comme « la surface parcourue par un individu lors de ses activités normales de recherche de nourriture, de reproduction et de soin aux jeunes» (Burt 1943). Cependant, il n’est pas aussi aisé de déterminer ce qui constitue une activité normale (White & Garrott 1990). Il est préférable de définir le domaine vital comme « l’ étendue de la surface ayant une probabilité définie d’occurrence d’un animal sur une période de temps donnée» (Kemohan et al. 2001). Il semble donc essentiel d ‘intégrer aussi une dimension temporelle à la notion de domaine vital, notamment de spécifier s’il s’agit d ‘ un domaine vital annuel, saisonnier ou autre. Le concept de domaine vital est lié à celui de territoire, lequel correspond à « un espace fixe duquel un individu, ou un groupe d’individus mutuellement tolérants excluent des compétiteurs pour une ou des ressources spécifiques» (Maher & Lott 1995). Ainsi, un territoire pourrait ne constituer qu’une partie d’un domaine vital (Tsukada 1997). La définition de territoire et de domaine vital reste souvent imprécise dans les publications (Maher & Lott 1995), peut-être à cause du fait que la distinction biologique entre les deux n’est pas toujours évidente puisqu’ils peuvent se superposer complètement. Néanmoins, lorsqu’il s’agit de comparer l’ influence de divers facteurs sur la taille du domaine vital ou du territoire, il est généralement implicitement ou explicitement admis que les deux dé finition s peuvent être employées de façon interchangeable, en tout cas chez les canidés, à partir du moment où le domaine vital est défendu (Goszczynski 2002; Eide et al. 2004). D’autre part, suivant la taille d ‘ un domaine vital et la capacité d’un individu à le parcourir rapidement dans son ensemble, il parait possible d ‘ avoir des territoires qui se chevauchent, même s’il n’y a que peu ou pas d’interactions entre les individus voisins. Étant donné que nous n’avons pas, dans la présente étude, mesuré la territorialité, nous adopterons une définition plus large de domaine vital englobant aussi celle de territoire, acceptant donc la prémisse que si les deux différent, leurs tailles sont cependant positivement corrélées.

ESPACE ISOTOPIQUE (isotopic space) – L’espace isotopique est un espace euclidien à n dimensions où chacun des axes représente le rapport isotopique pour un isotope particulier, par exemple le carbone sur les absc isses et l’azote sur les ordonnées. Dans l’analyse isotopique carbone/azote, chaque échantillon analysé peut être représenté dans cet espace en deux dimensions, permettant de calculer des distances euclidiennes entre deux échantillons ou bien la surface couverte par un ensemble d ‘échantillons, etc.

NICHE TROPHIQUE (trophic niche) – La niche trophique est la partie de la niche écologique (sensu Hutchinson 1957) qui concerne uniquement les ressources alimentaires utilisées. L’étendue de la niche trophique est liée directement à la richesse et à la diversité du régime a limentaire d ‘ une espèce, d’une population ou d ‘ un individu. Par extension, ce concept a été récemment appliqué à l’analyse isotopique: la niche isotopique est une surface dans l’espace isotopique (pour une définition détaillée voir Newsome et al. 2007). La correspondance entre niches trophique et isotopique n’est pas toujours évidente, et nous aborderons ce po int en détail ultérieurement (Chapitre V, Introduction).

RESSOURCES (resources) – Une ressource est un é lément de l’environnement utilisé par les individus d’ une espèce afin de se maintenir en vie et de se reproduire. La nourriture, l’eau, les abris, les substrats particuliers ou même les partenaires reproducteurs peuvent tous être considérés comme des ressources en écologie (Krebs 2001). Dans le eadre de cette thèse cependant, nous avons volontairement restreint la portée de cette définition aux seules ressources a limenta ires.

RESSOURCES ALLOCHTONES (allochthonous resources) – Les ressources allochtones sont des ressources (organiques ou inorganiques) provenant de l’extérieur d’ un hab itat ou d’ un écosystème considéré (Huxe l & McCann 1998; Spi 11 er et al. 20 10). La notion de subside allochtone est plus restreinte, et définit des ressources allochtones qui sont utilisées par des consommateurs et qui entraînent un accroissement de leur population (Polis et al. 1997). Ic i nous utiliserons uniquement la notion de ressource allochtone, puisque nous n’ avons pas cherché à démontrer que l’ utilisation de ces ressources entrainait un accroissement des popul ations de prédateurs (G iroux 2007). Par opposition, les ressources provenant du même habitat ou écosystème sont appelées autochtones.

STRATÉGIE et TACTIQUE (strategy/tactic) – Ces deux mots sont très souvent employés de façon synonyme dans les publications scientifiques (voir par exemple von Schantz 1984b; Freitas et al. 2008), a lors qu ‘ ils ont des significations différentes. Le mot stratégie est défini par Austad et Howard (1984) comme « a genetically-determined prescription of the behavioral response to any conceivable circumstance » (une modalité, génétiquement déterm inée, de la réponse comportementale à une situation donnée), établissant donc le caractère héri tab le de cette réponse compol1ementale et son caractère adaptatif qui en fait une stratégie évolutivement stable. En revanche le mot tactique est défini de façon plus vague comme tout comportement ou complexe de comportements. D’après ces définiti ons, deux tactiques différentes (par exemple, des techniques de chasse) pourraient répondre à une stratégie identique (par exemple, maximiser la quantité de proies tuées).  SYSTÈME TROPHIQUE (trophic System) – Nous uti liserons ce terme pour désigner tout ensemble d’ espèces ayant des interactions trophiques (compétition alimentaire, prédation, etc.), cet ensemble pouvant ne constituer qu ‘ un sous-ensem ble d’ un réseau troph ique complet, par exemple un consommateur et les principa les ressources qu ‘ il utilise.

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UTILISATION DE L’ESPACE (space use ) – Cette définiti on est à considérer au sens large et s’ app lique à la position et aux déplacements d’ un ou plusieurs indi vidus dans l’espace, sur une période de temps définie. Elle inclut donc ici les domaines vitaux et les territoires, qui donnent une image statique de l’ utilisation de l’ espace, ainsi que les mouvements indi viduels, qui en donnent une image plus dynamique (Young & Shivik 2006).

Productivité et liens trophiques avec d’autres écosystèmes 

Les écosystèmes terrestres arctiques sont souvent présentés comme étant re lativement simples  , avec des chaines trophiques courtes et un faible nombre d’espèces (Bêty el a/. 2002). Si la simplification de la représentation de ces écosystèmes a parfois été jugée excessive (Hodkinson & Coulson 2004), il n’ en demeure pas moins qu ‘ on y retrouve l’ une des communautés de vertébrés terrestres les plus simples de notre planète (G il g et al. 2009; Van der Wal & Hessen 2009). La productivité prima ire dans les écosystèmes terrestres arctiques est très faible (Oksanen 1983) et généralement lim itée par la disponibilité en é léments essentie ls tels que l’ azote et le phosphore (Gauthier et al. 1996; Ca ll aghan et al. 2004a; Van der Wal & Hessen 2009). La faible abondance des ressources à la base d’ un écosystème influence la structure verticale de son réseau trophique en lim itant la longueur max ima le des cha ines a limentaires et donc le nombre de ni veaux trophiques (Yodzis 1984). En effet, la fa ible efficacité énergétique dans l’assimilation des ressources à chaque ni veau trophique e ntraine une disponibilité encore plus restreinte de ressources pour les nivea ux trophiques supérie urs, notamment les prédateurs (Post 2002a). Ainsi, d’ après l’ hypothèse de l’ explo itation des écosystèmes (Oksanen el al. 1981 ; Oksanen & Oksanen 2000) les niveaux trophiques de prédateurs ne devraient pas parvenir à se ma intenir dans des écosystèmes à prod uctivité extrêmement faible  , comme dans la toundra du HautArctique, à mo ins qu ‘ il y a it un apport substantiel d ‘énergie extérieure à ces écosystèmes, dirigé ve rs les prédate urs (Polis & Hurd 1996).

Table des matières

CHAPITRE 1 Introduction générale
1.1 Contexte d’étude des écosystèmes terrestres arctiques
1. 1.1 Définition des notions utilisées
1. 1.2 Prod uctivité et li ens trophiques avec d’ autres écosystèmes
1. 1.3 Rôle des prédateurs dans la structuration des réseaux trophiques terrestres arctiques
1. 1.4 Impacts des changements climatiques sur les écosystèmes arctiques
1.2 Modèle d’étude, objectifs et hypothèses
1.2.1 Modèle d’étude: le renard polaire
1.2.2 Objectifs généraux et hypothèses de recherche
1.3 Méthodologie
1.3. 1 Population et zone d’étude: suivi à long terme sur l’île Bylot
1.3.2 Suivi satellite Argos
1.3.3 Analyses des isotopes stables du carbone et de l’azote en éco logie
1.4 Plan de la thèse
CHAPITRE Il Northern nomads: ability for extensive movements in adult arctic foxes
2.1 Introduction
2.2 Methods
2.2. 1 Study area
2.2.2 Capture and satellite tracking
2.2.3 Data processing and analyses
2.3 Results
2.4 Discussion
2.4. 1 Navigational abilities
2.4.2 Foraging ecology
2.4.3 Lemming cycles
2.4.4 Gene flow among populations
CHAPITRE III Seasonal variation in space use patterns of an arctic terrestrial carnivore: resource abundance influences summer home range size and winter movements
3.1 Introduction
3.2 Material and methods
3.2. 1 Study area
3.2.2 Capture and satellite tracking of anima Is
3.2.3 Filtering of location data
3.2.4 Calcul ation of home range area and distance to home range
3.2.5 Effect of food abundance on summer home range and core areas
3.2.6 Effect of food abundance on winter foraging distance
3.2.7 Lévy wa lk pattern in winter movements
3.3 Results
3.3 .1 Effect of food abundance on summer home ranges and core areas
3.3.2 Temporal variation in ranging behaviour
3.3.3 Winter foraging movements
3.4 Discussion
3.4.1 Effect of food abundance on summer home range and core areas
3.4.2 Temporal variation in ranging behaviour
3.4.3 Winter foraging movements
CHAPITRE IV Sensitivity of stable isotope mixing models to variation in isotopie ratios: evaluating consequences of Iipid extraction
4.1 Introduction
4.2 Material and methods
4.2.1 Case studies
4.2.2 Mixing models and diet reconstruction
4.2.3 Simulating the effects of lipid extraction on diet estimates
4.3 Results
4.3.1 Effect of lipid extraction on (5 13C and (5 1 sN
4.3.2 Effect of lipid extraction on estimates of diet composition
4.3.3 Simulating effects of lipid extraction on di et estimates
4.4 Discussion
4.4.1 Effect of lipid extraction on (5 13C and (5 lsN
4.4.2 Effect of lipid extraction on estimates of diet composition
4.4.3 Sensitivity of diet estimates to shifts in isotope ratios
Conclusion générale

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