Caractéristiques générales et processus d’une invasion biologique

Les espèces envahissantes

Plusieurs définitions ont été attribuées aux espèces envahissantes selon les auteurs, les ouvrages et les publications consultés : « Une plante envahissante » est définie comme « une plante qui se multiplie naturellement sans l’intervention de l’homme pour produire un changement important sur la composition, la structure ou le fonctionnement de l’écosystème dans un milieu naturel ou milieu dégradé » (QUENTIN et al., 1995). Cette définition est destinée aux espèces envahissantes dans un milieu naturel perturbé. « Une plante envahissante » est une plante étrangère qui se propage naturellement, sans assistance directe de l’homme, dans un habitat naturel ou semi-naturel en provoquant un changement significatif en terme de composition structure de l’écosystème (CHAPMAN et al., 1995 in ARIVOHARISOA, 2005). « Plante envahissante » désigne une associée d’une espèce allochtone qui s’étant établie dans des écosystèmes ou habitats naturels ou semi – naturels, en devenant un agent de perturbation, qui nuit à la diversité biologique autochtone (PASCAL et al., 2000 in ARIVOHARISOA, 2005). Espèce dite «envahissante» désigne toute espèce qui, à la suite de son introduction, prolifère, s’étend et persiste au détriment des écosystèmes et des espèces indigènes (MACK et al., 2000 in TASSIN et al., 2009). « Espèce exotique envahissante » veut dire une espèce exotique qui s’est établie dans des écosystèmes naturels ou semi-naturels. C’est un agent de changement qui menace la diversité biologique native (UICN, 2000 in ISSG, 2011a).
« Espèce exotique envahissante » veut dire une espèce exotique dont l’introduction et/ou la propagation menace la diversité biologique (COP_6 CDB, 2002 in ISSG, 2011a).
Par « espèces envahissantes », on entend l’ensemble des organismes vivants occupant un espace donné à un moment donné, qui est en relation avec le milieu naturel hôte. Ces espèces entrent en concurrence avec les espèces autochtones entraînant l’extinction de ces dernières (ONE, 2008e). Ainsi, une « espèce envahissante » désigne toute espèce qui est introduite et/ou qui s’est introduite dans un lieu et s’implante dans un écosystème naturel, semi-naturel. Elle constitue un facteur de changement dans ledit écosystème et menace la diversité biologique locale. Elle peut appartenir aux règnes Animal, Végétal ou un microorganisme ; mais, l’étude ci-présent s’est focalisée uniquement sur les espèces végétales envahissantes.

Caractéristiques générales et processus d’une invasion biologique

Toutes les espèces introduites dans un pays ne deviennent pas des envahisseurs. Les espèces envahissantes possèdent au moins les caractéristiques suivantes (FINLAYSON & ALYOKHIN, 2006) : bonnes capacités de dispersion : elles peuvent disperser de nombreuses propagules viables sur de grande distance.
accroissement rapide de la population : les espèces, dont la population se développe plus vite, peuvent avoir la capacité de se disperser et de former des populations stables par l’augmentation de leur capacité à résister aux conditions défavorables.
capacité à se reproduire asexuellement ou par auto-fertilisation : ce mode de reproduction est généralement avantageux par rapport à la reproduction sexuée pour l’établissement de nouvelle population.
large tolérance écologique : la capacité de résistance à une large variété de conditions environnementales pourra aider les organismes à occuper de nouvelles espaces. adaptation environnementale : les envahisseurs biologiques réussissent mieux dans les zones similaires à leur milieu d’origine.
L’invasion biologique est un phénomène dynamique. Avant de devenir «envahissante», une espèce franchit relativement les étapes suivantes (QUENTIN et al., 1995 ; BIFOLCHI, 2007) : Introduction : l’introduction d’une espèce envahissante implique la translocation et le transport de la matière vivante par les gens d’une région à une autre, d’une manière accidentelle ou intentionnelle. Cette étape correspond au franchissement d’une barrière géographique.
Naturalisation : une fois introduite, une espèce envahissante s’établie au-delà du site d’introduction initial vers les autres populations des végétations naturelles, semi-naturelles ou des milieux anthropisés. Ainsi, elle correspond au franchissement d’une barrière environnementale, soit la survie dans de nouvelles conditions environnementales.
Facilitation : la taille de la population d’une quelconque espèce naturalisée peut rester moindre, à moins que son extension soit facilitée (par exemple par la présence d’un agent de la dispersion convenable, par l’absence de maladies, etc.). Cette étape correspond, donc, au franchissement de la barrière reproductive pour assurer le maintien durable de la population.
Dispersion : Si l’extension d’une espèce a été facilitée, la vitesse de la colonisation des milieux va dépendre de sa propre croissance et de sa vitesse de reproduction. Ainsi, l’étape de dispersion correspond à une phase de prolifération dans les milieux colonisés ainsi que dans les nouveaux habitats.
Interactions avec les animaux et les autres espèces végétales : une fois établie, les espèces envahissantes entrent en contact avec les animaux ainsi que les végétaux du milieu.
Stabilisation : quelques espèces envahissantes paraissent se stabiliser en étant la seule espèce constitutive d’un habitat.

Cadre juridique pour la gestion des espèces envahissantes

Des instruments juridiques internationaux énoncent des dispositions, des principes et des outils permettant de prendre en charge les questions relatives aux espèces exotiques envahissantes (SHINE, WILLIAMS & GÜNDLING, 2000).
La Convention sur la Diversité Biologique (CDB), ratifiée par plus de 170 Etats (vers l’année 2000) est le seul texte juridique obligatoire, applicable à l’échelle mondiale, qui traite de façon générale l’introduction, le contrôle et l’éradication d’espèces exotiques envahissantes, tous taxons biologiques et écosystèmes confondus. En vertu d’une série de mesures de conservation in-situ, dans la mesure du possible et selon qu’il conviendra, chaque Partie “empêche d’introduire, contrôle ou éradique les espèces exotiques qui menacent des écosystèmes, des habitats ou des espèces” selon l’Article 8h de ladite convention. Il s’agit d’une obligation formulée de façon très générale, qui laisse aux Parties le choix des moyens appropriés pour sa mise en œuvre. Cependant, certaines dispositions générales de la CDB même fournissent des orientations importantes pour concevoir des outils et des critères communs pour l’élaboration du cadre juridique destiné à la réglementation des aspects ci-dessus. Il s’agit, par exemples, de l’intégration des questions liées à la diversité biologique dans les plans et les politiques de développement (Article 6b) et de la réalisation d’Etudes d’Impact sur l’Environnement des projets susceptibles de nuire sensiblement à la diversité biologique (Article 14).
Nombreux sont aussi les instruments de conservation de la nature à vocation régionale qui contiennent des dispositions visant à réglementer l’introduction d’espèces exotiques (SHINE et al., 2000).
En Europe, la Convention relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe (Convention de Berne, 1979) établit pour les Parties contractantes l’obligation de contrôler strictement l’introduction d’espèces non indigènes selon l’Article 11(2) de la convention. Son «Comité Permanent» a encouragé activement la mise en place de mesures juridiques plus efficaces, destinées à combattre les espèces exotiques envahissantes en prenant l’initiative de travaux de recherche et d’analyse juridique et en élaborant des recommandations spécifiques sur l’introduction et l’éradication d’espèces exotiques envahissantes ainsi que sur les réintroductions d’espèces indigènes.
En Afrique, la Convention africaine pour la conservation de la nature et des ressources naturelles (Alger, 1968) fait obligation aux Parties contractantes d’interdire, à l’intérieur d’une réserve naturelle, toute activité susceptible d’être nuisible à la faune ou à la flore et de les perturber, y compris l’introduction de spécimens zoologiques ou botaniques, autochtones ou importés, sauvages ou domestiques d’après l’Article 3 .
Pour le cas de Madagascar, de nombreuses conventions internationales et régionales, notamment celles relatives à la protection de la nature et de l’environnement, ont été ratifiées comme la Convention Africaine pour la conservation de la nature et des ressources (1968) ratifiée en 1970 ; la Convention sur la Diversité Biologique, signée en 1995 ainsi que l’Agenda 21 ou Plan Global d’Action sur l’environnement et le développement du CNUCED, etc.

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Collecte des paramètres et des informations sur les caractéristiques écologiques

Zones d’envahissement des espèces : Les diverses zones ainsi que les lieux éventuels de distribution des espèces, où elles ont été considérées comme étant envahissantes ou susceptibles de l’être au niveau du pays, ont été identifiés.
Origine géographique : Selon les définitions des espèces envahissantes, les espèces introduites ont une importance considérable. Ainsi, les pays d’origine principaux des espèces (continents, régions) ont été identifiés. Par ailleurs, les types de climat d’origine des espèces en ont été déduits.
Ecosystème de préférence : Les milieux, dans lesquels chaque espèce exerce son envahissement, ont été déterminés. De la sorte, deux (2) principaux types d’écosystèmes ont été distingués : terrestre regroupant l’écosystème forestier, les prairies et les savanes, les champs de culture, les bords de route, les voisinages des habitations humaines, etc.
aquatique regroupant les rizières, les lacs, les étangs, les fleuves, les marais, les marécages, etc. En outre, les caractéristiques de milieux envahis par les espèces ont été précisées. Ainsi, la classification de QUENTIN et al. (1992) des espèces envahissantes en cinq (5) catégories, selon leurs impacts sur l’écologie, a été utilisée (RANDRIANASOLO, 2006) :
Catégorie 1 : mauvaises herbes qui attaquent les savanes hautement dégradées ou les sols cultivés ; Catégorie 2 : mauvaises herbes qui menacent les pâturages, les plantations forestières ou les canaux d’irrigation ;
Catégorie 3 : espèces envahissantes des habitats naturels ou semi-naturels, possédant encore quelques intérêts de conservation ; Catégorie 4 : espèces qui menacent des habitats naturels ou semi-naturels importants, que ce soient des forêts dont la richesse floristique est élevée, ou des forêts contenant des espèces rares, soit des espèces endémiques, ou encore des aires protégées ;
Catégorie 5 : espèces qui menacent une flore ou une faune en voie de disparition. Ces cinq (5) catégories ont été regroupées en deux (2) grands groupes de milieux :
milieux anthropisés, milieux indissociables aux activités et aux influences des humains. Ils regroupent les catégories 1 et 2 des « mauvaises herbes » ou adventices qui désignent toute espèce végétale indésirable dans une culture (MERLIER & MONTEGUT, 1982). Il s’agit surtout des rizières, des champs de culture (zones de culture sur – brûlis anciennes ou actuelles), des zones d’habitation (villages), des bords de route, etc.
milieux naturels et ou semi – naturels, milieux ayant subis des étapes de succession avec le temps (mais qui conservent encore de nombreux éléments naturels) malgré les pressions (naturels ou anthropiques) et les perturbations qui s’y sont exercés. Dans ce groupe appartiennent les catégories 3,4 et 5. Ainsi, il s’agit des formations forestières et arbustives d’une extrême variété, possédant des intérêts de conservation non négligeable à Madagascar : forêt dense humide de basse, moyenne et haute altitude (FDHBA et FDHMHA), forêt dense sèche (FDS), bush, forêt secondaire (FII), etc.

Table des matières

I. INTRODUCTION
II. CADRE METHODOLOGIQUE
2.1. Problématique 
2.2. Hypothèses
2.3. Matériels
2.3.1. Les espèces envahissantes
2.3.1.1. Définitions
2.3.1.2. Caractéristiques générales et processus d’une invasion biologique
2.3.1.3. Cadre juridique pour la gestion des espèces envahissantes
2.3.2. Les régions bioclimatiques de Madagascar
2.3.2.1. Généralités
2.3.2.2. Caractéristiques
2.4. Méthodes
2.4.1. Investigation bibliographique et wébiographique
2.4.1.1. Constitution d’une liste bibliographique
2.4.1.2. Etablissement de la liste des « espèces envahissantes » à Madagascar
2.4.1.3. Collecte des paramètres et des informations sur les caractéristiques biologiques
2.4.1.4. Collecte des paramètres et des informations sur les caractéristiques écologiques
2.4.1.5. Collecte des paramètres et des informations sur la situation socio-économique
2.4.2. Entrevues avec des personnes ressources
2.4.3. Cartographie
2.4.4. Traitements et Analyses des données
2.5. Cadre opératoire 
2.6. Démarche méthodologique
III. RESULTATS ET INTERPRETATIONS
3.1. Caractéristiques biologiques des espèces envahissantes
3.1.1. Catégories taxonomiques des espèces envahissantes
3.1.2. Caractéristiques biologiques des espèces envahissantes
3.1.2.1. Forme biologique
3.1.2.2. Longévité
3.1.2.3. Reproduction
3.2. Caractéristiques écologiques des espèces envahissantes
3.2.1. Régions bioclimatiques de Madagascar
3.2.2. Situation d’envahissement des régions bioclimatiques
3.2.3.1. Etat d’envahissement de chaque région bioclimatique
3.2.3.2. Espèces envahissantes communes aux régions bioclimatiques
3.2.3.3. Comparaison de la situation d’envahissement des quatre (4) régions bioclimatiques
3.2.3. Ecosystèmes de préférence des Espèces envahissantes
3.3. Situation socio-économique des espèces envahissantes
3.3.1. Types et formes d’utilisation des espèces envahissantes
3.3.1.1. Typologie des utilisations des espèces envahissantes
3.3.1.2. Parties utilisées chez les espèces envahissantes
3.3.2. Valorisation économique des espèces envahissantes : Etude de cas
IV. DISCUSSIONS ET RECOMMANDATIONS 
4.1. Discussions
4.1.1. Sur les méthodes
4.1.2. Sur les résultats
4.1.3. Sur les hypothèses
4.2. Recommandations
V. CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 
ANNEXES 

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