Cancer du sein familial

Codon 72 du gène p53 dans le cancer du sein familial

Epidémiologie du cancer du sein 

Epidémiologie descriptive

Le cancer du sein est une épidémie mondiale avec 1,38 millions de cas diagnostiqués et 458.000 décès en 2008 (IRAC, 2011). Si l’épidémie semble être contrôlée dans les pays développés (avec 18.900 décès, ration décès/cas de 0,27), ce n’est absolument pas le cas dans les pays en voies de développement (avec 269.000 décès, ratio décès/cas de 0,38). La mortalité liée au cancer du sein est donc moins importante dans les pays développés. Cependant il reste toujours le cancer le plus mortel de tous les cancers dans le monde. En Afrique subsaharienne, particulièrement au Sénégal, le cancer du sein pose un sérieux problème de santé publique. Son incidence et son taux de mortalité restent très élevés avec 20,8% et 16,9% respectivement. De plus l’épidémie prend une allure particulière, et survient à un âge de plus en plus jeune et sous une forme très agressive. Cette forme agressive ainsi que la survenue à un âge précoce sont corrélés avec le cancer triple négatif qui est retrouvé surtout chez les femmes africaines. Le Sénégal est une parfaite illustration de l’épidémie dans les pays en voies de développement Selon l’agence internationale de recherche sur le cancer, on dénombre plus de 853 cas de cancer du sein par an au Sénégal dont, 472 finissent par mourir soit un peu plus de la moitié des répertoriés. Les causes sont souvent liées au fait qu’au Sénégal non seulement les malades arrivent tardivement dans les structures de référence mais le taux de prise en charge est très faible.

Les Facteurs de risque

Bien que les causes exactes de nombreux cas de cancer du sein restent inconnues, plusieurs facteurs de risques ont été identifiés: il s’agit donc d’une maladie multifactorielle. Parmi les facteurs connus associés au risque de cancer du sein on peut noter l’âge, le sexe, les facteurs liés à la vie reproductive, les facteurs environnementaux (tabac, alcool, radiations ionisantes) et les facteurs génétiques. Concernant ces facteurs génétiques, les études épidémiologiques ont presque toujours retrouvé une association entre le cancer du sein et la présence d’une histoire familiale. Ces agrégations familiales peuvent être imputées à deux causes : – Soit la fréquence élevée des cancers du sein dans la population générale – Soit une mutation germinale d’un gène conférant un risque élevé de développer un cancer du sein se transmettant dans la famille (gène de prédisposition). L’identification de certains gènes tels que les gènes BRCA1 et BRCA2 a permis une meilleure compréhension des formes familiales de cancer du sein. Les gènes BRCA1 et 8 BRCA2 sont les premiers à être cités dans la survenue du cancer du sein familial. Mais il existe d’autres gènes qui sont impliqués à des degrés moindres dans la survenue de ce cancer comme le gène p53. Tous ces gènes interviennent dans moins de 25% des cancers du sein dits héréditaires Il existe donc d’autres facteurs dont l’identification serait d’une grande importance dans la recherche des causes du cancer du sein héréditaire.

Gène p53

Généralités sur le gène p53

Le gène p53 encore noté TP53 est impliqué dans un large spectre de pathologies tumorales survenant chez l’enfant et l’adulte jeune. Il joue un rôle essentiel dans le maintien de l’intégrité du génome en régulant l’arrêt de la prolifération cellulaire et l’apoptose des cellules en réponse à divers stress génotoxique endogènes ou exogènes. A l’état normal la protéine p53 est instable, inhibée et dégradée via MDM2 (Mouse Double Minute 2) son principal inhibiteur. En réponse aux dommages de l’ADN, le taux de protéine p53 s’élève rapidement, essentiellement par stabilisation de la protéine permettant la formation de tétramères, par le biais du domaine d’oligomérisation et l’activation de la fonction de «DNAbinding protein ». L’activation de p53 induit ou inhibe l’expression de plus de 150 gènes impliqués dans l’arrêt du cycle cellulaire, l’apoptose ou la réparation des cassures d’ADN. p53 est muté ou inactivé dans plus de 50% des tumeurs. Des modifications post traductionnelles de p53 par phosphorylation de résidus sérine ou thréonine dans les régions Nterminal ou C-terminal de la protéine représentent un mécanisme important de régulation de son activité.

Structure du gène et de la protéine p53

Le gène p53 humain est localisé sur le bras court du chromosome 17 en 17p13.1. Il comporte 11 exons avec l’exon 1 non-codant (Figure 1). La protéine p53 est une phosphoprotéine de 393 acides aminés de poids moléculaire 53KDa. On la retrouve en très petite quantité dans les cellules normales, mais en grande abondance dans les cellules tumorales. Les principaux domaines de la protéine p53 sont: -Un domaine amino-terminal (résidu 1-42) nécessaire à l’interaction avec les composants de l’appareil transcriptionnel. -Une région riche en résidus proline (63-97) intervenant dans l’apoptose. 9 -Un domaine central hydromorphe (102-292) dont la structure tridimensionnelle permet la fixation spécifique à l’ADN et au sein duquel on retrouve la majorité des mutations inactivatrices mise en cause dans divers cancers humains. -Un domaine impliqué dans la tétramérisation (323-356). -Un domaine carboxyterminal (363-393) intervenant dans la régulation négative de p53 (figure1). Figure : 1 Structure du gène et de la protéine p53 (http://www.stjude.org/stjude/v/index.jsp?vgnextoid)

Fonction de la protéine p53

La protéine p53 est un facteur de transcription qui régule l’expression d’une multitude de gènes permettant de moduler la réponse p53 (Vousden and Prives, 2009). Par sa capacité à arrêter la prolifération cellulaire en bloquant le cycle et en activant la mort apoptotique, p53 est un candidat évident comme gène suppresseur de tumeur d’autant qu’il est activé par différents stress cellulaires rencontrés lors de la progression tumorale (dommages à l’ADN, activation oncogénique, hypoxie…). Cependant, il apparait que la réponse apoptotique n’est pas la seule arme de p53 pour cette activité suppresseur de tumeur. L’activation de la transcription de CDKN1A/p21 est extrêmement sensible à des élévations minimes de p53 et bloque le cycle cellulaire. Un arrêt prolongé du cycle est capable d’activer la sénescence cellulaire. Ce mécanisme serait un des moyens d’élimination des lésions précancéreuses (Vousden and Prives, 2009)( figures 2 et 3). 10 Figure 2: Protéine p53 dans la régulation du cycle cellulaire (http://acces.enslyon.fr/biotic/gpe/dossiers/p53/html/mutasoma.htm) Figure3: Régulation des gènes suppresseurs de tumeur: exemple de p53 http://masterbiologie.fr/M1_web/index2.php?id=4&p=5 I-

Mutations du gène p53

Le gène p53 est le gène suppresseur de tumeur le plus fréquemment muté dans les cancers humains. Plusieurs polymorphismes du gène p53 ont été décrits (Antoniou and Easton, 2006; Ford et al., 1998). La plupart sont des SNPs touchant une seule base nucléotidique. La majorité de ces variants est localisée dans les introns et n’ont pas d’effet sur la protéine. Parmi les polymorphismes affectant les régions codantes plusieurs s’accompagnent d’un changement d’acide aminé. Il existe plusieurs hots spots sur les résidus proline en position 47 et 72 et sur les résidus Arginine en position 175, 248, 249,273 qui contribuent à plus de 25% des mutations faux-sens identifiées dans les cancers humains (Hainaut and Hollstein, 2000) (figure 4). 11 Figure4:Mutations du gène p53 (http://p53.free.fr/Database/p53_cancer/p53_breast.html ) En fonction de leur impact sur la structure et la fonction de p53 ces mutations peuvent être divisées en 2 catégories principales: – Les mutations dites de contact (P47S, P72R, R248W et R273H) qui rompent directement la liaison de p53 sur les promoteurs cibles et entrainent des changements subtils de la conformation de la protéine. – Les mutations dites structurelles (R175H et R249S) qui altèrent franchement la conformation de la protéine ou dénaturent le domaine de liaison à l’ADN de sorte que les fonctions suppresseur de tumeur sont perdues (Joerger and Fersht, 2007). En général, les mutants faux-sens gardent la possibilité de former des tétramères mais perdent tout ou une partie de la fonction de DNA-binding et d’activité transcriptionnelle (Kern et al., 1992). C’est le cas du codon 72 qui est beaucoup plus fréquent avec des différences significatives de répartition en fonction des populations(Beckman et al., 1994). Il s’accompagne d’un changement structural de la protéine, sur le résidu 72 une proline (P) est remplacée par une Arginine (R) (P72R). Il est situé dans une région riche en proline importante dans l’arrêt de la prolifération cellulaire et la fonction apoptotique de p53 (Sakamuro et al., 1997; Walker and Levine, 1996). Le variant P72 aurait une capacité accrue d’arrêter le cycle cellulaire tandis que le variant R72 serait un inducteur de l’apoptose (Pim and Banks, 2004). Cependant l’activité du variant R72 pourrait varier en fonction du statut de p53: quand p53 est sauvage, R72 pourrait inhiber la croissance tumorale en augmentant la fonction apoptotique alors que lorsque p53 est muté il pourrait favoriser le développement tumoral par inactivation de p73. En effet p73Interagit avec certaines formes mutantes de p53 et non avec la forme sauvage (Marin et al., 2000). Chez les individus hétérozygotes, l’allèle R72 serait plutôt sujet aux mutations tandis que l’allèle P72 serait fréquemment perdu par délétion. Les formes mutantes ont également des fonctions oncogéniques. 

Table des matières

Introduction
Chapitre I. Synthèse Bibliographique
I.1.Le cancer du sein
I.1.1. Aspects macroscopiques des tumeurs
I.1.2. Aspects cytopathologiques et classification des carcinomes
I.1.2.1. Classification histologique
I.1.2.2. Classification clinique
I.1.2.3.Classification SBR ou histopronostique
I.1.2.4.Classification prédictive
I.1.3. Diagnostic et traitement
I.1.3.1.Diagnostic
I.1.3.2. Le Traitement
I.1.4. Epidémiologie du cancer du sein
I.1.4.1. Epidémiologie descriptive
I.1.4.2.Les Facteurs de risque
I.2. Gène p53
I.2.1. Généralités sur le gène p53
I.2.2. Structure du gène et de la protéine p53
I.2.3. Fonction de la protéine p53
I.2.4. Mutations du gène p53
Chapitre II. Population et Méthode
II.1. Population d’étude
II.2. Méthodes
II.2.1-Extraction de l’ADN génomique
II.2.2-Génotypage du polymorphisme du codon 72 du gène p53
Chapitre III. Résultats et Discussion
III.1. Résultats
III.1.1.Caractéristiques de la population d’étude
III.1.2. Codon 72 du gène p53 dans les familles étudiées
III.2.Discussion
CONCLUSION
Références bibliographiques

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