Caractérisation structurale et fonctionnelle des communautés bactériennes associées à Piliostigma reticulatum (DC.) Hochst
Dégradation des milieux sahéliens
Causes et impacts
La dégradation des sols (Figure 2) affecte environ 1,5 milliard de personnes et un quart de la superficie de toutes les zones agro-écologiques du monde (Lal et al., 2012 ; Gomiero, 2016). Chaque année, une superficie environ 5 à 8 million d’hectares de terres autrefois productives ne sont plus cultivées en raison de la dégradation (TerrAfrica, 2006). On parle de degradation quand la terre ne parvient plus à assurer les fonctions et services liés à la production et au développement des communautés vivantes. Elle se produit lorsque la productivité potentielle associée à un système d’utilisation des terres devient non durable ou lorsque la terre n’est plus en mesure d’accepter, de stocker et de recycler l’eau, l’énergie et les déchets (Vlek et al., 2010). La dégradation peut se présenter sous plusieurs formes : La dégradation physique, il s’agit de la diminution de l’épaisseur de la couche humifère, la déstabilisation des agrégats et de la structure du sol. Elle se manifeste aussi sous forme d’encroûtements à la surface du sol, de compactage, de l’aridification, etc. La dégradation chimique, c’est un déficit ou un excédent en éléments nutritifs qui se caractérise par l’acidification, la salinisation, l’alcalinisation etc. La dégradation biologique, qui est une réduction du contenu du sol en matière organique, de la quantité de la macrofaune du sol, et de la biodiversité de la macrofaune du sol. De plus, il ya une autre forme considérée comme un type de dégradation : c’est l’érosion due par l’eau (érosion en nappe, érosion linéaire, en griffe, rigole, érosion marine littorale), et par le vent (déflation, ensablement, formation de dunes). Cependant les effets globaux de la dégradation des sols constituent une menace majeure pour la sécurité alimentaire, en particulier dans les régions pauvres. Ainsi, pour estimer la dégradation des terres, il faudrait vérifier l’existence d’un lien de cause à effet entre les changements constatés et le déficit de productivité des terres. De plus, l’appauvrissement des sols en éléments nutritifs est souvent accentué par la faible fertilité initiale des sols dont 80% ont des limitations physiques ou chimiques pour la production agricole (Sanchez, 1976). Les faibles teneurs en carbone et en azote, qui sont des éléments essentiels de la fertilité du sol, sont causées entre autre par la faible production de biomasse et d’un taux très élevé de minéralisation (Mokwunye et al., 1996). Cependant, l’exportation des résidus de cultures après récolte diminue le niveau des réserves du sol en éléments nutritifs entraînant des baisses du pH, des éléments (tels que K, Ca et Mg), et de la capacité d’échange des cations (CEC) par rapport à l’état de la jachère (Bagayoko et al., 1996 ; Koulibaly et al., 2015). D’un autre côté, la pression démographique montante en Afrique, plus particulièrement au sahel a conduit à la perturbation des systèmes de jachère, à des faibles rendements, et à une diminution progressive de la superficie et de la qualité des terres arables par habitant. Beaucoup de systèmes traditionnels de production n’ont pas pu évoluer assez rapidement pour faire face à cette croissance. Le nombre élevé d’habitants et d’animaux dans certaines zones a dépassé la capacité de charge des terres, entrainant la dégradation de l’environnement et la durabilité des systèmes de production. Tout ceci démontre que la zone Sahélienne est menacée par une diminution accélérée des ressources naturelles et une aggravation de la pauvreté dans les zones rurales (Ambouta et al., 2004 ; Roose, 2004). Au Sénégal, l’érosion éolienne et hydrique qui sévit de manière très importante, la salinisation et l’acidification dues essentiellement à l’avancée de la mer et aux mauvaises pratiques agricoles participent fortement à la dégradation des sols. Toutefois, le sol en plus d’être un support pour la culture des végétaux, constitue un réservoir de micro-biodiversité car hébergeant plusieurs communautés microbiennes. Figure 2. Estimation du niveau de dégradation des sols au niveau mondial (Source UNEP/GRID-Arendal) Dégradation des sols Très dégradé Dégradé Sol stable Sans végétation
Les communautés bactériennes du sol
Le sol comme habitat de la biodiversité
Le sol est une combinaison de trois fractions : une fraction solide, une fraction liquide et une faction gazeuse. La fraction solide est composée de constituants minéraux (sables, argiles, limons) et de constituants organiques qui comprennent la phase organique inerte et la phase organique vivante (Theng, 1987). La fraction liquide (solution du sol) est composée d’eau dans laquelle sont dissoutes des substances solubles provenant à la fois de l’altération des roches, de la minéralisation des matières organiques et des apports par l’homme. Et enfin la fraction gazeuse qui est composée des gaz d’origine atmosphérique ou provenant de l’activité métabolique des organismes du sol. Le sol abrite en partie les processus de décomposition et de minéralisation de la matière organique. Il est également un milieu vivant qui héberge une très grande diversité d’organismes qui interagissent entre eux (Lavelle et al., 1995 ; Swift et al., 1998). Par ailleurs, les microorganismes qui y vivent, jouent un rôle clé dans la régulation des processus de décomposition de la matière organique et du cycle des nutriments (Recous et al., 2017). Ce qui suppose qu’il constitue un maillon fort de la production agricole, et donc le support de la plante cultivée. Le sol est au centre des grands cycles biogéochimiques constituant des réserves d’éléments nutritifs, qui participent aux cycles de l’eau (stockage et régulation) et de la qualité de cette eau (source de pollution, capacité de rétention et de biodégradation des polluants) entre l’atmosphère et la terre. Il est considéré comme un milieu biologique dans/et sur lequel se développent des êtres vivants. Ce développement va dépendre de la qualité et de la quantité de carbone, d’azote, la capacité d’échange cationique, etc. ou de la fertilité du sol.
La diversité des communautés bactériennes du sol
Le sol est un environnement complexe et très riche abritant une importante diversité de microorganismes. Parmi ces microorganismes, les bactéries sont de loin les plus abondantes à la fois en termes de biomasse et de diversité taxonomique (Buckley & Schmidt, 2002). Les microbiologistes utilisent, le terme « diversité » pour décrire les variations qualitatives entre les microorganismes (Øvreås, 2000). L’estimation de la diversité en espèces permet d’obtenir plus d’informations sur la nature de la composition d’un sol donné. Elle est exprimée par le nombre d’espèces différentes ainsi que par leur abondance relative dans la microflore du sol (Kennedy & Smith, 1995). Ainsi, la diversité des espèces dans un écosystème local est considérée comme la diversité alpha. La variation de cette dernière dans un même environnement est considérée comme la diversité bêta, et, lorsqu’elle est mesurable, la diversité gamma qui représente la richesse en espèces à l’échelle régionale et mondiale. Par ailleurs, cette diversité a été appréhendée par diverses méthodes statistiques et marqueurs phylogénétiques.
La rhizosphère et les bactéries rhizosphériques
Le terme «rhizosphère» a été défini pour la première fois en 1904 par Lorenz Hiltner, et redéfini par plusieurs auteurs comme la zone soumise à l’influence directe des racines (Bakker et al., 2013 ; Bouizgarne, 2013 ; Prescott & Grayston, 2013). Cette zone se distingue par trois parties (Figure 3) qui sont : L’endorhizosphère qui comprend le cortex racinaire et le tissu endodermique, le rhizoplane qui englobe l’épiderme et le mucilage et l’ectorhizosphère qui couvre le sol près de la racine (Lynch, 1983 ; Lynch & Whipps, 1990 ; Badri & Vivanco, 2009). Elle constitue un lieu d’interactions et d´échanges dynamiques complexes entre le sol, la solution du sol, les racines des plantes et les microorganismes rhizosphériques (Lynch & Whipps, 1990 ; Barea, 2005 ; Bais et al., 2006). Dans cette zone, les interactions entre les racines des plantes, les sols et les microbes modifient de manière significative les propriétés physiques et chimiques du sol, qui modifient à leur tour la population microbienne de la rhizosphère (Nihorimbere et al., 2011). Elle peut contenir jusqu’à 1011 cellules microbiennes par gramme de sol racinaire et plus de 30 000 espèces procaryotes (Egamberdieva, 2008 ; Mendes, 2011). Des travaux ont montré que les racines des plantes transfèrent 17% de leurs photosynthétats au niveau de la rhizosphère ce qui en fait une zone attractive et d’intense activité microbienne (Salt et al., 1998 ; Nguyen, 2003), qui se caractérise par des conditions biotiques et abiotiques différentes de celles du sol non rhizosphérique (Ibekwe et al., 2010). Les bactéries de cette zone appelées rhizobactéries sont d’une grande diversité et dont leur influence sur la plante peut être neutre, néfaste ou bénéfique (Raaijmakers et al., 2009). Parmi les rhizobactéries bénéfiques, on peut distinguer principalement les bactéries diazotrophes (les bactéries symbiotiques fixatrices d’azote et les bactéries fixatrices libres). Des études phylogénétiques montrent que des fixateurs sont présents dans de très nombreux groupes bactériens (Young, 1992 ; Young, 2000). Certains fixateurs d’azote s’associent à des plantes et d’autres vivent à l’état libre dans le sol et même parfois renforcent la nodulation des légumineuses ou influencent positivement la symbiose mycorhizienne en augmentant la solubilité des phosphates dans le sol (Lemanceau, 1992)
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