Chaine de traitement du signal LiDAR proposée

L’aviation civile commerciale s’est considérablement développée depuis le début du XXe siècle. L’intensification du transport de passagers a engendré des problématiques de sécurité et de réduction des coûts. L’augmentation du trafic aérien conduit par exemple à réduire le temps entre deux décollages ou l’écart entre les différents niveaux de vol tout en améliorant la sécurité des vols. Les exigences en termes de disponibilité, d’intégrité, de fiabilité et de précision portant sur les fonctions de navigation ou de pilotage sont donc renforcées et tout développement d’un équipement aéronautique doit traiter les questions de sécurité comme une priorité. Un équipement embarqué sur un aéronef est placé dans un système complexe, avec lequel il interagit. Le niveau de sécurité d’un équipement ou d’un système est défini selon les conséquences qu’implique une éventuelle défaillance de ce dernier. Les autorités aériennes (OACI au niveau mondial, FAA pour l’Amérique du Nord et EASA pour l’Europe) définissent les exigences portant sur la sécurité des systèmes. Les défaillances les plus critiques, dont les conséquences sont dites « catastrophiques » car pouvant conduire à la perte de l’appareil, doivent avoir une probabilité d’occurrence inférieure à 10⁻⁹ par heure de vol. Afin de satisfaire ces exigences, la stratégie usuelle consiste à tripler les voies et chaines de mesure. La décision entre les différentes voies est prise par un vote majoritaire. Cette approche permet aujourd’hui de limiter le taux d’accident à un tous les deux millions de vols. Les autorités aériennes recommandent dans le document ARP 4754A [1] une autre voie d’amélioration de la sécurité consistant à faire en sorte que les chaines de mesure reposent sur des technologies et des principes physiques différents. Cette solution permet de réduire la probabilité de pannes en mode commun, c’est à dire qu’un seul événement provoque une panne simultanée sur toutes les chaines.

Les travaux effectués au cours de cette thèse s’inscrivent dans un projet de développement d’un anémomètre embarqué sur aéronef mené par Thales Avionics. La mesure de la vitesse relative de l’avion par rapport à la masse d’air qui l’entoure est critique. En effet, cette information permet de déterminer la portance de l’avion, soit la force opposée au poids lui permettant de maintenir son altitude. Les systèmes existants, utilisés depuis les débuts de l’aéronautique, reposent sur des mesures anémobarométriques, c’est-à-dire de pression et de température. L’ajout d’une voie LiDAR (Light Detection And Ranging) permet d’obtenir une dissimilarité sur la mesure de la vitesse et s’inscrit pleinement dans la politique des autorités aériennes. Les précédents projets réalisés par Thales Avionics ont permis de tester un système capable de fonctionner dans tout le domaine de vol civil et militaire. Un tel équipement doit pouvoir fonctionner avec un fort niveau de disponibilité et d’intégrité. À ce jour, le système a montré un niveau de performance satisfaisant dans la plupart des situations connues. Cependant, l’exigence de disponibilité et d’intégrité du produit visé conduit à améliorer les traitements pour une meilleure prise en compte des cas marginaux et des conditions extrêmes d’utilisation.

En aéronautique, la mesure de la position et de la vitesse d’un avion est effectuée selon deux référentiels distincts. La navigation utilise le référentiel terrestre quand le pilotage se fait par rapport à la masse d’air dans laquelle vole l’aéronef.

Navigation
La navigation a pour but de déterminer et contrôler la position de l’avion lors de son trajet (vitesse, position géographique, hauteur sol…). Différentes classes d’instruments existent, telles que la navigation satellitaire (GPS), radio (radioaltimètre) ou inertielle (accéléromètres et gyroscopes).

Pilotage
Le pilotage comprend toutes les fonctions permettant de maintenir l’avion en vol. Cela regroupe les instruments de mesure de l’altitude, de la température et de la vitesse de l’avion par rapport à l’air. Les informations fournies par ces instruments sont indispensables pour la sécurité du vol. En effet, ces mesures permettent d’éviter à l’avion de se retrouver en situation de décrochage.

Les différents instruments de pilotage d’un tableau de bord sont (Figure 1 de haut en bas et de gauche à droite) :
– L’anémomètre : la vitesse relative de l’avion par rapport à la masse d’air
– L’horizon artificiel : l’assiette et l’inclinaison de l’avion
– L’altimètre : l’altitude de l’avion (mesure de pression)
– La bille et l’indicateur de virage : indicateur de symétrie et de taux de virage (variation du cap en fonction du temps)
– Le compas (ou boussole)
– Le variomètre : la vitesse de montée ou de descente .

En aéronautique, l’anémométrie représente l’ensemble des instruments de mesure de la vitesse de l’avion par rapport à l’air (dite vitesse air). La vitesse air est un vecteur 3D dont les trois composantes sont définies dans le repère de l’avion. Le vecteur vitesse air peut se définir selon son module et deux angles :

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– le module de la vitesse, TAS (True Air Speed) .
– l’angle AOA (Angle Of Attack) ou angle d’incidence .
– l’angle SSA (Side Slip Angle) ou angle de dérapage .

Portance et trainée
Deux forces s’exercent sur un avion en vol : les résultantes aérodynamique et mécanique. Le poids et la traction sont les projections orthogonales de la résultante mécanique. La traction est la force exercée par le moteur, elle fait avancer l’avion.

Evolution de l’anémométrie en aéronautique

L’information de vitesse étant une donnée primordiale à la sécurité du vol, les avions possèdent généralement plusieurs chaines séparées de mesure de vitesse. Par exemple, trois voies primaires et une voie de secours sont installées sur un Airbus A380. Cependant, faute de méthode de mesure alternative, toutes ces chaines de mesure reposent sur un principe physique similaire. Les autorités aériennes recommandent, à terme, l’utilisation de chaines de mesure dissemblables, c’est-à dire basées sur des principes physiques différents, pour la mesure de vitesse. L’objectif étant de réduire la probabilité de panne en mode commun. En outre, les tubes de Pitot sont situés à l’extérieur de l’avion et sont donc soumis aux aléas climatiques. De ce fait, des systèmes de réchauffage et de dégivrage ont été intégrés aux sondes. Il s’agit de résistances électriques dont la consommation peut atteindre plusieurs centaines de watts par sonde. De plus, la criticité des mesures justifie l’emport de batteries capables de maintenir le système de dégivrage actif en cas de panne électrique. Les systèmes LiDAR ont été envisagés car leur principe de mesure est radicalement différent des sondes de pression. Par ailleurs, ces sondes sont non protubérantes et n’ont pas besoin d’être dégivrées.

Anémométrie Laser Doppler

Cette thèse s’inscrit dans le cadre des recherches actuelles sur des systèmes de mesure de vitesse air 3D par technologie LiDAR dans le domaine aéronautique ([3], [4]). L’anémométrie laser Doppler est une technique optique de mesure de la vitesse des fluides. Les particules entrainées par le fluide sont illuminées par un faisceau laser gaussien et le signal rétrodiffusé par ces particules est décalé d’une fréquence proportionnelle à la vitesse des particules. Pour l’application étudiée, il s’agit de mesurer la vitesse relative entre l’avion et la masse d’air dans laquelle il vole, à l’aide des aérosols naturellement présents dans l’air. Le système repose sur plusieurs voies LiDAR  afin de mesurer les trois composantes du vecteur vitesse. L’architecture visée comprend quatre axes LiDAR, symétriques deux à deux de chaque côté de l’avion. La quatrième voie apporte une redondance dans la mesure et permet de vérifier la cohérence entre les différentes voies.

Les travaux réalisés par Thales Avionics au travers des projets européens NESLIE (2006-2009) et DANIELA (2008-2011), permettent d’envisager des dispositifs capables de mesurer en temps réel la vitesse 3D de l’avion. Ces systèmes ont été testés lors de campagnes d’essais en vol. Les résultats ont montré que le signal dépend fortement des conditions de vol, telles que l’altitude, les conditions météorologiques, la zone géographique. Par la suite, les principes de l’anémométrie laser Doppler sont décrits et des choix pour l’architecture optique du système sont justifiés.

Table des matières

Introduction générale
1. Motivation
1.1. Contexte
1.1.1. Navigation
1.1.2. Pilotage
1.2. Anémométrie Laser Doppler
1.2.1. Lois de diffusion de la lumière
1.2.2. Régime « monoparticule » et « multiparticule »
1.2.3. Architecture optique
1.2.4. Fréquence Doppler / Vitesse radiale
1.2.5. Population de particules
1.3. Problématiques de la mesure de vitesse air
1.3.1. Disponibilité
1.3.2. Intégrité
1.3.3. Précision
1.3.4. Ecoulement perturbé
1.3.5. Sélection des aérosols utiles
1.4. Objectifs de la thèse
2. Chaine de traitement du signal LiDAR proposée
2.1. Formalisation du problème
2.1.1. Caractéristiques des particules
2.1.2. Modélisation du problème direct
2.1.3. Inversion du modèle
2.2. Représentation du signal
2.2.1. Objectifs et critères de sélection
2.2.2. Méthodes non-paramétriques
2.2.3. Méthodes paramétriques
2.2.4. Conclusion
2.3. Détection des signaux
2.3.1. Traitement statistique
2.3.2. Détection individuelle des signaux
2.3.3. Résultats
2.3.4. Conclusion
2.4. Estimation des paramètres du modèle et des caractéristiques des particules
2.4.1. Estimation des paramètres du modèle
2.4.2. Estimation des caractéristiques des particules
2.4.3. Sélection des aérosols utiles
2.4.4. Conclusion
2.5. Estimation de la vitesse radiale locale
2.5.1. M-estimateur
2.5.2. Estimation de l’incertitude
2.5.3. Comportement de l’estimateur en fonction des populations de particules
2.5.4. Evaluation
2.5.5. Conclusion
2.6. Evaluation de la chaîne de traitement du signal LiDAR
2.6.1. Fond Stratosphérique
2.6.2. Arctique
2.6.3. Nuage
2.6.4. Conclusion
2.7. Conclusion
Conclusion générale

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