Conséquences pour la transmission de la politique monétaire
Quel est l’impact prévisible sur les principaux canaux de transmission de la politique monétaire, à savoir le canal des taux d’intérêt, le canal du cours de change et le canal du crédit ? Le canal des taux d’intérêt est un mécanisme de transmission de la politique monétaire particulièrement important dans les pays relativement plus développés, comme l’Afrique du Sud, le Kenya et Maurice12. Dans ces pays, une modification des taux directeurs entraîne une modification des taux d’intérêt intérieurs, mais parfois à retardement et sans que la transmission soit complète. L’existence, dans de nombreux pays, d’une structure bancaire oligopolistique, limite la concurrence et, partant, la réactivité des taux du marché à une modification des taux directeurs. Cela s’explique en partie par la concentration du marché mais aussi des risques. En fait, l’Afrique subsaharienne a les marges d’intérêt les plus élevées du monde13. Elle est aussi la région qui présente le plus fort taux de concentration de banques. Dans la mesure où une hausse de l’activité bancaire transfrontière intensifie la concurrence dans le système bancaire intérieur, elle pourrait contribuer à réduire la marge d’intérêt. Au Nigéria, par exemple, la participation des banques panafricaines aux opérations d’open market a permis de modérer le niveau de la structure des taux. En Ouganda, elle a intensifié la concurrence dans le secteur bancaire et sans doute aussi renforcé le canal des taux d’intérêt, même si les preuves empiriques font toujours défaut. Dans d’autres pays, il est trop tôt pour discerner l’impact sur le canal des taux d’intérêt.
Canal du cours de change
Dans les économies ouvertes à régime de change flexible, le canal du cours de change peut constituer un puissant mécanisme de transmission de la politique monétaire. Ainsi, une expansion monétaire aurait tendance à faire baisser le taux d’intérêt réel et à induire une dépréciation de la monnaie. Le cours de change est, en outre, un signe très clair des conditions monétaires dans les pays où des statistiques ne sont pas forcément disponibles. C’est pourquoi les banques centrales dans des pays comme le Ghana, le Kenya, Maurice et le Maroc ont indiqué que le canal du cours de change est un des mécanismes de transmission de la politique monétaire les plus importants14. Dans plusieurs pays, les banques étrangères qui participent activement au marché des changes peuvent aussi influer sur les conditions monétaires et le cours de change. C’est apparemment le cas au Nigéria, où les banques panafricaines prennent part aux adjudications de devises. Au Malawi, selon l’évolution du change, les banques panafricaines retirent ou injectent, dans le système, des devises obtenues en partie auprès de leur société mère. Si les dépôts et prêts qu’elles détiennent sont, pour l’essentiel, en monnaie locale, il y a aussi une part non négligeable de dépôts et prêts en devises et donc la possibilité de substituer les monnaies.
Les banques interviennent comme intermédiaire entre l’épargne (les dépôts) et les prêts à des fins d’investissement ou de consommation. Le ratio d’intermédiation, à savoir le ratio prêts/dépôts, qui est relativement faible en Afrique par rapport à d’autres régions (tableau 1), a néanmoins un impact sur l’efficacité de la politique monétaire. Les opérations des banques panafricaines ont-elles stimulé le ratio d’intermédiation ? Il est encore trop top pour le dire avec certitude. Premièrement, les banques panafricaines ont dans une certaine mesure remplacé les banques nationales ou les autres banques étrangères en achetant des établissements existants, souvent ceux qui avaient des difficultés financières. Elles exercent généralement leurs activités comme les banques nationales, avec toutefois des différences d’un pays à l’autre. Dans la mesure où elles peuvent contribuer à moderniser l’infrastructure, y compris en améliorant le système de paiement dans leur propre réseau, elles pourraient accroître le ratio d’intermédiation.