Comment expliquer la prolifération des bidonvilles dans la ville de Manakar
Un important phénomène de transition se produit actuellement dans le monde entier concernant les villes; une évolution inédite dans l’histoire de l’humanité. Actuellement, plus de la moitié de la population mondiale, soit environ 3,3 milliards de personnes, vivent dans des zones urbaines. Vers les années 70 encore, à peine plus du tiers de la population mondiale vivait dans des zones urbaines et d’ici à 2025, cette proportion aura grimpé à près des deux tiers soit environ 6 milliards d’habitants. Ce phénomène est plus prononcé dans les pays en développement, avec des populations urbaines qui s’accroissent de 3,5% par an, contre moins de 1% dans les régions plus avancées. De nos jours, 95% de la croissance urbaine se réalise dans les pays en développement en Asie et en Afrique. Cependant cet accroissement est surtout très prononcé dans les quartiers informels que l’on appelle bidonvilles. Selon ONU- Habitat (l’agence onusienne en charge des établissements humains) : « Un bidonville correspond à un groupe d’individus vivant sous un même toit dans une aire urbaine et manquant d’au moins l’une des cinq caractéristiques suivantes : un logement durable (une structure permanente qui assure une protection contre les conditions climatiques extrêmes) ; un surface de vie suffisante (pas plus de trois personnes par pièce) ; un accès à l’eau potable (de l’eau qui puisse être accessible en quantité suffisante, qui soit abordable et sans effort excessif) ; un accès aux services sanitaires (toilettes privées ou publiques mais partagées par un nombre raisonnable de personnes) ; une sécurité et une stabilité d’occupation (protection contre les expulsions)1 ». Aujourd’hui, plus d’un milliard de personnes vivent dans des bidonvilles soit un habitant sur six dans le monde ou encore un tiers de la population urbaine dans le monde et en Afrique 72% soit 187 Millions de la population urbaine habitent les bidonvilles. Un chiffre alarmant et en constante augmentation. Madagascar n’en est pas épargné de ce problème, car actuellement, la Grande île présente un fort taux d’accroissement urbain (4% à 4,6%). Plus d’un ménage sur trois vit en ce moment dans une agglomération urbaine, et au rythme actuel, près de la moitié se trouvera en ville Madagascar est parmi la plus rapide du continent africain, proche de celle d’Abuja et d’Ouagadougou et deux fois plus rapide que celle de Nairobi et de Bamako3.
Ce processus d’urbanisation est actuellement inéluctable et ce dans un temps très court. Source de multiples potentialités, cette urbanisation est dans le même temps facteur de vulnérabilités, de risques et d’accroissement d’inégalités exacerbées, notamment par le développement des bidonvilles. Leur croissance est fortement liée à l’exode rural, la croissance démographique, l’arrivée de réfugiés, etc., conjugués aux difficultés pour les autorités publiques de planifier et de maîtriser l’urbanisation, notamment au niveau de l’offre en logements accessibles aux plus défavorisés. De ces faits, le pourcentage des habitants des bidonvilles ne cesse d’augmenter et la situation est actuellement très alarmante pour Madagascar. En 2014, 77,2 % de la population urbaine vivent dans les bidonvilles4, et selon l’ONU-HABITAT, Madagascar est classé parmi les pays du continent Africain en alerte élevée en formation des bidonvilles. Mais, cette proportion varie suivant les villes. Dans la capitale (Antananarivo), les établissements informels atteignent 60% à 70% de construction. Dans les grandes villes, tel que Tamatave, 80% des ménages vivent dans des habitats précaires et non structurés (2016). A Moramanga, près de 65% des maisons construites sont en majorité de type traditionnel et peu décentes5. Les données sont disparates et le phénomène est difficile à mesurer à défaut de précision dans le recensement de l’habitat. Le manque d’indicateur multidate ne permet pas de tracer l’évolution du phénomène. Toutefois, face à cette rapidité de l’urbanisation qui est de plus non maîtrisée, la majorité des villes connaissent des problèmes de toutes sortes : problèmes sociaux, insuffisance des infrastructures et des services de développement, forte pression foncière principalement dans les grandes villes, délabrement des réseaux routiers et d’assainissement, problèmes de santé liés aux pollutions atmosphériques et aux mauvaises conditions d’hygiène, etc. A ce propos, la Commune Urbaine de Manakara offre un exemple de ville secondaire où l’urbanisme informel prédomine. Elle se situe dans le Sud Est de Madagascar, comprise entre 21°00 et 21°30’ de latitude sud et 48°00 de longitude Est. Sur le plan administratif, la Commune est le Chef lieu de la Région de Vatovavy Fitovinany, du District de Manakara, s’étend sur 31,756 Km², dont 15 km² de zone urbanisée, composée de 18 Fokontany, et s’étale sur une vaste plaine alluviale marécageuse dont l’altitude moyenne ne dépasse pas 10 mètres.