Composition d’une essence de FCC
Globalement, les essences issues du FCC, quelles que soient l’origine du brut et les conditions opératoires de l’unité de FCC, ont des compositions similaires en hydrocarbures et en composés soufrés et ne diffèrent que par leur teneur en soufre et leur point de coupe final. Classiquement les constituants d’une essence de FCC [4, 5] sont: • les paraffines et isoparaffines (~30% pds) et naphtènes (~10% pds) • les oléfines (~20 à 40% pds) et les dioléfines (1 à 2% pds) • les composés aromatiques (~20 à 40% pds) • des impuretés soufrées (500 à 5000 ppm poids S) et azotées (de l’ordre de 50 à 150 ppm poids N environ) Les composés soufrés présents dans les essences de FCC sont majoritairement de type thiophéniques ou benzothiophéniques (en fonction du point de coupe final de l’essence). Ces types de composés soufrés sont relativement peu réfractaires aux procédés classiques d’hydrotraitement. Les molécules soufrées majoritairement présentes sont le thiophène et ses dérivés méthylés courts (C1 à C4-Thiophène). Quelques ppm poids de soufre se trouvent sous forme de mercaptans et de sulfures (de l’ordre de 10 à 30 ppm poids). Les mercaptans sont les produits primaires de la recombinaison (addition de l’H2S sur les oléfines) et les sulfures les produits secondaires résultant de l’addition des mercaptans sur les oléfines, en effet lors du procédé de FCC, le craquage des composés thiophéniques et benzothiophéniques ne permet pas d’obtenir des mercaptans par ouverture de cycle ni des sulfures [6, 7]. La teneur en soufre total de l’essence dépend de la teneur en soufre de la charge traitée dans le FCC et des points de coupes de la fraction essence [4, 5]. Les variations de compositions sont liées principalement aux points de coupe de la fraction essence (Europe: 160 °C, USA: 210 °C). Quand le point de coupe final de l’essence est bas, les oléfines sont majoritaires. Quand le point de coupe est élevé, ce sont les aromatiques qui deviennent majoritaires. De plus, lorsque le point de coupe augmente, les teneurs en impuretés telles que le soufre et l’azote augmentent et des composés soufrés comme le benzothiophène et ses dérivés (méthylbenzothiophènes, dibenzothiophènes) deviennent présents dans la coupe essence. L’indice d’octane mesure la résistance à l’auto-allumage de l’essence utilisée dans un moteur à allumage commandé. On dit qu’un carburant a un indice d’octane de 95 par exemple, lorsque celui-ci se comporte, au point de vue auto-allumage, comme un mélange de 95% d’iso-octane qui ne détone pas (son indice est de 100 par définition) et de 5% d’heptane, qui lui est très détonant (son indice est de 0 par définition). Parmi les composés oléfiniques, les oléfines ramifiées sont majoritaires par rapport aux oléfines linéaires et cycliques. Les oléfines contribuent à l’indice d’octane, mais il s’agit de composés sensibles à l’hydrogénation. Il faut donc apporter une attention toute particulière afin de ne pas les transformer lors des étapes d’hydrotraitement. Les essences de craquage catalytique contiennent également des composés hautement insaturés de type dioléfiniques (1 à 2% pds) qui sont susceptibles de désactiver le catalyseur d’hydrotraitement suite à la formation de gommes.
Les procédés industriels de désulfuration
De nombreuses solutions ont été développées afin de réduire la teneur en soufre dans les essences de FCC, telles que l’adsorption réactive sur solide poreux sous hydrogène à haute température (procédé S-Zorb Phillips Petroleum), l’adsorption sélective sans H2 à température ambiante (procédé SARS), l’extraction liquide-liquide, l’oxydation, la séparation par membrane [8, 9]. Bien que tous ces procédés revendiquent une meilleure désulfuration et un coût de fonctionnement très bas, industriellement ce sont les procédés d’hydrotraitement qui se sont imposés: l’hydrodésulfuration conventionnelle (OCTGain d’Exxon Mobil, ISAL d’UOP) et surtout l’hydrodésulfuration sélective (Selectfining d’UOP-Intevep, SCANfining d’Exxon Mobil, Prime G+ d’Axens, CD Hydro + CD HDS de CD Tech).
L’hydrotraitement des essences
L’intérêt majeur de l’hydrotraitement est d’ajuster la qualité des produits distribués par l’industrie pétrolière aux spécifications, et tout particulièrement celles des carburants. L’hydrotraitement est un procédé de raffinage qui permet l’élimination des hétéroatomes (S, O, N) en présence d’hydrogène et d’un catalyseur, à plus ou moins haute température et pression selon les caractéristiques des charges à traiter et la qualité du produit désirée. Les procédés d’hydrotraitement se situent à tous niveaux de la raffinerie, aussi bien pour le traitement des différentes coupes issues de la distillation directe que pour la valorisation des coupes lourdes en coupes plus légères (Figure 6, Figure 7). L’hydrodésulfuration des coupes pétrolières (réaction qui nous intéressera plus particulièrement au cours de ce travail) est la transformation des composés soufrés en hydrocarbures et en sulfure d’hydrogène. Les unités industrielles d’hydrotraitement utilisent essentiellement des réacteurs à lit fixe. Les catalyseurs d’hydrotraitement sont pour la plupart des sulfures de métaux de transition supportés sur alumine (CoMo, NiMo, NiW). L’alumine de haute pureté est généralement utilisée comme support pour son bon rapport surface BET/prix et sa grande résistance mécanique. De plus, l’alumine est régénérable (contrairement au carbone) et est généralement peu acide [11]. La composition classique de ces catalyseurs correspond à une teneur massique en oxyde de cobalt ou de nickel comprise entre 1 et 4%, en oxyde de molybdène entre 8 et 16% et en oxyde de tungstène entre 12 et 25%. La phase active de ce type de catalyseurs est la phase sulfure, c’est pourquoi tous ces catalyseurs subissent une étape de sulfuration in ou ex-situ pour les rendre actifs . Le choix des métaux de la phase active dépend de l’application. Dans le cas de l’hydrodésulfuration des essences de FCC, le rapport entre l’activité en hydrotraitement et la sélectivité (hydrodésulfuration des composés soufrés/hydrogénation des oléfines) désirées vont orienter le choix du catalyseur. Les catalyseurs à base de CoMo sont d’excellents catalyseurs d’hydrodésulfuration alors que les catalyseurs à base de NiMo quant à eux, sont très actifs en hydrogénation et hydrodésazotation [12] et sont donc utilisés pour des charges plus réfractaires ou plus azotées. Les conditions opératoires (pression, température, temps de contact, débit relatif d’hydrogène) sont très variables et dépendent de la coupe pétrolière traitée et des produits attendus.
Les différents procédés d’hydrodésulfuration sélective
SCANfining (Exxon Mobil)
SCANfining d’Exxon Mobil est un procédé d’hydrodésulfuration sélective. L’alimentation (essence de FCC et hydrogène) entre dans le saturateur de dioléfines pour convertir les dioléfines afin d’éviter la production de gommes dans le four et le réacteur. Les effluents du saturateur sont chauffés et vaporisés puis traversent un réacteur de désulfuration à lit fixe rempli de catalyseur CoMo sur alumine (RT-225, développé conjointement par Exxon Mobil et Albemarle). En sortie de ce réacteur, l’effluent est refroidi pour condenser l’essence désulfurée et la séparer des composés légers dont l’H2S. En 2002, la technologie SCANfining était conçue pour désulfurer les essences à 30 ppm. Afin de respecter les nouvelles normes (< 10 ppm), un couplage de ce procédé au procédé EXOMER (Extraction Of MERcaptan) est proposé [13]. Le procédé EXOMER permet d’extraire les mercaptans encore présents dans les essences de FCC par extraction liquide-liquide.
La distillation catalytique (CD Tech)
Afin d’éviter une perte d’octane importante lors de la désulfuration poussée, l’essence de FCC peut être fractionnée par distillation avant l’étape de désulfuration et chaque fraction peut alors être désulfurée dans des conditions adaptées [15]. Cette distillation est d’autant plus intéressante que les oléfines sont principalement concentrées dans les fractions ayant un point d’ébullition bas alors que les composés soufrés sont principalement présents dans les fractions de haut point d’ébullition. Le procédé CDHDS de la société CD Tech allie distillation catalytique et hydrodésulfuration dans un même réacteur (Figure 10). Cette combinaison permet d’effectuer une désulfuration poussée jusqu’à 90% tout en ayant une perte en octane faible (moins de 1). La fraction des oléfines légères est désulfurée à des températures plus basses que les fractions plus lourdes, ce qui permet de minimiser la saturation des oléfines légères. La séparation des zones de désulfuration permet également d’éviter dans une certaine mesure la formation de mercaptans : en effet, en bas de la colonne, où la température est suffisamment élevée pour que la recombinaison soit favorisée par la cinétique, il n’y a pas d’hydrogène sulfuré grâce au stripage d’H2 et peu d’oléfines légères. Ce procédé fonctionne autour de 17 bars