Le rayonnement laser
Les lampes ordinaires, lampes à incandescence, lampes à décharge (tubes fluorescents), LEDs (diodes électroluminescentes) émettent une lumière polychromatique, dans des directions multiples.
En revanche, un faisceau laser présente des caractéristiques particulières : cohérence spatiale : lorsqu’il se propage, y compris sur une grande distance, le faisceau reste parallèle et localisé ; lorsqu’il est arrêté par un obstacle, il se manifeste par une tache brillante presque ponctuelle ; cohérence temporelle : le faisceau est purement monochromatique ; il est caractérisé par une fréquence unique, autrement dit une longueur d’onde unique dans un milieu donné.
Ainsi, les photons d’un faisceau laser sont dans un seul mode de champ électromagnétique (une seule fréquence, une seule direction de propagation et une seule polarisation) : ils sont tous identiques.
Condition d’oscillation du laser
Pour que l’oscillation laser se mette en place, il faut introduire un gain d’amplification, proportionnel à la différence des populations des électrons excités et non excités N2 – N1 : en cas d’inversion de population, ce gain est positif.
Le laser démarre par émission spontanée : la lumière émise par émission spontanée dans le milieu actif est amplifiée au sein de la cavité optique. Pour que le phénomène de résonance ait lieu, il faut que pour chaque passage dans la cavité, le gain de l’amplification soit supérieur aux pertes. Le seuil de fonctionnement (on parle de condition d’oscillation) correspond à la situation où les deux grandeurs, gains et pertes, sont égales. En dessous du seuil, l’intensité de l’onde dans la cavité est négligeable. Au-dessus du seuil, un faisceau laser est émis.
La principale cause de pertes est due aux miroirs, ceux-ci n’étant pas totalement réfléchissants. C’est nécessairement le cas pour le miroir de sortie qui doit laisser passer le faisceau émis par le laser. D’autres pertes peuvent également exister dans la cavité, soit par absorption ou diffusion au niveau des miroirs, soit au niveau des autres éléments optiques qui la composent (par exemple, réflexion aux interfaces avec le milieu amplificateur, ou diffraction). Lors de la conception du laser on cherche en général à les limiter autant que possible.
Dans le cas d’un milieu amplificateur de faible gain, il faut que les pertes de la cavité soient faibles pour que la condition « gain supérieur aux pertes » soit satisfaite. C’est notamment le cas pour la plupart des lasers à gaz : les miroirs de la cavité doivent donc être très réfléchissants pour obtenir l’effet laser (de l’ordre de 99% pour le miroir de sortie). En revanche, pour des lasers présentant un gain très important (en particulier les diodes lasers utilisant des matériaux semi-conducteurs), les miroirs de la cavité sont obtenus en clivant les faces du matériau, et leur coefficient de réflexion, dû à la différence d’indice optique entre celui-ci et l’air, est de l’ordre de 30%. Cette condition d’oscillation dépend de la longueur d’onde .
Propriétés de la lumière laser
Grâce à l’émission stimulée, les photons produits par le faisceau laser sont identiques : de même fréquence : la lumière du laser est monochromatique (en toute rigueur, il existe une largeur spectrale, mais très fine) ;
de même phase : le rayonnement est directif (en toute rigueur, le faisceau est légèrement divergent, mais selon un angle très faible).
La puissance lumineuse émise est concentrée au niveau du « spot laser » : l’intensité du faisceau (relation entre puissance lumineuse et surface) peut dépasser celle du rayonnement solaire reçu sur Terre (1 kW/m2 ), même pour des lasers de faible puissance : il y a une concentration spatiale de l’énergie. En termes de sécurité, il convient ainsi de manipuler un laser avec précaution, car le faisceau peut occasionner des dommages oculaires irréversibles au niveau de la rétine. Enfin, certains lasers émettent en continu, tandis que d’autres émettent par impulsions, c’est-à-dire par émissions très brèves mais très intenses de photons. Ce type de laser permet, par concentration temporelle de l’énergie, d’atteindre des puissances considérables, de l’ordre du gigawatt (cas des lasers picosecondes ou femtosecondes).
L’énergie développée par le laser est ensuite conduite jusqu’à la cible grâce à une fibre optique de diamètre variable. L’interaction laser-matière dépendra alors : de la structure de la matière ; de la longueur d’onde λ du laser ; des réglages puissance/énergie du laser ; du mode laser : ondes pulsées ou continues ; de la technique d’utilisation du laser.
Modes d’action des lasers
Il est possible de proposer une classification de l’interaction laser / matière selon quatre types d’effets. Ceux-ci dépendent du temps d’exposition et par conséquent, de l’irradiance (puissance par unité de surface) appliquée .
On distingue ainsi : l’effet photomécanique, obtenu avec des impulsions de 10-15 à 10-9s, et des irradiances de l’ordre de 107 à 1012 W/cm2 ;
l’effet photoablatif, obtenu avec des impulsions de 10-9 s à 10-8 s ; plus que l’irradiance, c’est le domaine spectral qui est important pour cet effet, qui nécessite des photons énergétiques ; l’effet photothermique, obtenu avec des impulsions de 10-3 s à quelques secondes, et des irradiances de l’ordre de 101 à 106 W/cm2 ;
l’effet photochimique, obtenu uniquement en combinaison avec un photosensibilisant, avec des durées d’illumination s’étendant de la dizaine de secondes à la dizaine de minutes et des irradiances généralement très faibles.
Effet photomécanique : C’est une action disruptive : lorsqu’une impulsion laser très courte (de durée inférieure à 10-9 s) est focalisée sur une cible, créant une irradiance élevée (supérieure à 1010 W/cm2 ), il se produit localement des champs électriques élevés, de l’ordre de 106 à 107 V/m, comparables aux champs atomiques ou intramoléculaires. Il se forme alors un plasma. L’expansion du plasma engendre des variations de pression importantes, et cette onde de choc induit une rupture mécanique de la structure. Cet effet est notamment obtenu par les lasers Nd:YAG, en ophtalmologie (destruction de membranules de l’œil) ou en dermatologie (traitement de lésions pigmentées ou détatouage).
Effet photoablatif : Appelé également décomposition ablative, il est fondé sur l’utilisation de photons d’énergie supérieure à l’énergie de liaison des molécules : il y a alors dissociation ou rupture de la matière et expulsion de fragments à une vitesse supersonique. Des photons ayant une énergie de l’ordre de 3 à 5 eV sont susceptibles de dissocier des liaisons peptidiques ou des liaisons carbone-carbone des chaînes polypeptidiques.
Cet effet est particulièrement utilisé en ophtalmologie (technique LASIK, pour la chirurgie réfractive de la cornée).
Effet photothermique : L’action thermique des lasers constitue actuellement le mécanisme prédominant des applications thérapeutiques des lasers. L’effet thermique regroupe un large groupe d’interactions, caractérisées par un changement de température significatif au sein du matériau illuminé par le laser. Cet effet est l’aboutissement d’un processus complexe comprenant trois phénomènes : conversion de la lumière en chaleur, transfert de la chaleur dans le matériau, réaction du matériau, dépendant de la température.
En fonction de la durée d’échauffement et de l’élévation de température du matériau, plusieurs modifications peuvent se produire .
Effet photochimique : Le plus souvent nommé photothérapie dynamique, il consiste à sensibiliser sélectivement un tissu par administration d’un photosensibilisant, puis à le détruire par une activation lumineuse spécifique du photosensibilisant. L’excitation du photosensibilisant initie par transfert d’énergie une cascade de réactions cytotoxiques. La présence du photosensibilisant est une condition requise pour l’obtention de cet effet photochimique.
Intérêt du laser en endourologie pour la chirurgie prostatique
Comme évoqué précédemment, le large champ d’applications du laser Ho:YAG, tant au niveau du traitement des calculs urinaires qu’au niveau tissulaire, en a fait un outil incontournable de l’équipement de l’urologue. Concernant les applications tissulaires, celles-ci sont dominées par les indications de traitement de l’hypertrophie bénigne de la prostate, mais concernent aussi le traitement des tumeurs urothéliales, les endopyélotomies et les incisions de sténoses urétérales. Cette thèse se focalisera avant tout sur l’application tissulaire prostatique, puisque la chirurgie de l’hypertrophie bénigne de la prostate est l’une des chirurgies urologiques les plus fréquentes avec environ 60.000 interventions réalisées chaque année en France.
La prise en charge chirurgicale de cette pathologie s’est considérablement modifiée au cours des quinze dernières années. La chirurgie ouverte, qui représentait un standard thérapeutique pour les prostates de gros volume, a progressivement laissé sa place à des techniques endoscopiques moins morbides. De la même manière, la résection transurétrale de la prostate (RTUP) au courant monopolaire a évolué vers l’utilisation d’un courant bipolaire ou vers des techniques lasers . Ces évolutions technologiques ont été déterminantes pour l’obtention d’une réduction de la morbidité périopératoire et des durées de séjour hospitalier. Néanmoins, certains risques urinaires et sexuels persistent, ce qui incite les urologues à se tourner vers des techniques alternatives encore moins invasives et plus adaptées au respect de la qualité de vie globale des patients.
Laser Ho:YAG
Développé à la fin des années 1980, le laser actuellement le plus répandu pour l’énucléation prostatique est un laser solide à matrice cristalline, grenat d’yttrium et d’aluminium dopé à l’holmium (laser Ho:YAG), pompé par une lampe à flash. Il délivre un rayonnement par impulsions discontinues, très efficaces pour la lithotritie, et émet à une longueur d’onde λ = 2120 nm. Du fait de ses performances intéressantes et de sa facilité d’utilisation, la technologie Ho:YAG s’est rapidement répandue.
Ses indications se sont largement étendues depuis le début des années 2000, et le laser Ho:YAG est devenu depuis environ 10 ans la référence du traitement endoscopique pour l’énucléation laser prostatique. Malgré sa large diffusion, la technologie Ho:YAG connait certaines limites.
Limite technologique : longueur d’onde non optimale La nature exacte de l’interaction entre le rayonnement laser et la matière fait toujours l’objet de controverses. La longueur d’onde λ = 2120 nm n’est pas parfaitement corrélée au pic d’absorption de l’eau dans les tissus qui est de 1940 nm. Il en résulte une précision sous optimale lors de l’incision tissulaire du fait de lésions thermiques périphériques à la zone traitée de l’ordre de 400 à 500 µm, pouvant conduire à un tissu cicatriciel et donc un effet inverse de celui recherché lors du traitement de sténoses par exemple .
Limite technologique : matrice non optimale La lampe (xénon ou krypton) émet une lumière de spectre large alors que le cristal YAG dopé à l’holmium produit un faisceau lumineux monochromatique (à spectre étroit). La lumière non exploitée est transformée en chaleur dans la cavité optique, nécessitant un système de refroidissement à eau, rendant le générateur volumineux. Seuls 1 à 2% de cette énergie servent au pompage optique .
Le cristal YAG est un milieu relativement volumineux, qui génère un faisceau large, de l’ordre de 300 µm. Celui-ci doit être collimaté pour pénétrer dans des fibres optiques de plus petit calibre. Ce défaut de congruence nécessite le recours à des systèmes optiques (lentilles), qui peuvent augmenter le coût de maintenance. Alors qu’un rayon bien guidé pénétrera dans le cône d’acceptance de la fibre, un rayon mal guidé, en dehors de ce cône d’acceptance, sera réfracté à l’entrée de la fibre : l’énergie du rayonnement sera alors absorbée par le connecteur, résultant en une perte de signal, avec de surcroît le risque que le faisceau ne pénètre pas entièrement dans le noyau de la fibre mais aussi dans sa gaine, à l’origine d’un endommagement de celle-ci.
Table des matières
INTRODUCTION
1. Généralités
2. Laser : définitions, principes de fonctionnement
2.1. Notion d’ondes électromagnétiques
2.2. La lumière
2.3. Le rayonnement laser
2.4. Amplification stimulée de rayonnement
2.5. Condition d’oscillation du laser
2.6. Propriétés de la lumière laser
2.7. Géométrie du faisceau
2.8. Différents types de lasers
2.9. Modes d’action des lasers
2.10. Caractéristiques d’un laser pulsé
3. Historique des lasers en urologie
4. Comparaison des lasers Ho:YAG et TFL
4.1. Intérêt du laser en endourologie pour la chirurgie prostatique
4.2. Laser Ho:YAG
4.3. Le TFL
OBJECTIFS
MATERIEL ET METHODES
1. Générateurs laser utilisés
2. Fibres laser
3. Solvant
4. Analyses statistiques
Objectif n°1
1. Etude de la gaine externe de la fibre laser
2. Etude des facteurs influençant la dégradation de la fibre laser
3. Etude de l’évolution de la puissance au cours du temps
Objectif n°2
1. Etude du profil impulsionnel
2. Etude des bulles de vapeur
3. Modèle utilisé pour l’étude des modes d’action des lasers Ho:YAG et TFL
4. Etude des modes d’action des lasers Ho:YAG et TFL
4.1. Etude de la transmission de l’énergie laser dans l’air et dans le sérum physiologique
4.2. Etude de la pression des bulles de cavitation
4.3. Protocole expérimental pour l’étude des modes d’action des lasers Ho:YAG et TFL
Objectif n°3
1. Détermination du modèle tissulaire
2. Analyse des effets tissulaires selon les différents paramètres laser
RESULTATS
Objectif n°1
1. Etude de la gaine externe de la fibre laser
2. Etude des facteurs influençant la dégradation de la fibre laser
3. Etude de l’évolution de la puissance au cours du temps
Objectif n°2
1. Préambule
2. Etude du profil impulsionnel
3. Etude des bulles de vapeur
3.1. Forme des bulles
3.2. Taille des bulles
3.3. Durée de vie des bulles
4. Etude des modes d’action des lasers Ho:YAG et TFL
4.1. Etude de la transmission de l’énergie laser dans l’air et dans le sérum physiologique
4.2. Etude de la pression des bulles de cavitation
4.3. Etude des modes d’action des lasers Ho:YAG et TFL
Objectif n°3
1. Détermination du modèle tissulaire
2. Analyse des effets tissulaires selon les différents paramètres laser
DISCUSSION
Objectif n°1
Objectif n°2
Objectif n°3
CONCLUSIONS
BIBLIOGRAPHIE