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Problématique de l’étude
La zone de Beforona, où le projet BEMA avait mené ses recherches, couvre une zone de 50km². Elle est considérée comme étant représentative du Centre-est de Madagascar et présentant des caractéristiques similaires que cette région plus vaste. Des diagnostics sur la gestion des ressources naturelles ont été faits dans des sites de recherche choisis dans cette zone pour comprendre le mode de gestion appliqué par les paysans. Les résultats de recherche qui y sont obtenus seront ensuite à extrapoler dans la région du Centre-est qui couvre une superficie de 15.000 km2 et la méthode d’approche est aussi à valider.
La problématique générale de la gestion des ressources (voir 1.1 Contexte de l’étude) montre que la forêt humide du versant Est est considérée comme étant destinée à la production de riz par les riverains et les migrants. La zone de Beforona, ayant fait l’objet de diagnostics et d’analyses sur différents thèmes par différentes disciplines, les résultats ainsi obtenus à grande échelle sont à capitaliser à un niveau régional. L’approche systémique permet de comprendre le système agro-écologique d’un site en intégrant les différents composants (écologiques et socio-économiques) du système qui sont dans une relation de dépendance réciproque.
Les résultats de recherche de la localité de Beforona sont de deux types, écologique et socio-économique. Ces résultats et analyses sont très détaillées (relevés ou enquêtes au niveau site, ménage ou bassin versant). La précision et les détails d’analyse à l’échelle locale (topographie, état des ressources, etc.) sont difficiles à extrapoler. Dans ce cas, il est nécessaire de les généraliser, de voir leur représentativité pour passer du local au global et enfin, de multiplier les points d’observation pour vérifications.
Objectifs et hypothèses
La régionalisation des ressources naturelles contribue à identifier des solutions par extrapolation des résultats trouvés dans la zone de Beforona. Cependant, une simple extrapolation de données existantes ne résoudrait pas le problème de régionalisation car plusieurs impondérables peuvent survenir.
La problématique sur le tavy susmentionnée n’est pas exhaustive. Elle est basée sur des résultats de recherche de différents auteurs ayant travaillé dans la région orientale en général. Les objectifs de cette étude sont présentés en trois parties.
L’objectif général de cette thèse est d’analyser l’état actuel des ressources naturelles, leur utilisation par les acteurs locaux ainsi que l’influence de différents facteurs écologiques et socio-économiques qui les régissent. Dans ce cas, pour formuler des hypothèses répondant à cet objectif, il faut harmoniser ces différents facteurs d’une manière synchrone. Les objectifs spécifiques de cette étude sont présentés en trois parties.
Notre premier objectif spécifique est alors d’étendre les résultats du diagnostic des ressources naturelles à partir de l’exemple de Beforona afin de les restituer sous forme d’informations sur les contraintes et les possibilités d’action dans la région étudiée. Cet objectif consiste à décrire, quantifier et analyser les perturbations des écosystèmes renfermant les ressources naturelles dans l’ensemble de la région. A partir de ce modèle intégrant à la fois le milieu, les ressources et leurs utilisateurs, on pourra constituer une base de données présentant des données chiffrées pour chaque commune. D’après cette approche, la première hypothèse émise est que l’état des ressources naturelles de chaque commune est fonction de sa position par rapport au corridor forestier. Le taux de dégradation des ressources
Introduction
augmente proportionnellement avec la croissance démographique en concomitance avec le phénomène de migration. Par ailleurs, la qualité du savoir-faire local dans l’utilisation des ressources naturelles est en relation avec la dégradation de ces ressources.
Le second objectif spécifique est d’évaluer l’effet de la distance des communes par rapport aux infrastructures routières. C’est l’un des facteurs jouant un très grand rôle dans la dynamique des ressources naturelles. En effet, la route peut être prise aussi bien comme un facteur de développement que comme un facteur de dégradation. Par ailleurs, suivant les lieux, des potentiels agricoles spécifiques peuvent être identifiés mais ne sont pas valorisés soit par manque de moyens de production, soit à cause des accès difficiles. Ce qui nous amène
à émettre la seconde hypothèse que l’extension du phénomène de tavy au niveau régional est influencée par l’existence de route, et la déforestation pourrait être moindre à partir d’un certain seuil de distance. C’est pour dire qu’au-delà de ce seuil, les ressources naturelles sont relativement moins dégradées et que la durée des jachères est relativement suffisante pour la restauration de la fertilité du sol.
Le troisième objectif spécifique de cette étude est de trouver des indicateurs écologiques et socio-économiques pour extrapoler les « alternatives et améliorations » trouvées à Beforona. Cet objectif conduit à subdiviser la région en zones agro-écologiques présentant des caractéristiques agronomiques et écologiques identiques. Cette partition de la région donne la possibilité de dégager les potentialités et les contraintes dans l’utilisation des ressources naturelles. Ainsi, la troisième hypothèse qui en découle est qu’en fonction de la disponibilité des ressources naturelles, des zones agro-écologiques peuvent se différencier dans la région en matière d’utilisation des ressources naturelles et du savoir-faire sous régional. Ceci équivaut à une analyse des différents facteurs disponibles, écologiques et socio-économiques. En d’autres termes, suivant l’état des ressources naturelles disponibles, l’application des alternatives et améliorations trouvées à Beforona peut être adoptée ou non.
Compte tenu des différents facteurs à intégrer, l’approche pluridisciplinaire est adoptée dans ce travail. Cette approche intègre l’adoption de concepts et de résultats de plusieurs disciplines dont les thèmes principaux sont l’écologie, la socio-économie et la géographie. Pour aborder chacun des thèmes, la structure de notre thèse, après l’introduction, est organisée comme suit :
• Après l’introduction, le premier chapitre expliquera le contexte de l’étude et présentera le milieu d’étude en sachant que la région d’extrapolation (niveau global) inclue le niveau local qui est la zone de Beforona.
• Le deuxième chapitre traite de la méthodologie adoptée, incluant le cadre conceptuel de la régionalisation, les différentes procédures utilisant des démarches techniques et des outils variés.
• Les résultats sont présentés dans le troisième chapitre et portent particulièrement sur la végétation, l’occupation des sols de la région, les différents types de modèles sur les ressources naturelles aussi bien à l’échelle locale qu’au niveau régional, y compris une typologie régionale relative aux communes rurales.
• Enfin, le quatrième chapitre traite de la discussion des résultats et essaye d’avancer des recommandations relatives au tavy.
• Le dernier chapitre termine cette étude par une conclusion.
Contexte et caractéristiques du milieu d’étude
Contexte et caractéristiques du milieu d’étude
Contexte de l’étude
La pratique de la culture sur brûlis est considérée comme étant le premier pas dans la transition de la cueillette ou de la chasse vers la production proprement dite. Elle prend son origine depuis la période néolithique, soit 7000 ans avant JC (Sharma, 1976, cité par Ozenda, 1982). Cette technique de culture sur brûlis assure actuellement la subsistance d’environs 300 millions de personnes parmi les plus démunies dans le monde (Andriesse et Schelhaas 1987, cités par Pfund, 2000). A Madagascar, les Betsimisaraka sont des pionniers évoluant en milieu forestier depuis des générations ; ils pratiquaient déjà la culture sur brûlis avant le XVIIe siècle (Le Bourdiec F., 1974 ; Aubert et al, 1996). Depuis le royaume de Ranavalona II et la promulgation du code des 305 articles en 1881, les peines et les sanctions étaient sévères pour ceux qui brûlaient les forêts. Ensuite, l’administration coloniale ayant pris la relève, multipliait la mise en défens de la forêt par l’interdiction de toute utilisation abusive du patrimoine forestier et par la création des Aires Protégées. A partir de la Deuxième République, la mise en défens des terres et des forêts s’est relâchée et les usagers en ont abusé ; les paysans des zones forestières prenaient cette « tolérance » de l’État central comme de la « liberté totale » tant attendue, où chacun pouvait faire à sa manière en matière d’utilisation des terres et du feu.
De nos jours, nous trouvons irrationnel de parler de la culture sur brûlis sans discuter des problèmes écologiques et agronomiques, entre autres la déforestation et la perte de fertilité ; en parallèle, nous ne pouvons pas omettre les problèmes socio-économiques comme tout ce qui est relatif au riz, des coutumes, des migrants et des autochtones à la recherche de nouvelles terres fertiles, de la politique nationale en matière de gestion des espaces forestiers, etc.
Les aspects écologiques et agronomiques du tavy
Depuis l’arrivée de l’homme sur l’île, la culture sur brûlis se pratiquait dans les quatre coins de Madagascar. Seule la surface défrichée et brûlée changeaient en cours du temps. Dans tous les cas, Green et Sussman (1990) estiment qu’entre 1950 et 1985, la surface défrichée est de l’ordre de 110.000 ha par an dans la région orientale. Les conditions écologiques et particulièrement la topographie accidentée et le climat donnent rarement le choix du type de culture à adopter. Les vallons étroits en forme de V, les fortes pentes et les passages fréquents des cyclones entravent l’extension de la riziculture irriguée.
La viabilité de la culture sur brûlis dépend aussi de la fréquence d’utilisation des jachères ; à cet effet, Delord (1965, cité par Brand et Zurbuchen, 1997) a démontré que la forêt pluviale se transforme en une savane herbeuse peu fertile après 10 à 15 cycles de brûlis. Cette dégradation ne concerne pas seulement la végétation ; selon les études menées à Beforona (Brand et Rakotondranaly, 1997 ; Pfund et al. 1997), les qualités physiques et chimiques des sols se détériorent constamment suite à un très fort lessivage des nutriments sous tavy. Les dégâts sont encore poursuivis par les pertes en terre équivalentes à 4,6 à 13 tonnes /ha/an sur les parcelles tavy, et 46 à 144 tonnes /ha/an sur une culture de gingembre (Brand et al. 1997).
Table des matières
Introduction
1. Contexte et caractéristiques du milieu d’étude
1.1. Contexte de l’étude
1.1.1. Les aspects écologiques et agronomiques du tavy
1.1.2. Les problèmes économiques et socioculturels du tavy
1.2. Le milieu d’étude
1.2.1. Le milieu physique
1.2.2. Le milieu biotique
1.2.3. Conclusion
2. Méthodologie
2.1. Démarche générale pour la régionalisation.
2.2. Collectes des données
2.2.1. Inventaires botaniques.
2.2.2. Travaux denquête
2.3. Les méthodes cartographiques
2.3.1. Images satellites utilisées
2.3.2. Traitements dimages
2.3.3. Classification de la végétation
2.4. Méthodes de construction de modèles
2.4.1. Lutilisation du Système dInformation Géographique (SIG)
2.4.2. Construction des modèles
2.5. Synthèse méthodologique
3. Résultats
3.1. Inventaires et résultats cartographiques
3.1.1. La carte de végétation
3.1.2. La carte doccupation des sols.
3.1.3. La dynamique de la végétation dans la région détude
3.1.4. Conclusion partielle.
3.2. Modèles des sites dans la zone de Beforona
3.2.1. Modèles descriptifs et distribution spatiale des tanimboly
3.2.2. Modèle prédictif des tanimboly.
3.3. Modèles régionaux.
3.3.1. Les zones agro-écologiques
3.3.2. Les zones à risque de dégradation
3.3.3. Zones déforestées
3.3.4. Zonation des types de communes rurales
3.4. Synthèse des résultats
4. Discussion et recommandations
4.1. Quelques aspects méthodologiques.
4.1.1. Problèmes relatifs aux données utilisées et de changement déchelle
4.1.2. Pondération des facteurs : exemple de cas du facteur feu
4.1.3. Le croisement des indices : cas des zones à risque de dégradation
4.2. Discussions sur quelques résultats
4.2.1. Cas de la déforestation et pressions diverses sur les ressources naturelles
4.2.2. Zonation sur les types de communes rurales
4.2.3. Régionalisation et développement durable
4.3. Recommandations
4.3.1. Aspects du développement agricole
4.3.2. Aspects conservation
Conclusion générale