Concilier protection de l’eau et activités agricoles
Intervention de M. François MERLE, rapporteur de la commission environnement et milieux naturels de la Communauté d’agglomérations Seine-Eure (27). Je viens de la Communauté d’agglomérations Seine-Eure, qui regroupe 62 000 habitants et 29 communes, à 25 kilomètres au sud de Rouen, en Haute-Normandie. Le projet que je vais vous présenter, dont on parle depuis 2006, vise à protéger notre ressource en eau et particulièrement un captage qui alimente 45 000 habitants et qui délivre environ 3,5 millions de m 3 d’eau par an. C’est un captage stratégique, puisqu’à lui seul il dessert les trois quarts des habitants de l’agglomération. Il est de plus relié à la Communauté de communes voisine, et peut servir en secours au cas où une communauté ait un problème en eau. Après les élections de 2008, les nouveaux élus décidèrent, non pas de sanctuariser la zone comme le préconisait l’Agence de l’eau — ce qui signifiait la rendre improductive et en faire un endroit où les gens puissent de promener —, mais de mettre en place une agriculture biologique. En effet, nous estimions que l’espace agricole ayant plutôt tendance à se réduire au profit de parcs d’activités, il était dommage de perdre les cent hectares concernés par le périmètre rapproché du captage.
Le projet des Hauts Prés s’inscrit dans une série d’actions qui sont destinées à reconquérir — à préserver — la qualité de l’eau, à la fois sur le plan chimique et sur le plan physique. Nous avons également des actions de restauration de la continuité écologique de l’Eure, la rivière qui traverse le territoire de la Communauté. Il y a un grand nombre de domaines sur lesquels nous intervenons autour de la thématique de l’eau au sens le plus large. Pour le projet d’agriculture biologique, nous voulons discuter avec les gens du golf du Vaudreuil qui se trouve à proximité pour que leurs pratiques n’aillent pas à l’encontre des nôtres, retravailler sur la zone humide Les Pâtures afin de lui rendre ses fonctionnalités d’autrefois, et créer un sentier pédagogique qui permette de rentrer en relation avec l’ensemble de la population par un certain nombre de panneaux d’information.
Concernant plus particulièrement le volet agricole, il a démarré il y a maintenant quatre ans. Initialement, ces 110 ha étaient valorisés par sept agriculteurs. C’était une petite partie de leurs exploitations, car l’agriculture, particulièrement dans l’Eure et dans le territoire de notre agglomération, est une agriculture marquée par des systèmes de production grandes cultures, du type blé, colza et maïs. Nous sommes entrés en discussion avec ces sept agriculteurs : il y en a un qui était proche de la retraite (et qui est décédé depuis), deux ont refusé la conversion en agriculture biologique, les autres se sont montrés intéressés. En parallèle, nous souhaitions mettre en place une zone de maraîchage, parce que nous nous étions rendu compte qu’il y avait une demande forte en légumes biologiques sur le territoire de l’agglomération et qu’il n’y avait pas de fournisseurs. La seule zone de maraîchage à proximité, dans la vallée de la Seine, n’est absolument pas biologique.
Pour la zone de maraîchage, nous avons utilisé les 30 ha laissés par l’agriculteur décédé. Nous avons fait deux appels à candidature et nous avons sélectionné cinq maraîchers individuels, une entreprise d’insertion qui va exploiter une dizaine d’hectares, et, ce qui nous a semblé intéressant, un apiculteur. Les quatre autres agriculteurs vont se partager les 80 ha qui restent : trois sont en conversion partielle, et un en totale.
Ces quatre agriculteurs avaient bien sûr des bâtiments, ce qui n’était pas le cas des nouveaux venus. La zone étant déclarée inondable, donc inconstructible, il fallait chercher à acquérir un bâtiment destiné au maraîchage. Il y en avait un en bout de la zone de captage, mais de 13 000 m 2, ce qui est gigantesque par rapport à notre projet. Après de nombreuses hésitations et d’âpres négociations — car les propriétaires en voulaient très cher — nous avons décidé de l’acheter.