Les systèmes de fermeture du sternum sont utilisés lors de l’étape finale d’une opération à cœur ouvert. Ces systèmes sont pour la plupart permanents, c’est-à-dire qu’ils demeurent sur le patient à vie. Actuellement, il existe trois grandes catégories de systèmes : les fils d’acier inoxydable, les rubans d’acier inoxydable ou de fibres plastiques ainsi que les agrafes, qui sont le plus souvent en acier inoxydable, mais peuvent aussi être en alliage à mémoire de forme.
Ces systèmes de fermeture présentent certains problèmes qui peuvent entraîner des complications postopératoires telles que le bris du sternum ou une hémorragie interne suite à la coupure des tissus musculaires. Ainsi, certains systèmes présentent une faible aire de contact entre l’os et le système, ce qui induit une contrainte élevée à l’interface et une détérioration des tissus osseux. D’autres systèmes présentent une rigidité trop élevée, ce qui complexifie les manipulations lors du processus d’installation et diminue l’ adaptabilité à la géométrie variable du sternum. Enfin, certains systèmes sont trop souples et peuvent entraîner la séparation du sternum. De telles complications sont plus fréquentes chez certaines populations à risque : par exemple, les personnes âgées, obèses, diabétiques, ayant des difficultés respiratoires ou souffrant d’ostéoporose.
Par la modification de la géométrie des systèmes existants ainsi que par l’introduction de nouveaux matériaux comme les alliages à mémoire de forme, le présent mémoire a donc pour objectif de développer un système à la fois souple et rigide, de réduire les contraintes appliquées sur le sternum, et par le fait même, de diminuer les risques de complications.
La conception d’un nouveau système de fermeture intégrant une nouvelle géométrie et des matériaux inusités demande de bien connaître l’environnement biomécanique et le matériau que l’on désire intégrer. De plus, il faut être en mesure de développer des techniques pour le comparer aux systèmes qui existent déjà sur le marché de façon à valider les avantages qu’il peut apporter.
En premier lieu, un aperçu de ce qu’est la sternotomie et des moyens présentement utilisés pour la refermer est fait. Par la suite, une description des alliages à mémoire de forme permet de comprendre les phénomènes qui s’y rattachent et de mieux comprendre leurs avantages lorsqu’ils sont utilisés pour la fabrication d’implants. Pour finir, les différents modèles utilisés pour caractériser les systèmes de fermeture existants sont comparés pour en comprendre les avantages et les inconvénients.
Sternotomie et fermeture du sternum
L’opération à cœur ouvert, ou sternotomie, constitue encore l’opération la plus courante lors des pontages coronariens, des transplantations cardiaques et de plusieurs autres opérations touchant les organes se trouvant à l’intérieur de la cage thoracique (690 000 opérations aux États-Unis en 2001 [1]). Elle permet d’obtenir une voie d’accès aux organes internes de la cage thoracique et consiste, concrètement, en la séparation du sternum à l’aide d’une scie. Cette opération cause problème (infection, bris du sternum) dans environ 2% des cas [2]. Les problèmes reliés aux infections et à la rupture du sternum apparaissent dans les premières semaines post-opératoires. En effet, même si le SDF reste en place sur le patient de façon permanente, le système n’est fonctionnel que durant un court laps de temps, soit environ 12 semaines. Après cette période, l’ossification s’est faite et le SDF n’agit plus [3].
Le sternum est un os long et plat qui fait la jonction entre les côtes de la cage thoracique . Il mesure environ 17 cm de long et est constitué de trois parties : le manubrium, le corps et la l’appendice xiphoïde. Enfin, l’extérieur du sternum est composé d’une mince couche d’os compacte et rigide (os cortical), tandis que l’intérieur est composé d’un tissu spongieux moins rigide et fortement vascularisé [5].
Une fois l ‘opération complétée, il faut refermer la cage thoracique. La fermeture du thorax consiste à mettre les deux parties du sternum en contact et à y appliquer une pression, pour que la fracture soit mise en compression. Cela limitera le mouvement relatif des deux parties en contact et favorisera l’ostéogenèse, c’est-à-dire la formation du tissu osseux [6]. Ainsi, les techniques de fermeture du sternum employées font généralement appel à l’ajout de liens,Une tension est appliquée sur les liens pour que la fracture soit effectivement mise en compression. Chacun des liens de la fermeture du sternum est défini comme étant un système de fermeture du sternum (SDF) alors que l’ensemble de ces liens forme le système de fermeture globale (SDFG).
Caractéristiques des systèmes de fermeture
D’abord, le système doit supporter les charges normales imposées par la respiration sans que le sternum se sépare. Il doit également maintenir le sternum fermé lors d’une quinte de toux, qui constitue en effet un chargement très sévère qui peut se répéter à plusieurs reprises durant la convalescence du sujet.
La technique de fermeture utilisée doit, avant toute chose, minimiser le mouvement relatif des deux parties en contact. Un système plus rigide minimisera les mouvements à l’interstice, de même qu’un système qui applique une forte contrainte sur l’os. Toutefois, si la pression de contact entre le système de fermeture et le sternum est déjà grande, le risque de rupture de l’os sera d’autant plus grand, si un chargement additionnel (par exemple, une toux) est appliqué.
Les liens utilisés par les différentes techniques de fermeture du sternum peuvent soit traverser l’os (transsternal) ou l’entourer en passant entre les côtes (péristernal). Tel que mentionné précédemment, la couche extérieure est la plus rigide. Lorsque le système passe transsternalement, la couche extérieure est transpercée. La principale barrière de protection est donc rompue, ce qui rend le SDF moins solide. Malgré ces limites, le passage transsternal est néanmoins apprécié des chirurgiens et très utilisé, car il évite de passer à travers la masse musculaire (péristernal). En effet, en passant à l’extérieur, le SDF passe à travers les muscles intercostaux externes, intercostaux internes et le triangulaire du sternum [5; 7]. Le système risque alors de couper les muscles et de causer une hémorragie interne.
Enfin, pour passer dans l ‘usage commun, ces systèmes doivent non seulement être rigides et supporter les charges normales imposées par la respiration, mais ils doivent aussi être composés d’un matériau biocompatible qui résistera au milieu biologique sans se dégrader, pendant toute la vie du patient. Au plan pratique, le système doit également être facilement manipulable par le chirurgien. En cas d’urgence postopératoire, les SDF doivent être aisément retirables par n’importe quel chirurgien dans n’importe quel établissement. Le retrait doit pouvoir s’effectuer à l’aide d’une paire de ciseaux ou de pinces. Il ne doit pas nécessiter d’outil spécial.
Systèmes de fermeture existants
La fermeture par fils est la première technique à avoir été proposée [8]. Elle demeure également la technique la plus populaire, car elle est simple d’utilisation. Quatre à huit fils [9] forment une boucle qui passe autour du sternum (péristemalement) ou à l’intérieur (transsternalement). Dans le dernier cas, le sternum est alors percé à l’aide de l’aiguille du fil de suture. Chaque boucle formée constitue un SDF. Initialement, des fils d’argent étaient utilisés, mais ils ont maintenant été remplacés par des fils d’acier inoxydable. La technique de suture par fils la plus populaire consiste à utiliser six fils simples, soit un fil sur le manubrium (partie supérieure du sternum) et cinq sur le corps du sternum.
Bien qu’il soit populaire, le SDF par fils n’est pas exempt de problèmes. Les fils exercent une très forte contrainte au point de contact entre le sternum et le système de fermeture. Cette forte contrainte est la cause d’une grave complication associée à la fermeture du sternum par fils : la rupture du sternum à la suite de son sectionnement par les fils du SDFG [10].
Ainsi, de nombreuses autres façons d’installer les fils ont été développées afin de diminuer les contraintes sur le sternum ou d’augmenter la rigidité du système [11]. Par exemple, Robicsek et al. [10] proposent d’ajouter aux fils péristernaux standards, deux autres fils longitudinaux passant autour des côtes sur lesquels les premiers fils viennent s’appuyer. Cela permet de diminuer la pression de contact. Une autre méthode populaire, décrite dans plusieurs ouvrages est la méthode «figure en 8 » qui consiste à croiser les fils derrière le sternum [12; 13]. Cette technique a pour but d’augmenter la rigidité dans la direction rostro-caudal. Une multitude d’autres systèmes par fils existent, dont certains sont par ailleurs décrits par Losanoff et al. [14].
D’autres systèmes, qui utilisent d’autres moyens que les fils, ont également été développés dans le but d’augmenter la rigidité et de diminuer la pression appliquée sur le sternum. Parmi ces systèmes, il y a: les rubans de Mersilene [15], les rubans d’acier inoxydable [16] et les agrafes [17-19].
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