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Les organosilanes : histoires, synthèses et applications comme bioisostères
Introduction
Lorsqu’on lui parle de silicium, le chimiste pensera à l’élément situé juste en-dessous du carbone dans le tableau périodique. Un chimiste organicien pensera également au groupement protecteur d’alcool, éventuellement, à la silice sur laquelle il purifie ses composés. En quelque sorte, le silicium est à la chimie ce qu’est le « capitaine de soirée » à ses amis : un élément essentiel pour nous amener à bon port (protection, purification) mais que l’on oublie (absent dans la molécule finale). Dans l’introduction qui suit, le silicium retiendra notre attention. Sa place dans la Nature, ses propriétés remarquables ainsi que ses diverses utilisations en chimie seront discutées. Les résultats et conclusions mis en évidence avec l’étude de chacun de ces points nous ont alors amenés à développer ce travail de thèse. Celui-ci consiste à exploiter une facette encore peu connue du silicium, à savoir son utilisation comme bioisostère du carbone en chimie médicinale. Notre intérêt s’est ainsi porté vers la synthèse d’analogues silylés qui seraient la copie conforme des molécules parentes carbonées, telles que les 10-silastéroïdes. En effet, ces molécules présenteraient très certainement des propriétés intéressantes en chimie thérapeutique et actuellement aucun de ces composés n’a pu être testé vu l’absence de méthodes dévouées à leur synthèse.
La place du silicium dans la Nature
La chimie organique, historiquement la chimie de la vie, est maintenant considérée comme la chimie du carbone. Celui-ci, par sa tétravalence, sert d’élément de base aux molécules organiques. Cette importance du carbone peut paraître paradoxale lorsque l’on compare son abondance dans la croûte terrestre (0,09%) à celle d’un autre élément tétravalent autrement plus présent : le silicium. Ce dernier est le second élément le plus abondant (28%) après l’oxygène et aurait donc pu jouer un rôle plus important dans la chimie de la vie. Ainsi, les seules espèces vivantes présentant le silicium comme constituant majeur recensées dans la littérature sont les horta, les mynocks, les limaces de l’espace et les trolls appartenant aux univers de Star Trek, Star Wars et Discworld de Terry Pratchett.1 Le silicium se fait plus discret dans notre univers, ce qui peut s’expliquer par sa forme naturelle, SiO2, qui est un solide inerte et peu soluble dans l’eau. En solution aqueuse le silicium est principalement sous la forme d’acide orthosilicique Si(OH)4, forme sous laquelle il va entrer dans le cycle de la vie.
Dans la mer il est un constituant essentiel des diatomées. Ces algues enveloppées par un squelette de silice forment le premier maillon de la chaîne alimentaire marine. Leur croissance et leur développement dépendent directement de la concentration en silicium dissous (DSi) dans l’eau de mer. Cette croissance consomme également du carbone et est responsable de 40% de la séquestration de carbone dans l’océan. Ce phénomène de capture du CO2 de l’atmosphère par les diatomées de l’océan est appelé « biological Si pump ».2 Les algues ayant un exosquelette de calcite ne participent pas à ce phénomène.
Dans le monde végétal on trouve une quantité moyenne de silicium dans les plantes de 1 à 3% (dans la matière sèche), voire plus pour certaines espèces comme le riz (10%).3 Le silicium a un rôle dans la croissance, et est impliqué dans les phénomènes de résistance mécanique ou aux moisissures et herbivores. Ceci est parfaitement illustré par lsi1, un riz mutant qui accumule moins de silicium, celui-ci est par conséquent plus sensible aux parasites et maladies. Cela se traduit par une production de grains dix fois plus faible qu’un plant de riz normal. 4
Le même rôle crucial sur la croissance a été observé chez les animaux. Chez la souris et le rat, la concentration en silicium se trouve très élevée au niveau des zones de croissance des os alors que sa concentration est à la limite de la détection dans l’os mature.5 Une étude comparative entre des poulets qui suivaient un régime enrichi ou appauvri en silicium a également été menée. Après 23 jours, il a pu être observé que les poulets suivant le régime enrichi pesaient en moyenne 116 g alors que les poulets suivant le régime appauvri pesaient 76 g. Les os de ces derniers sont plus courts, fins et fragiles, le bec est souple et l’on peut noter l’absence de crête (Figure 1). Les tissus sous-cutanés présentent également une couleur marron-jaune très différente des tissus plus classiques de couleurs blanc-rosé.6 L’influence de la concentration en silicium dans l’alimentation sur la croissance a également été montrée chez le rat. 7
Chez l’Homme, le silicium n’est pour l’instant pas considéré comme nécessaire. Il est vu comme un élément à l’état de trace dans notre organisme et aucun apport minimal n’est recommandé même si la teneur des aliments en silicium est de plus en plus étudiée. À ce titre, la bière est reconnue comme l’aliment le plus riche en silicium biodisponible. Le silicium est présent dans le corps à hauteur de 7 g, inégalement réparti en fonction des organes. Il se concentre principalement dans les os,8 surtout aux zones de croissance, ainsi que dans les tissus contenant du collagène comme le cartilage, les artères ou la peau.9 De récentes études confèrent au silicium un effet bénéfique pour lutter contre l’adsorption d’aluminium, qui pourrait justifier son utilisation préventivement pour lutter contre la maladie d’Alzheimer.10 Il interagit avec les métaux in vivo et va ainsi diminuer la biodisponibilité de l’aluminium et augmenter celle du fer. Il peut également interagir avec des diols. Ces interactions sont faibles (liaisons hydrogènes) et ne sont possibles que dans des milieux basiques (pH=9). Cette contrainte explique le fait qu’aucun organosilane n’ait été isolé à partir d’un organisme vivant. Ainsi de manière générale, les formes prépondérantes du silicium dans la nature sont : la silice SiO2 et sa forme hydratée Si(OH)4.11
Silicium de synthèse
En 1787, et sans en connaître sa nature précise, Lavoisier fut le premier à s’intéresser à la chimie du silicium. Celui-ci avait décrit la silice comme l’oxyde d’un élément chimique encore non-isolé.12 Berzelius l’isola sous la forme d’un solide amorphe par réduction de fluorure de silane en 1823.13 Il fallut attendre 31 ans pour que le premier silicium cristallin soit obtenu grâce au français Deville en 1854. Aujourd’hui le silicium est préparé à partir de silice en présence de carbone à très haute température (Schéma 3).
Le silicium métallique ainsi obtenu a une pureté de 99% et est appelé silicium métallurgique, en raison de son utilisation dans les alliages. Lorsque le silicium est hautement purifié il peut être utilisé comme semi-conducteur dans les panneaux solaires (99,9999%) ou en électronique (99,9999999%).
Une fois mis en évidence, la chimie du silicium s’est développée pour conduire à de nouveaux composés autres que les formes oxydées de ce dernier. Ainsi, le premier organosilane a été synthétisé par Friedel et Crafts en 1863 par réaction du diéthylzinc sur du tétrachlorosilane (Schéma 4).14
En 1904, l’utilisation des réactifs de Grignard comme dérivés organométalliques par Kipping15 et Dilthey16 représente une grande avancée pour la préparation d’organosilanes, se plaçant comme la première méthode de choix pendant presque un demi-siècle.
La seconde ère de la chimie du silicium (1940-1960) est directement associée au procédé Rochow-Muller mis au point quasi simultanément par Rochow 17 aux USA et Muller18 en Allemagne, respectivement en 1941 et 1942. Ce procédé permet d’obtenir des chlorosilanes en chauffant du silicium métallique à haute température en présence d’un halogénure d’alkyle et d’un catalyseur au cuivre (Schéma 5).
Ce procédé direct a permis l’explosion de la chimie du silicium au niveau industriel et plus particulièrement avec la synthèse de silicones. En effet, en présence d’eau ces dichlorosilanes donnent spontanément des polysiloxanes (Schéma 6). En 2011, le marché mondial des silicones représentait 13,7 milliards de dollars et 40% de la consommation en silicium. Les silicones par leurs propriétés de stabilité thermique, d’inertie chimique, de faible conductivité et de faible toxicité sont utilisés dans diverses industries pour différentes fonctions.19 On peut citer les isolants électriques ou thermiques, les joints d’étanchéité, les lubrifiants, les colles. Le nom de silicone vient de Kipping, qui pensant à l’époque avoir isolé l’analogue silylé de la cétone, lui donna le nom issu de la contraction entre silicium et cétone. Malgré la structure erronée ce nom est resté pour les polysiloxanes.20
Une autre grande avancée dans la chimie industrielle du silicium fut l’utilisation de la réaction d’hydrosilylation de doubles liaisons. Sommer décrit pour la première fois en 1947 cette réaction dans des conditions radicalaires en présence de peroxyde diacétylique (Schéma 7 Eq. a).21 Plus tard, même s’il n’est pas le premier exemple d’hydrosilylation catalysée par un métal de transition,22 l’utilisation de l’acide chloroplatinique par Speier fait office de référence (Schéma 7 Eq. b).23 Ce catalyseur de platine fut le premier à être utilisé de manière généralisée pour l’hydrosilylation de doubles liaisons et évite certains désagréments de la voie radicalaire des premières hydrosilylations (polymérisation, rendements élevés seulement avec le trichlorosilane).
À partir des années 1970 jusqu’à nos jours, les travaux sur le silicium se sont multipliés. Des progrès considérables ont été réalisés durant cette période qui peut être vue comme la troisième ère de la chimie du silicium. Des avancées majeures ont ainsi été réalisées dans le cadre de la formation de liaisons multiples à base de silicium qui restait encore un grand défi. Du fait de la faible énergie de la double liaison et de leur grande polarité, ces liaisons multiples étaient considérées comme quasiment impossibles à obtenir de manière stable.24
La première preuve de l’existence de la double liaison C=Si fut apportée par Flowers en 1967. Pour cela, il piégea le silène intermédiaire, issu de la thermolyse du diméthylsilacyclobutane, avec de l’eau ou avec une autre molécule de silène (Schéma 8).25 Il fallu attendre quatorze ans pour que Brook isole le premier silène stable à température ambiante en utilisant un groupement adamantyle encombrant afin de stabiliser le silène.26
L’existence d’une liaison double Si=Si (disilène) fut démontrée en 1972 par Peddle par thermolyse d’un disilane conduisant de manière quantitative à un polymère silylé. Le disilène a également été piégé, notamment avec de l’anthracène deutéré (Schéma 9). 27
Le premier disilène stable a été synthétisé et isolé par West en 1981. La stabilité de ce disilène est alors directement reliée à la présence de groupements encombrants de type mésityle. Ce succès marqua un tournant dans la quête de la formation de liaisons multiples avec un silicium (Schéma 10).28
Depuis, de nombreux composés possédant une liaison double impliquant un silicium et un hétéroatome ont été isolés. Comme les silanimines (Si=N) par Wiberg en 1985,29 les silanethiones (Si=S) par Okazaki en 199430 et enfin les silanones (Si=O) par Driess en 2009 (Schéma 11).31
L’obtention de silanones requiert le passage par un silylène, l’équivalent silylé du carbène. Le premier silylène a été isolé par Denk en 1994 par réduction d’un dichlorosilane avec du potassium (Schéma 12).32
Logiquement, la formation de liaisons triples Si≡Si est devenue le défi suivant. En 2004, Sekiguchi fut le pionnier dans ce domaine. La réduction du disilane tétrabromé à l’aide de graphite de potassium donne le silyne coudé sous la forme d’un cristal vert émeraude extrêmement sensible à l’humidité et à l’air (Schéma 13).33 Dans ce silyne, les deux atomes siliciums centraux sont formellement au degré d’oxydation zéro bien que non métallique.
Récemment, Schleyer et Robinson ont synthétisé un disilène possédant lui aussi des siliciums au degré d’oxydation formel zéro grâce à la stabilisation par des ligands de type NHC (Schéma 14).34
Forts de cette maîtrise de la formation de liaisons doubles avec un silicium, les chimistes ont pu l’incorporer dans des molécules plus complexes. De cette manière le premier sila-aromatique benzoïdique stable a pu être préparé par Tokitoh et Okazaki en 1997 par action de tert-butyllithium sur un bromosilane à température ambiante avec un rendement de 80% (Schéma 15).35 Trois ans plus tard la même équipe synthétisa le premier silabenzène.36
L’ultime défi fut atteint par Rzepa et Scheschkewitz en 2010 qui réussirent à synthétiser un hexasilabenzène, l’équivalent totalement silylé du benzène (Schéma 16). Comme anticipé par les calculs, celui-ci ne présente pas une conformation plane à six chaînons. Ses différentes formes mésomères conduisent à une structure globale tricyclique [3.4.3]. Le solide de couleur vert-noir est étonnamment stable plusieurs heures à l’air.37
Toutes ces avancées ont ainsi permis d’accéder aux analogues silylés des fonctions multiples carbonées. Dans cette même idée, l’étape suivante consiste donc à synthétiser des analogues silylés de molécules déjà existantes. Cela est d’autant plus intéressant qu’il n’existe pas, à notre connaissance, de dérivés organosilanes naturels.
Pour cela, il faut être en mesure de synthétiser des silanes dans lesquels le silicium ne serait pas sous la forme d’un substituant en périphérie de la molécule (typiquement triméthylsilyle) ou d’un lien dans une chaîne (typiquement diméthylsilyle). D’où le besoin de développer des méthodes de synthèse de silanes dans lesquels le silicium aurait une position centrale. Pour cela, il faut être en mesure d’introduire de manière parfaitement contrôlée plusieurs groupements différents sur le silicium. De plus, comme de nombreuses molécules d’intérêt sont des composés cycliques, la synthèse de silacycles sera également présentée.
Nous allons donc faire un rappel des voies de synthèse existantes, en décrivant dans un premier temps les méthodes permettant l’accès à des silanes polyfonctionnalisés, puis dans un second temps les méthodes pour la préparation de silacycles.
Synthèse d’organosilanes
L’une des deux principales réactions utilisée pour créer une liaison silicium-carbone est l’attaque d’un carbone nucléophile sur un silicium possédant un bon groupement partant, typiquement un chlorosilane. Dans des travaux pionniers, Kipping a posé les bases de la synthèse de silanes avec pour la première fois l’utilisation des réactifs de Grignard comme nucléophile. Il a également été le premier à utiliser des alkoxysilanes comme électrophiles. Etant moins réactifs, les substitutions successives sont possibles permettant ainsi un contrôle au niveau de l’introduction des groupements nucléophiles sur le silicium. À titre d’exemple, la substitution d’un seul groupement méthoxy du diméthoxysilane avec le réactif de Grignard adéquat conduit à un intermédiaire de la synthèse du sila-linalool (Schéma 17).
On peut classer la labilité des substituants sur le silicium dans l’ordre suivant SiCN > SiCl > SiOR (Me>Et) > Si‒OSi> SiH> SiMe (en gras les plus usuels). Récemment, une accélération de la substitution d’hydrure de silane avec un réactif de Grignard a été observée par Urabe, grâce à l’ajout d’une quantité catalytique de chlorure de lithium dans le milieu réactionnel. Le mécanisme de cette accélération est encore obscur (Schéma 18).38
La seconde grande méthode pour la création de liaison C-Si est la réaction d’hydrosilylation. Elle s’avère être une méthode très efficace pour introduire des chaînes carbonées sur le silicium. Ce fut le cas des synthèses du sila-coranol et du sila-dimétol en présence d’une catalyse à l’oxyde de platine (Schéma 19).39,40
En couplant les deux méthodes, il est possible d’obtenir un silicium tétrasubstitué où chaque groupement aura été introduit de manière parfaitement contrôlée. Ainsi, Tacke a pu obtenir un organosilane hautement fonctionnalisé en réalisant une séquence basée sur une réaction d’hydrosilylation, deux substitutions nucléophiles et une hydrolyse finale. Le silane ainsi préparé a pu être testé comme analogue d’antagoniste muscarinique (Schéma 20).41
Outre le défi d’accéder à des siliciums polysubstitués, les synthèses développées doivent aussi permettre de faire varier les substitutants. Lors de sa synthèse de mimes de dipeptides, Skrydstrup a été confronté à ce problème. Il a d’abord essayé une stratégie utilisant dans un premier temps une réaction d’hydrosilylation suivie d’une lithiation (Schéma 21). Cependant cette stratégie ne fonctionne pas lorsque les substituants portent des fonctions plus sensibles (OBn, OAc, substituants sur les aromatiques,…).
Pour cette raison, une deuxième stratégie a été mise au point. Celle-ci consiste en l’utilisation de deux hydrosilylations successives dans des conditions douces et en un seul pot (Schéma 22). Ces conditions douces permettent de préparer un spectre plus large de silanes.42
Dans cette même optique d’accéder à une large gamme de composés avec une seule et même synthèse, Tacke a préparé des briques moléculaires silylées. Celles-ci peuvent être ensuite facilement utilisées pour donner des composés à visée thérapeutique contenant un atome de silicium. Par exemple le groupement 2-halogéno-5-pyridyle lié à un silicium peut être introduit grâce à deux briques moléculaires différentes. Le premier possède une fonction acide boronique qui peut être utilisée pour réaliser un couplage croisé de type Suzuki. L’acide 4-((2-halogéno-5-pyridyl)diméthylsilyl)phenylboronique est synthétisé à partir du diméthoxydiméthylsilane en réalisant deux substitutions nucléophiles avec des dérivés aromatiques lithiés. Ensuite, une série de fonctionnalisations permet d’obtenir l’acide boronique désiré (Schéma 23).43
L’autre méthode est l’attaque d’un nucléophile sur l’époxyde du (2-halogéno-5-pyridyl)diméthyl(oxiran-2-ylméthyl)silane. Ce dernier est obtenu en seulement deux étapes à partir du diméthyl(allyl)chlorosilane. Une substitution nucléophile sur le silicium permet d’abord d’introduire le groupement 2-halogéno-5-pyridyle puis l’époxydation de l’allylsilane conduit à la brique moléculaire souhaitée (Schéma 24). 44
Une autre brique moléculaire proposée par Tacke est la 4‑silapipéridine. Dans ce motif le silicium est incorporé dans un azacycle. L’étape-clé qui permet la fermeture du cycle est une réaction de Staudinger cyclisante.45 La même méthode a été utilisée pour accéder aux 4‑silacyclohexan-1-ones (Schéma 25).46
La synthèse de ces silacyclohexanones requiert l’utilisation du groupement TMOP. Celui-ci a été décrit pour la première fois par Tacke comme groupement protecteur de chlorosilane. Il est introduit sur le silicium par simple substitution nucléophile. Etant donné le fort encombrement stérique que présente le groupement TMOP, la réaction de substitution peut se faire sur un polychlorosilane sans conduire à la polysubstitution du silicium. Le TMOP étant très sensible aux électrophiles, il est donc facilement clivé avec de l’acide chlorhydrique. En le couplant avec le DMOP (2,6-diméthoxyphényle) et le MOP (p-anisole), il est possible d’enchaîner trois substitutions nucléophiles sur le silicium de manière parfaitement contrôlées. Il est ensuite possible de cliver un, deux, ou trois des groupements protecteurs et retrouver ainsi un (poly)chlorosilane qui peut être engagé par la suite dans des réactions avec un ou plusieurs nucléophiles (Schéma 26).47
Formation de cycles silylés
Dans le but d’accéder à des molécules toujours plus complexes, la synthèse de silacycles a également été développée. Ces silacycles peuvent être obtenus par fermeture de cycle qui peut se faire soit au niveau du silicium, soit au niveau des chaînes carbonées portées par le silicium. Dans cet aperçu, nous allons donc distinguer les deux méthodes et détailler dans un premier temps la fermeture de cycle par création de liaison C‒C qui s’avère plus générale.
Création de liaison C-C
Par substitution nucléophile
Une première possibilité pour accéder à un silacycle par création de liaison C-C est de faire une double substitution nucléophile sur les chaînes portées par le silicium comme l’a décrit West pour la synthèse de silacyclobutanes. Le bis-(iodométhyl)-diméthylsilane en présence de diéthylmalonate et de méthanolate de sodium donne le silacyclobutane attendu avec un rendement de 50% (Schéma 27).48
Par métathèse cyclisante
Une autre possibilité est d’utiliser une réaction de métathèse cyclisante. Elle a été réalisée pour la première fois en version silylée par Basset avec le catalyseur de Schrock pour conduire à des cycles à 5, 6 ou 7 chaînons.49 Avec le catalyseur de Grubbs, Landais a pu obtenir des silacycles plus fonctionnalisés.50 Undheim s’est illustré par la suite en préparant des silacycles plus grands et comportant différents groupements sur silicium (Schéma 28). 51
Par cycloaddition
La cycloaddition thermique [4+2] de ène-diènes donne également de bons rendements pour la synthèse de bicycles silylés, toutefois aucune stéréosélectivité n’est observée (Schéma 29).52 D’autres réactions de cycloaddition peuvent être utilisées comme la cycloaddition [2+2+2]. Dans des conditions de catalyse au cobalt, Tacke a pu synthétiser un motif sila-indane présent dans des composés silylés odorants ou à visée thérapeutique (Schéma 30).53
Suzuki a accédé à des silacyclobutènes à partir de siladiynes à l’aide d’une catalyse au zirconium. 54 L’intermédiaire réactionnel de type zirconacycle peut également être utilisé comme précurseur d’hétéro- ou silahétérocycles insaturés (Schéma 31).55
Table des matières
Introduction générale
Les organosilanes : histoires, synthèses et applications comme bioisostères
1 Introduction
2 La place du silicium dans la Nature
3 Silicium de synthèse
4 Synthèse d’organosilanes
5 Formation de cycles silylés
A Création de liaison C-C
B Création de liaison Si‒C
6 Les silaisostères et bioisostères
A Isostérie et bioisostères
B Sila-isostères : les sila-explosifs
C Sila-bioisostères : les sila-odorants
D Sila-biosisostères : les sila-drogues
E Exemples d’utilisation de composés silylés bioactifs
F Les silastéroïdes
G Conclusions
Benzo(sila)cyclobutènes pour l’accès aux (sila)-stéroïdes
1 Bibliographie
A Extensions de cycles carbonés
B Extension de silacycles
2 Travaux préliminaires sur les benzosilacyclobutènes
3 Stratégie
Synthèses des substrats
1 Approche par le NBS
2 Première synthèse : diéthoxyméthylsilane
3 Deuxième synthèse : dichlorométhylsilane et TMOP
4 Troisième synthèse : dichlorométhylsilane et TMOP optimisée
5 Conclusions
Accès aux benzosilacyclobutènes par cycloaddition [2+2+2]
1 Stratégie
A Historique et champ d’application de la cycloaddition [2+2+2]
B Mécanisme
C Les catalyseurs usuels
D Systèmes catalytiques efficaces dans des conditions douces
2 Résultats
A Identification du système catalytique
B Optimisation avec NbCl3.DME
C Champ d’application
3 Conclusions
Extension de benzosilacyclobutènes
1 Travaux précédents – Synthèses de substrats
2 Résultats
A Synthèse des substrats
B Etude de l’extension de benzosilacyclobutènes
C Cascade cycloaddition [2+2+2]/ extension de benzosilacyclobutène
3 Conclusions
Conclusions générales
Supporting informations
General remarks
General procedure
Synthesis and characterization of the compounds