Caractéristiques clinico-pathologiques des carcinomes mammaires infiltrants

Le cancer du sein est la première pathologie maligne féminine au monde. Il est la première cause de décès par cancer chez la femme. Son incidence ne cesse d’augmenter. Il est responsable de plus de 521 000 décès par an (1). Le cancer du sein apparait comme une maladie complexe, caractérisée par l’accumulation de multiples altérations moléculaires qui confèrent à chaque tumeur un phénotype et un potentiel évolutif propres. Le diagnostic est basé sur le trépied clinique, radiologique et biopsique/chirurgical couronné par un examen anatomopathologique. La dernière classification de l’OMS 2012(1) s’est basée sur des données morphologiques, histochimiques et génotypiques des tumeurs. Ainsi, étant la forme histologique la plus fréquente, les carcinomes mammaires sont distingués en carcinomes infiltrants de type non spécifique qui représentent 80% de la totalité des tumeurs et des carcinomes de types spéciaux rares (2). La diversité du profil hormonal et immunologique des tumeurs mammaires (3) donne des évolutions et pronostics propres à chaque tumeur (4). Cette divergence est partiellement responsable de plusieurs échecs thérapeutiques et explique la complexité de la prise en charge des tumeurs mammaires. Elle reflète aussi la complexité de la base moléculaire de cette pathologie. Il est donc crucial d’améliorer la classification pronostic du cancer du sein, pour affiner les indications thérapeutiques et améliorer les taux de survie (3).

La classification moléculaire du carcinome mammaire est basée sur l’analyse de l’expression génétique en utilisant l’ADN microarrays. Décrite par Perou et Sorli (5) au début des années 2000, cette analyse nous permet d’identifier et distinguer 4 classes moléculaires :

• Type Luminal : Tumeurs qui expriment les récepteurs hormonaux. Elles sont classées en deux catégories : Luminal A et Luminal B.
• Type HER2 overexpressing : Tumeurs Sur-exprimant l’HER2.
• Basal like « Triples-négatif » : Les tumeurs qui n’expriment pas les récepteurs hormonaux et ne sur-expriment pas l’Her2.
• Type Normal breast like: Un type de tumeurs mal défini. Un certain nombre de scientifiques le considère comme un artefact, provenant de la contamination des échantillons tumoraux par le tissu mammaire normal (8).

Étant coûteuses, d’accès restreint et nécessitant du matériel tissulaire tumoral congelé, les partisans de cette classification moléculaire se sont employés à trouver des moyens pratiques pour appliquer à la vie courante les techniques à haut débit (9,10). Par conséquent, l’utilisation des marqueurs immuno-histochimiques remplaçants l’ADN microarry pour le sous-typage a été adoptée (11).

Organisation histologique, morphologique et immunohistochimique

Structure générale du sein :
La glande mammaire est une glande exocrine sudoripare modifiée. Elle se développe au cours de la vie de la femme. C’est une glande d’origine ectodermique. Son stroma et ses vaisseaux dérivent du mésenchyme. Elle représente un symbole de féminité avec une fonction biologique de production du lait afin d’allaiter les nouveau-nés et nourrissons. C’est un organe à développement continu depuis le stade embryonnaire, à travers la puberté, les cycles menstruels et la grossesse, jusqu’à l’atrophie à la ménopause.Les deux principales hormones qui contrôlent le renouvellement de la structure mammaire sont : l’œstradiol et la progestérone. Ils réalisent une association à la fois synergique et antagoniste.

Le sein a la forme d’un cône à base thoracique, avec le mamelon au sommet où s’abouchent 10 à 20 canaux. Certains sont rapidement borgnes mais la majorité va (après une dilatation ampullaire fusiforme appelée sinus lactifère et située à hauteur de la plaque aréolaire) se ramifier en canaux de plus petit calibre jusqu’à aboutir aux structures terminales périphériques appelées les lobules.

La glande mammaire renferme deux structures essentielles : le lobule qui est une structure à visée sécrétoire, et le canal galactophore à visée excrétrice. La ramification d’un canal galactophore donne lieu à une arborescence qui (avec le tissu conjonctif ou adipeux qui l’entoure) est appelée lobe.

Le lobe :
La glande mammaire est une glande tubulo-alvéolaire formée de 10 à 20 lobes entourés de tissu conjonctif et de tissu adipeux. Chaque lobe est drainé par un canal excréteur : canal galactophore. Ces lobes convergent vers l’aréole et s’ouvrent au niveau du mamelon où ils présentent une dilatation appelée sinus lactifère, avant de s‘aboucher au sommet du mamelon. Ils sont ramifiés en canaux de plus en plus fins qui recueillent le produit de sécrétion des glandes tubulo-acineuses.

Le lobule :
a. La structure :
Le lobule est une formation sphérique d’environ 0,5 à 1mm de diamètre constituée de petits tubes borgnes (appelés ductules terminaux) agencés de manière radiée autour d’un canal collecteur intralobulaire (le galactophore terminal intralobulaire). Ces ductules terminaux, au nombre de 20 à 100, sont entourés par un tissufibrocollagène lâche appelé tissu palléal et dont les limites périphériques séparent le lobule du tissu fibro-collagène de soutien. Le revêtement épithélial des lobules est à double couche ; la couche internefaite de cellules épithéliales bordant la lumière, et la couche externe de cellules myoépithéliales .

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En 1975, Wellings a développé le concept de TDLU (terminal ductlobular unit ou unité terminale ductulo-lobulaire) qui englobe le lobule et le galactophore terminal extra-lobulaire(24). Ce galactophore terminal représente la dernière division du galactophore avant le lobule. Il est court et de longueur voisine de celle du diamètre lobulaire, soit environ 1mm. Ce TDLU, de par sa grande hormonoréceptivité, représente le lieu de développement de la plupart des proliférations épithéliales bénignes et malignes.

b. La cellule épithéliale :
La cellule luminale est responsable de la fabrication du lait maternel. La cellule épithéliale (Luminale) présente au niveau de la lumière est la cellule précurseurde la majorité des carcinomes mammaires. Dans au moins 98% des cas de cancer il s’agit d’un Adénocarcinome développé à partir de cette cellule glandulaire.

c. Les récepteurs hormonaux et profil immunohistochimique:
La synthèse des récepteurs hormonaux est induite par les œstrogènes. En effet, l’activation de ces récepteurs, au niveau du tissu mammaire, est importante lorsque l’incitation hormonale est croissante. Cette activation induit une multiplication des cellules mammaires échappant à tout mécanisme de régulation.
• Le récepteur de l’œstradiol est un marqueur de la différenciation tumorale.
• Le récepteur de la Progestérone, étant normalement induit par l’œstradiol, est un reflet de la fonctionnalité du récepteur de l’œstradiol .

d. La cellule myoépithéliale (basale) :
La cellule basale n’est pas spécifique du sein. On la retrouve dansles glandes salivaires et sudorales. Elle se situe entre les cellules épithéliales et la membrane basale. La cellule myoépithéliale participe à l’élaboration de la membrane basale. Elle a des propriétés contractiles qui favorisent l’éjection du lait et l’apparition d’espaces intercellulaires, permettant de meilleurs échanges entre l’épithélium et le tissu palléal. On remarque son absence dans les carcinomes mammaires infiltrants.

e. La membrane basale :
La membrane basale est une structure membranaire, qui a comme fonction le soutien de l’épithélium. Synthétisée par les cellules épithéliales, elle représente une zone d’échange et de contact entre les structures épithéliales et le tissu conjonctif. En cancérologie, la membrane basale s’oppose au passage des cellules cancéreuses, et son respect par les cellules néoplasiques apermis de définir le concept de carcinome in situ. Son invasion définit aussi le carcinome infiltrant (27).

f. Le tissu palléal :
Le tissu conjonctif intra-lobulaire qui entoure les canalicules au sein du lobule appelé encore tissu palléal est lâche, plus cellulaire que celui des travées inter-lobulaires et sensible aux influences hormonales.

Sa densité est variable, en fonction du cycle hormonal ou de l’âge. Très actif, le tissu palléal est :
− une zone d’échange où se produisent les modifications cycliques d’origine hormonale ;
− un site privilégié de la croissance du tissu mammaire, en particulier à l’adolescence et chez l’adulte dans le phénomène d’adénose ;
− propice au développement d’une réaction inflammatoire, en particulier dans les mastites ou au contact d’un carcinome in situ ;
− à l’origine de tumeurs à dominance conjonctive comme le fibroadénome ou la tumeur phyllode.

Table des matières

INTRODUCTION
MATÉRIELS ET MÉTHODES
I. Type de l’étude
II. Méthodes du travail
1. Sélection de la population étudiée
2. Etapes techniques et étude immunohistochimique
RÉSULTAS
I. Caractéristiques clinico-pathologiques des carcinomes mammaires infiltrants
1. Les années étudiées
2. Lieu de l’étude histologique
3. Le type de prélèvement
4. Le sexe
5. L’âge
6. Le type histologique selon l’OMS 2012
7. Grade histo-pronostique SBR (modifié par Ellis et Elston)
8. Taille TNM (7éme édition 2009 AJCC)
9. Atteinte Ganglionnaire
10. Emboles vasculaires
II. Profil phénotypique des marqueurs immunohistochimiques des carcinomes mammaires infiltrants
1. Récepteurs de l’Estrogène
2. Récepteurs de la Progestérone
3. Le profil HER2 des carcinomes mammaires infiltrants
4. Le profil prolifératif (Ki67) des carcinomes mammaires infiltrants
III. L’approche de la classification moléculaire
1. L’approche de la classification moléculaire
2. La répartition de l’approche de classification moléculaire dans les années étudiées
IV.Comparaison des facteurs clinico-pathologiques et l’approche de classification moléculaire
1. La répartition des différents sous-types selon l’âge
2. La répartition des différents sous types moléculaires selon le type histologique
3. La répartition des différents sous types moléculaires selon le grade SBR modifié par Ellis et Elston
4. La répartition des différents sous types moléculaires selon la présence d’embols vasculaires
5. La répartition des différents sous types moléculaires selon la taille tumorale
6. La répartition des différents sous types moléculaires selon l’envahissement ganglionnaire
7. La répartition des différents sous types moléculaires selon le sexe
DISCUSSION
I. Rappels bibliographiques
1. Organisation histologique, morphologique et immunohistochimique
2. L’étude histologique
3. L’étude immunohistochimique
4. La classification moléculaire
5. Les applications thérapeutiques
II. Discussion
1. La classification moléculaire
2. Corrélation clinico-immuno-pathologique chez les carcinomes mammaires infiltrants
3. Les critères pronostiques et classification moléculaire
4. Recommandations
CONCLUSION

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