CONTAMINATION EN AFLATOXINE DES ALIMENTS DE SEVRAGE DESTINES AUX NOURRISSONS
Historique, structure et nomenclature des aflatoxines
Les champignons et leurs métabolites toxiques (les mycotoxines), présents dans les graines, les semences et sur les champs, ont constitué un problème pour l’Homme et les animaux domestiques depuis des siècles. Les mycotoxicoses causées par l’ingestion d’aliments rendus toxiques par les champignons, ont été à l’origine de mortalité chez l’Homme et les animaux ; c’est le cas de l’ergotisme au Moyen Age en Europe, et celui de l’A.T.A. (Alimenter Toxic Aleukia) en 1930 et 1940 en Russie ( (NIKIEMA, 1993). Le problème des mycotoxicoses s’est posé avec acuité pour la première fois au Royaume Uni, lors de l’apparition de la maladie dite maladie « X » des dindes, qui a causé la mort de 100.000 dindes dans 500 fermes en 1960. Le facteur commun était une alimentation commune des dindes à partir de farine d’arachide provenant du Brésil (NIKIEMA, 1993). Des recherches menées à partir de cet aliment ont montré que la maladie était provoquée par des toxines produites par des souches du champignon Aspergillus flavus, d’où le nom Aflatoxine qui leur a été donné par la suite. Des travaux ultérieurs ont permis de savoir que les aflatoxines sont essentiellement produites par les champignons : Aspergillus flavus et Aspergillus parasiticus, et que plusieurs oléagineux, céréales, légumes et épices s’avéraient être naturellement contaminés par les Page 4 aflatoxines, ou parfois lorsque les conditions physico- chimiques seraient favorables Figure 1 : Caractères morphologiques des Aspergillus (A) Les aflatoxines sont considérées comme étant les plus cancérigènes parmi les substances naturelles toxiques ; elles sont hépatotoxiques, cancérigènes, tératogènes et immunosuppressives (NIKIEMA, 1993). Les recherches menées sur les aflatoxines depuis une trentaine d’années ont établi la prévalence de deux principaux types d’aflatoxines : Les aflatoxines du type B et Les aflatoxines du type G Les aflatoxines du type M, moins importantes que les deux premières, ont été détectées pour la première fois dans le lait comme dérivées des aflatoxines du type B. L’aflatoxine B1 est le plus fréquent dans les produits alimentaires et considéré comme le plus cancérigène .La structure de base de la molécule d’aflatoxine est constituée de cycle bifurane coumarine-Lactone /cyclopentanone. Les aflatoxines du type G possèdent un cycle lactone, tandis que celles du type B ont un cyclopentanone. Chaque type d’aflatoxines est subdivisé en deux groupes (l et 2) ; les aflatoxines du groupe 1, à la différence de celles du groupe 2, sont caractérisées par la présence d’une double liaison en C8-9 du premier anneau furane (figure 2). Les aflatoxines du type M possèdent un anneau cyclopentanone comme celles du type B, mais sont hydroxylées en C10 .Les anatoxines Bl et B2 présentent une fluorescence bleue à 365nm Page 5 et sont produites par les souches toxigéniques d’Aspergillus flavus. Les aflatoxines G1 et G2 (vert fluorescent), sont produites par les souches toxigéniques de Aspergillus parasiticus, qui en outre, produisent des aflatoxines Bl et B2. Certaines souches d’Aspergillus parasiticus produiraient des aflatoxines Ml et M2 (NIKIEMA, 1993).
Biosynthèse des aflatoxines
Certaines étapes de la voie biosynthétique des aflatoxines sont jusqu’à nos jours mal comprises ; de ce fait, la voie exacte de biosynthèse des aflatoxines n’est pas encore élucidée. Néanmoins, un consensus existe quant à l’étape initiale de leur biosynthèse. La synthèse commence avec des unités d’acétate (Figure 3) et de malonate ; qui sont métabolisées en AFB1 via des polycétones, avec pour intermédiaires principaux : l’acide norsolorine, l’avérufine, la versicolorine A et la stérigmatocystine (NIKIEMA, 1993). Les travaux in vitro sur la biosynthèse des aflatoxines constituent une des parties les plus importantes des recherches menées sur les aflatoxines. (NIKIEMA, 1993) Ils concernent essentiellement : les dynamiques du métabolisme des hydrates de carbone, les activités enzymatiques du cycle de l’acide tricarboxylique et de la voie d’Embden-Meyerhof, la polycétone synthétase, le rôle des métaux, le rôle des nucléotides et des acides aminés et enfin, l’influence du métabolisme des lipides sur la biosynthèse des anatoxines (NIKIEMA, 1993). L’AFB1, plus souvent rencontrée et plus toxique que les autres types d’anatoxines a été le point de départ des recherches sur les aflatoxines et de la recherche sur le cancer (NIKIEMA, 1993).
La toxicocinétique
.2.1 Absorption L’Absorption des aflatoxines se fait principalement par voie digestive suite à une ingestion d’aliments contaminés (afssa, 2006). 3.2.2 Distribution Les aflatoxines sont distribués d’abord dans le tractus gastro-intestinal, au niveau du duodénum puis sont véhiculées dans le foie à partir d’une fixation sur les protéines plasmatiques. C’est le cas de l’AFB1 liée à l’albumine. La présence de cet adduit dans le sérum peut servir de bio-indicateur d’exposition. Une partie des aflatoxines est accumulée dans les reins sous forme de métabolites (afssa, 2006).
Métabolisme
Une fois dans l’organisme, l’AFB1 subit plusieurs réactions de biotransformation à plusieurs niveaux. Ainsi dans la cellule hépatique l’aflatoxine est métabolisée par un arsenal enzymatique qui facilite son élimination par augmentation de ses propriétés hydrophiles. Il existe deux méthodes d’élimination de l’AFB1 (Jaquet J, 1982). Le processus d’hydroxylation constitue la voie principale qui conduit à la formation du dérivé hydroxylé de l’aflatoxine B1 qui est l’aflatoxine M1. Alors que par oxydoréduction, il y a formation de l’aflatoxicol qui est moins toxique et de pouvoir mutagène faible. D’autres aflatoxines peuvent être formées à partir de B1, il s’agit notamment des aflatoxines B2, H1, P1 et Q1. Les aflatoxines ingérées sont rapidement absorbées par le tractus gastro-intestinal où elles vont commencer à être métabolisées ou détoxifiées au début dans les cellules mucorales. L’AFB1 subit une bioconversion spécifique (figure 4) donnant formation à un métabolite majeur résultant d’une époxidation par le Cytochrome P450-dependant : c’est l’AFB1 8,9-époxyde. Ce produit interagit avec l’ADN formant des adduits (AFB-N7- Guanine) présumés impliqués dans l’activité carcinogène des aflatoxines. La fixation de cet époxyde sur les protéines joue probablement un rôle important dans la toxicité des aflatoxines. Le complexe « aflatoxine – époxyde » formé peut réagir spontanément avec le glutathion par une glutathion-S-transférase. Cette conjugaison est généralement considérée comme une importante voie de détoxification à côté des autres mécanismes donnant naissance notamment à l’aflatoxicol et aux autres dérivés M1, P1 et Q1 (Jaquet J, 1982).
Elimination L’élimination des aflatoxines de l’organisme inclut l’excrétion urinaire (AFM1, AFP1, AFQ1, AFB1-N7- guanine), l’excrétion biliaire (AFB1-glutathione) et l’excrétion laitière sous forme d’AFM1 chez les femelles des mammifères. Cette dernière constitue la principale voie d’exposition des nourrissons.
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