Choix de la paille de blé et constitution d’un lot d’échantillons cohérents

Choix de la paille de blé et constitution d’un lot d’échantillons cohérents

Le choix de la paille de blé comme substrat d’étude s’est fait sur la base de la relative disponibilité de ce substrat notamment en Europe, sans accaparer de nouvelles surfaces avec des cultures énergétiques dédiées. Ce substrat constitue en Europe une référence comme peuvent l’être le Miscanthus x giganteus et le peuplier pour les cultures dédiées. Cependant, par le grand nombre d’usages des pailles céréalières, leur disponibilité réelle en est réduite : sur l’année 2011-2012, il est estimé que 25 Mt de paille furent produites sur le territoire français. Sur cette production, seules 16 Mt furent réellement exploitées (le reste étant notamment restitué au sol pour maintenir sa fertilité). Et parmi ces 16 Mt, 8Mt furent utilisées comme litière pour l’élevage. De cette manière, et dans les conditions actuelles, 8 Mt de pailles de céréales au mieux sont mobilisables par année en France [240]. Compte-tenu du rendement massique de l’ensemble de la chaine du procédé depuis la paille jusqu’à l’éthanol (estimé à 18 %, [12]) et de la population française, cela correspond à la production de seulement 21,2 kg d’éthanol par individu et par an. En revanche, contrairement aux cultures dédiées, ce substrat est d’ores et déjà disponible, et ne nécessite pas d’adaptations immédiates dans le secteur agricole comme peuvent l’être les cultures dédiées. Pour répondre aux objectifs de la thèse, il est nécessaire de disposer d’un inventaire très large de substrats lignocellulosiques aux propriétés physico-chimiques et aux réactivités à l’hydrolyse enzymatique très différentes. Un moyen d’obtenir cette diversité de propriétés et de digestibilité est de réaliser des prétraitements variés en termes de procédés et de conditions opératoires pour obtenir des biomasses lignocellulosiques prétraitées aux caractéristiques très différentes. Afin de répondre aux problématiques énoncées, il a été choisi de travailler sur un lot d’échantillons cohérents produits à partir de la même paille native de départ, prétraitée à l’acide dilué et explosion vapeur, avec différentes conditions opératoires. Ce travail de production a été réalisé dans le cadre de la thèse de Charlotte Loustau-Cazalet (2015-2018 [241]), effectuée en parallèle de la présente thèse.

Les techniques expérimentales

La mise en lien des propriétés physicochimiques avec le rendement de conversion en hydrolyse enzymatique nécessite l’emploi d’outils de caractérisation adéquats, de même que des préparations d’échantillon adaptées et une méthodologie précise pour traiter les données, les exploiter, ou tout simplement les visualiser. On précise donc ici dans un premier temps le protocole de mise en saccharification des substrats, référence à partir de laquelle les rendements en glucose seront calculés. Ensuite sont présentés les outils utilisés dans la démarche d’une caractérisation multi-échelle et multitechnique, dans le but de sonder des propriétés physiques, chimiques, de cristallinité, de surface ou encore de porosité. La Figure 33 illustre les plages d’utilisation des différents outils analytiques mis en œuvre, dépendamment des propriétés étudiées.

L’hydrolyse enzymatique

Il s’agit de tester la digestibilité d’un substrat en hydrolyse enzymatique. Les conditions suivies de saccharification se basent sur celles décrites par le protocole du NREL [50]. Ces expérimentations sont réalisées avec un équipement STEM dans lequel des flacons Schott de 100 mL sont introduits. Le substrat est introduit à raison de 1 % pds de cellulose en solution, et est incubé en présence de deux cocktails enzymatiques composés de cellulases : (i) le cocktail GC220 (Genencor-Danisco, Rochester, NY, Etats-Unis d’Amérique, sécrétome de Trichoderma reesei) à 15 FPU/g de cellulose, et (ii) le cocktail N188 de glucosidases (Novozyme, Franklinton, NC, Etats-Unis d’Amérique, sécrétome d’Aspergillus niger) à 37,5 CBU/g cellulose, à un pH de 4,8 et une température de 50 °C, conformément au protocole NREL [50]. L’utilisation d’un 2ème cocktail contenant majoritairement des β-glucosidases (Tableau 9) se justifie par le fait que l’on souhaite d’une part réaliser des hydrolyses enzymatiques pour lesquelles le cellobiose n’exerce pas une inhibition sur les cellulases, et d’autre part pour s’assurer que la conversion du cellobiose en glucose n’est pas une étape limitante. En effet, on considère par la suite le rendement de conversion de la cellulose en glucose, qui doit refléter au mieux la digestibilité des substrats. Le glucose libéré au cours de l’hydrolyse enzymatique est mesuré et est exprimé en % du glucose initial présent sous forme de cellulose. Le Tableau 9 indique les informations disponibles sur les deux cocktails enzymatiques utilisés. Le substrat à hydrolyser est introduit dans un flacon Schott de telle sorte à ce que l’on ait dans le flacon une masse de 0,7 g de cellulose. On y ajoute ensuite 3,5 mL de tampon acétate à un pH de 4,5, 7 mL d’azide de sodium à une concentration de 10 g.L-1 et qui constitue un biocide pour éviter une contamination biologique au cours de l’hydrolyse. Le tampon quant à lui, permet de se placer à un pH stable, et proche du pH optimal pour exécuter l’hydrolyse enzymatique (4,8). Le flacon est rempli d’eau déminéralisée afin que la masse totale du mélange réactionnel soit de 70 g. Pour chaque substrat à tester, les hydrolyses sont effectuées en double. Les flacons sont placés sous agitation magnétique pendant une nuit avant l’ajout des enzymes, afin de s’assurer de l’imprégnation du substrat et de l’homogénéisation du mélange réactionnel, évitant ainsi toute limitation de la conversion par des causes d’ordre rhéologique. Matinalement, le pH est ramené à 4,8, la température vérifiée, puis les enzymes sont introduites dans les quantités suivantes :  23 µL de cocktail GC220 (6 mg de protéine/g de cellulose).  70 µL de cocktail N188 (18 mg de protéine/g de cellulose) En cours d’hydrolyse, des prélèvements de 1 mL sont effectués à différents temps de saccharification : 1,5 h, 3 h, 6 h, 24 h, 48 h, et 72h. Les prélèvements sont plongés dans un bain marie à 90 °C durant 10 min, afin des désactiver les enzymes cellulolytiques. Après refroidissement complet, les prélèvements sont centrifugés à 4000 tr/ming durant 20 min et le surnageant est prélevé pour doser la concentration en glucose. Afin d’évaluer la conversion des polymères de glucose (cellulose principalement) en monomères de glucose, la teneur en glucose est déterminée tout au long du test d’hydrolyse enzymatique à l’aide d’un analyseur enzymatique YSI 2700. Pour ce faire, une sonde de glucose-oxydase convertit le glucose en eau oxygénée Cette eau oxygénée est ensuite oxydée sur une électrode de platine. Le courant produit (et mesuré) par cette réaction est proportionnel à la quantité de D-glucose libéré. La mesure est réalisée deux fois pour chaque échantillon, à chaque temps de prélèvement.

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Caractérisations morphologiques

Plusieurs paramètres morphologiques seront regardés à différentes échelle : forme des particules, état général de dégradation (fragmentation, taille des particules, fibrillation), tissus présents, et l’état de surface (lisse, rugueux, présence de gouttes, etc.). i Macrovision à l’aide du prototype BlueBox Principe L’outil prototypique de macrovision BlueBox a été utilisé pour rendre compte des modifications morphologiques provoquées par le prétraitement sur la paille de blé étudiée. Le prototype a été construit à l’INRA Pays de la Loire de manière à réaliser l’analyse de la morphologie de tissus végétaux [135]. L’appareil permet de contrôler l’intensité de l’éclairage et les grandissements afin de pouvoir comparer des échantillons par analyse d’images. Une caméra CCD PROSILICA EC1600 (Alliance Vision, Montélimar, France) est présente, de même qu’un objectif PRECISE EYE NAVITAR à focale fixe, un anneau libre de fibres optiques (SCHOTT DCR® IV Light Source) placé sur un fond noir pour rétroéclairer les coupes avec un angle de 35 °, et des platines motorisées pour positionner la caméra et l’échantillon. L’acquisition d’images est pilotée par un logiciel développé sous LabView™ 8.2. Il permet d’observer des coupes mais également des poudres, avec la contrainte que les variations d’épaisseur d’objet ne soient pas trop importantes (jusqu’à 1mm environ). Comparativement à la microscopie optique, cette technique est bien moins résolutive (~10 µm) mais permet de visualiser de grands champs de vue. De plus, l’acquisition de  mosaïques d’images permet à la fois d’obtenir une statistique correcte descriptive de la poudre étudiée, et de sonder une gamme de taille de particules très grandes (jusqu’à quelques millimètres pourvu que la préparation d’échantillon soit adaptée et répétée). Cet équipement a été utilisé pour caractériser l’anatomie d’échantillons végétaux (tige de maïs, fruit de tomate, pomme) : proportion et agencement des différents tissus, taille des cellules ou encore taille de particules dans des broyats [135]. Une distribution de tailles de particules peut aussi être déterminée par analyse de texture d’images après application d’un masque dont la taille et la forme sont adaptables, ou encore par analyse d’image par seuillage. Dans le cas de l’analyse de texture d’images, il est possible de quantifier le type d’hétérogénéité de forme et de longueur des particules [136]. Cette technique peut être utilisée de manière complémentaire et comparative avec la granulométrie par diffraction laser. Ainsi, par la visualisation directe d’un champ de vue très macroscopique, cet outil permet une caractérisation qualitative visuelle et quantitative pour des gammes de tailles d’objets variant de 100 µm à 2-3 mm. Les principales limitations résident dans la présentation de l’échantillon sous la caméra (gestion du flou, d’hétérogénéités, de texture ou encore de luminosité). Les descripteurs fournis sont une distribution de diamètres de particules ou de facteur d’allongement.

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