BILAN DES ACTIVITES D’ANESTHESIE
Modifications cardiovasculaires
Hypervolémie L’augmentation de la volémie qui débute dès la 12ème semaine de gestation, rapide pendant le deuxième trimestre, plus lente au cours du troisième trimestre, est de 35 % par rapport au début de la grossesse. L’augmentation du volume plasmatique (+ 50 %) excédant celle de la masse globulaire (+ 20 %), une anémie de dilution apparaît souvent au cours de la grossesse. Cet état favorise l’apparition de souffles cardiaques anorganiques chez plus de 80 % des patientes en fin de grossesse. L’hémodilution entraîne une diminution de la concentration des protéines plasmatiques et donc une augmentation de la forme libre de nombreux médicaments utilisés en anesthésie. Au décours de l’accouchement, la contracture utérine réalise une autotransfusion d’environ 500 ml qui permet de compenser l’hémorragie de 300 à 500 ml qui accompagne la délivrance normale.
Augmentation du débit cardiaque
L’augmentation du débit cardiaque (DC) débute dès la huitième semaine de gestation. Elle est maximale durant le deuxième trimestre, puis demeure stable durant le troisième trimestre pour atteindre une valeur de 35 % à 45 % plus élevée qu’en début de grossesse. Une étude hémodynamique invasive a révélé la contribution relative de l’augmentation de la fréquence cardiaque (+ 17 %) et du volume d’éjection systolique (+ 27 %), ainsi que celle de la diminution des résistances artérielles systémiques (- 21 %) et pulmonaires (- 34 %) dans la variation du débit cardiaque [32]. La pression veineuse centrale et la pression capillaire pulmonaire n’augmentent pas car l’augmentation des volumes télédiastoliques ventriculaires ne s’accompagne pas d’augmentation de pression. Ceci est dû à une dilatation des cavités cardiaques dont rend compte l’élargissement de la silhouette cardiaque sur la radiographie du thorax [32]. Pendant le travail, la pression artérielle (PA) et le DC augmentent (+45 %) en raison de la vasoconstriction induite par les catécholamines sécrétées en réponse à la douleur, mais aussi du fait de l’autotransfusion d’environ 500 ml qui contribue à l’élévation transitoire de la pression veineuse centrale (4 à 6 cmH2O) lors de chaque contraction utérine. Après l’accouchement, l’autotransfusion d’origine placentaire aboutit à une augmentation de 80 % du DC. Celui-ci revient à la normale au cours de la deuxième semaine du postpartum. La pression artérielle diminue pendant la grossesse en raison de la baisse des résistances artérielles systémiques. La réponse vasopressive et chronotrope aux catécholamines est diminuée au cours de la grossesse. La position de la parturiente joue un rôle essentiel dans les variations du DC et de la PA. Le décubitus dorsal entraîne un certain degré de compression aortocave chez toutes les parturientes, aboutissant à une réduction de 30 à 50 % du DC [32]. Si la plupart des patientes sont capables de maintenir normale leur PA en augmentant leur fréquence cardiaque et leurs résistances artérielles systémiques, 10 % d’entre elles développent une franche hypotension artérielle en décubitus dorsal.
Modifications de la pression artérielle
La PA diminue au cours de la première partie de la grossesse : la PA systolique diminue de 5 à 10 mmHg et la PA diastolique de 10 à 15 mmHg. La PA remonte progressivement pendant la deuxième partie de la grossesse, pour revenir aux valeurs de base à terme. Les modifications hormonales entraînent une diminution des résistances vasculaires systémiques. Malgré un tonus sympathique élevé, les femmes enceintes sont plus sensibles aux modifications hémodynamiques des blocs centraux. Il existe une diminution de la sensibilité des récepteurs β myocardiques expliquant la moindre spécificité de la dose-test adrénalinée chez les femmes enceintes lors de la mise en place d’une péridurale [43].
Syndrome de compression aortocave (Figure 2)
Il peut apparaître dès le deuxième trimestre et atteint son maximum à terme. Il correspond à une compression de la veine cave inférieure par l’utérus gravide en décubitus dorsal. Cette compression, voire occlusion complète dans certains cas, entraîne une diminution du retour veineux responsable d’une diminution de 20% du DC maternel [14]. La baisse du débit sanguin utérin associée peut être responsable d’une souffrance fœtale. L’association de la compression aortique majore les effets délétères de la compression cave. Plus la taille de l’utérus est importante (grossesses multiples, hydramnios…), plus les effets sont importants. Ce syndrome est symptomatique dans 10 % des cas [46] et se manifeste par un malaise, une hypotension, des vertiges, des nausées, une pâleur et des sudations. Il peut être prévenu par le déplacement vers la gauche de l’utérus : mise en décubitus latéral gauche ou mise en place d’un coussin sous la fesse droite. La vasoplégie induite par l’anesthésie péridurale majore les effets de ce syndrome.
Implications anesthésiques
La prévention du syndrome de compression aortocave est particulièrement importante en cas d’anesthésie locorégionale (ALR) car l’hypotension artérielle maternelle résultant de la baisse du retour veineux ne peut être compensée du fait de la vasoplégie induite dans le territoire analgésié. Même en l’absence d’hypotension maternelle, la compression aortique peut considérablement réduire la pression de perfusion dans l’artère utérine et donc la perfusion placentaire et fœtale. À cet égard, le décubitus latéral droit semble produire le même effet bénéfique que le décubitus latéral gauche.
INTRODUCTION |