Construire un cadre pour accompagner l’implémentation du BIM

Expérimentation avec quatre agences d’architecture au cours de l’implémentation de pratiques BIM

Construire un cadre pour accompagner l’implémentation du BIM

Dans cette partie, nous nous appuyons sur des méthodes de gestion de projet et de gestion du changement ainsi que sur une comparaison de méthodes d’implémentation du BIM pour proposer un cadre permettant d’accompagner l’implémentation du BIM. Ce cadre prend la forme d’une feuille de route.

La gestion de projet appliquée au projet d’implémentation

Pour développer des lignes directrices pour le projet d’implémentation du BIM, nous nous appuyons ici sur deux documents de référence relatifs à la gestion de projet : la norme ISO 21502 (ISO21502 2020) et le PMBOK : Project Management Body Of Knowledge174 (Snyder 2013), un des principaux ouvrages de référence en gestion de projet. Ils fournissent des recommandations et lignes directrices pour mener à bien un projet, quels que soient sa nature et ses objectifs.  Implémenter des pratiques BIM est un projet Les architectes sont habitués à gérer des projets, en particulier lorsqu’il s’agit de projets construction ou de projets architecturaux. Mais lorsque l’on s’extrait du domaine de la construction, un projet désigne, de façon générale, un « effort temporaire pour atteindre un ou plusieurs objectifs définis » (ISO21502 2020). C’est une « initiative temporaire entreprise dans le but de créer un produit, un service, ou un résultat unique » (Snyder 2013). La gestion de projet ou management de projet correspond à l’ensemble des « activités coordonnées visant à piloter et maîtriser l’atteinte d’objectifs convenus » (ISO21502 2020). L’implémentation du BIM est donc un projet qui concerne un changement organisationnel. Les méthodes de gestion de projet sont pertinentes pour développer une feuille de route pour l’implémentation du BIM.

Tout projet a un début et une fin : mais la notion de fin n’est pas évidente lorsqu’il est question de changement. Le projet d’implémentation commence lorsque le dirigeant décide de lancer son organisation dans la phase d’implémentation. Le changement opéré dans un premier temps (au cours de l’implémentation) peut être relativement radical et laisse place à une phase de changement continu. Le projet d’implémentation prend fin lorsque les objectifs d’implémentation sont atteints et qu’on estime que l’agence est laissée dans une situation suffisamment stable pour être engagée dans ce processus d’amélioration continue des pratiques.

Le cycle de vie du projet

Le PMBOK décrit le cycle de vie d’un projet en quatre grandes phases, précédées d’un « travail antérieur ». Dans le cas de l’implémentation du BIM, cette phase correspond à la validation (sur le processus d’adoption) qui aboutit à la décision et au début de l’implémentation. Ci-dessous, les phases du cycle de vie des projets présentées dans le PMBOK (voir Figure 98) : • 0 – Travail antérieur  Définition des objectifs et justifications du projet, analyse de la situation, évaluation de la faisabilité • 1 – Initialisation  Définition du projet et identification des parties prenantes • 2 – Organisation et préparation  Planification du projet • 3 – Exécution  Direction et gestion du travail, gestion des connaissances du projet, allocation des ressources, application des réponses aux risques • 4 – Finalisation  Évaluation du projet au vu des objectifs définis, clôture du projet. Figure 98. Représentation du cycle de vie du projet dans le PMBOK, d’après (PMI 2017) Le PMBOK décrit également une division des phases en étapes : le développement du concept, l’étude de faisabilité, les exigences, le développement de solutions, la conception, le prototypage, la construction, les tests, la transition, la mise en service, la revue des jalons, et enfin les retours d’expérience. On y retrouve également une forme de « checklist » d’éléments à prendre en compte pour la gestion d’un projet. Celle-ci intègre l’identification du périmètre et les objectifs du projet, l’identification des personnes en charge, la planification du projet, la gestion et l’anticipation des coûts, la gestion de la qualité, la gestion des ressources, la gestion des communications, la gestion des connaissances du projet et la gestion des risques.

Conduite du changement

Dans la littérature sur la gestion et conduite du changement, les approches pragmatiques nous offrent des outils et stratégies175 sur lesquels nous pourrons nous appuyer pour proposer une feuille de route. Nous allons notamment nous appuyer sur les travaux de (Kotter 1995) qui propose « une feuille de route en huit étapes », organisées en quatre phases (préparer le changement, engager le changement, réaliser le changement, ancrer le changement) 176 . Son ouvrage (Kotter 2015) est d’ailleurs rédigé à destination des professionnels, et peut tout à fait servir de support à la conduite du changement pour un dirigeant d’agence. La feuille de route proposée par Kotter concorde parfaitement avec les étapes proposées dans le PMBOK pour la gestion de projet : le PMBOK adresse la gestion de projet en général, tandis que la feuille de route de Kotter est orientée sur un projet de changement. 

Méthodes et représentations de l’implémentation de pratiques BIM

Nous avons rassemblé plusieurs méthodes qui ont vocation à accompagner les acteurs du secteur de la construction dans la transition vers des pratiques BIM. Nous en proposons ici une analyse comparative et critique. Elles sont toutes proposées dans le cadre de recherches universitaires sur l’adoption et l’implémentation du BIM. La plupart de ces études font appel à la recherche-action177. Ces études ont été difficiles à collecter à cause de l’hétérogénéité du vocabulaire utilisé dans la littérature pour parler de l’implémentation du BIM 178 . Une étude de littérature systématique (SLR – Systematic Literature Review) est difficile dans ce cas. Les méthodes qui constituent notre corpus179 ont donc été sélectionnées tout au long de notre recherche et abordent toutes l’implémentation sous l’angle du changement organisationnel (échelle micro). Nous les avons comparées sur (1) les aspects du changement qu’elles adressent et (2) les différents angles et concepts qu’elles développent.