MÉTHODES MÉCANIQUES
Les méthodes mécaniques réfèrent à toutes les approches mécaniques utilisées pour briser la glace et accélérer sa chute. Elles consistent à interrompre l’accumulation de glace directement par le raclage ou à l’aide de l’énergie libérée par des vibrations ou des mouvements de la structure. Ces méthodes sont principalement conçues pour le dégivrage. Le raclage manuel, l’utilisation de revêtements souples, la secousse contrôlée des pales et le dégivrage par air à haute vitesse ne sont pas considérés dans le présent document en raison de leur incompatibilité avec les grandes structures comme les turbines éoliennes.
a) Les techniques pneumatiques Elles sont couramment utilisées dans le secteur de l’aéronautique pour le dégivrage du bord d’attaque des petits aéronefs. Lorsque suffisamment de glace s’accumule sur le bord d’attaque, les chambres à air se gonflent et se dégonflent sous l’effet d’impulsions successives d’air comprimé. La déformation de la couche de glace a pour effet de la rompre et de l’éjecter (Figure 3). Cette technique est très simple et requiert peu d’énergie, mais modifie les propriétés aérodynamiques de la pale et est difficile à installer. En outre, elle nécessite beaucoup d’entretien (Mayer, et al., 2007). Figure 3: Principe de fonctionnement du dégivrage pneumatique (Botura & Fisher, 2003)
b) Les techniques expulsives Ces techniques consistent à utiliser des impulsions électromagnétiques ou piézoélectriques pour briser et éjecter la glace (Mayer, et al., 2007). Dans le cas du dégivrage par électro-expulsion, une bobine en spirale appelée actuateur est placée à proximité de la face interne d’une plaque métallique (Figure 4). Lorsqu’un courant est appliqué à la bobine, un champ magnétique est créé, lequel déforme le métal. Il en résulte un déplacement rapide du profil de surface et l’expulsion de la glace accumulée. Dans le cas du dégivrage piézoélectrique expulsif, une tension est passée à travers un élément piézoélectrique ; ce qui crée un déplacement de surface et permet l’élimination de la glace. Ce système est économe en énergie et peut être facilement automatisé.
c) Dégivrage ultrasonique Le principe de cette technique est de briser les liens d’adhérence entre deux surfaces en utilisant des ultrasons pour créer une contrainte à la jonction des surfaces. Les avantages de cette technique sont son faible coût (faible énergie nécessaire) et un dégivrage instantané (Goraj, 2004; Palacios, et al., 2009). Cette technique a prouvé son efficacité dans le dégivrage des pales d’hélicoptère. C’est un concept très prometteur pour les pales d’éoliennes, mais il n’a pas encore été adapté pour cet usage et le risque de délaminage qu’il présente doit être pris en considération. La société DeIce-UT, basée au Royaume-Uni, développe actuellement des dispositifs de dégivrage basés sur cette technologie (Figure 5) dont la commercialisation est prévue dès 2020 (DeIce-UT, 2014).
COMBINAISON DE TECHNIQUES
La synergie acquise à partir de la combinaison de différentes techniques peut se solder par une amélioration de la performance. C’est un champ d’étude intéressant qui a été largement ignoré jusqu’à présent. Maissan a combiné des revêtements glaciophobes avec des peintures noires (Maissan 2002). Jusqu’à maintenant, les revêtements glaciophobes se sont révélés inefficaces comme protection des pales d’éoliennes contre le givrage. Cependant, la présence de peinture noire a positivement amélioré leur performance dans certains sites où les événements de givrage sont peu fréquents et sont suivis de températures au-dessus de 0 °C ou des sites ayant une intensité solaire élevée (Laakso, et al., 2003). Plus récemment, des revêtements hydrophobes ont été combinés avec un système de chauffage électrothermique (Adomou, 2011). En mode antigivrage, les revêtements hydrophobes ont réduit de 7 % la consommation d’énergie tandis que les revêtements superhydrophobes l’ont réduite de moitié (Anderson & Reich, 1997; Adomou, 2011). En mode dégivrage, la consommation d’énergie a été réduite de 15 % par la combinaison de résistantes chauffantes et de revêtements super-hydrophobes (Adomou, 2011). Antonini (Antonini, et al., 2011) a également démontré que la combinaison de revêtements super-hydrophobes avec une stratégie de dégivrage peut réduire de manière significative la puissance de chauffage nécessaire. Cette réduction serait due au fait que les dépôts de glace sur les surfaces hydrophobes ont une densité inférieure à la densité usuelle de la glace ; ce qui en facilite la rupture et la fonte (Antonini, et al., 2011). Plus récemment, Enercon a présenté une nouvelle version de son système de dégivrage (Figure 9) qui combine l’injection d’air chaud et des revêtements thermiques placés à l’intérieur de la pale, comme le montre la figure ci-dessous. Cette nouvelle architecture ne requiert pas la modification du profil de la pale, est peu coûteuse, facile à maintenir, très efficace et ne nécessite pas l’arrêt des éoliennes ; elle offre aussi l’avantage d’être à l’épreuve de la foudre (Jonsson & Site Assessment, 2012).
Il n’existe aucun produit de protection contre le givrage dans l’industrie éolienne qui soit éprouvé et commercialisé à l’échelle industrielle. Des investigations plus poussées seront nécessaires pour accroître la fiabilité de conception et la sécurité des systèmes d’antigivrage/de dégivrage. Les revêtements glaciophobes/hydrophobes sont abordables, faciles à maintenir et n’ont pas besoin de protection contre la foudre (excepté pour certains matériaux glaciophobes). Toutefois, ils ne peuvent pas empêcher la formation de givrage à eux seuls. Ils doivent être combinés à des systèmes de chauffage. Les produits chimiques sont également abordables, mais leur action est limitée dans le temps. Par conséquent, ils ont besoin de beaucoup d’entretien. En outre, la plupart des produits chimiques existants ne sont pas biodégradables. Les méthodes thermiques sont actuellement recommandées et utilisées par de nombreuses entreprises. Ceci est principalement dû au fait que les méthodes thermiques, et en particulier les méthodes de type Joule, permettent de dégivrer de grandes sections et sont plus facile à mettre en oeuvre. L’utilisation des résistances chauffantes semble être la technique la plus prometteuse parce qu’elle permet le retrofit, son installation est facile, le dispositif est efficace et également facile à contrôler.
Les résistances chauffantes sont souvent placées sur le bord d’attaque et parfois également sur le bord de fuite. Cet agencement est efficace en général, mais ne permet pas de prévenir complètement le givrage secondaire. Leur durée de vie est souvent réduite par le fait que les résistances chauffantes se détachent prématurément dans des conditions de givrage sévère. De plus, le mode antigivrage consomme beaucoup plus d’énergie que le mode dégivrage et, selon les conditions météorologiques, il pourrait donc être plus profitable d’opérer en mode dégivrage au lieu du mode antigivrage. Pour un résultat optimal, il faudrait associer la technologie des résistances chauffantes à d’autres techniques, telles que la variation active de l’angle d’attaque, la peinture noire ou le positionnement des pales face au soleil, entre autres. Un chauffage mal contrôlé peut affecter par inadvertance l’aérodynamique de la pale et augmenter le dépôt de glace, mais aussi déclencher des événements givrants qui ne sont pas censés se produire (Rindeskär, 2010). De plus, la chute de blocs de glace constitue un risque pour les installations et les êtres vivants aux alentours. Si la protection contre le givrage sur une pale est défectueuse, cela pourrait sérieusement déséquilibrer l’éolienne et endommager ses composants. Des protocoles de sécurité supplémentaires doivent être ajoutés aux algorithmes de contrôle, principalement dans les régions soumises à d’intenses événements givrants.
ANSYS CFD ANSYS
CFD n’est pas un logiciel dédié à la simulation de l’accrétion de glace, mais c’est le logiciel le plus rencontré dans notre revue de littérature pour la dynamique des fluides computationnelle. Il a été largement employé dans la recherche universitaire et largement validé. Le coffret ANSYS CFD comprend ANSYS Fluent et ANSYS CFX, qui peuvent être acquis séparément, et d’autres produits spécialisés supplémentaires. ANSYS CFX est un outil numérique pour un usage général de la dynamique des fluides et a déjà été utilisé pour modéliser l’accumulation de glace (Martini et al, 2011) et la modélisation de l’antigivrage/dégivrage (Hannat, 2009). Il donne accès également à plusieurs modèles physiques qui peuvent convenir à de nombreuses applications. ANSYS Fluent est le logiciel le plus connu pour la modélisation de l’écoulement, de la turbulence, du transfert de chaleur, et des réactions chimiques. Il est fiable pour une large gamme d’applications et est personnalisable. Il a été utilisé pour étudier l’accumulation de glace sur les pales (Sagol, et al., 2013; Villalpando, et al., 2012) ainsi que la simulation de l’antigivrage/dégivrage (Bu, et al., 2013; Velasco, et al., 2014; Balakrishna & Ketha, 2014). Il existe de nombreux autres logiciels d’accrétion de glace, tels que ONERA, TRAJICE, CANICE, CIRA-LIMA, mais notre revue de littérature n’a pu identifier aucune utilisation récente de ces logiciels. Ces logiciels semblent donc à priori moins avancés que LEWICE et FENSAPICE.
LOGICIELS GRATUITS
OpenFOAM est le seul logiciel libre de CFD qui a été référencé dans notre revue de la littérature pour les simulations de givrage. Il propose une large gamme de fonctionnalités pour résoudre divers problèmes, dont des flux complexes de fluides impliquant des réactions chimiques, de la turbulence et du transfert de chaleur. Il touche également à la dynamique des solides et à l’électromagnétisme. Il comprend des outils pour le maillage, notamment snappyHexMesh, un mailleur parallélisé pour géométries de conception assistée par ordinateur (CAO) complexes, et pour pré et post-traitement. Le maillage, le prétraitement et le post-traitement se déroulent presque tous en parallèle, permettant aux utilisateurs de tirer pleinement parti du matériel informatique à leur disposition. En étant libre, OpenFOAM offre une totale liberté de personnalisation et d’extension ses fonctionnalités existantes, soit par elles-mêmes ou grâce au soutien de la communauté OpenCFD (OpenFOAM, 2014). Il en résulte une conception de code très modulaire dans laquelle les collections de fonctionnalités (par exemple : les méthodes numériques, le maillage, les modèles physiques …) sont compilées dans leur propre bibliothèque partagée (OpenFOAM, 2016). OpenFOAM a été utilisé avec succès par Kinzel (Kinzel, et al., 2010) pour l’accumulation de glace sur un rotor tournant et par Son (Son, et al., 2012) pour l’accumulation de glace sur les pales. OpenFOAM offre beaucoup de fonctionnalités sans coût, mais il est plus difficile à manipuler que les trois logiciels précédents, car il nécessite des compétences complémentaires.
RÉSUMÉ |