Cancers du sein dits « négligés »

Cancers du sein dits « négligés »

Histoire naturelle

 Le cancer du sein naît le plus souvent de l’unité terminale ductulo-lobulaire (UTDL). Le temps de dédoublement est estimé à 3 mois en moyenne, avec des extrêmes allant d’une semaine à un an. A partir de cellules normales, le processus commence par le developpement d’une hyperplasie simple puis atypique qui est la lésion précurseur du cancer in situ. La figure ci-dessous (figure 1) explique le mecanisme de cancérisation et la longue évolution de la maladie. On considère qu’il faudra en moyenne 10 ans avec des extrêmes de 1,5 à 20 ans avant que la tumeur devienne cliniquement palpable, soit mesurant 1 cm environ. Lorsque la tumeur fait un milliard de cellules, 3 millions de cellules cancéreuses sont déversées dans le sang ou la lymphe toutes les 24 heures. Ce fait explique que les métastases soient en place au moment du diagnostic clinique mais trop petites pour être détectables. Figure 1: Histoire naturelle du cancer du sein [11] D = dédoublement 6  Extension du cancer – Extension locale intramammaire Elle se fait en surface, le long du galactophore avec extension multicentrique ; ensuite la graisse et le tissu conjonctif sont envahis puis la peau. – Extension lymphatique et régionale Elle se fait par embolie et perméation des cellules néoplasiques. Elle est d’autant plus fréquente que la tumeur est grosse. Un tiers des patientes dont la tumeur est inférieure à 3 cm présentent une atteinte ganglionnaire. Pour la moitié des patientes dont la tumeur est supérieure à 3 cm, les ganglions sont atteints. L’extension ganglionnaire se fait le plus souvent vers les ganglions axillaires centraux, puis axillaires hauts, puis sous-claviculaires. La chaîne mammaire interne est surtout envahie en cas de lésions des quadrants internes. – Extension métastatique Elle se fait par voies veineuse et lymphatique vers les os (43%), le poumon et la plèvre (29%), le foie (17%) et le cerveau (5%). Dans 27% des cas, les métastases sont multiples. La dissémination métastatique dépend de la taille de la tumeur, du nombre de ganglions envahis mais aussi du grade histologique et du temps de doublement. Le temps de doublement des métastases est en général supérieur à celui de la tumeur primitive. 

 Epidémiologie descriptive

  Incidence Le cancer du sein représente un problème majeur de santé publique dans le monde avec 1,4 million de nouveaux cas diagnostiqués et 459000 décès en 2008 [2]. Cette incidence reste cependant variable selon les pays [30]. Ainsi, on distingue 3 zones d’incidences différentes : 7 – une zone de forte incidence (supérieure à 60/100000) comprenant l’Amérique du Nord, l’Europe Occidentale et du Nord, l’Australie et la Nouvelle Zélande ; – une zone d’incidence intermédiaire (30 à 60/100000) comprenant l’Amérique Latine, l’Afrique du Sud, les Caraïbes, le Japon et l’Europe de l’Est ; – une zone de faible incidence (inférieure à 30/100000) comprenant l’Asie et l’Afrique subsaharienne. En Afrique, le cancer du sein est le deuxième cancer féminin après celui du col de l’utérus sauf dans certains pays d’Afrique du Nord [12, 13]. Au Sénégal, il représente 42% des cancers gynécologiques reçus à l’Institut Joliot Curie de Dakar après le cancer du col de l’utérus dont la prévalence est de 47,3 %, selon une étude publiée en 2008[4]. Selon Globocan 2012, sa fréquence est estimée à 20,1% de l’ensemble des cancers [5].  Mortalité Le cancer du sein est responsable de 459000 décès dans le monde en 2008, soit 14% de l’ensemble des décès par cancer [14, 15]. En Europe, le taux de survie à 5 ans après cancer du sein s’est amélioré en passant de 70 à 75% entre 1999 et 2007. On estime que 52 588 femmes ont été atteintes en France en 2010 et que plus de 11 000 en sont décédées [16]. L’étude EUROCARE [16] a mis en évidence en France une survie à 5 ans de 83,1%, ce qui la place au quatrième rang en Europe après l’Islande, la Finlande et la Suède. Ces chiffres font que le cancer du sein est la première cause de mortalité par cancer chez la femme. La différence de survie entre les différents pays est directement liée au stade lors du diagnostic. L’absence d’aggravation de la mortalité par cancer du sein est très certainement liée aux politiques de dépistage précoce de cette affection et aux thérapeutiques inovantes disponibles dans ces pays. En revanche, dans les pays à ressources limitées comme le Sénégal, la mortalité est très élévée et estimée à 15,5% des cas selon GLOBOCAN 2012 [5]. 

 Epidémiologie analytique 

 Facteurs de risque principaux  

Antécédents familiaux de cancer du sein

 Dans certaines familles, il existe un risque héréditaire véritable qui peut aller jusqu’à 80%. Ces cancers héréditaires sont rares (5 à 10%). Ils sont caractérisés par leur fréquente bilatéralité, leur apparition à un âge plus jeune (avant la ménopause) et leur association fréquente à d’autres cancers tel que le cancer de l’ovaire. Dans la plupart des cas, le cancer du sein ne se présente que sous forme sporadique de la maladie.  Antécédents personnels de cancer du sein ou de mastopathie Quand une femme a présenté un cancer du sein, on peut estimer que le risque de le développer dans le deuxième sein ou le sein restant est cinq fois plus élevé que dans la population générale. En ce qui concerne les maladies bénignes du sein, il n’existe un risque notable qu’en présence d’une maladie fibrokystique comportant des lésions proliférantes avec des atypies cellulaires.  Les facteurs liés à la vie reproductive L’apparition des règles avant 12 ans et la survenue d’une ménopause tardive (après 55 ans) augmentent le risque d’apparition du cancer du sein [17]. A l’inverse, la survenue d’une ménopause précoce a un effet protecteur. Les nullipares ont un risque relatif multiplié par deux par rapport à celles qui ont eu leur première grossesse avant 20 ans. Ce risque augmente progressivement en fonction de l’âge de la première grossesse. Les grossesses survenant après 35 ans constituent pour certains un facteur de risque [17].

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 Autres facteurs secondaires

 Ils sont liés à certains antécédents personnels. Les femmes exposées à de fortes doses de radiations ionisantes (maladie de Hodgkin, tuberculose) ont un risque augmenté de cancer du sein. La survenue de certains cancers (endomètre, côlon, etc.) augmente le risque de cancer du sein, ces cancers ayant par ailleurs des facteurs étiologiques communs. Le tableau I montre les différents groupes à risque en fonction de leurs antécédents : Tableau I : Cancer du sein et groupes à risque [17] Groupe à haut risque (RR > 4) Groupe à risque modéré (RR 2 à 4) Groupe à risque faible (RR 1 à 2) – Antécédent personnel ou familial de lésions d’hyperplasie atypique – Antécédent personnel de cancer du sein – Syndrome de prédisposition familiale au cancer du sein (mutation de BRCA1ou BRCA2) – Antécédent familial de cancer du sein bilatéral et/ou préménopausique – Antécédent familial de cancer du sein unilatéral post-ménopausique – Première grossesse tardive ou nulliparité – Obésité post-ménopausique – Antécédent personnel de cancer de l’ovaire ou de l’endomètre – Mastopathie proliférative bénigne – Antécédent d’irradiation – Consommation d’alcool – Premières règles avant 12 ans – Absence d’allaitement – Oestroprogestatifs – Traitement hormonal de la ménopause – Niveau socioéconomique élevé – Facteurs alimentaires? 

 Diagnostic 

 Diagnostic positif 

 Circonstances de découverte 

Plusieurs circonstances peuvent mener à la découverte d’un cancer du sein : – une decouverte fortuite lors d’auto-examen des seins, de l’examen systématique des seins lors d’une consultation médicale, d’une mammographie de dépistage. – au décours des symptômes évocateurs : une masse mammaire, une mastodynie, une modification cutanée ou des contours du sein, d’une anomalie aréolo-mamelonnaire, une ulcération mammaire, une écoulement mamelonnaire souvent unipore brunâtre ou sanglant, une adénopathie axillaire isolée ou un gros bras. – suite à des complications métastatiques à localisation osseuse, pulmonaire, hépatique ou autres. 

 Examen clinique

 L’examen clinique, en Sénologie comme dans d’autres domaines médicaux, doit être aussi systématique et rigoureux que possible. 

Interrogatoire 

Il précisera : – la date et les circonstances d’apparitions des signes, – les modalités évolutives des signes, – les antécédents personnels : – l’âge des ménarches, le rythme du cycle menstruel et l’abondance des menstruations ; – l’âge de la ménopause et les traitement hormonaux en cours; – la notion d’allaitement et sa durée ; – la gestité, parité, la notion d’avortement et l’âge de la première grossesse ; L’interrogatoire précisera les antécédents médicaux et chirurgicaux notamment ceux qui sont en rapport avec une pathologie mammaire et la méthode thérapeutique utilisée ; – antécédents familiaux : une notion de cancer mammaire, colo-rectal ou ovarien dans la famille sera recherchée lors de cet interrogatoire ; – médication et mode de vie : recherchera les médicaments utilisés et ceux qui sont en cours, une consommation d’alcool et une exposition aux pesticides.

Examen physique 

 Examen général Il comprend : – l’appréciation de l’état général de la patiente, son état psychologique et sa mobilité, – la mesure des constantes : le poids, taille, l’indice de masse corporelle, la tension artérielle et le pouls, – l’évaluation de l’état d’hydratation et de nutrition.  Examen sénologique L’examen se fait dans une salle calme, avec de la lumière pouvant être utilisée à jour frisant, dans un climat de confiance. La patiente est dévêtue jusqu’à la ceinture.  Inspection  Techniques Les seins sont inspectés de face et de profil, à jour frisant chez une patiente debout, assise, penchée en avant, les bras pendants puis relevés au-dessus de la tête de la patiente.

Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : LE POINT SUR LE CANCER DU SEIN
I. Histoire naturelle
II. Epidémiologie
II.1. Epidémiologie descriptive
II.2. Epidémiologie analytique
III. Diagnostic
III.1. Diagnostic positif
III.2. Diagnostic différentiel
IV. Pronostic
IV.1. Facteurs du pronostic
IV.2. Pronostic proprement dit
V. Traitement
V.1. But
V.2. Moyens
V.3. Conduite du traitement des cancers du sein
V.4. Surveillance
VI. Prévention
VI.1. Prévention primaire
VI.2. Prévention secondaire
VI.3. Prévention tertiaire
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE
I. Objectifs de l’étude
I.1. Objectif principal
I.2. Objectifs spécifiques
II. Méthodologie
II.1. Type d’étude.
II.2. Cadre d’étude
II.3. Population cible
II.4. Critères d’inclusion
II.5. Critères de non inclusion.
II.6. Variables étudiées
II.7. Collecte et analyse statistique
III. Résultats
III.1. Aspects épidémiologiques
III.2. Aspects socio-démographiques
III.3. Antécédents gynécologiques et obstétricaux
III.4. Aspects cliniques et diagnostiques
III.5. Profil histopronostiques
III.6. Aspects thérapeutiques
III.7. Coût du traitement.
III.8. Evolution globale
IV. Discussion
IV.1. Epidémiologie des cancers du sein « négligés »
IV.2. Particularités diagnostiques des cancers du sein « négligés
IV.3. Pronostic des cancers du sein « négligés »
IV.4. Prise en charge des cancers du seins « négligés
IV.5. Recommandations.
Conclusion
Références

 

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