CANADA – mesures visant l’exportation des aéronefs civils

CANADA – MESURES VISANT L’EXPORTATION DES AÉRONEFS CIVILS

Observations du Canada

Répondant aux questions posées par le Groupe spécial en liaison avec la deuxième réunion, le Canada indique que ses réponses sont fournies compte tenu de certaines préoccupations. Premièrement, le Groupe spécial a demandé la présentation d’éléments de preuve au sujet de moyens de défense que le Canada n’a pas invoqués. Le Canada rappelle qu’en vertu du principe de l’économie jurisprudentielle, en particulier dans le cadre des procédures accélérées prévues par l’article 4 de l’Accord SMC, il n’est ni nécessaire, ni souhaitable que la partie défenderesse présente une défense pour chacun des deux éléments servant de critère pour qu’une subvention à l’exportation soit considérée comme prohibée, énoncés à la partie II de l’Accord SMC. Le Brésil doit d’abord prouver qu’une subvention existe au sens de l’article premier, et que cette subvention est subordonnée aux exportations au sens de l’article 3. En réponse, il est suffisant que le Canada montre, pour chacune des mesures contestées, soit que la mesure n’est pas une subvention, soit qu’elle n’est pas subordonnée aux exportations. Le Canada note que, dans sa lettre au Président du Groupe spécial, en date du 13 décembre 1998, le Brésil a souscrit à cette thèse.

Deuxièmement, le Groupe spécial a demandé la production d’éléments de preuve au sujet de questions pour lesquelles, de l’avis du Canada, le Brésil n’a manifestement pas établi de présomption. Le Canada note que le Groupe spécial n’a pas statué sur le point de savoir si le Brésil avait établi une présomption à propos de l’un quelconque des programmes, activités ou opérations attaqués. Le Canada note que la lettre de couverture accompagnant les questions du Groupe spécial, en date du 10 décembre 1998, indique que les questions sont posées sans préjudice des constatations ultérieures du Groupe spécial concernant l’une quelconque des questions soulevées par l’une ou l’autre partie.

Troisièmement, le Canada objecte que le Groupe spécial a demandé la production d’éléments de preuve au sujet d’opérations à propos desquelles le Brésil n’a pas même formulé d’allégation. Le Canada ne considère pas qu’il soit approprié de présenter des éléments de preuve en réponse à une allégation qui n’a pas été formulée et à une présomption qui n’a pas été établie.

Enfin, le Canada dit qu’il a été mis dans une situation très difficile parce que les questions du Groupe spécial lui demandent de fournir des renseignements commerciaux confidentiels; il rappelle sa position (voir les paragraphes 4.173 à 4.183), à savoir que les procédures régissant les renseignements commerciaux confidentiels n’assurent pas le niveau requis de protection pour ces renseignements.

Observations du Brésil

Au sujet des observations du Canada concernant les questions du Groupe spécial et des réponses du Canada à ces dernières, le Brésil formule des préoccupations concernant ce qu’il considère comme le manquement du Canada à l’obligation lui incombant de divulguer des renseignements particulièrement sous son contrôle. Le Brésil note qu’à son avis le Groupe spécial aurait pu, conformément au principe de l’économie jurisprudentielle, se prononcer sur les questions soulevées en l’espèce sur la base des faits dont il était saisi dès la deuxième réunion, plutôt que de donner au Canada une autre chance encore de présenter des renseignements pour sa défense (paragraphe 4.126). Néanmoins, le Groupe spécial a exercé le droit qui est le sien, conformément à l’article 13 du Mémorandum d’accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends de l’OMC (le « Mémorandum d’accord »), de demander au Canada des renseignements supplémentaires et, de l’avis du Brésil, cette demande a créé pour le Canada, toujours en vertu de l’article 13, l’obligation de « répondre dans les moindres délais et de manière complète » à la demande du Groupe spécial.

Le Brésil affirme que le Canada n’a pas satisfait à cette obligation, notant que dans ses réponses aux questions du Groupe spécial, le Canada a invoqué à plusieurs reprises « l’absence de procédures suffisantes permettant de protéger les renseignements commerciaux confidentiels » pour justifier le fait qu’il ne fournissait pas des renseignements spécifiquement demandés par le Groupe spécial. Le Brésil fait valoir que, lorsque le Canada a fourni des éléments de preuve écrits, ils avaient été caviardés à un extrême degré, si bien qu’ils ne pouvaient en aucune façon aider le Groupe spécial à comprendre les programmes et questions en jeu. Le Brésil dit que, dans d’autres cas, le Canada a fourni de façon sélective des pages, lignes ou chiffres particuliers empruntés à différents documents, alléguant que ces extraits soutenaient sa défense.

Le Brésil estime que le Canada doit supporter les conséquences de sa décision de soustraire des renseignements à l’attention du Groupe spécial. Chaque fois que le Canada s’est expressément refusé à fournir des éléments de preuve écrits qui lui avaient été spécifiquement demandés, ou que le Canada a totalement ou sélectivement supprimé, dans les éléments de preuve écrits fournis, les renseignements qui lui avaient été spécifiquement demandés, le Brésil estime que le Groupe spécial devrait en tirer des déductions défavorables et présumer que les renseignements non dévoilés, constituant des éléments de preuve de la violation de l’Accord SMC, nuiraient à la position du Canada. De l’avis du Brésil, l’adoption de telles déductions défavorables n’est pas interdite par le Mémorandum d’accord, et est entièrement compatible avec la pratique des tribunaux internationaux comme le Tribunal pour les affaires Iran-États-Unis , la Commission interaméricaine des droits de l’homme , et la Cour interaméricaine des droits de l’homme. De plus, recourir à des déductions défavorables dans des cas où une partie n’a pas fourni des renseignements spécifiquement demandés et qui sont en sa possession et sous son contrôle exclusifs est pour le Groupe spécial le seul moyen pratique à sa disposition de faire respecter l’obligation de collaboration reconnue dans l’affaire Argentine – Mesures affectant les importations de chaussures, textiles, vêtements et autres articles comme étant au centre du processus de règlement des différends de l’OMC et de faire respecter l’obligation qui incombe à un Membre de l’OMC, au titre de l’article 13 du Mémorandum d’accord, de « répondre dans les moindres délais et de manière complète à toute demande de renseignements présentée par un groupe spécial ».

Procédure proposée par le Canada

Le Canada demande que le Groupe spécial adopte pour en faire l’une de ses procédures de travail, conformément à l’article 12:1 du Mémorandum d’accord, une procédure propre à assurer la protection des renseignements exclusifs confidentiels qui pourraient lui être communiqués. Le Canada demande que les procédures proposées soient adoptées avant la date limite à laquelle la première communication du Brésil doit être reçue. Le Canada note qu’une telle procédure est nécessaire du fait que, pour présenter sa défense, il pourrait avoir à communiquer au Groupe spécial des éléments de preuve contenant des renseignements commerciaux exclusifs confidentiels.

Le Canada reconnaît que certaines dispositions du Mémorandum d’accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends (Mémorandum d’accord) traitent de la nécessité de protéger la confidentialité. L’article 18:2 du Mémorandum d’accord dispose ce qui suit:
« Les communications écrites présentées au groupe spécial ou à l’Organe d’appel seront traitées comme confidentielles, mais elles seront tenues à la disposition des parties au différend. Aucune disposition du présent mémorandum d’accord n’empêchera une partie à un différend de communiquer au public ses propres positions. Les Membres traiteront comme confidentiels les renseignements qui auront été communiqués par un autre Membre au groupe spécial ou à l’Organe d’appel et que ce Membre aura désignés comme tels. Une partie à un différend fournira aussi, si un Membre le demande, un résumé non confidentiel des renseignements contenus dans ses exposés écrits qui peuvent être communiqués au public. »
Le Canada cite le paragraphe 3 des Procédures de travail (appendice 3 du Mémorandum d’accord) :
« Les délibérations du groupe spécial et les documents qui lui auront été soumis resteront confidentiels. Aucune disposition du présent mémorandum d’accord n’empêchera une partie à un différend de communiquer au public ses propres positions. Les Membres traiteront comme confidentiels les renseignements qui auront été communiqués par un autre Membre au groupe spécial et que ce Membre aura désignés comme tels. Dans les cas où une partie à un différend communiquera au groupe spécial une version confidentielle de ses exposés écrits, elle fournira aussi, si un Membre le demande, un résumé non confidentiel des renseignements contenus dans ses exposés qui peuvent être communiqués au public. »
De l’avis du Canada, toutefois, ces dispositions du Mémorandum d’accord ne suffisent pas à instituer une procédure adéquate pour protéger les renseignements commerciaux exclusifs confidentiels.

Le Canada estime qu’en ce qui concerne la protection de ce type de renseignements dans le cadre d’un différend, la pratique de l’OMC est insuffisante, mais que ce problème s’est posé dans un différend antérieur au titre de l’Accord SMC (Indonésie – Certaines mesures affectant l’industrie automobile) dans lequel les États-Unis ont indiqué dans leur première communication qu’ils avaient en leur possession des renseignements commerciaux exclusifs qui étaient en rapport avec leurs allégations relatives au préjudice grave. Le Canada note que les États-Unis hésitaient à les communiquer au Groupe spécial à moins que celui-ci n’établisse tout d’abord des procédures adéquates pour protéger ces renseignements , et que l’Indonésie a demandé au Groupe spécial d’exiger que les États-Unis communiquent ces renseignements avant la première réunion de fond du Groupe spécial avec les parties.

Le Canada rappelle que le Groupe spécial Indonésie Automobiles n’a pas exigé des États Unis qu’ils fournissent les renseignements demandés, notant qu’il n’y avait aucune obligation pour les parties de présenter tous les renseignements factuels dans leur première communication, mais a constaté néanmoins ce qui suit :
« Enfin, nous tenons à rappeler à toutes les parties que l’article 18:2 du Mémorandum d’accord permet aux parties de désigner des renseignements comme étant confidentiels. Cette désignation sera respectée par le Groupe spécial, le Secrétariat de l’OMC et les autres parties au différend. Nous encourageons donc toutes les parties à communiquer au Groupe spécial les renseignements qu’elles jugent pouvoir être utiles pour résoudre ce différend. À cet égard, nous notons que les parties reconnaissent que les plaignants qui allèguent qu’il y a un préjudice grave doivent démontrer l’existence de ce préjudice par des éléments de preuve positifs. Si les États-Unis considèrent que les renseignements en question sont nécessaires pour qu’ils puissent s’acquitter de cette charge, et s’ils estiment que l’article 18:2 est inadéquat, ils peuvent proposer au Groupe spécial par écrit, dès que possible, une procédure qu’ils jugent suffisante pour protéger les renseignements en question. »

Le Canada note que les États-Unis n’ont ni proposé ni demandé que le Groupe spécial adopte une telle procédure, et que le Groupe spécial a constaté que si les plaignants ne peuvent pas être contraints à communiquer des renseignements commerciaux confidentiels, ils ne peuvent pas non plus « … invoquer la confidentialité pour justifier le fait de ne pas présenter les éléments de preuve positifs qui sont requis, en l’espèce, pour démontrer l’existence d’un préjudice grave au regard de l’Accord SMC ». Le Groupe spécial a conclu que les États-Unis n’avaient pas démontré l’existence d’un préjudice grave par des éléments de preuve positifs.

Le Canada estime qu’en tant que plaignant dans l’affaire Indonésie Automobiles, les États Unis avaient le choix entre présenter ou non les éléments de preuve nécessaires pour satisfaire à la charge de présentation leur incombant. En l’espèce, si le Brésil satisfait à la charge lui incombant d’établir une cause à première vue fondée, le Canada ne peut se permettre le luxe de ne pas présenter les éléments de preuve nécessaires pour défendre ses programmes contestés, et peut avoir à recourir à des renseignements commerciaux exclusifs confidentiels.

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