Caractérisation de défauts latents dans les circuits
intégrés soumis à des décharges électrostatiques
Les Décharges Electrostatiques
Dès l’antiquité, le phénomène d’électrification a été observé par les Grecs (Thalès de Milet au 5 ieme siècle avant J.C), qui ont remarqué que certains corps s’attirent ou se repoussent. Il faudra attendre le XVIIIieme siècle avec Charles Augustin de Coulomb pour sortir du simple domaine de la curiosité et commencer à théoriser le phénomène. Les notions de décharge et d’arc électrique font leur apparition. A la même époque, Benjamin Franklin crée la première protection contre les décharges électrostatiques : le paratonnerre. Les décharges électrostatiques (ESD) sont des phénomènes naturels de rééquilibrage de charges. Elles correspondent à un transfert très rapide de charges électriques entre deux objets. L’ESD apparaît lorsque le champ électrique maximum dˆu à la charge accumulée sur un corps isolant dépasse la valeur du champ disruptif dans le milieu considéré (Champ disruptif dans l’air dans des conditions normales (20˚C, 11 g/m3 d’humidité,. . . ) : Ed = 3 MV/m). Selon la nature des objets, l’échange de charges peut s’avérer très rapide (plusieurs nanosecondes), générant ainsi des courants de plusieurs ampères. Les ESD sont un phénomène courant. Une personne est électriquement chargée et déchargée plusieurs fois par jour. Le processus de décharge peut être un évènement insignifiant, comme la sensation piquante que l’on ressent parfois quand on touche la poignée d’une porte en métal ou qu’on embrasse quelqu’un. Ce peut être aussi un évènement catastrophique, par exemple lorsqu’un bˆatiment est touché par la foudre ou qu’une étincelle se produit à proximité d’une réserve de produit inflammable. Nous n’entrerons pas dans les détails des mécanismes de génération du déséquilibre de charges initiateur des décharges électrostatiques. Ce dernier a plusieurs origines, les plus significatives dans l’environnement de la microélectronique sont la triboélectrification, l’induction et la conduction. Le phénomène de triboélectricité, c’est-à-dire la séparation de charges due au frottement entre deux matériaux dont au moins un est isolant, peut engendrer des tensions électrostatiques extrêmement importantes. Le tableau 1.1 présente la tension électrostatique résultant de différentes activités humaines. La large fenêtre de tension électrostatique générée pour une même activité est due au fait que la triboélectrification est un phénomène très sensible à l’humidité relative de l’air ambiant. Un air humide atténuera les méfaits des décharges électrostatiques, tandis qu’un air sec entraînera des tensions vingt à trente fois plus importantes .
Les Décharges Electrostatiques, un problème pour la microélectronique
Les défaillances liées aux ESD ont fait leur apparition en électronique au début des années 70. Leur impact négatif sur la fiabilité des composants microélectroniques est un problème majeur. En effet, à l’échelle du transistor, la brique élémentaire des circuits microélectroniques, une ESD peut avoir des conséquences équivalentes à celle de la foudre frappant un arbre. Même une tension de charge ESD très faible, qu’un humain ne ressentirait pas (inférieure à 3 kV), peut endommager ou même détruire un transistor. Les ESD sont donc un phénomène critique pour la microélectronique qui a pour conséquence d’endommager ou de détruire les composants électroniques sensibles, effacer ou changer les données magnétiques. On estime, que chaque année, 40 milliards de dollars sont perdus à cause de dommages provoqués par les décharges électrostatiques, dans la seule industrie électronique [2]. L’énergie d’une décharge électrostatique peut se coupler avec un circuit électronique par conduction directe, couplage inductif, couplage capacitif, couplage par rayonnement. Les effets peuvent aller de la création de défauts latents à la destruction du dispositif. Les images de la figure 1.1 [3, 4] présentent les exemples de défaillances que peut engendrer une décharge électrostatique sur un composant microélectronique. On comprend bien que, suite à ce type de défaillance, le circuit risque de ne plus être fonctionnel.
Modèles de décharges
Beaucoup de paramètres peuvent influer sur la forme du courant et la durée totale d’une décharge électrostatique. Plusieurs modèles de décharges ont donc été développés en fonction des différentes situations rencontrées en microélectronique. Le plus courant est le modèle du corps humain, en anglais Human Body Model (HBM) qui, chargé électriquement, se décharge au travers d’un composant. De la même manière, le modèle de la machine (MM) décrit la décharge engendrée par un équipement. Le modèle du composant chargé, en anglais Charged Device Model (CDM), considère le cas o`u le composant lui-même est chargé et se décharge en entrant en contact avec un conducteur. Le modèle du ”gun” (IEC-1000-4-2) est utilisé dans le cas d’ESD appliquées au niveau d’un système. Les testeurs utilisés dans l’industrie reproduisent les modèles de décharges précédents en respectant certaines normes. La caractérisation de la robustesse d’un circuit vis-à-vis des ESD consiste à soumettre le composant à une série de décharges d’intensité croissante, jusqu’à sa destruction. Ces tests destructifs, outre le fait qu’ils ne permettent d’évaluer que le niveau de robustesse ESD d’un composant, n’apportent aucune information pour la compréhension du comportement de la structure de protection. C’est pourquoi, parallèlement à ces tests industriels, ont été développées des techniques de caractérisation ESD qui ne sont pas obligatoirement destructives. Ces dernières ont le double avantage d’évaluer la robustesse ESD du dispositif mais également d’extraire certains paramètres électriques caractéristiques d’une structure de protection ESD. La connaissance de ces paramètres aboutit à une meilleure compréhension du comportement du dispositif ce qui permet par la suite son optimisation. Les principales techniques de caractérisation ESD décrites dans les paragraphes ci-après sont le TLP (Transmission Line Pulsing) et le VFTLP (Very Fast Transmission Line Pulsing). Modèle HBM : Human Body Model Considéré comme le principal modèle de décharges électrostatiques, il est également le plus ancien [6, 7]. Il décrit la décharge d’un être humain debout, par l’extrémité d’un de ses doigts. En première approximation, on peut le représenter par un simple réseau RC, composé d’une capacité de 100 pF et d’une résistance de 1500 Ω (Fig. 1.2(a))
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