Comportement thermodynamique des fluides
Familles de lois d’état applicables à des fluides de composition fixe
On trouve dans la littérature un grand nombre de lois d’état, dont l’établissement est basé sur des hypothèses et des approches différentes. Afin d’être en mesure de choisir celles qui seraient les plus à même de décrire le comportement thermodynamique des fluides stockés en cavité saline, les grandes classes de lois d’état des fluides de composition fixe sont présentées dans ce qui suit.
La loi des gaz parfaits
Il s’agit de la loi d’état la plus simple qui existe en thermodynamique. Elle s’appuie sur les trois postulats : — à température constante, le produit de la pression et du volume pV est une constante proportionnelle à la masse (loi de Mariotte) ; — la densité d’énergie interne ne dépend que de la température (loi de Joule) ; — à température et pression données, le volume molaire Vm est une constante indépendante du fluide considéré (loi d’Avogadro). Ces trois conditions permettent d’aboutir à la formulation explicite de l’équation des gaz parfaits : pν = RT/M (1.1) où ν désigne le volume massique du fluide (ν = V/M, M étant la masse du fluide), R/M = Z avec R constante indépendante de la nature chimique du gaz (constante universelle de valeur approximative 8,314 J/mol/K) et M masse molaire du gaz considéré (voir Appendice A). La valeur du facteur de compressibilité massique d’un gaz parfait Z est ainsi indépendante de toute variable d’état autre que la composition du fluide décrit par cette loi d’état. En corollaire, les capacités thermiques massiques isobare cv et isochore cp ne dépendent que de la température, ces grandeurs étant calculées à partir de la dérivée partielle selon la température de l’énergie interne et de l’enthalpie respectivement. Elles vérifient les relations cp/cv = γ (γ cœfficient isentropique, voir Appendice A) et cp − cv = Z (relation de Mayer). D’un point de vue moléculaire, ce modèle repose sur l’hypothèse de l’absence de toute interaction entre les atomes/molécules, en-dehors des chocs. Ce modèle correspond au cas limite de tout modèle décrivant un gaz réel, pour lequel la distance intermoléculaire moyenne est très largement supérieure à la taille des molécules, soit lorsque pression et masse volumique du gaz tendent vers 0. C’est pour cette raison que certaines équations d’état des gaz réels sont décomposées en une partie idéale (correspondant au comportement d’un gaz parfait pour un corps pur) et en une partie résiduelle (issue de la déviation par rapport au cas idéal), à la manière de la décomposition du facteur de compressibilité présentée en Appendice A).
Potentiel thermodynamique
Il existe deux fonctions potentiel thermodynamique, en fonction du choix des variables d’état : — la densité d’énergie libre f(ρ, T) : cette formulation du potentiel thermodynamique est applicable sur une gamme étendue de ses variables d’état primaires (la masse volumique ρ et la température T), y compris en présence d’un changement de phase, en raison de la discontinuité que ce dernier implique sur ρ ; — la densité d’enthalpie libre g(p, T) : cette fonction, de variables d’état pression p et température T, oblige, à l’inverse de la précédente, à décomposer le plan (p, T) en plusieurs morceaux, a minima afin de séparer les différents états thermodynamiques existants. En effet, un changement de phase n’affectant pas la pression du système (celle-ci restant, à température constante, elle-même constante jusqu’à ce que la transition s’achève), le potentiel thermodynamique g(p, T) ne peut naturellement traduire l’impact de ce phénomène sur les paramètres thermodynamiques. Cette transition est assurée « manuellement » : à chacun de ces morceaux est associée une formulation propre du potentiel thermodynamique. Les deux formulations du potentiel thermodynamique peuvent être reliées aux différents termes thermodynamiques présentés en Appendice A, comme le montre le Tableau 1.1. La loi d’état du fluide peut être construite en s’appuyant sur le potentiel thermodynamique, que l’on peut exprimer à partir de fonctions ajustant les données expérimentales de deux grandeurs thermodynamiques uniquement, que les variables primaires soient le couple (ρ, T) ou (p, T). Potentiel thermodynamique du couple de variables (ρ, T) Si on se focalise sur le couple de variables (ρ, T), on pose la relation de Gibbs appliquée à l’énergie libre df = (p/ρ2 )dρ − sdT (voir le Tableau A.1).
Loi du viriel
Dans la phase gazeuse, l’équation d’état du viriel est parfois employée. Cette équation correspond à un développement limité du facteur de compressibilité en fonction de la masse volumique ou de la pression, sachant que Z = Z pour un gaz parfait. L’expression de cette loi d’état peut ainsi être mise sous la forme suivante, selon que la seconde variable d’état primaire est la pression ou la masse volumique [Deiters and Kraska, 2012] : Z(ρ, T)/Z = 1 + X k Bkρ k Z(p, T)/Z = 1 + X k B ′ kp k (1.8) où les coefficients Bk = (1/k!)∂ k ρ (Z/Z)(T, p = 0) et B′ k = (1/k!)∂ k p (Z/Z)(T, ρ = 0) dépendent uniquement de la température et sont ajustés à partir de données expérimentales. Des calibrations de cette équation ont été proposées dans la littérature, qu’il s’agisse, par exemple, du O2 [Wagner et al., 1984] (ici pour des températures et des masses volumiques respectivement inférieures à 400 K et 220 kg/m3 ) ou encore de H2O (décrivant le comportement de la phase vapeur jusqu’à des températures de 573 K [Hill and MacMillan, 1988] et 1173 K [Harvey and Lemmon, 2004]). Des développements empiriques sur les paramètres Bk peuvent être apportés, rendant l’expression de l’équation d’état plus précise, mais également plus complexe (exemple pour le CH4 avec la loi d’état de Benedict, Webb et Rubin [Benedict et al., 1940], reprise plus tard par Duan et al. [1992b] pour le CO2). Néanmoins, les équations du viriel sont limitées à la description d’un gaz et ne peuvent être appliquées sur un fluide à l’état liquide, état dans lequel les fluides stockés peuvent éventuellement se trouver.