Comparaison de deux types de conditionnement
préalable à l’allogreffe de cellules souches
hématopoïétiques
Les premiers essais chez l’Homme
Les premiers travaux décrivant l’allo-CSH chez l’Homme ont été menés par le Dr Thomas et son équipe, en 1957, basés sur les résultats encourageants d’expériences murines. Dans son étude, il rapporte l’expérience de six patients ayant bénéficié d’une greffe de moelle. Un seul patient a eu une prise de greffe « transitoire » mais aucun d’entre eux n’a survécu au-delà de 100 jours 4 . En 1958, la découverte du complexe majeur d’histocompatibilité (CMH) et son rôle dans la transplantation chez l’homme par le Professeur Jean Dausset 5,6 a permis d’améliorer la procédure d’allogreffe en introduisant la notion de compatibilité HLA entre donneur et receveur. C’est entre 1959 et 1965 que G. Mathé et son équipe décriront les premiers succès de l’alloCSH avec notamment l’obtention des premières chimères hématopoïétiques humaines en France7,8. Ils introduiront également la notion de la maladie du greffon contre l’hôte (GvHD). Mathé a ainsi rapporté l’expérience d’une greffe de moelle osseuse (MO) non HLA-identique chez 6 patients yougoslaves irradiés lors d’un accident nucléaire à Belgrade ayant permis la reconstitution hématopoïétique et la survie de 4 d’entre eux7 . En 1970, Bortin présente les résultats des allo-CSH réalisées chez 203 patients entre 1959 et 1969. Seulement 3 patients étaient survivants à la date de la publication, les autres étaient décédés de GVHD, infections, échec de prise de greffe, récidive ou progression de la leucémie 9 . Suite à ces résultats décevants, l’allo-CSH a été pendant quelques temps abandonnée chez l’homme jusqu’à la fin des années 1960 et de nouvelles études animales ont été menées (chiens, primates et rat)10,11. Celles-ci ont permis une meilleure compréhension du système 10 HLA et de la GvHD, et ont ainsi participé à l’amélioration de la procédure d’allo-CSH dans le cadre des hémopathies malignes ou non (aplasies médullaires) notamment en termes de conditionnements pré-greffe, jusqu’alors insuffisants. 2.2.Les premières séries En 1969, l’équipe de Seattle commence à réaliser des greffes de MO dans le cadre d’aplasies médullaires mais aussi de leucémies aigües à des stades avancés et réfractaires1,2 avec des taux de guérison de l’ordre de 20% dans ces leucémies. A la fin des années 1970, les résultats encouragent ainsi la réalisation des greffes dans les LAM en 1ère rémission complète12 et les LMC13 .
Développement des greffes non apparentées
Seulement 30% des patients ont des donneurs HLA identiques. C’est pourquoi dans les années 80 se sont développées les allogreffes à partir de donneurs dits « alternatifs ». Tout d’abord les greffes HLA identiques non apparentées (ou phéno-identiques), dont le premier succès a été décrit en 1979 chez une jeune patiente atteinte de leucémie aigüe. Plus tard, en 1987, seront créés le registre américain de donneurs non apparentés, le National Bone Marrow Donor Registry, et le registre français, à l’initiative de Jean Dausset et Jean Bernard. Par la suite, toujours dans la perspective d’identifier un donneur pour la quasi-totalité des patients, des tentatives d’allo-CSH HLA mis-match apparentées (greffes haplo-identiques) ont été réalisées dans les années 1980. Ce type de greffe était alors associé à une incidence élevée de rejet de greffe (20-30%) et de GVHD (70-80%), et donc d’un taux de mortalité non liée à la rechute inacceptable 14–16 . 11 Ainsi, les avancées réalisées en parallèle dans la compréhension des mécanismes immunologiques de l’allogreffe ont participé au développement de médicaments immunosuppresseurs dans le but de prévenir et/ou traiter la maladie du greffon contre l’hôte notamment le méthotrexate (MTX) en association avec la ciclosporine A (CsA)17 . La Figure 2 résume l’évolution et les progrès de l’allogreffe depuis 1955.
Indications
Les progrès réalisés au cours de ces dernières décennies ont permis d‘élargir progressivement les indications de l’allo-CSH, initialement réservée aux hémopathies malignes de type leucémie aigüe myéloïde (LAM) ou lymphoïde (LAL), les syndromes myélodysplasiques (SMD) mais aussi à des pathologies bénignes (déficit immunitaires sévères, aplasie médullaire…). Ainsi, l’allogreffe est actuellement indiquée dans le cadre d’autres hémopathies malignes telles que le lymphome, certaines tumeurs solides mais également dans le cadre d’hémopathies bénignes/hémoglobinopathies telle que la drépanocytose. Dans le cadre des hémopathies malignes et les tumeurs solides, l’allogreffe a pour objectif d’éradiquer le clone malin par la myéloablation induite par le conditionnement et une réaction immunologique entre les lymphocytes T du greffon et les cellules tumorales. Dans le cadre des hémopathies non malignes, l’objectif de l’allo-CSH est avant tout le remplacement d’une moelle/hématopoïèse déficiente par une autre, fonctionnelle. Selon le rapport de l’EBMT (European Society for Blood Marrow Transplantation), 18 281 allogreffes ont été rapportées en 2017 en Europe19 . L’indication d’une allogreffe doit être discutée en tenant compte : (1) Des caractéristiques du patient receveur : son âge, ses comorbidités, (2) Des caractéristiques de l’hémopathie : pronostic, statut au moment de la greffe, (3) De l’existence ou non d’un donneur intra-familial (4) Et enfin de l’existence ou non d’éventuelles alternatives thérapeutiques. Les principales indications sont indiquées dans la figure 3. Au premier plan, les LAM qui représentent 39% des indications d’allogreffes, suivie de 16% pour les LAL, 12% pour les syndromes myélodysplasiques (SMD), 7.5% pour les lymphomes non hodgkiniens (LNH), 4% pour les néoplasies myéloprolifératives (NMP) et 2% pour les 13 leucémies myéloïdes chroniques (LMC), 1% pour les leucémies lymphoïdes chroniques (LLC) et 3% pour la maladie de Hodgkin (MH). Les hémopathies non malignes sont principalement représentées par les aplasies médullaires (5%), les déficits immuns congénitaux (3%) et les hémoglobinopathies (thalassémies/drépanocytose) (3%).
REMERCIEMENTS |