ASPECTS CHIRURGICAUX DE LA DILATATION DES BRONCHES

ASPECTS CHIRURGICAUX DE LA DILATATION DES BRONCHES

Épidémiologie 

La dilatation des bronches a une prévalence très élevée dans les zones polaires telles que l’Alaska dans la région du Yukon-Kuskokwim Delta. Cette particularité s’explique par la fréquence des infections pulmonaires chez les enfants et l’accès difficile aux soins [7]. Une étude récente aux États-Unis estime à 52,3 pour 100 000 habitants la prévalence des bronchectasies dans la population américaine [7]. Cette prévalence augmente très fortement à partir de 50 ans et elle est plus importante chez les femmes. La prévalence de la DDB dans la population de 65 à 75 ans aux USA est estimée à 250 pour 100. 000 habitants chez les femmes, par contre elle est estimée à 120 pour 100. 000 habitants chez les hommes [7]. Dans la même étude on retrouve que 35000 personnes sont atteintes de bronchectasie par an en France [7]. En Finlande et en Nouvelle Zélande, l’ incidence de la DDB est estimée respectivement à 3,9 pour 100.000 habitants et à 3,7 pour 100.000 habitants . En Afrique noire, particulièrement au Sénégal nous ne disposons pas de données épidémiologiques sur la dilatation des bronches. Cela s’explique par la rareté de publication sur cette pathologie dans la littérature. Selon le registre des protocoles du bloc opératoire, la fréquence de la DDB est de 2,66 % (72/2697) des patients opérés en CTCV sur une période de 9 ans.

Historique 

La prise en charge chirurgicale de la dilatation des bronches a commencé à la fin du XIXe siècle. La technique chirurgicale consistait à l’époque à un drainage des abcès bronchectasiques associé à une collapsothérapie après fenestration selon Garré [12]. Le début du XXe siècle est caractérisé par la réalisation des premières lobectomies pulmonaires par Heindenhain puis Babcock pour traiter la DDB [12]. Les progrès de la chirurgie et surtout de l’anesthésie ont permis de diminuer considérablement le risque chirurgical, apportant ainsi une réponse thérapeutique à cette pathologie alors mal contrôlée par le traitement médical. En 1967, à la réunion de la Société de chirurgie thoracique à Lyon, six équipes avaient colligé 1310 exérèses pulmonaires pour dilatation des bronches. La mortalité post-opératoire était inférieure à 1 % avec de bons résultats fonctionnels retrouvés respectivement dans 90 à 95 % pour les résections unilatérales et dans 80% pour toutes les formes confondues .. La chirurgie était alors indiquée devant une bronchectasie localisée, stabilisée, et (mal tolérées). Lors des Journées de la Société de chirurgie thoracique et cardiovasculaire à Toulouse en 1983, il est précisé que la dilatation des bronches localisée et symptomatique doit être opérée précocement après une préparation médicale courte 

Ethiopathogénie 

 Les bronchectasies sont la conséquence de phénomènes essentiellement locaux : agression de la muqueuse bronchique par une charge bactérienne favorisant une réponse inflammatoire contre l’hôte et les infections. Les dommages tissulaires (destruction des cils et du cartilage bronchique) sont responsables d’une accumulation de sécrétions purulentes par défaut de drainage. Ces phénomènes constituent les principaux éléments du cercle vicieux de Cole, avec la pérennisation de l’inflammation locale et le développement de la dilatation des bronches . Figure1 : Le cercle vicieux de PETER COLE (UK) d’après BOYTON et BRINCHAULT La fréquence des infections et de l’ inflammation des voies aériennes entraînent des lésions qui conduisent à la destruction des voies aériennes et du parenchyme pulmonaire avoisinant. La charge bactérienne permet le 8 rélargage in situ de facteurs chimiotactiques pour les polynucléaires. Ceuxci libèrent des protéases (dont élastase neutrophile) qui ont un rôle délétère sur la muqueuse bronchique et contribuent à l’entretien de l’ inflammation et de l’ hypersécrétion bronchique ainsi qu’a l’altération des capacités de phagocytose des polynucléaires neutrophiles. L’élastase neutrophile est habituellement neutralisée par des inhibiteurs (alpha antitrypsine). L’altération de la clairance muco ciliaire constitutionnelle ou secondaire, trouvée au cours des bronchectasies est aggravée au moment des poussées infectieuses par des toxines bactériennes et par les protéases relarguées par les polynucléaires neutrophiles présents en abondance dans la lumière bronchique .Différents facteurs contribuent à la pérennisation de l’altération de la clairance muco-ciliaire : l’hypersécrétion de mucus, les lésions épithéliales avec altération des battements ciliaires, l’abrasion de l’épithélium cilié, etc. L’altération muco-ciliaire explique l’encombrement et l’obstruction au niveau des voies aériennes périphériques. L’altération du fonctionnement des canaux ioniques épithéliaux et de l’ immunité cellulaire intervient fortement dans la genèse de la dilatation des bronches. En effet, il a été démontré que chez les sujets atteints de DDB, la muqueuse bronchique est infiltrée par des lymphocytes, principalement les lymphocytes TCD8+, ainsi que par des macrophages activés, ce qui évoque une réponse à médiation cellulaire. L’analyse de l’expectoration et des biopsies bronchiques montre outre l’augmentation de l’élastase neutrophile, une augmentation des concentrations d’interleukine (puissant chémo-attractant pour les 9 polynucléaires neutrophiles), de tumor-nécrosis factor (TNFα) et de prostanoïdes. Les concentrations de ces marqueurs endo-bronchiques de l’ inflammation sont corrélées à la charge bactérienne. Les patients atteints de dilatation des bronches à l’état stable (non infectés), présentent également une élévation modérée des marqueurs de l’ inflammation systémique. Cette inflammation systémique a été décrite comme un facteur indépendant associé à une accélération du déclin de la fonction respiratoire .

Physiopathologie 

L’altération des défenses locales provoque une infection bronchique chronique. La désorganisation de l’activité ciliaire rend l’épuration mucociliaire inefficace, entraînant une stase du mucus, une colonisation bactérienne et un dommage tissulaire (destruction fibro cartilagineuse). L’ inflammation chronique de la muqueuse bronchique est une réponse à l’agression de la muqueuse bronchique (infection). Une hyper vascularisation est constamment observée, celle-ci est d’origine systémique et elle explique la fréquence des hémoptysies ainsi que leur gravité au cours de la DDB en raison de nombreuses anastomoses entre les systèmes artériels, et bronchique .

Anatomopathologie 

 Aspects macroscopiques

Les lésions de la dilatation des bronches prédominent au niveau des lobes inférieurs en dehors de certaines étiologies comme la mucoviscidose. Elles peuvent être unilatérales ou bilatérales, localisées ou étendues. Les bronches concernées sont situées entre le 4ème et le 8 ème ordre de division .Les bronches sont irrégulières, tortueuses et ramollies. Les bronchioles distales sont obstruées. Le parenchyme avoisinant peut être remplacé par du tissu fibreux . Figure 2-3 : Images d’un poumon sain (A) et d’un poumon avec DDB (B) d’après BOYTON [2] A B 11 La classification anatomo pathologique selon REID est répartie en 3 types :  Les bronchectasies cylindriques ou fusiformes : qui comprennent des bronches légèrement dilatées, à bords réguliers, se terminant de façon abrupte au contact de bouchons muqueux [44]. Le nombre de ramifications distales est à peine réduit.  Les bronchectasies variqueuses ou moniliformes : se caractérisent par des dilatations irrégulières, alternant avec des zones de rétrécissement. L’obstruction bronchique est plus distale et moins complète que dans les formes kystiques. Les ramifications distales sont nettement réduites .  Les bronchectasies sacciformes ou kystiques : touchent la partie proximale de l’arbre bronchique. Dans cette forme les bronches augmentent progressivement de diamètre et se terminent en cul de sac au niveau des bronches de 4 ème et 5 ème générations .Au delà, il ya obstruction, destruction ou absence de ramification bronchique et bronchiolaire

Table des matières

INTRODUCTION
Première Partie : RAPPELS
I. RAPPELS
1.1. Épidémiologie
1.2. Historique
1.3. Etiopathogénie
1.4. Physiopathologie
1.5. Anatomopathologie
1.5.1. Aspects macroscopiques
I.5.2. Aspects microscopiques
II. DIAGNOSTIC
2.1. Diagnostic positif
2.1.1. Signes cliniques
2.1.1.1. Signes fonctionnels
2.1.1.2. Signes généraux
2.1.1.3. Signes physiques
2.1.2. Signes para cliniques
2.1.2.1. Imagerie thoracique
2.1.2.1.1. Radiographie du thorax de face et profil
2.1.2.1.2. Tomodensitométrie haute résolution (TDM-HR)
2.1.2.2. Examens bactériologiques
2.1.2.2.1. Examen Cytobactériologique de L’Expectoration
2.1.2.2.2. Fibroscopie bronchique
2.1.2.3. Bilan fonctionnel
2.1.2.3.1. Spirométrie
2.1.2.3.2. Gazométrie
2.1.2.3.3. Scintigraphie pulmonaire de ventilation ou de perfusion
2.1.2.4. Autres examens complémentaires
2.1.3. Évolution
2.1.3.1. Éléments de surveillance
2.1.3.2. Modalités évolutives
2.2. Diagnostic étiologique
2.2.1. DDB acquises
2.2.1.1. Causes infectieuses
2.2.1.2. Causes mécaniques
2.2.1.3. DDB par maladies dysimmunitaires
2.2.2. DDB congénitales
2.2.2.1. Mucoviscidose
2.2.2.2. Dyskinésie ciliaire primitive (DCP)
2.2.2.3. Dilatation des bronches par déficit immunitaire congénital
2.2.2.4. Syndrome de Young
2.2.2.5. Syndrome de Mounier-Kuhn
2.2.2.6. Autres causes de DDB congénitales
III. TRAITEMENT
III.1. Traitement curatif
3.1.1. Buts
3.1.2. Moyens
3.1.2.1. Moyens médicaux
3.1.2.2. Moyens instrumentaux
3.1.2.2. Moyens chirurgicaux
3.1.3. Indications
3.2. Traitement préventif
Deuxième Partie : TRAVAIL PERSONNEL
IV. MATERIELS ET METHODES
4.1. Cadre d’étude
4.2. Population d’étude
4.3. Type et période d’étude
4.4. Critères d’inclusion
4.5. Recueil des données
4.6. Saisie et analyse des données
V. RESULTATS
5.1. Caractéristiques socio démographiques des patients
5.1.1. Age
5.1.2. Sexe
5.1.3. Profession
5.1.4. Origine géographique
5.2. Antécédents
5.3. Terrain
5.4. Signes cliniques
5.4.1. Durée de la symptomatologie
5.4.2. Symptomatologie fonctionnelle
5.4.3. Signes généraux
5.4.4. Signes physiques
5.5. Signes cliniques
5.5.1. Imagerie thoracique
5.5.1.1. Radiographie thoracique de face
5.5.1.2. Tomodensitométrie thoracique
5.5.1.3. Lésions radiologiques associées
5.5.2. Biologie
5.5.2.1. Hémogramme
5.5.2.2. Tests cutanés tuberculiniques
5.5.2.3. Sérologie aspergillaire
5.5.3. Examens bactériologiques
5.5.3.1. Bacilloscopie
5.5.3.2. Examen Cytobactériologique de l’Expectoration (ECBE)
5.5.4. Exploration Fonctionnelle Respiratoire
5.6. Prise en charge chirurgicale
5.6.1. Préparation à la chirurgie
2.6.1.1. Kinésithérapie préopératoire
2.6.1.2. Traitement médical des patients infectés par un germe
5.6.2. Traitement chirurgical
5.6.2.1. Anesthésie
5.6.2.2. Voie d’abord chirurgicale
5.6.2.3. Geste chirurgical 49
5.6.2.4. Incidents per-opératoires
5.6.2.5. Durée de l’intervention chirurgicale
5.6.2.6. Durée de séjours
5.6.3. Évolution
5.6.3.1. Suites opératoires
5.6.3.2. Suivi à moyen et long terme
5.6.4. Examen anatomo-pathologique
VI.DISCUSSION
6.1. Caractéristiques socio démographiques des patients
6.2. Antécédents
6.3. Terrain
6.4. Signes cliniques
6.5. Signes para cliniques
6.6. Prise en charge chirurgicale
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

 

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