Caractérisation spatiale du laser XUV injecté
Mesure de la distribution d’énergie du laser XUV injecté
Dispositif expérimental
Pour mesurer la distribution d’énergie du laser à 32,8 nm, nous avons utilisé un système optique composé d’un filtre en aluminium, d’un miroir multicouche à 45° et d’un dispositif de détection qui est une caméra CCD XUV 16 bits. Ce dispositif permet de collecter l’émission XUV avec une ouverture de l’ordre de 5×5 mrad. Un schéma de principe de ce dispositif est représenté sur la Figure 5.1Le miroir à 32,8 nm est revêtu d’un empilement de couches de B4C/Mo/Si [111]. La Figure 5.2 (a) présente la réflectivité de ce miroir avec un angle d’incidence de 45°, en fonction de la longueur d’onde pour la polarisation S. La réflectivité maximale mesurée après sa fabrication est de l’ordre de 33 % à 32,8 nm. Pour bloquer le rayonnement visible provenant du plasma et le faisceau laser de pompe, nous avons placé un filtre en aluminium de 2 × 0,15 µm d’épaisseur avant le miroir multicouche. Nous avons mesuré expérimentalement la transmission du filtre et la valeur trouvée est de l’ordre de 4,5 %. La transmission théorique du filtre aluminium en fonction de la longueur d’onde est représentée sur la Figure 5.2 (b). Cette transmission est calculée pour 300 nm d’épaisseur d’aluminium et 35 nm d’oxyde d’aluminium (Al2O3). Ce calcul donne une transmission de l’ordre de 5 %, valeur très proche de la valeur mesurée. Nous avons néanmoins changé plusieurs fois de filtres en aluminium sans avoir systématiquement mesuré la transmission. Cependant, les faibles variations d’intensité mesurées montrent que la transmission des différents filtres était du même ordre de grandeur.
Résultats expérimentaux
Sans injection
Avant de présenter le profil spatial de l’émission laser injectée, il est important de montrer à quoi ressemble l’émission ASE du plasma sans injection. Comme le montre la Figure 5.3, la distribution d’énergie de l’émission ASE présente un profil marqué par la présence de nombreuses surintensités, appelées également speckles. Comme l’ont montré les travaux précédents, ces speckles sont la conséquence directe de la faible cohérence spatiale combinée à la forte cohérence temporelle de l’amplification de l’émission spontanée (ASE) [41]. La divergence du rayonnement n’est pas mesurable dans notre cas car il est difficile de savoir si toute l’émission a été collectée par la caméra CCD. Toutefois, et compte tenu des dimensions attendues de l’amplificateur (de l’ordre de 70 µm de diamètre par L = 7 mm de long), nous nous attendons à un cône d’émission de l’ordre de 5 à 6 mrad d’ouverture, ce qui semble être en bon accord avec ce que nous observons expérimentalement.
Profils injectés
Les mesures d’empreintes de faisceaux que nous allons présenter ici, proviennent de deux séries d’expériences réalisées avec six mois d’intervalle du fait d’une panne du laser. Après réparation, les conditions de pompage optimales (position du foyer, pression du gaz, longueur de cellule) se sont retrouvées légèrement modifiées. Toutefois, il semble que ces changements n’ont pas totalement modifié les dimensions et les qualités amplificatrices du plasma de krypton car le facteur d’amplification de l’harmonique d’ordre 25 s’est avéré semblable pour les deux séries de mesures (entre 150 et 200). Comme nous allons le voir, la plus grande différence entre les deux séries réside dans la mise en forme du faisceau harmonique.La Figure 5.4 montre des mesures typiques de distribution d’énergie en champ lointain du faisceau laser injecté et du faisceau harmonique avant injection, effectuées lors des deux périodes. Avant tout, il est important de noter que la distribution d’énergie du laser injecté ne laisse plus apparaître de speckles comme nous les avions vus sur la Figure 5.3. Nous supposons que le plasma n’amplifie plus sa propre émission spontanée, a priori incohérente, mais le rayonnement harmonique, qui lui est cohérent. Comme le montre la Figure 5.5 (b), pendant la première période le faisceau harmonique possède un profil circulaire et régulier, très proche d’un profil gaussien avec une divergence de l’ordre de 0,65 ± 0,05 mrad (1/e2 ). Après injection, le profil spatial du laser à 32,8 nm laisse apparaître plusieurs anneaux très marqués autour d’un pic central de forme gaussienne. Cette empreinte de faisceau est très proche d’une fonction de Bessel de Pendant la deuxième série de mesures, le profil du laser injecté est sensiblement modifié. Nous ne voyons plus qu’un seul anneau apparaître (Figure 5.4 (d)). Dans ce cas, et comme le montre la Figure 5.6, la distribution d’énergie du faisceau est très proche d’une fonction d’Airy. Dans cette configuration la mesure de la divergence est un peu plus grande et est égale à 0,67 mrad. En comparaison, le faisceau harmonique présente un profil elliptique avec des divergences, l’une horizontale et l’autre verticale, respectivement autour de l’ordre de 1,3 mrad et 0,5 mrad (Figure 5.4 (c)). Cette forme elliptique est causée par l’astigmatisme introduit par un léger désalignement du miroir torique qui couple la source harmonique au plasma amplificateur.
Influence de la densité de l’amplificateur
La Figure 5.8 montre des empreintes de faisceaux pour différentes pressions dans la cellule remplie de krypton : 10, 15, 20, 30, 50 et 60 mbar. Pour cette mesure nous avons conservé tous les autres paramètres inchangés. Nous observons que le profil évolue très rapidement d’une forme elliptique (faisceau harmonique non amplifié) vers une forme plus régulière et circulaire. L’empreinte mesurée pour une pression de 10 mbar conserve le profil elliptique du faisceau harmonique alors que le faisceau est déjà deux fois plus intense. Un anneau autour de la tache centrale est clairement visible pour les basses pressions. Cet anneau est très marqué pour 15 mbar et semble disparaître progressivement avant de disparaître totalement pour les pressions supérieures à 30 mbar. Mais si nous y regardons de plus près, nous constatons que l’intensité varie peu entre 15 et 30 mbar alors que la tache centrale du faisceau augmente. Pour des pressions plus importantes, l’anneau apparaît moins clairement. La divergence du faisceau du laser XUV injecté, correspondant ici à la tache centrale, augmente linéairement avec la pression comme le montre la Figure 5.9. Il est probable que l’anneau soit encore présent mais masqué dans les pieds du faisceau pour les plus hautes pressions de krypton. Deux hypothèses peuvent être avancées pour expliquer la disparition de l’anneau et l’augmentation de la divergence avec la pression. La Figure 5.10 montre le profil du gain intégré sur la toute la longueur de la cellule pour différentes pressions (15, 20, 30 et 40 mbar). Ces profils de gains ont été calculés à partir des cartes de gain de la figure 3.15. Le creux au centre de ces profils correspond à la zone non amplificatrice dû à la surionisation du plasma. La première constatation est que plus la pression est faible (15 et 20 mbar) plus la zone de gain possède des bords francs. Cela permet d’interpréter la présence de l’anneau comme étant bien une figure de diffraction provoquée par l’ouverture franche de la zone de gain. De plus, nous pouvons faire l’hypothèse que ces profils de gain correspondent à ceux du laser XUV injecté à la sortie du plasma amplificateur. Donc, si nous réalisons une transformé de Fourier de ces profils de gain pour obtenir un champ lointain du laser XUV en mode injecté, nous observerions la présence d’anneaux à cause du creux présent au centre des profils de gain. Sur cette même figure nous pouvons voir que les dimensions transverses moyennes de la zone de gain diminuent avec la pression, le diamètre de la zone de gain étant de l’ordre de 80 µm pour des pressions de 15 et 20 mbar et plutôt de 70 µm pour des pressions de 30 et 40 mbar. Nous pouvons donc interpréter cette augmentation de la divergence par la diffraction comme étant provoquée par une zone de gain petite agissant comme un trou de filtrage dont la dimension diminue quand la pression augmente.