Caractérisation des échelles spatiales des erreurs modèles etde la variabilité océanique pour la température et la salinité
Ce chapitre constitue une étape préliminaire pour parvenir à affiner les ex- igences d’échantillonnage du réseau Argo, et définir un système d’observations permettant de représenter ou contraindre via l’assimilation de données les princi- pales échelles de la variabilité océanique. L’échantillonnage actuel du réseau Argo (un flotteur tous les 3°x3°) vise principalement à résoudre les variations à grande échelle des champs de température et de salinité. La combinaison des données Argo avec les données altimétriques et satellitaires de température de surface per- met, par contre d’accéder aux variations à moyenne échelle que ce soit via des méthodes de cartographie de type analyse objective (Guinehut et al. [2012]) ou via l’assimilation dans les modèles océaniques (Lellouche et al. [2013], Turpin et al. [2015]). La qualité de la restitution des champs de température et de salinité de la grande échelle à la moyenne échelle reste dans tous les cas fortement dépendante de l’échantillonnage du réseau Argo.
Une meilleure caractérisation des échelles spatiales et temporelles de la tempé- rature et de la salinité ainsi que leurs variations géographiques est nécessaire pour améliorer les méthodes de cartographie de type analyse objective et donne des indications utiles pour optimiser l’échantillonnage du réseau Argo. Une échelle de corrélation spatiale L ( L définie comme le premier passage à zero de la fonction de corrélation) est ainsi une bonne estimation du pas d’échantillonnage minimal à rechercher pour un réseau Argo optimisé. Les échelles spatiales sont, en outre, à priori différentes selon les régions (notamment en latitude) et les contraintes d’échantillonnage ne sont donc pas les mêmes. Bien entendu il n’est pas concevable de définir un réseau Argo résolvant seul la mésoechelle et c’est via la combinaison avec l’altimétrie notamment que l’on peut essayer de résoudre ces échelles. Les contraintes sur l’échantillonnage du réseau Argo peuvent donc être relachées (par exemple un pas d’échantillonnage égal à 2L ou 3L) mais la connaissance de L reste essentielle pour définir un échantillonnage optimisé. Lorsqu’il s’agit de contraindre un modèle via l’assimilation des données Argo conjointement à d’autres données, l’objectif doit être de réduire les erreurs sur l’ébauche modèle, i.e les écarts entre les observations et la prévision du modèle. Ce sont alors les échelles de cette erreur sur l’ébauche modèle qui sont importantes pour améliorer les schémas d’assimila- tion et pour optimiser l’échantillonnage. En assimilation de données, les erreurs sur l’ébauche modèle sont souvent approximées à partir d’une caractérisation des erreurs d’un run libre du modèle. Notre objectif ici est donc de caractériser à par- tir des données Argo, les échelles spatiales des anomalies de température et de la salinité par rapport à une climatologie et par rapport à une simulation issue d’un run libre du modèle global au 1/4°. On pourra ainsi caractériser à la fois les échelles spatiales du signal et celles des erreurs modèles.
Méthodologie pour l’estimation des échelles spatiales
L’estimation des échelles spatiales de corrélation des erreurs modèles ou du signal passe par celle du champ de covariance des erreurs en température et salinité. Pour l’ensemble des calculs réalisés dans ce chapitre, ces derniers sont extraits des fichiers des profils Argo (voir chapitre 2) eux même sélectionnés sur une fenêtre temporelle de 7 jours.La première étape du traitement consiste à identifier pour chaque couple de profils la classe de distance à laquelle ils appartiennent. Toutes les paires de profils sont donc classées en fonction des distances zonale et méridionale qui les séparent. Pour chaque classe de distance △x et △y on obtient un ensemble N de paires de profils qui permettent d’estimer la covariance spatiale COV(△x, △y) selon :E(zz′) est la moyenne du produit des anomalies 1. E(z)E(z′) est le produit moyen des anomalies au sein de la classe de distance. Cette quantité est difficile- ment connue, et nous avons donc choisi d’utiliser les champs moyens saisonniers par bins de 4◦x4◦ calculés au sein du chapitre 3. On rappelle qu’ils sont issus d’un traitement de colocalisation au point d’observation, et ce dans le cas de la simu- lation T 335 et des données climatologiques. Les champs moyens saisonniers sont ensuite associés à chaque profil z′i en fonction de la localisation et de la date. Larésolution spatiale et temporelle des champs moyens est plus lâche (4◦) que celle des anomalies au point d’observation. La méconnaissance du champ moyen est un des facteurs responsables du bruit au sein de la matrice de covariance. Pour cette raison il est préférable d’estimer le variogramme plutôt que la fonction de covariance. L’utilisation du variogramme est donc nécessaire car l’estimation de la fonction de covariance reste biaisée du fait de la méconnaissance de l’espérance.