Charge lourd-léger avec bandes élastiques Vs charges traditionnelles chez des sportifs de haut niveau
INTRODUCTION
De nombreux sports nécessitent une puissance musculaire importante pour réaliser des performances de haut niveau. La puissance musculaire maximale est définie et limitée par la relation force-vitesse (Cormie, McGuigan & Newton, [partie 1], 2011). La puissance musculaire (P) représente un débit d’énergie exprimé en watt et correspond au niveau de force (F) développé sur une distance (d) et un temps (t) donnés (P = F x d/t) ou, plus simplement, au produit de la force par la vitesse (V) (P = F x V). La puissance maximale est atteinte à un niveau de force optimale et à une vitesse optimale, tous deux sous-maximaux. Etant donné que la force produite par un muscle varie en fonction de la vitesse à laquelle il se raccourcit, une augmentation de la force développée pour une vitesse identique engendre une élévation de la puissance musculaire. Et, une diminution du temps nécessaire à l’expression d’un niveau de force donné, sans modifier la distance à parcourir, engendre une majoration de la puissance musculaire. Cette seconde illustration renvoie directement à la notion du taux de développement de force. Le taux de développement de force a été reconnu comme étant un paramètre prédictif du niveau de performance d’un sportif (Joy, Lowery, Oliveira de Souza & Wilson, 2016). Cette notion, retrouvée sous le nom de RFD (Rate of Force Development) dans la littérature anglosaxone, correspond à un indice de la force explosive, ou à l’explosivité en langage terrain, c’est-à-dire à la capacité du sportif à produire une grande force, à augmenter son niveau de force, le plus rapidement possible (Maffiuletti et al., 2016). Ce taux équivaut à la rapidité à laquelle un sportif peut développer sa force maximale (Stevenson, Warpeha, Dietz, Giveans & Erdman, 2010). Par conséquent, l’entraînement de la puissance musculaire est sous-tendu par le développement de deux qualités (la force musculaire maximale et la vitesse de raccourcissement des muscles) permis grâce à des adaptations physiologiques et neurophysiologiques. La production de puissance maximale est influencée par des facteurs physiologiques. La relation tension-longueur, au côté de la relation force-vitesse, affecte la puissance musculaire développée. D’après la revue de littérature de Cormie et al. (2011), quelle que soit la stimulation considérée, la force produite par le muscle dépend de la longueur à laquelle le muscle se trouve au moment de son activation. Une longueur de sarcomère optimale existe permettant l’établissement d’un maximum de ponts d’union entre l’actine et la myosine. Plus ce nombre de ponts d’union est élevé, plus la force développée augmente. De plus, le type de contraction modifie les niveaux de puissance produits et les mouvements mettant en jeu le cycle étirementraccourcissement sont les plus propices à la production de puissance maximale. Ces mouvements permettent d’emmagasiner et de restaurer davantage d’énergie élastique. Durant ces mouvements, les matières contractiles agissent comme des générateurs de hauts niveaux de force à de faibles vitesses de raccourcissement et les matières élastiques jouent un rôle de redistributeur d’énergie et d’amplificateur de la puissance produite. Grâce à ces mouvements, une potentiation des matières contractiles que sont l’actine et la myosine et des matières élastiques telles que la titine ou la nebuline ainsi qu’une activation des réflexes spinaux autorisent un développement de puissance supérieur. Des facteurs neurophysiologiques viennent donc également conditionner la puissance produite. D’après Van Cutsem, Duchateau et Hainau (1998), un entraînement en puissance mène à une amélioration des contractions maximales volontaires du muscle grâce à ces adaptations neurales. L’ordre de recrutement des unités motrices (principe de taille d’Henneman) reste inchangé mais les unités motrices sont activées plus rapidement avec une atteinte plus précoce du pic de force. Ces effets sont dus à une baisse du seuil de recrutement des unités motrices de type II, c’est-à-dire celles au potentiel de force le plus élevé. Chaque unité motrice possède une fréquence de décharge beaucoup plus forte. Le recrutement temporel est ainsi beaucoup plus efficace avec des tensions supérieures atteintes. Aussi, la coordination intermusculaire est améliorée. Tous ces mécanismes conduisent à une augmentation du taux de développement de force (RFD). Cette augmentation du RFD rend la courbe force / vitesse moins concave grâce à une augmentation de la vitesse produite pour une force donnée ou inversement. On peut également noter une amélioration de la synchronisation des unités motrices mais qui d’après Van Cutsem et al. n’a pas d’effet sur l’augmentation de la puissance. Au contraire même, ce mécanisme pourrait avoir un impact négatif sur le taux de développement de force (RFD). Enfin, des facteurs morphologiques modifient le potentiel de puissance d’un athlète : le type de fibres et leurs distributions, l’architecture musculaire (la surface de section, l’angle de pennation, la longueur des faisceaux), les propriétés tendineuses. Cibler tous ces mécanismes physiologiques et neurophysiologiques est donc l’objectif de nombreux entraîneurs et préparateurs physiques désireux de voir leurs athlètes réussir. Tous les sports où les accélérations entraînent une action gagnante (sports de combats, sports collectifs, haltérophilie, sports de raquettes, etc.) impliquent l’expression d’une grande puissance. A titre d’exemple, un boxeur doit être capable de déclencher et développer ses coups avec une grande vitesse pour surprendre son adversaire, et, il doit parallèlement être capable de générer une force importante à cette vitesse pour que ses coups soient efficaces et déstabilisent davantage son adversaire. Or, au niveau de l’entraînement et de la préparation physique, la complexité des calendriers n’autorise pas toujours la garantie de pouvoir améliorer ces qualités de force et de vitesse. Il convient alors de se tourner vers des méthodes d’entraînement stimulant conjointement ces deux paramètres essentiels à la puissance. Une des méthodes les plus utilisées est le contraste de charge
PROBLEMATIQUE
Le but de cette étude est donc de préciser les effets chroniques d’un programme de type contraste de charge lourd-léger utilisant des bandes élastiques chez des sportifs de haut niveau. L’objectif est de voir si l’utilisation de bandes élastiques amplifie vraiment le rendement de la PAP par rapport à de simples charges traditionnelles. Compte-tenu de l’efficacité plus marquée des bandes élastiques sur le recrutement d’unités motrices et le développement de force chez des sujets actifs, l’hypothèse formulée est que la PAP sera accentuée avec élastique et que cet effet va permettre un développement de puissance plus important sur la série légère comparativement à un programme sans élastique, avec des effets chroniques associés plus marqués.
METHODE
Approche expérimentale
Cette étude vise à teste les effets chroniques d’un cycle d’entraînement de 6 semaines en contraste de charge sur le développé-couché en utilisant deux modalités différentes. Elle repose sur l’analyse des performances de force maximale, vitesse maximale et puissance maximale développées par chaque sujet sur un test réalisé à deux moments distincts : un test pré-protocole et un test post-protocole. Les sujets s’engagent à suivre la totalité du cycle composé d’une séance et 4 séries par semaine suivant deux conditions : – Groupe EL : avec élastique sur le pré-exercice lourd, – Groupe SE : sans élastique sur le pré-exercice lourd. La force maximale (1 RM) développée par chaque sujet sur une barre libre et sur l’exercice du développé-couché est évaluée au préalable. Le développé-couché se réalise à amplitude maximale, avec un départ bras tendus, une phase excentrique ponctuée par le contact barre – poitrine, et une extension complète des bras à la fin de la phase concentrique. Les paramètres de force, de vitesse et de puissance maximales sont enregistrés à l’aide d’un encodeur linéaire. Pour la condition avec élastique, ces derniers sont attachés de part et d’autre de la barre de manière à fournir une résistance égale à 25% de la charge totale. Sujets 16 jeunes joueurs de rugby de haut niveau en centre de formation (âge moyen = 19,5 ± 1,5 ans ; taille = 1,84 ± 0,06 m ; poids = 93,7 ± 13,3 kg) avec plus de deux années d’expérience en renforcement musculaire ont participé volontairement à cette étude. Ils ont été divisés en 2 groupes de 8 joueurs qui ont suivi un cycle d’entraînement de puissance en contraste de charge d’une durée de 6 semaines sans utiliser d’élastique (groupe SE) et en utilisant des élastiques (groupe EL). Ces sujets étaient en bonne santé, ne présentaient aucune blessure récente ou importante au niveau du haut du corps (épaules et bras prioritairement). Il leur a été demandé de conserver leurs habitudes alimentaires et d’entraînement tout au long de l’étude et de ne pas prendre de produits complémentaires stimulants 48 heures avant chaque séance test. Entraînement Le protocole d’entraînement de 6 semaines consistait en la réalisation, une fois par semaine, de 4 séries de développé-couché suivant deux modalités : – Groupe EL → 3 répétitions à 85% RM avec élastique + 5 répétitions à 30% RM – Groupe SE → 3 répétitions à 85% RM sans élastique + 5 répétitions à 30% RM Les temps de récupération étaient les mêmes d’une modalité à l’autre avec 1 minute de récupération intra-série entre le pré-exercice lourd et l’exercice léger et 5 minutes inter-séries. Chacune de ces séries était réalisée avec une intention de vitesse maximale. Tous les paramètres de l’entraînement (fréquence, intensité, récupération) étaient identiques, seul l’ajout d’élastique sur le pré-exercice lourd pour le groupe EL venait différencier les deux modalités. Des élastiques de la marque Sci-Sport ont été utilisés pour réaliser le programme d’entraînement du groupe EL. Les bandes élastiques sont positionnées de chaque côté de la barre de musculation. Ces élastiques sont ancrés directement au bas du rack (Cybex). Deux tailles d’élastiques ont été sélectionnées : S (jaune) et M (orange). Ces deux types d’élastiques permettent d’appliquer les 25% de tension nécessaire (Soria-Gila et al., 2015 ; Wallace, Bergstrom & Butterfiel, 2018). En effet, un tableur créé par Sci-Sport définit les élastiques à choisir, leur longueur nécessaire avant étirement et la charge à utiliser sur la barre pour que la charge en position de départ et finale (bras tendus) soit parfaitement égale à 85% RM dont 25% fournie par résistance élastique.
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