Cardio-oncologie en pédiatrie: évaluation cardiaque complète de survivants de leucémie aigüe survenue pendant l’enfance inclus dans la cohorte nationale LEA
Les leucémies aiguës de l’enfant sont des pathologies fréquentes (environ 700 nouveaux cas par an en France) et de pronostic spontané effroyable. Les traitements actuels, dont la chimiothérapie par anthracyclines ou la radiothérapie, permettent d’obtenir des taux de survie bien supérieurs aux autres pathologies malignes mais à un certain prix, dont celui de complications cardiovasculaires.
La cardio-oncologie est une discipline très récente, visant à prendre en charge les complications cardiovasculaires des traitements des cancers, et en perpétuelle évolution. Elle s’attache particulièrement à rechercher les paramètres diagnostiques les plus sensibles afin de détecter l’apparition de toxicités cardiovasculaires le plus précocement possible. Le but étant de proposer des traitements cardioprotecteurs à des stades infra-cliniques afin de stabiliser voire de faire régresser les anomalies observées. Il est en effet admis que la cardiomyopathie aux anthracyclines, une fois au stade clinique, est irréversible et va progresser inéluctablement vers l’insuffisance cardiaque malgré un traitement cardioprotecteur (1)(12). Ce diagnostic précoce est maintenant possible grâce notamment aux progrès des techniques échocardiographiques ces dernières années, en particulier avec l’analyse des déformations longitudinales du ventricule gauche ou strain. La toxicité cardiaque des anthracyclines et de la radiothérapie est connue de longue date. Elles peuvent entre autre induire l’apparition d’une cardiomyopathie dilatée ou plus rarement restrictive. De plus, la radiothérapie est également responsable de coronaropathies, de valvulopathies, de troubles conductifs et de pathologies du péricarde pouvant survenir à long terme.
La plupart des études menées sur la population de survivants de leucémies survenues pendant l’enfance ont inclus des patients traités il y a de nombreuses années, avec des protocoles d’administration des anthracyclines et de séances de radiothérapie bien éloignés des pratiques actuelles. Néanmoins, une étude de cohorte nationale suisse de patients survivants de leucémie de l’enfant révèle que le problème de la cardiotoxicité des anthracyclines reste d’actualité malgré l’évolution des protocoles de traitement. Les patients inclus avaient en effet été traités entre 1976 et 2005 mais il n’y avait pas de différence significative en termes de cardiotoxicité selon l’année de traitement. (2) En outre, dans les quelques rares études de cardio-oncologie pédiatrique, les mesures échocardiographiques reposaient sur la mesure de la fraction de raccourcissement et de la fraction d’éjection du ventricule gauche. Or, il est admis que ces paramètres sont les derniers à s’altérer, ce qui a été également prouvé dans les études de cardio-oncologie menées sur les cancers de l’adulte.
L.W.Jones concernant des patients traités pendant l’enfance pour un lymphome de Hodgkin entre 1970 et 1984 (3). Ils ont observé une nette réduction des évènements cardiovasculaires. Néanmoins, ceci reste une étude concernant des patients traités avec des protocoles dépassés à ce jour et à haut risque cardiovasculaire. Il serait donc intéressant de relier ce facteur protecteur potentiel aux données échocardiographiques modernes de patients traités pendant l’enfance avec les derniers protocoles de traitement oncologique. Notre étude a pour objectif d’étudier la cardiotoxicité des anthracyclines, associées ou non à de la radiothérapie, chez des patients traités pendant l’enfance pour une leucémie aiguë avec les protocoles actuels. Notre objectif est de montrer que le strain longitudinal global des ventricules est le paramètre le plus sensible afin de détecter précocement une cardiotoxicité. Nous avons également cherché à préciser le rôle protecteur de la pratique d’une activité physique régulière avant et après le traitement.
Population étudiée
“Etude des déterminants de santé et de la qualité de vie des patients après traitement d’une leucémie aiguë de l’enfance – Cohorte prospective multicentrique des Leucémies de l’Enfant et de l’Adolescent (L.E.A.)”. Sont inclus dans cette étude tous les patients qui avaient moins de 18 ans au moment du diagnostic de la leucémie aiguë. Un consentement était recueilli au moment de l’inclusion. Les patients ont été traités entre 2000 et 2018. Cette recherche a été soumise à avis et à autorisation auprès de deux instances, lesquelles ont pour mission de vérifier la pertinence scientifique de l’étude, les conditions requises pour la protection et le respect des droits des patients : Lors de la consultation avec l’oncologue dans le cadre du suivi du protocole LEA, les patients et leur responsable légal le cas échéant, étaient informés de la nécessité d’une consultation spécialisée en cardiologie tous les 2 ou 4 ans en fonction des traitements antérieurs reçus. Ils avaient le choix entre consulter un cardiologue de ville ou consulter au sein du service de cardiologie pédiatrique et congénitale. Tous les examens ont été effectués par le même opérateur.