Capital humain : Fondements théoriques
Etant donné l’objet de cette étude, celui de l’interaction entre capital humain et migration nous avons choisi d’aborder dans cette partie les déterminants principaux et les caractéristiques relatifs au capital humain avec les fondements théoriques établis à présent ainsi que son accumulation à travers ce qui a déjà été fait dans la littérature. Le but n’étant pas bien entendu d’ajouter une nouvelle représentation ni de refaire ces analyses mais de justifier notre choix basés sur quelques principes théoriques analytiquement, d’en tirer les éléments concourant à la formation du capital humain et les arguments qui légitiment leur prise en considération. Par la suite nous nous intéressons au phénomène de migration des qualifiés.
L’essor décisif donné à la théorie du capital humain revient à Gary Stanley Becker qui publie en 1964 son fameux Human Capital, A theoritical and Empirical Analysis lui permettant de recevoir le prix Nobel d’économie vingt huit ans plus tard. Bien que cet économiste ne soit pas le pionnier dans ce domaine parce que Smith, Marx, Marshall et Fisher s’étaient intéressés au concept de capital humain, le mérite lui revient d’introduire le capital humain dans un cadre d’analyse néoclassique.
Le capital humain pourrait se définir au sens le plus large, selon l’OCDE [2001], comme l’ensemble des compétences, des qualifications et des caractéristiques individuelles favorisant la réalisation d’un bien-être individuel, social et économique. Si l’on considère que l’évaluation de cet investissement résulte d’une différence entre dépenses engagées à se former et revenus futurs actualisés en vendant ses connaissances à l’entreprise. Cette définition paraît incomplète et nécessite d’être raffinée parce que l’une des perspectives liant le capital humain aux qualifications et compétences s’inscrit dans le cadre d’augmenter ses chances d’être employé, Caspi et al déclarent que «le capital humain se réfère aux ressources, qualifications, compétences et aux connaissances qui sont disponible et acquises par des individus pour maximiser leur propre employabilité». L’autre perspective découle de la précision de Woodhall selon laquelle «Le concept de capital humain se réfère au fait que l’homme investit dans lui-même, au moyen de l’enseignement, la formation ou d’autres activités qui augmentent le revenu futur en augmentant la durée de vie de son gain ».
Le capital humain est donc un concept qui traduit la valeur attribuée aux qualités dans lesquelles on investit. L’individu possédant ce capital humain doit, somme toute et comme tout investissement, faire face à des rendements décroissants ainsi qu’au caractère irréversible des dépenses encourues.
L’introduction du terme capital au concept du capital humain reflète l’idée que son accumulation engendre un investissement productif et des coûts de réalisation. Cet investissement améliore la productivité future et par conséquent les gains futurs espérés. Contrairement au stock physique le capital humain est un stock immatériel attribué voire incorporé dans une personne et pouvant être accumulé. Toutefois, les capacités productives du stock de capital humain doivent évoluer ou être maintenues puisqu’elles sont sujettes à dépréciation. Celle-ci traduit le fait que la productivité des travailleurs diminue lors d’une transition entre un état technologique donné vers un autre, c’est ce qu’on appelle effet d’érosion (Galor et Weil [2000]). Dans ce cas, une partie des compétences de l’individu devient obsolète, leur maintien n’est plus possible et l’individu doit faire évoluer ses compétences par un processus de formation.
La théorie du capital humain s’impose de manière déterminante dans l’explication de la croissance économique. Initialement le capital humain traduisait ce qui restait de la croissance une fois soustrait l’investissement en capital physique et en progrès technologique . La part résultante a été par la suite attribuée à l’amélioration de la qualité de la main-d’œuvre issue de l’accroissement des niveaux d’instruction des travailleurs aux Etats-Unis. Depuis elle est devenue un excellent instrument d’analyses concernant le débat sur les politiques à suivre en matière d’éducation (scolarisation ou formation), de marché du travail ou de détermination de salaire puisque l’éducation prise comme investissement devient un instrument d’amélioration de la productivité et d’accroissement des gains. Les déterminants de la formation du capital humain sont divers nous en avons délibérément choisi ceux dont la littérature a traité.
Les différentes formations
Pour expliquer la formation du capital humain, la littérature fait recours au rôle fondamental joué par la formation scolaire (Barro [1991], Romer [1990], et Mankiw et alii [1992]), appelée school learning, la formation dans la production ou learning-by doing (Arrow [1962], Romer [1986], Young [1991] et Stockey [1988]), et l’éducation supérieure.
a) – La formation scolaire
Elle est mesurée par l’educational attainment qui est le taux de scolarisation dans le primaire et le secondaire, et qui est significativement corrélé avec la croissance. De la simple capacité de savoir lire découlent 30% du revenu attribuable à l’instruction chez les hommes canadiens travaillant toute l’année à plein temps (Osborg [2000]). Il s’agit généralement là d’une formation de base générale appelée “socle commun” ou “tronc commun”.
b) – La formation dans la production
Elle a été introduite dans les modèles pour contribuer à l’explication de la croissance de long terme et expliquer la croissance miraculeuse des pays du sud-est asiatique. Cette formation peut selon Hartog [1999], compenser dans beaucoup de cas des insuffisances de la formation scolaire. Elle peut permettre aussi d’entretenir ou d’améliorer le perfectionnement des compétences des travailleurs en fonction des exigences du changement technologique. Il accorde à la formation dans l’entreprise des rendements supérieurs à 15%.
c) – Education supérieure
L’enseignement supérieur, cycle non obligatoire, s’inscrit généralement dans la continuité de celui de school learning qui est en grande partie obligatoire. A la question de savoir “pourquoi se former”, la réponse est : être éduqué améliore la productivité individuelle et celle des autres et augmente la rémunération. Cela contribue à augmenter le PIB, car il existe un lien de corrélation positive au niveau agrégé entre le niveau d’éducation et celui du revenu national. L’exemple d’un homme indonésien ayant suivi des études supérieures montre un gain moyen de 82% de plus que le gain d’un autre n’ayant qu’un diplôme du secondaire. Mais l’exemple d’un homme paraguayen est le plus flagrant puisque cet écart monte à 300% .
INTRODUCTION GÉNÉRALE |