Conception et réalisation d’un interrupteur
bidirectionnel silicium pour des applications secteur
Les interrupteurs de puissance sur silicium
Les systèmes de conversion d’énergie électrique, utilisés en électronique de puissances, sont constitués principalement de convertisseurs statiques d’énergie, dont la fonction première est de traiter l’énergie électrique circulant entre une source et sa charge. Ces convertisseurs, à leur tour, sont composés essentiellement d’interrupteurs à base de composants à semi-conducteur de puissance (IGBTs, MOSFETs, GTOs, transistors bipolaires, triacs, thyristors, diodes). Le rôle d’un interrupteur de puissance est d’autoriser ou de stopper le passage du courant. Il présente deux états statiques (état bloqué et état passant) et il doit remplir les fonctions suivantes : Ø À l’état bloqué : supporter des tensions élevées (de quelques centaines de volts à plusieurs kV) avec un faible courant de fuite. Ø À l’état passant : conduire un courant élevé (de quelques A à plusieurs kA) avec une faible tension à leurs bornes. Ø En commutation : commuter le plus rapidement possible afin de réduire autant que possible les pertes en commutation. À ce jour, aucun interrupteur de puissance développé ne satisfait les trois exigences simultanément, ce qui nécessite de choisir l’interrupteur pour un domaine d’application spécifique. En électronique de puissance, la classification des interrupteurs à semi-conducteur se fait en fonction de besoins imposés par la nature des sources d’énergie (continue ou alternative, de courant ou de tension) et de l’application ciblée, ainsi que par les propriétés des composants [3]. Selon les applications, les composants de puissance peuvent être : Ø Des interrupteurs qui peuvent conduire le courant dans un sens et supporter des tensions négatives (ou positives), on parlera d’interrupteurs unidirectionnels en courant et en tension, comme le cas de la diode (figure I.3.a). Ø Des interrupteurs qui peuvent conduire le courant dans les deux sens et supporter des tensions positives (ou négatives), on parlera d’interrupteurs bidirectionnels en courant et unidirectionnels en tension, comme le cas du thyristor dual (figure 1.3.b). Ø Des interrupteurs qui peuvent conduire le courant dans un sens et supporter des tensions positives et négatives, on parlera d’interrupteurs unidirectionnels en courant et bidirectionnels en tension, comme le cas des RB-IGBT (figure 1.3.c). Ø Des interrupteurs qui peuvent conduire le courant dans les deux sens et supporter des tensions négatives et positives, on parlera d’interrupteurs bidirectionnels en courant et en tension, comme le cas du triac (figure 1.3.d). Le choix de l’interrupteur de puissance adapté à une application donnée se fait selon les critères suivants : mode de commande souhaitée, tension de blocage et courant à faire transiter, fréquence de commutation désirée, bidirectionnalité en courant, bidirectionnalité en tension et parfois bidirectionnalité en courant et en tension.
Interrupteurs bidirectionnels en courant et en tension sur silicium
Les applications sur réseau alternatif nécessitent l’utilisation d’interrupteurs bidirectionnels en courant et en tension. Cette bidirectionnalité peut être assurée en synthétisant la fonction par l’association de plusieurs composants ou en utilisant un seul dispositif intégré monolithiquement. 2.1- Synthèse de la fonction par association d’éléments discrets Dans certaines applications, les dispositifs de puissance unilatéraux et commandés par MOS, comme l’IGBT, le MCT, le MOSFET, sont souvent associés à des diodes pour réaliser ces interrupteurs bidirectionnels en courant et en tension. Des exemples d’associations de ce type d’éléments pour réaliser des interrupteurs bidirectionnels sont donnés sur la figure I.4. a. b. c. d. e.L’interrupteur dans l’assemblage donné par la figure I.4.a est facile à commander. En effet, un seul interrupteur est utilisé dans ce pont de diodes. Mais son inconvénient est qu’il présente une chute de tension importante à l’état passant. Ceci est dû au fait que le courant, à l’état passant, traverse trois composants : deux diodes et un transistor. L’interrupteur donné par la figure I.4.b, par rapport au précédent, permet de diminuer la chute de tension à l’état passant : une diode et un transistor conduisent durant chaque alternance. Toutefois, il nécessite deux éléments unidirectionnels et exige l’utilisation d’un circuit auxiliaire pour pouvoir décider, selon l’alternance, qui des deux dispositifs unidirectionnels doit conduire, ce qui rend son coût de réalisation plus élevé comparé à celui de la figure I.4.a. Outre ce problème, l’interrupteur de la figure I.4.b utilise deux éléments unidirectionnels commandés par des grilles MOS référencées par rapport à deux potentiels différents. Pour une commande par rapport à une seule électrode de référence, une alternative peut être l’utilisation de deux BJT et deux diodes, ou des interrupteurs unidirectionnels et bidirectionnels commandés en tension 14 Les interrupteurs de puissance adaptés pour telle ou telle application sont généralement choisis pour leurs modes de commande souhaitées, la tension de blocage et le courant à faire transiter , la fréquence de commutation désirée, la bidirectionnalité en courant, la bidirectionnalité en tension et parfois la bidirectionnalité en courant et en tension.
Evolution des structures IGBTs unidirectionnelles en courant
L’un des critères de sélection des composants de puissance est leur commande. Il existe des composants commandables en courant tels que le transistor bipolaire et le triac. Ce genre de commande est toutefois complexe et relativement gourmande en puissance. Il existe également des composants commandés en tension tels que le MOSFET et l’IGBT. Ces dispositifs sont caractérisés par une très grande impédance d’entrée et nécessitent une puissance de commande relativement faible comparée aux dispositifs commandés en courant. Cette caractéristique permet de réduire la complexité du circuit de commande, qui doit simplement fournir assez de courant pour charger et décharger les capacités internes de ces composants [3]. La structure IGBT associe les avantages du transistor bipolaire en conduction et du transistor MOSFET en commutation. De ce fait, l’IGBT est devenu l’un des composants le plus utilisé en électronique de puissance pour des applications allant jusqu’à 10 kW avec des fréquences pouvant atteindre 20 kHz [4]. Les avantages apportés par la structure IGBT dans les applications de puissance depuis sa commercialisation ont stimulé la recherche sur ce composant afin d’améliorer constamment ses performances et par conséquent élargir son champ d’application. Cela a conduit par conséquent à l’émergence d’un grand nombre de structures dérivées de la structure IGBT classique. Dans ce qui suit, nous décrirons brièvement quelques structures IGBTs unidirectionnelles proposées dans la littérature, ou encore l’association de deux IGBT-diodes, comme présenté figure I.4.d. L’association de deux thyristors montés en anti-parallèle (figure I.4.e) permet une chute de tension équivalente à celle d’un thyristor, mais présente le même inconvénient de commande que l’interrupteur de la figure I.4.b. En outre, le thyristor est commandable uniquement à la fermeture.
Interrupteurs monolithiques bidirectionnels en courant et en tension
Interrupteurs commandés en courant
Les potentialités offertes par les dispositifs p-n-p-n, basés sur l’empilement de quatre couches semi-conductrices alternées p-n-p-n, comme commutateurs de puissance ont été constatées, pour la première fois, par Moll [5]. Quelques années plus tard, des dispositifs de puissance à trois électrodes, adaptés aux applications de réglage de phase et pour fonctionner comme commutateurs statiques, ont été développés et commercialisés [6]. Ces dispositifs sont groupés sous l’appellation anglo-saxonne SCR pour Silicon Controlled Rectifier. Cependant, ces SCR sont des dispositifs unidirectionnels en courant, c’est à dire, lorsqu’ils sont à l’état ON, ils ne conduisent le courant que dans une seule direction. Le développement de ces dispositifs bidirectionnels n’a connu son véritable essor qu’avec l’innovation du concept appelé « les courts-circuits d’émetteur ». Ce concept a permis non seulement le développement de dispositifs bidirectionnels, mais il a également permis l’amélioration des caractéristiques des SCR. Dans les structures bidirectionnelles en courant et en tension, la section élémentaire qui assure la conduction durant chaque alternance correspond à une structure thyristor. Dans le paragraphe suivant, nous allons décrire les caractéristiques de ce dispositif qui nous seront utiles pendant la description des dispositifs bidirectionnels. i- Thyristor Le thyristor est l’une des premières réalisations en intégration fonctionnelle dans le domaine de la puissance. Ce dispositif (figure I.5.a) est constitué, fondamentalement, de quatre couches semiconductrices p-n-p-n alternées. Lorsqu’un potentiel négatif est appliqué à l’anode par rapport à la cathode, les jonctions J1 et J3 sont polarisées en inverse et supportent la tension. Le courant traversant la structure a une intensité très faible. C’est le régime bloqué inverse pour lequel la limite en tension est associée soit au mécanisme de multiplication par avalanche, soit au perçage. Lorsque le potentiel de l’anode est positif par rapport à la cathode, le thyristor peut se trouver dans deux états électriques différents : Ø Le régime direct bloqué qui correspond aux jonctions J1 et J3 en direct tandis que J2 est polarisée en inverse et supporte la tension appliquée. L’intensité de courant qui traverse la structure dans ce cas-là est faible. Ø Le régime direct passant qui correspond à un état dans lequel le thyristor présente une impédance faible. Les trois jonctions J1, J2 et J3 sont passantes (fonctionnement en régime saturé pour les transistors). Le passage du courant est lié à l’existence d’une charge stockée de porteurs minoritaires dans les bases P et N. Si cette charge décroît au-dessous d’un certain seuil, qui correspond au courant de maintien IH, la jonction J2 se bloque et le thyristor retrouve son état bloqué.
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