ASPECTS RADIOLOGIQUES DE LA DUPLICATION
PYELO-URETERALE CHEZ L’ENFANT
Embryologie, anatomie, physiopathologie
Trois types d’organes excréteurs vont se développer chez l’embryon selon une progression cranio-caudale (Figure 1). – Le pronéphros qui est rudimentaire et non fonctionnel – Le mésonéphros qui fonctionne pendant une courte période. C’est un rein intermédiaire avant le développement du rein définitif. Les canaux mésonéphrotiques ou canaux de Wolf qui débouchent dans le cloaque, disparaissent dans le sexe féminin et donne de nombreux constituants chez le sujet mâle. – Le métanéphros constitue le rein définitif et commence à se développer au cours de la 5ème semaine à partir de deux constituants : o Le bourgeon urétéral excroissance du canal mésonéphrotique et qui fournira le pelvis rénal (bassinet), les calices et les tubes collecteurs. o Le blastème métanéphrogène du mésoderme intermédiaire. Le néphron est dérivé de ce blastème. Le bourgeon urétéral né du canal de Wolff, pénètre le blastème rénal où il forme les cavités excrétrices et les tubes collecteurs. Ces derniers induisent des foyers de cellules mésenchymateuses qui vont donner les tubules du métanéphros, qui, en définitive, formeront le néphron. S’il existe une division prématurée du bourgeon urétéral, cela entraîne la formation d’une duplication incomplète. Si un bourgeon surnuméraire naît du canal de Wolff, il en résulte une duplication complète .Figure 1(A et B) : Embryologie de la duplicité pyélo-urétérale [4] B A ht avt ht avt 5 Ainsi le terme de duplication ou de système double regroupe les différentes possibilités de dédoublement de la voie excrétrice. La partie de parenchyme rénal et la voie excrétrice correspondante est appelé pyélon. Il y’a donc un pyélon supérieur et un pyélon inférieur. Chaque pyélon possède un uretère propre. Si les deux uretères se rejoignent en un seul avant leur abouchement dans la vessie, on parle de bifidité; si les 2 uretères sont totalement séparés on parle de duplicité (Figure 2). L’anomalie peut être uni ou bilatérale. Figure 2 : Schéma de duplicité urétérale partielle (droite) et totale (gauche) (www.pediatric.surgery.org) ht dte 6 En cas de duplicité, l’uretère du pyélon supérieur migre plus bas que celui du pyélon inférieur, de telle sorte qu’au terme de leur développement, l’uretère du pyélon supérieur se termine toujours plus bas dans la vessie que l’uretère du pyélon inférieur. C’est la loi de Weigert et Meyer (Figure 3). Figure 3 : Loi de Weigert et Mayer (www.urologyhealth.org) ht dte 7 Quand les deux orifices urétéraux siègent côte à côte dans la paroi vésicale, aucune complication n’est en règle à redouter. Des complications s’observent quand les orifices sont en position ectopique, c’est-à-dire hors de leur position normale (Figure 4 A, B). Figure 4 : Abouchements urétéraux A : normal B : Défauts de terminaison (1 : abouchement rectal 2 : abouchement vaginal 3 : abouchement uréthral) [4] Ainsi, l’uretère du pyélon inférieur qui s’abouche plus haut, peut s’aboucher trop haut, avoir ainsi un trajet sous-muqueux trop court et être donc le siège d’un reflux (Figure 5C). Ce reflux vésico-rénal dans le pyélon inférieur est la pathologie la plus fréquente. L’uretère du pyélon supérieur se termine souvent par une sténose urétérovésicale avec dilatation urétérale réalisant un méga-uretère obstructif (Figure 5 A, B). A B ht avt 8 Figure 5: A : Duplication pyélo-urétérale avec dilatation de l’uretère du pyélon supérieur bas implanté ( mégauretère obstructif) B : Schéma d’abouchement urétéral ectopique du pyélon supérieur C : Schéma de reflux vésico-urétéral dans le pyélon inférieur sur duplicité pyélo-urétéral gauche (www.sfip-radiopediatrie.org) L’uretère du pyélon supérieur qui s’abouche plus bas, peut s’aboucher trop bas et être le siège de 2 pathologies différentes : – L’urétérocèle : C’est une dilatation pseudo-kystique de la portion distale de cet uretère dans son trajet sous-muqueux trigonal. Tout se passe comme si le méat correspondant était sténosé et cette portion dépourvue d’une musculature suffisante se laisse distendre de façon importante (Figure 6 ). A B C ht dte 9 Figure 6 : B : Schéma d’une urétérocèle ectopique. La dilatation siège sur la partie terminale de l’uretère supérieur d’une duplication. L’abouchement est ectopique au niveau du col ou de l’urètre (www.sfip-radiopediatrie.org) A : Utérocèle intravésicale sur duplicité urétérale complète gauche (www.mayoclinic.org) – L’abouchement ectopique : C’est un abouchement sous le niveau du col vésical, chez la fille (Figure 5 A B). Chez le garçon, cet abouchement ectopique peut se faire dans l’urètre postérieur, dans les voies séminales voire même les canaux éjaculateurs. Chez la fille, elle peut s’insérer au niveau de l’urètre, du vestibule, du vagin ou apparaître (exceptionnellement) à la vulve. B ht A dte 10 Dans ce dernier cas, les urines sécrétées par le pyélon supérieur s’écoulent directement sans passer par la vessie. Ainsi est réalisé un tableau d’incontinence urinaire chez la fille dans l’intervalle de mictions apparemment tout à fait normales, alors que le garçon va rester continent. Cela va faire toute la différence de la symptomatologie entre les deux sexes.
DIAGNOSTIC CLINIQUE
En cas de bifidité, les manifestations pathologiques sont rares. Seul le reflux vésico-rénal est proportionnellement plus fréquent qu’en cas d’uretère normal. Les manifestations pathologiques sont fréquentes en cas de duplicité urétérale. Cependant, elle ne s’accompagne parfois d’aucune manifestation.
Découverte fortuite
La duplication de la voie excrétrice peut être découverte soit de façon totalement fortuite (exploration d’un autre appareil, traumatisme révélateur, ou de plus en plus à l’occasion d’une échographie anténatale), soit à l’occasion d’une complication liée à la pathologie de la duplicité.
Symptomatologie infectieuse
Elle est habituellement le fait de la pathologie de reflux et elle se manifeste par des pyélonéphrites aiguës à répétition menant au bilan radiologique. Il peut s’agir aussi de complications infectieuses survenant sur des pyélons supérieurs en stase soit du fait d’une ectopie, soit plus rarement d’une urétérocèle. Il est à signaler que cette symptomatologie est plus fréquente chez la fille, du fait de la plus grande facilité de contamination par voie basse et ascendante.
Fuites urinaires
Elles sont très évocatrices, lorsque typiques, des ectopies urétérales. Elles sont souvent permanentes, goutte à goutte, indépendantes de la miction, de l’effort, provenant souvent de la région vaginale, ou de l’urètre, quelquefois du périnée. L’enfant se mouille le jour et la nuit souvent de façon très minime mais régulière. II.4. Anomalies vulvaires L’anomalie apparaît comme une formation kystique bleutée, pédiculée par le méat urétral (Figure 7). Elle s’accompagne quelquefois de fuite lorsque l’urétérocèle se vide. Toute cette symptomatologie justifie chez tous les patients et surtout les enfants suspects d’être porteurs d’une duplicité pathologique, d’un examen clinique minutieux, à la recherche d’une masse rénale, d’une anomalie vulvaire, ou des organes génitaux chez le garçon, voire d’un orifice urétéral externe en cas de fuite. Figure7 : Urétérocèle prolabée à la vulve (www.pediatric.surgery.org) avt dte 12 La constatation de ces anomalies pousse à envisager de parti pris une exploration écho-radiologique chez tout (e) patient(e) ayant présenté un tableau de pyélonéphrite aiguë, des cystites récidivantes, ou une pathologie infectieuse génitale (en particulier vulvo-vaginite récidivante chez la fille et épididymite chez le garçon).
DIAGNOSTIC RADIOLOGIQUE
Anténatal
Les deux pathologies du pyélon supérieur s’accompagnent d’une dilatation de l’ensemble de ce pyélon qui peut être donc facilement détectée par l’échographie anténatale, mode de découverte actuellement le plus fréquent. De plus, cette dilatation du pyélon supérieur entraîne souvent une dysplasie, c’est-à-dire un défaut de développement du parenchyme rénal correspondant et une fonction médiocre de cette portion rénale. Par ailleurs, en cas de doute après examen d’expertise, une IRM fœtale peut être réalisée (Figures 8, 9, 10). Figure 8 : Echographie obstétricale à 26 SA A) Urétéro-hydronéphrose bilatérale avec dilatation calicielle modérée. B) Duplicité rénale gauche pour laquelle le pyélon supérieur est dysplasique (*) [11] avt dte 13 Figure 9: Echographie obstétricale à 26 SA montrant une vessie augmentée de volume, à paroi fine, contenant une urétérocèle (* ) [11]. Figure 10 : IRM du même patient : [11] A) IRM foetale à 27 SA. Urétéro-hydronéphrose bilatérale avec dilatation calicielle modérée. B IRM foetale à 27 SA. Urétérocèle ectopique obstructive (*) . A B avt bas ht dte
Post natal
Si le diagnostic n’a pas été évoqué par l’échographie anténatale, une infection urinaire peut être révélatrice d’une duplicité urétérale. Le bilan précis d’un système double repose sur l’échographie, l’U.I.V, la cystographie rétrograde, la cystoscopie et éventuellement de plus en plus la scintigraphie et l’uro-IRM.
Echographie En cas de duplication complète ; le diagnostic est souvent difficile ; présence d’une zone d’échogénicité similaire au cortex, divisant le sinus hyper-échogène en deux parties inégales. Cet aspect peut également correspondre à une simple hypertrophie d’une colonne de Bertin (Figure 11). Par ailleurs, la mise en évidence d’une dilatation polaire supérieure peut faire suspecter l’existence d’une duplicité urétérale (Figure 12).
INTRODUCTION |