La géologie exprime, face à la cartographie, le besoin de modéliser les objets géologiques en 3D et d’analyser ces modèles pour prendre des décisions plus éclairées.
Les études géologiques commencent généralement sur la recherche bibliographique suivie d’une descente sur le terrain pour les observations, les mesures et les prélèvements des échantillons. Elles se terminent par les travaux au laboratoire et surtout à l’élaboration d’une carte géologique de la zone étudiée permettant par la suite la construction d’un modèle 3D des structures géologiques.
Seules quelques cartes géologiques effectuées à Madagascar ont présenté une coupe géologique à partir d’un trait de coupe qui peut fournir beaucoup d’informations. Cette coupe nous donne une idée sur la disposition des couches suivant une ligne mais non une zone. Ainsi nous nous sommes posés la question «peut-on établir un modèle géologique en 3D d’une zone à partir de la carte géologique 2D ? » Pour pouvoir répondre à cette question nous avons effectué un levé géologique à Bemavo et à partir des observations et de la carte géologique ainsi confectionnée, nous avons mené des recherches sur la zone de contact du Granodiorite avec du gneiss à Bemavo en vue de l’établissement du modèle géologique de ce secteur.
Concepts liés à la modélisation géologique 3D (Bédard, 2006)
Modélisation géologique
Depuis toujours, les géologues conçoivent, dans leur esprit, les environnements géologiques en trois dimensions (Groshong, 1999; Kelk, 1992). Ces modèles de la Terre sont des images mentales du sous-sol formées à l’aide des données et interprétations disponibles et des raisonnements informés plutôt que par des prédictions quantitatives et mesurables de la géologie de la région (McGaughey et Morrison, 2001). Afin de représenter de façon tangible la géologie d’une région, on peut créer des modèles concrets qui permettent de formaliser ces images mentales d’environnements tridimensionnels.
La modélisation consiste à construire un modèle et à utiliser une représentation simplifiée de la réalité pour montrer les aspects importants du système étudié (OQLF, 2005). Les modèles statiques, qui n’intègrent pas explicitement la notion de temps, montrent un système à un temps spécifique et s’intéressent surtout aux structures de ce système (Fannader et Leroux, 1999). Une carte et une maquette sont des exemples de modèles statiques. Un diagramme de classe décrivant les données qui composent un système est aussi un modèle statique mais qui peut être appelé modèle conceptuel de données car on y décrit théoriquement les objets que l’on trouve dans le système (Fannader et Leroux, 1999).
Dans le cadre de ce mémoire, le terme « modèle » correspond toujours à un modèle statique qui est une simplification d’un environnement spatial tridimensionnel. Avant de décrire la modélisation spécifique au domaine de la géologie et afin de s’assurer d’une bonne compréhension des explications subséquentes, il importe de définir ce qu’est une dimension et comment cette notion est utilisée dans ce mémoire. Tel que discuté par Larivée et al. (2006) plusieurs définitions existent pour le mot dimension : axe d’analyse dans un entrepôt de données, en informatique ; étendue d’un corps suivant une direction donnée, en mathématique ; grandeur réelle, mesurable déterminant l’espace occupé par un corps, en physique ; etc. (OQLF, 2005). Dans ce mémoire, une dimension est définie comme chacune des grandeurs (longueur, largeur, hauteur ou profondeur) nécessaires à la description géométrique des objets.
Objets géologiques à modéliser
Selon Mallet (2002), la modélisation géologique correspond à : « l’ensemble des méthodes mathématiques qui permettent de représenter de façon unifiée la topologie, la géométrie et les propriétés physiques des objets géologiques, tout en considérant les données de toutes sortes rattachées à ces objets ». Le processus de modélisation permet donc de représenter de façon simplifiée des objets géologiques. L’assemblage de ces simplifications d’objets de la réalité en un tout cohérent et logique forme le modèle géologique. En géologie, les objets à représenter peuvent être des unités géologiques (lithologiques ou stratigraphiques), des éléments structuraux (failles et fractures), des gisements de minerais et des réservoirs de combustible fossile, etc. Les paragraphes suivants montrent comment sont habituellement modélisés ou représentés ces objets.
Les unités géologiques sont des volumes de roches ayant des caractéristiques communes qui sont soit lithologiques, même type de roches, ou stratigraphiques, même âge, par exemple (OQLF, 2005). Les frontières entre les unités sont communément appelées « contacts géologiques » ou « horizons » ; dans le langage géologique elles représentent le sommet, la base ou le pourtour des unités. Il est donc possible de représenter les unités par leur frontière ou à l’aide de volumes. À des fins de visualisation, il est souvent utile de représenter les unités par leurs frontières puisqu’on évite ainsi de surcharger le modèle géologique et on en obtient une visualisation plus claire. Cependant, pour des analyses volumiques plus poussées, il convient mieux de représenter les unités géologiques en entier par des volumes pleins auxquels on peut assigner des propriétés qui varient à l’intérieur même de l’objet. Les trois unités géologiques sont modélisées à l’aide des surfaces verte et bleue qui en sont les frontières. On distingue une unité sous la surface bleue, une unité entre les deux surfaces et une unité au-dessus de la surface verte.
Parmi les structures géologiques que l’on représente dans les modèles géologiques, les failles sont parmi les plus importantes, du point de vue de la modélisation géologique 3D, car elles créent des divisions spatiales dans les environnements géologiques. Une faille est une fracture de la Terre le long de laquelle il y a eu un déplacement des roches environnantes (USGS, 2004). Le mouvement observé et à représenter peut être vertical, latéral ou oblique selon le type de faille : normale, inverse, de chevauchement, de décrochement ou oblique (Monroe et Wicander, 1995). Remarquez que les unités géologiques peuvent être distinguées grâce à leurs couleurs et textures différentes. Les flèches noires indiquent que les blocs faillés à droite des failles ont subi un déplacement vers le bas par rapport aux blocs à gauche des failles. Les lignes blanches pointillées montrent le contact entre deux unités géologiques qui ont été déplacés par le mouvement des failles.
Exemples de modèles géologiques
Les modèles classiques utilisés pour représenter le sous-sol sont les cartes géologiques associées à des coupes verticales. Une carte est : « une représentation conventionnelle généralement plane, à échelle réduite, de phénomènes concrets ou abstraits, localisables dans l’espace et le temps » (OQLF, 2005). La carte géologique utilise particulièrement des lignes, des polygones, des symboles et des couleurs conventionnels pour montrer la distribution des éléments géologiques (types de roches et de structures, présence de fossiles ou de minéralisation, etc.) à la surface de la Terre (Jachens et al. 2001; Monroe et Wicander, 1995; Thurmond et al. , 2005). Comme cette carte ne présente que la géologie à la surface de la Terre, des plans verticaux, appelés coupes, sections ou longitudinales, montrant la distribution en profondeur des unités et structures géologiques lui sont combinés afin d’améliorer la compréhension du sous-sol (Barnes, 1995; Groshong, 1999). Ces coupes nous permettent de visualiser la géologie en profondeur dans toute sa complexité ; ce que ne nous offre pas la carte seule. Sans la coupe, il est impossible, pour la majorité des gens, de représenter la géométrie des unités géologiques sous la surface, de comprendre comment s’agencent les unités déformées et déplacées par les failles et les plis.
La carte et la coupe géologique sont chacune des modèles bidimensionnels de la réalité car elles sont des représentations d’environnements géologiques naturellement tridimensionnels sur un média ayant deux dimensions. Il existe cependant certains inconvénients à l’utilisation des cartes associées à des coupes verticales : comme la géologie en profondeur n’est représentée que sur un plan, tout le reste du sous-sol peut être interprété de diverses façons par différents spécialistes (Aillères, 2000; Brodaric et al. , 2004; Kelk, 1992). D’autre part, les cartes et les coupes sont des simplifications de la réalité qui ne représentent qu’une interprétation d’un spécialiste et elles ne représentent pas toutes les données d’origine. De plus, il peut être difficile d’interpréter correctement la géologie qui se trouve entre deux coupes parallèles lorsque que l’environnement géologique est très complexe et déformé. Il faut donc s’assurer que chaque géologue qui utilise ces modèles 2D, créés par un autre géologue, interprète correctement en trois dimensions ce qu’il voit sur deux ou plusieurs plans.
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