CONSTRUCTION D’UNE CARTE GENETIQUE DE NIEBE
Généralité sur le niébé
Position systématique Le niébé (Vigna unguicalata (L.) Walp.) est une Dicotylédone appartenant à l’Ordre des Fabales, à la super famille des Leguminoseae, à la famille des Fabaceae, sous famille des Faboideae, tribu des Phaseoleae, sous tribu des Phaseolinae, au genre Vigna, à la section Catiang et l’espèce Vigna unguiculata (Verdcourt, 1970) ; Maréchal et al., (1978). C’est une espèce diploïde avec 2n=2x=22. Le cultigroupe unguiculata correspondant au niébé, est le groupe des formes cultivées le plus important en Afrique. Le niébé cultivé est une plante herbacée tropicale annuelle de petite taille, ses gousses sont larges, étalées ou parfois plus ou moins pendantes (figure 1) (Baudoin et Maréchal, 1985).R
Origine et diffusion
Des études portant sur une description cytologique et morphologique des formes sauvages et cultivées du niébé montrent que l’Afrique de l’Ouest, et plus probablement le Nigeria, est le centre d’origine du niébé (Faris 1963, 1965). De même, Vanderborght et Baudoin (2001) ont proposé une origine Africaine avec une domestication datant du Néolithique. Récemment, Huynh et al., (2013) ont mené une étude très avancée sur la domestication du niébé. Ces auteurs ont mis en évidence l’existence de deux pools génétiques, l’un basé en Afrique de l’Ouest et l’autre en l’Afrique de l’Est et ces deux groupes constituent avec les formes sauvages, la base génétique du niébé à travers le monde. Sa diffusion vers l’Asie, en parallèle avec celle du sorgho et du mil daterait de 3600 av JC (Faris, 1965) et s’est faite à partir de l’Afrique de l’ouest en passant par l’Inde (Huynh et al., 2013). Le niébé a été introduit en Europe vers 300 av J-C directement à partir de l’Afrique de l’ouest, où il reste une culture mineure dans la partie méridionale. Les Espagnols et les Portugais l’exportèrent au 17ème siècle vers le nouveau monde (Amérique du Nord) (Vanderborght et Baudoin, 2001), la majorité du niébé cultivé aux USA proviendrai de l’Afrique de l’Est (Huynh et al., 2013). Le niébé aurait atteint le Sud des Etats-Unis au début du 19ème siècle (Vanderborght et Baudoin 2001). 5 FF Figure1: Schéma de l’appareil aérien de la plante de niébé (Plant Resources of South-East Asia) http://www.proseanet.org.).
Diversité génétique du niébé
La diversité génétique est la différence qui existe entre les individus d’une même espèce ou d’une population. Sa connaissance permet de mieux comprendre les processus évolutifs de l’espèce et renseigne sur son histoire démographique et génétique. Cette diversité génétique est évaluée de façon fiable par les outils de la biologie moléculaire. Ainsi, avec l’avènement des marqueurs moléculaires, la compréhension de la structuration génétique du niébé et de l’organisation de sa diversité ont été améliorées. Les variétés traditionnelles constituent avec les formes sauvages le réservoir de la variabilité génétique (Kouakou et al., 2007). Dans ce sens, Tosti et Negri (2005) ont analysé la variation génétique entre trois variétés locales de niébé cultivées en Italie et montré une faible diversité génétique au sein des variétés locales. Des résultats similaires ont été obtenus en Malawi en étudiant les variétés locales de niébé avec la technique RAPD (Nkongolo, 2003). Récemment, Fang et al. (2007) , en utilisant des marqueurs AFLP sur six programmes de sélection de niébé de l’Afrique de l’Ouest et des États-Unis, et 27 variétés locales en provenance d’Afrique, d’Asie et d’Amérique du Sud, ont déclaré que ces variétés sont génétiquement identiques à plus de 86 %. Au Sénégal, peu d’études portant sur l’analyse de la diversité génétique ont été réalisées. Diouf et Hilu (2005) et Badiane et al (2012), dans leurs études portant respectivement sur 11 variétés et 22 variétés y compris des accessions locales de niébé, ont mise en évidence une faible diversité génétique au sein de ces variétés cultivées dans le pays et que la plus part de ces variétés étaient représentées dans un même groupe.
Importance du niébé
Le niébé est une denrée de base, importante qui présente des avantages économiques, nutritionnelles, et agronomiques considérables (Agbicodo et al., 2009). Plusieurs parties de la plante à savoir les graines fraîches ou séchées, les feuilles, les gousses et les racines immatures sont utilisées pour l’alimentation humaine et animale. Ses graines représentent une source précieuse de protéines végétales (23 à 32%) riche en lysine et en tryptophane (Pungulani et al., 2013). Elles contiennent également une importante quantité de minéraux et de vitamines (acide folique et vitamine B) nécessaires pour la prévention des malformations congénitales (Hall et al., 2003 ; Diouf, 2011). Le Niébé est une plante fixatrice de l’azote atmosphérique grâce à son association symbiotique avec des bactéries du genre Rhizobium, réduisant ainsi la demande d’engrais azoté et les coûts de la production agricole (Dugje et al., 2008 ; Asiwe et al., 2009). Il est donc une culture à utilisation multiple qui joue un rôle important dans le développement de l’agriculture (Tan et al., 2013). 1.5. Amélioration de la tolérance du niébé à la sécheresse Bien que, le niébé soit l’espèce la plus tolérante à la sécheresse parmi les espèces du genre Vigna, les sécheresses périodiques limitent encore sa production. Toutefois, des différences significatives existent dans les réponses au stress hydrique parmi les génotypes de niébé (Hall et al., 2003 ; Muchero et al., 2008 ; Fatokun et al., 2012). Le premier caractère qui a été ciblé par les programmes de sélection pour la tolérance à la sécheresse chez le niébé a été le raccourcissement du cycle permettant ainsi à la plante d’éviter un déficit hydrique en phase terminale (Cissé et al., 1996). Cette stratégie a permis de développer des variétés à cycle court de 55 à 75 jours (Cissé et al., 2005). Au Sénégal, l’amélioration génétique du niébé a débuté dans les années 1960. Elle a permis l’identification de variétés locales très productives comme la 58-57 qui est une variété rampante possédant de petites graines (Sène, 1966). Le poids des graines de cette variété a été améliorée de 12 à 16 g pour 100 graines permettant ainsi d’obtenir la variété Ndiambour (Cissé et al., 1996). La recherche pour la sélection de variétés à cycle court s’est poursuivie et a abouti à la création des variétés Mougne puis Bambey . Cette dernière est la première variété extra-précoce (60 jours) et à port érigé développée au Sénégal (Cissé et al., 2005). Elle serait capable de produire des rendements de 1091 kg/ ha sous des conditions de faible pluviométrie (181 mm), de température et de demande évaporatoire élevées (6 mm/ jour) (Gueye, 2006). D’autres variétés très précoces ont par la suite été développées mais elles se sont révélées sensibles à certains parasites et maladies du niébé (Hall et al., 2003). C’est ainsi que la sélection s’est orientée vers la recherche de variétés rustiques et moins précoces avec la création de Mouride. C’est une variété très productive, bien adaptée à la zone sahélienne, tolérante à la sécheresse intervenant à mi-cycle. Cette variété a constitué grâce à ses propriétés un bon géniteur de départ pour la création de nouvelles variétés de niébé au Sénégal. Avec le développement des techniques de marquage moléculaire, les stratégies de sélection assistée par marqueurs ont été appliquées au niébé avec des résultats importants en 7 termes d’identification de gènes et/ou de QTL impliqués dans la résistance/tolérance à plusieurs contraintes biotiques et abiotiques (Tableau 2). Des études récentes ont porté sur la compréhension des bases moléculaires de la tolérance à la sécheresse. Barrera-figueroe et al., (2011) ont identifié 44 micro RNAs (miRNA) associés à la tolérance à la sécheresse grâce à un séquençage de petits ARN provenant de deux génotypes de niébé cultivés en condition d’irrigation et de stress hydrique. Ce résultat montre que les miRNAs peuvent jouer un rôle important dans le déterminisme de la résistance à la sécheresse chez le niébé.