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Ankyloglossie
Définition
Le terme « ankyloglossie » vient du mot grec « agkilos » qui signifie « courbe » ou « boucle » et de « glossa » qui signifie « langue ». Il est également connu sous le terme anglo-saxon de « tongue-tie » ou encore de « frein court ».
L’ankyloglossie est définie comme un frein de langue trop court et/ou trop fibreux (donc peu élastique) avec une protrusion de la pointe de langue ne lui permettant pas de s’extérioriser de la cavité buccale, c’est-à-dire de passer les lèvres (31).
La protrusion est limitée à la crête gingivale mandibulaire et la pointe de langue peut se déformer en forme de cœur (figure 8).
L’ankyloglossie liée à l’adhérence de la langue au plancher buccal ou à la briè-veté du frein lingual, peut s’observer chez les nouveau-nés et les enfants, ce qui en limite les mouvements normaux [3, 12].
Sa prévalence est comprise entre 0,1% et 10,7% [35, 38].
Figure 8 : Aspect typique en cœur de la pointe de langue [32]
Diagnostic
Il peut être posé par la sage-femme à la naissance, le pédiatre ou l’entourage, le plus souvent vers 2-3 ans lorsque l’enfant a du mal à parler voire même à s’alimenter et, le chirurgien-dentiste qui peut être le premier à la diagnostiquer lors de l’examen bucco-dentaire.
La mobilité linguale est considérée comme normale lorsque la protrusion permet à la pointe de langue de s’extérioriser de la cavité orale, sans être fendue en forme de cœur et lorsque la pointe de langue peut toucher facilement les lèvres supérieures et inférieures. Enfin, le frein ne doit pas créer de diastème inter-incisif.
On parle d’ankyloglossie lorsqu’un patient ne peut avancer la langue plus loin que le bord incisif des dents mandibulaires ou lorsque le patient, bouche ouverte, est incapable de toucher le palais avec le bout de la langue [12, 42].
Ces éléments cliniques doivent être recherchés devant certains points d’appel comme la difficulté à l’allaitement du nourrisson, la gêne articulatoire chez l’enfant plus âgé, l’apparition d’un diastème inter-incisif, l’intelligibilité du langage,). De nombreuses formes minimes, peu symptomatiques, ne sont pas diagnostiquées. Sur des formes modérées, l’évolution peut être favorable, soit spontanément soit à l’aide de séances d’orthophonie.
Classification des freins linguaux pathologiques
Il n’existe aucune méthode clinique reconnue pour établir le diagnostic de la brièveté du frein lingual. Aucune évaluation objective ou appréciation visuelle ou tactile isolée ne peut être suffisante pour poser le diagnostic. Plusieurs classi-fications ont été proposées [28].
Classification de Dahan
La classification de Dahan se base sur l’insertion alvéolaire du frein lingual.
Ainsi on peut observer :
une insertion alvéolaire haute : au niveau du tiers coronaire des racines des incisives ;
une insertion alvéolaire basse : au niveau du tiers radiculaire (apical) ;
une insertion alvéolaire très basse : au niveau de l’os basal de la mandibule [7, 28].
Ces types de freins sont pathogènes car ils ont des répercussions parodontales et orthodontiques. En effet, une insertion trop haute du frein sur la mandibule peut s’associer à une linguo-version des incisives mandibulaires et une insertion trop basse entraine une vestibulo-version des incisives ou une rétromandibulie.
Classification de Kotlow
La classification de Kotlow se base sur l’insertion du frein au niveau de la pointe de la langue [22,28].
La classification de Kotlow est basée sur la distance entre l’insertion du frein de langue sur sa face ventrale et la pointe de langue. Elle est considérée comme normale lorsqu’elle est supérieure à 16 mm. Elle comprend 4 classes :
– classe I (ankyloglossie légère) avec une distance comprise entre 12 et 16 mm,
– classe II (ankyloglossie moyenne) lorsqu’elle est comprise entre 8 et 11 mm,
– classe III (ankyloglossie sévère) entre 3 et 7 mm,
– classe IV (ankyloglossie complète) lorsque la distance est inférieure à 3 mm [22, 28].
Cette classification a l’avantage d’être simple.
La classification de Hazelbaker ou assessment tool for lingual frenulum function (ATLFF)
Elle est plus précise mais beaucoup plus complexe à utiliser. Elle allie cinq cri-tères morphologiques à sept critères fonctionnels. Les critères morphologiques sont l’apparence de la langue à l’élévation, l’élasticité du frein, la longueur du frein quand la langue est élevée, la position d’insertion du frein en postérieur sur la face ventrale de la langue et la position d’insertion du frein en antérieur sur la mandibule. Les critères fonctionnels sont la possibilité de latéralisé la langue, de l’élever, de la protrusion, mais aussi l’étalement, la fonction de « ventouse », le péristaltisme et le bruit à la déglutition. Chaque item est noté 0, 1 ou 2. Le dia-gnostic est posé si le score fonctionnel est inférieur ou égal à 11 ou s’il est com-pris entre 12 et 13 avec un score morphologique inférieur à 10 (tableau I) [5]. Cependant, ce score n’est pas très reproductible du fait de sa complexité [26].
Traitement de l’ankyloglossie
But
Cette procédure permet l’allongement suffisant du frein lingual ou sa suppression pour restaurer une fonction optimale de la langue [11, 41].
Moyens
Freinectomie (bistouri et lazer)
La frénectomie est un acte chirurgical simple qui consiste à couper chirurgicalement le frein de la langue, pour lui redonner une liberté de mouvement optimale.
Outre la freinectomie avec la lame, le laser CO2 peut être également utilisé. En effet, l’anesthésie topique suffit mais l’utilisation d’anesthésie locale par infiltration est recommandée. Les lunettes loupes sont recommandées pour localiser les veines linguales et les glandes salivaires. L’incision est réalisée avec une faible énergie et une faible fréquence pulsionnelle pour un meilleur contrôle de la vaporisation des fibres collagéniques. L’intervention chirurgicale est complétée par l’utilisation du spray air-eau pour rafraîchir les tissus et rendre la zone propre et visible. Pour diminuer les cicatrices, la langue doit être immédiatement mobilisée après la chirurgie par des exercices d’étirement permettant la réhabilitation fonctionnelle [9, 28].
Freinotomie
Il s’agit de la section transversale du frein, par une incision horizontale simple jusqu’au périoste près de la gencive attachée. L’incision est prolongée 2ZDC X latéralement sur au moins la longueur d’une dent de chaque côté. La suture des berges du losange formé est réalisée par des points séparés en O au niveau du périoste et à la base de l’incision. La plaie est ensuite protégée par un pansement chirurgical [11, 41].
Abstention
Quand le frein lingual n’est pas pathologique.
Instrumentation et protocole opératoire
Lorsqu’un frein lingual est problématique parce qu’empêchant une mobilité normale de la langue, il est indiqué de réaliser l’ablation par la freinectomie ou l’incision par la freinotomie.
Instrumentation [11, 41].
• Champ opératoire.
• Matériel anesthésique.
• Canules d’aspirations chirurgicales stériles.
• Lames de bistouri n°15 et manches stériles ou bistouri jetable.• Sonde cannelée
• Ecarteur de Faraboeuf• Ciseau à bout mousse• Pinces porte aiguille.
• Pince hémostatique.
• Aiguille ½ cercle courte (16 mm).
• Fils de suture (résorbables ou non résorbables) de 5.0 ou 4.0• Sérum physiologique.
• Compresses stériles.
Protocole opératoire
Asepsie exo et endo-buccale plus pose de champ stérile.
L’anesthésie avec vasoconstricteur, par infiltration de la muqueuse linguale rétro-incisive est réalisée. La base de la langue est ensuite infiltrée en surface de part et d’autre du frein lingual, au niveau du plancher et sur le bout de la langue.
Une incision superficielle perpendiculaire au frein de la langue à mi-distance de ses insertions supérieure et inférieure est ensuite effectuée.
Le décollement délicat de la muqueuse sur environ 10 et 15 mm de la partie moyenne de l’incision à l’aide de ciseaux type Metzenbaum à bout rond ou mousse est réalisé.
La dissection se fera latéralement en superficie et en profondeur, permettant de dégager la partie inférieure de la langue en remontant vers le haut. Il faut tracter en avant la muqueuse afin de le séparer du plan sous-jacent. La longueur du frein devrait être au moins deux fois plus importante que celui avant l’intervention.
La suture des berges de la plaie se fera à l’aide de points simples séparés ou des surjets, avec de préférence des fils synthétiques très fin (5/0 ou 6/0) et une aiguille demi-cercle courte (16mm) pour préserver l’intégrité de la muqueuse sublinguale qui est très fragile.
Le contrôle aura lieu à une semaine, pour l’ablation des fils de suture et pour rappeler les exercices de mobilisation et d’étirement linguaux [19, 28].
ASPECTS EPIDEMIOLOGIQUES, CLINIQUES ET THERAPEUTIQUES DE L’ANKYLOGLOSSIE CHEZ L’ENFANT AU SERVICE D’ODONTOLOGIE DE L’HOPITAL D’ENFANTS ALBERT ROYER DE FANN.
JUSTIFICATIF
La langue présente au niveau de la face ventrale un frein permettant de limiter ses mouvements et stabiliser sa position [3, 12]. Ce frein peut être le siège de pathologies source de perturbation des fonctions de la langue [3, 12].
La brièveté de ce frein chez l’enfant, bien que rare, retentit souvent sur l’allaitement, la phonation et la morphogenèse des arcades dentaires. Elle serait également la cause de récidive de certains traitements orthodontiques [12].
Cette brièveté du frein lingual est souvent due à l’ankyloglossie qui est une anomalie congénitale dont la prévalence est comprise entre 0,1% et 10,7% [35, 38]. Elle est définie comme un frein trop court et/ou trop fibreux avec une protrusion limitée à la crête gingivale mandibulaire et une impossibilité de toucher le palais avec la pointe de la langue [3, 12].
La prise en charge de ce frein pathologique se fait dans certaines situations par la freinectomie qui permet de libérer la langue afin d’accomplir ses différentes fonctions et de favoriser une bonne morphogenèse des arcades dentaires [3, 12]. Une freinectomie avec ou sans freinoplastie est indiquée chez les enfants plus âgés [39]. Par ailleurs, plusieurs techniques sont proposées chez le nourrisson avant l’âge de 6 mois et lorsqu’elle n’a encore qu’une fine membrane celluleuse [3, 12].
De nombreux enfants sont référés au quotidien pour des freinectomies, au service d’odontologie pédiatrique de l’Hôpital d’enfants Albert Royer de Fann de Dakar par des chirurgiens-dentistes, des pédiatres, ou simplement, amenés par leurs parents.
OBJECTIFS
Objectif général
L’objectif de ce travail était d’étudier les aspects cliniques et thérapeutiques de l’ankyloglossie chez des enfants consultant pour une freinectomie au service d’odontologie pédiatrique du Centre Hospitalier National d’Enfants Albert Royer (CHNEAR) de Fann.
Objectifs spécifiques
Les objectifs secondaires étaient de :
déterminer les aspects épidémiologiques des enfants référés pour une freinectomie linguale,
décrire les aspects cliniques du frein lingual des enfants référés pour une freinectomie,
décrire les thérapeutiques appliquées chez ces enfants référés pour une freinectomie linguale.
METHODOLOGIE
Cadre d’étude
L’étude s’était déroulée au service d’odontologie pédiatrique de l’hôpital d’enfants Albert Royer de Fann.
Infrastructures
Les locaux du service étaient constitués de :
deux salles de soins abritant deux fauteuils dentaires ;
une salle de stérilisation ;
une salle d’attente ;
trois bureaux dont celui du chef de service, celui des praticiens et celui des assistantes du service.
Personnel
Le personnel du service était constitué de :
un professeur agrégé en odontologie pédiatrique,
deux chirurgiens-dentistes spécialisés en odontologie pédiatrique, un chirurgien-dentiste omnipraticien,
une technicienne supérieure en odontologie, surveillante du service, deux assistants dentaires.
Activités
o Consultation
o Soins conservateurs o Chirurgies mineures
o Soins prothétiques et d’orthodontie
Type d’étude
Il s’agit d’une étude transversale descriptive.
Période de l’étude
L’étude s’est déroulée sur une période de 10 mois allant du 1ier février au 30 novembre 2019.
Population d’étude
Elle était constituée par des enfants venus consulter au service d’odontologie de l’hôpital d’enfants Albert Royer de Fann pour un problème lié au frein lingual.
Critères d’inclusion
Pour faire partie de l’échantillon, les patients devaient être âgés de 1 à 84 mois et présenter un frein lingual pathologique dont le diagnostic a été confirmé par le dentiste.
Critères de non inclusion
– enfants âgés de 1 à 84 mois venus consultés ou référés pour la prise en charge d’un frein pathologique mais dont le diagnostic ne confirmait pas la présence d’un frein pathologique.
Collecte des données
Les données ont été recueillies à partir d’une fiche d’enquête contenant les informations sociodémographiques (âge, sexe, lieu d’habitation), les données cliniques (état général, motif consultation, insertion du frein, sa constance, son volume, mobilité langue) et thérapeutiques (type de traitement).
Analyse des données
Les informations recueillies ont été consignées dans une base de données Excel puis analysées à l’aide du logiciel SPSS 20.0 IMB for Windows.
Des analyses univariées avec des fréquences et pourcentages ont été réalisées.
Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : GENERALITES SUR LA LANGUE
I. RAPPELS
1.1. Embryologie
1.2. Anatomie
1.2.1. Face dorsale de la langue
1.2.2. Face ventrale de la langue
1.3. Squelette de la langue
1.4. Muscles de la langue
1.4.1. Muscles intrinsèques
1.4.2. Muscles extrinsèques
1.5. Vascularisation et Innervation de la langue
1.5.1. Vascularisation
1.5.2. Innervation
1.6. Frein lingual
1.6.1. Histologie
1.6.2. Rapports
II. Ankyloglossie
2.1. Définition
2.2. Diagnostic
2.3. Classification des freins linguaux pathologiques
2.3.1. Classification de Dahan
2.3.2. Classification de Kotlow
2.3.3. La classification de Hazelbaker ou assessment tool for lingual frenulum function (ATLFF)
2.4. Traitement de l’ankyloglossie
2.4.1. But
2.4.2. Moyens
2.4.3. Instrumentation et protocole opératoire
DEUXIEME PARTIE : ASPECTS EPIDEMIOLOGIQUES, CLINIQUES ET THERAPEUTIQUES DE L’ANKYLOGLOSSIE CHEZ L’ENFANT AU SERVICE D’ODONTOLOGIE DE L’HOPITAL D’ENFANTS ALBERT ROYER DE FANN
I. JUSTIFICATIF
II. OBJECTIFS
2.1. Objectif général
2.2. Objectifs spécifiques
III. METHODOLOGIE
3.1. Cadre d’étude
3.2. Type d’étude
3.3. Période de l’étude
3.4. Population d’étude
3.5. Collecte des données
3.6. Analyse des données
IV. RESULTATS
4.1. Aspects sociodémographiques
4.2. Aspects cliniques
4.2.1. Répartition de la population selon le motif de consultation
4.2.2. Répartition de la population selon l’état général de l’enfant
4.2.3. Répartition de la population selon la sévérité de brièveté du frein lingual
4.2.4. Répartition de la population selon la consistance du frein
4.2.5. Répartition de la population selon le site d’insertion du frein
4.2.6. Répartition de la population selon le type de frein
4.2.7. Répartition de la population selon la variation de l’espace sublingual
4.2.8. Répartition de la population selon la position de la langue en protraction
4.3. Aspects thérapeutiques
4.3.1. Répartition de la population selon l’attitude thérapeutique adoptée
4.4. Aspects évolutifs
V. DISCUSSION
5.1. Aspects sociodémographiques
5.2. Aspects cliniques
5.3. Aspects thérapeutiques
CONCLUSION
REFERENCES