Considérations générales sur le phénomène de la pauvreté
La première difficulté de la recherche dans l’étude du phénomène de la pauvreté est de trouver un consensus qui permet de dégager une définition universelle ou normalisée de la notion de pauvreté. Les opinions divergent sur la définition et la compréhension de la pauvreté et ses causes. Il serait utile dans un premier temps d’évoquer dans ce chapitre les différentes définitions universelles contribuées sur l’évolution du concept de la pauvreté dans la pensée, qui engendrèrent ainsi des instruments pour caractériser et mesurer la pauvreté sous ses diverses formes. A cet effet, Le problème de l’élimination de la pauvreté reste depuis longtemps une question principale qui cherche une solution au niveau mondial, à travers les organismes onusiens et organisations non gouvernementales, et au niveau des différents pays à travers des stratégies nationales. La littérature sur le concept de pauvreté est extrêmement abondante, caractérisée à un niveau d’ambiguïté très élevé dans son rapport à la théorie économique. De ce fait, sa perception évolue à travers le temps, ce qui influence la manière de la définir.
A titre historiquement lointain, Le terme « pauvre » vient du latin pauper et du grec pénes (pauvre) et penia (pauvreté), vocables apparentés à peina (faim) et d’une façon lointaine à ponos (douleur) et poiné (châtiment, peine).7 Selon Michel Mollat, historien du moyen âge « Le pauvre est celui qui, de façon permanente ou temporaire, se trouve dans une situation de faiblesse, de dépendance, d’humiliation caractérisée par la privation des moyens, variables selon les époques et les sociétés, de puissance et de considération sociale : argent, relation, influence, pouvoir, science, qualification technique, honorabilité de naissance, vigueur physique, capacité intellectuelle, liberté et dignité personnelle. Vivant au jour le jour, il n’a aucune chance de se lever sans l’aide d’autrui. Une telle définition peut inclure tous les frustrés, tous les laissés pour compte, tous les associaux, tous les marginaux ; elle n’est spécifique d’aucune région, d’aucun milieu. Elle n’exclut pas non plus tous ceux qui, par idéal ascétique ou mystique, ont voulu se détacher du monde ou qui, par dévouement, ont choisi de vivre pauvres parmi les pauvres ».8 Sylvain Lariviére et Frederic Martin (1997), définissent la pauvreté « comme un état de privation à long terme de bien être jugé inadéquat pour vivre décemment.
La pauvreté est donc synonyme de carence, elle est fonction d’un manque connu face à des besoins que l’ont peut identifier. Elle concerne en priorité ceux ou celles qui éprouvent des difficultés à s’intégrer au système socioéconomique pour toutes sortes de raisons ».9 A leurs tours, B. Ames, W. Brown et S. Devarajan, ont tenté de donner une explication de la pauvreté ; « elle peut être définie au mieux comme étant une privation inacceptable du bien être de l’être humain. Une personne peut donc être considérée comme pauvre quand elle ne peut se procurer les biens et services en quantité suffisante pour satisfaire ses besoins matériels fondamentaux ».10 M. Ravallion (1994) considère que « la pauvreté peut exister dans une société donnée quand une ou plusieurs personnes n’atteignent pas un niveau de bien être économique, considéré comme un minimum raisonnable prés des normes de cette société ».11 Dans cette première analyse, on peut constater que la notion de pauvreté est liée au concept de l’économie du bien être. Anyck. D (1999) donne une explication simple de la pauvreté de la manière suivante : « On entend souvent dire qu’une personne pauvre est une personne qui n’arrive pas à satisfaire ses besoins de base ».12 Le lauréat du prix Nobel en 1998,
Amartya Sen (1993) confirme « qu’il y’a une raison forte pour juger l’avantage individuel en termes de possibilités. Dans cette perspective, la pauvreté doit être vue comme une privation des besoins de base plutôt qu’un bas revenu qui est le critère standard de la pauvreté ».13 Cet élargissement dans la compréhension de la pauvreté à donné un nouvel élan du concept, caractérisé par une multiplicité de visages, qui va au delà d’une insuffisance de revenu. En plus des rapprochements sur la vision de définir le concept de la pauvreté, certains auteurs ont pu également cerner une définition plus objective de la pauvreté tels que Fields (1994) : « La pauvreté est l’incapacité d’un individu ou d’un ménage à avoir les ressources les ressources de base requis pour la satisfaction des besoins de base ».14 Par ailleurs Lipton (1996) 15 avance qu’en n’importe quelle période, une personne est pauvre, si et seulement si, elle ou son accès aux ressources économiques est insuffisant.