Conception du pilote de laboratoire
Pour contrôler les conditions expérimentales de façon optimale, des appareils à faisceau UV collimaté sont généralement utilisés dans les études de dégradation des micropolluants (Pereira et al., 2012; Rosenfeldt et al., 2007) ou d’évaluation de la désinfection (Mamane et al., 2007; Zhang et al., 2014). Cette technique permet d’obtenir des rayons UV parallèles d’intensité contrôlée. Le système consiste à irradier une solution contenant une concentration connue en bactéries ou un ou plusieurs polluants organiques. Cette conformation statique permet à l’ensemble de l’échantillon irradié de recevoir une dose uniforme en fonction du temps d’exposition. Il est alors possible d’évaluer précisément des cinétiques d’abattement des microorganismes ou de dégradation de différents micropolluants. Néanmoins, ces conditions expérimentales sont très éloignées des conditions retrouvées dans des réacteurs UV commerciaux où le flux d’eau circule de façon continue. Ainsi, dans le cadre de cette étude, le choix s’est porté sur un système permettant de se rapprocher des conditions réelles d’utilisation tout en contrôlant les paramètres déterminants tels que : -le débit, -la température de l’eau, -la concentration initiale en micropolluants ou en bactéries, -la concentration initiale en oxydant, -la dose UV. Le pilote est conçu pour permettre d’évaluer à la fois l’efficacité de désinfection et les performances en matière de dégradation de différents micropolluants organiques. Pour cela deux modes de circulation ont été mis en place :-le mode continu (système ouvert) :il permet un seul passage de l’eau dans le réacteur pour atteindre des doses UV proches des doses réglementaires communément utilisées en désinfection UV (40 mJ/cm²) ; -le mode semi-continu (système fermé) :ce mode assure une recirculation de l’eau dans la cuve, il permet d’atteindre des doses UV élevées en multipliant le passage de l’eau dans le réacteur (≈ 1000 mJ/cm²).
Montage du pilote
Il permet de faire circuler l’eau jusqu’à un débit maximal de 40 L/min soit 2,4 m³/h. Dans ce cas, le temps de séjour dans le réacteur est d’environ 1,7 secondes. L’eau à traiter est stockée dans une cuve en verre de 60 Litres où sont directement injectées les solutions de microorganismes et de micropolluants ainsi que les oxydants. Le volume du réacteur est de 1,1 litre. Pour un volume de 40 litres, 38 litres sont contenus dans la cuve et 2 litres dans le système (tuyaux + réacteur). Une pompe permet d’injecter l’eau dans le système à un débit précis, mesuré par un débitmètre et contrôlé par une vanne. L’eau circule ensuite au sein du réacteur UV ou bien est redirigée vers la cuve par un circuit by-pass (Figure II.2). Ce dernier permet notamment d’homogénéiser la température du système et la concentration en micro-organismes ou en polluants organiques. En sortie du réacteur, l’eau est soit rejetée à l’égout dans le cas du mode continu, soit réinjectée dans la cuve dans le cas du mode semi-continu. Un serpentin en verre relié à un thermorégulateur en circuit fermé assure le maintien d’une température constante. Les températures de l’eau de la cuve et de la surface de la lampe sont mesurées en temps réel. Les données de débit, de température et de puissance UV sont intégrées et enregistrées en continu par l’intermédiaire d’un programme développé sous Labview.
Réacteur et lampe UV
Le réacteur UVC utilisé dans le système pilote est un réacteur commercial annulaire en INOX 216L (COMAP WT). Il s’agit d’une unité d’un module conçu pour la désinfection en station d’épuration (Figure II.3). L’irradiation UVC est produite par une lampe Philips basse pression d’une puissance électrique de 55 W. Les lampes UV basse pression contiennent du mercure sous forme de gaz à une pression d’environ 0,93 Pa. Les caractéristiques générales de la lampe sont présentées dans le Tableau II.1. Un courant électrique circule entre deux électrodes et chauffe la vapeur de mercure. Ce dernier émet alors un rayonnement UV principalement centré autour de 254 nm (environ 85 % du rayonnement). La lampe UV utilisée nécessite des ballasts ferro-magnétiques pour apporter le voltage suffisant qui engendre l’allumage de la lampe. La lampe, placée au centre du réacteur, est isolée de l’eau par un tube en quartz qui laisse passer près de 100% du rayonnement émis. La lame d’eau entre la paroi du réacteur et la lampe est de 1 cm permettant une pénétration des rayons UV même dans le cas d’une eau de faible transmittance (TUV). La lampe UV fournit une puissance germicide de 17,5 W (donnée constructeur) pendant 9000 heures. Une sonde UV (UV Technik) est insérée dans un filET Age situé au milieu du réacteur et donne la puissance UV en W/m² à ce point particulier du réacteur (à 1 cm de la lampe). La lampe est préchauffée au minimum 15 minutes avant l’utilisation du pilote .
Caractérisation et validation du pilote
Effet de la température sur l’efficacité de la lampe
L’efficacité de la lampe dépend de la pression du mercure. Or, cette pression varie en fonction de la température à la surface de la lampe qui dépend elle-même de la température de l’eau. Pour évaluer l’impact de la température sur le système en conditions réelles, le thermorégulateur a été réglé au minimum pour atteindre une température d’environ 10 °C. L’eau qui circule à un débit de 40 L/min, est progressivement réchauffée par la lampe elle-même jusqu’à 30°C. La puissnace UV, mesurée par une sonde UV Technik, a été enregistrée sur cette gamme de température qui correspond généralement à celle des eaux usées à traiter. La Figure II.4 montre que la puissance UV est près de 1,7 fois plus importante à 30 °C qu’à 10 °C (11 W/m²). Ce paramètre de température doit donc être parfaitement contrôlé sur le pilote afin de limiter la variation de la puissance UV entre deux expérimentations. Une température de 20 °C est maintenue tout au long des expérimentations sur le pilote, elle correspond à la température ambiante moyenne du laboratoire. Dans ces conditions expérimentales, la valeur de la puissance UV est de 16 W/m². Cette référence permet notamment de contrôler le bon fonctionnement ou l’usure de la lampe.
Détermination de la dose UV par biodosimétrie
Facteurs d’influence de la dose UV dans le pilote
Lorsque le système fonctionne en mode continu, il est possible de faire varier le débit et donc le temps de séjour de l’eau dans le réacteur dont dépend la dose UV. En effet, cette dernière, exprimée généralement en mJ/cm², est le produit de la puissance UV par le temps de séjour à un point donné du réacteur. Cette dose UV est l’un des paramètres les plus importants à connaitre lors des expérimentations car elle permet de comparer l’efficacité des traitements. Dans le cas du mode semi-continu, la dose UV dépend du débit et du volume d’eau initial dans la cuve. Ces deux paramètres peuvent donc être modifiés pour obtenir des doses UV différentes. La dose UV émise dépend de nombreuses variables, souvent interdépendantes telles que la géométrie du réacteur (nombre, espacement et puissance des lampes), les caractéristiques des gaines en quartz, la disposition de déflecteurs, la vitesse et la transmittance de l’eau.
Stratégie de calcul de la dose UV dans le pilote
La biodosimétrie consiste à utiliser un biodosimètre dont la sensibilité aux UV a été étalonnée en laboratoire. Il s’agit de la seule méthode de référence utilisée par les organismes de certification tels que l’ÖNORM, organisme de certification autrichien. Elle permet de déterminer la dose moyenne reçue par une particule élémentaire lors de son trajet dans le réacteur UV et prend donc en compte l’hydraulique du système. La biodosimétrie donne des valeurs précises de dose UV mais est contraignante à mettre en place. Il n’est pas concevable de l’utiliser avant chaque expérimentation. Néanmoins, il existe des logiciels commerciaux qui permettent de calculer une dose UV moyenne en fonction des paramètres du réacteur, du débit et de la transmittance. Dès lors, la stratégie choisie vise à valider l’un de ces logiciels par la méthode biodosimétrique. Par la suite, ce logiciel sera utilisé pour déterminer rapidement les doses UV moyennes atteintes lors des expérimentations sur pilote. Le choix s’est porté sur le logiciel UVCalc2A développé par la société Bolton Photosciences. En effet, il est déjà utilisé dans différents travaux de recherche (Sindelar et al., 2014; Wang et al., 2015). La version acquise permet de déterminer la dose moyenne émise dans un réacteur où le mélange de l’eau est supposé parfait. La dose obtenue est donc la dose UV maximale théorique. A cela doit donc être appliqué un facteur de correction qui peut être déterminé en fonction des résultats obtenus par biodosimétrie.